1/ La notion de contrainte
La contrainte (art L.244-9 et R.133-3 du Code de sécurité sociale (CSS)) est une procédure de recouvrement des cotisations impayées, des majorations de retard arrivées à la date de mise en demeure et des pénalités.
Elle peut intervenir dans un délai de cinq ans mais n’est valable que si elle est émise après l’expiration du délai d’un mois à la suite de la mise en demeure (L.244-2 CSS).
Elle produit les effets d’un jugement. Par conséquent, l’action en exécution de la contrainte est soumise à la prescription de droit commun de cinq ans (Cass. 2e civ., 16 sept. 2003, no 02-10.331 ).
En outre, sa signification fait courir le délai d’opposition dès lors que la contrainte a été précédée d’une mise en demeure envoyée à la même adresse que celle figurant sur la contrainte.
2/ La recevabilité de l’opposition à contrainte
Le cotisant dispose d’un délai de 15 jours à compter de la signification de la contrainte pour former opposition (art R.133-3 du CSS).
A défaut, elle est irrecevable (Cass. soc., 1er oct. 1992, no 90-20.866) et le cotisant ne peut plus contester, par la voie d’un recours contre la mise en demeure, la régularité et le bien-fondé des chefs de redressement de la contrainte (Cass. 2e civ. 9 mars 2017, n° 16-11.167).
Par ailleurs, la question s’est posée de savoir si l’employeur pouvait former une opposition à contrainte alors même qu’il n’avait formé aucun recours contre la mise en demeure.
La jurisprudence a répondu positivement, et ce alors même que la dette n’avait pas été contestée devant la commission de recours amiable (CRA) de l’Urssaf, dans le mois suivant la notification de la mise en demeure (Cass. soc., 12 juin 1997, no 95-17.330).
Cette solution favorable à l’employeur est toutefois tempérée par la jurisprudence retenant qu’une décision de la CRA devenue définitive ne peut être remise en cause par voie d’opposition à contrainte (Cass. soc., 11 janv. 1990, no 87-12.327 ).
Ainsi, l’employeur ne peut contester à nouveau, par la voie de l’opposition, si la CRA s’est prononcée et que sa décision n’a fait l’objet d’aucun recours contentieux dans le délai de deux mois prévu par l’article R. 142-18 du Code de la sécurité sociale (Cass. 2e civ., 16 nov. 2004, no 03-13.578).
3/ Les conditions de forme de l’opposition
L’employeur doit former sa contestation soit par inscription au secrétariat du tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS) dans le ressort duquel il est domicilié, soit par lettre recommandée avec demande d’avis de réception adressée au secrétariat du tribunal.
A défaut, elle est irrecevable. Toutefois, il a été jugé que les réclamations précises, explicites et motivées, adressées par l’employeur à l’Urssaf dans les 15 jours qui suivent la signification d’une contrainte, valent opposition à celle-ci, peu importe que l’opposition n’ait pas été adressée au secrétariat du tribunal des affaires de sécurité sociale.
Cette solution se justifie au regard du principe posé par l’article R. 142-18 du Code de la sécurité sociale, à savoir que la forclusion ne peut être opposée toutes les fois que le recours a été introduit dans les délais, soit auprès d’une autorité administrative, soit auprès d’un organisme de sécurité sociale (CA Paris, 9 janv. 1991).
On conseillera toutefois, par prudence, aux employeurs, de former une opposition à contrainte en respectant scrupuleusement les formes prescrites par les textes.
L’employeur devra également accompagner sa demande d’une copie de la contrainte même si cela ne constitue pas une formalité substantielle ou d’ordre public pouvant justifier l’annulation de la contrainte (Cass. soc., 5 avr. 2001, no 99-13.070 ).
4/ Les conditions de fond de l’opposition
L’opposition à contrainte doit être motivée (art L. 244-9 et R. 133-3 CSS), étant précisé que la charge de la preuve repose sur le cotisant. Autrement dit, c’est à lui de rapporter la preuve du bien-fondé de l’opposition (Cass. 2e civ., 19 déc. 2013, no 12-29.075, P+B).
La motivation peut porter sur la réalité de la dette, l’assiette et le montant des cotisations, voire sur la prescription de la dette (Cass. soc., 10 mai 1989, no 86-17.714).
Cela étant, l’Urssaf doit également veiller au contenu de la contrainte : délais de recours, obligation de motivation, etc. Ainsi, a été jugée recevable l’opposition non motivée dès lors que l’acte de signification ne mentionnait pas l’obligation de la motiver à peine d’irrecevabilité (Cass. 2e civ., 23 mars 2004, no 02-30.119).
L’irrégularité de la contrainte peut donc, dans certains cas, sauver celle affectant l’opposition à contrainte.
5/ La décision du TASS relative à l’opposition
Le TASS doit se prononcer sur la demande d’opposition à contrainte.
A cet effet, il doit préciser et analyser, même de façon sommaire, le contenu des pièces et expliquer les éléments sur lesquels il fonde sa décision (Cass soc, 28 mars 1996, n° 94-13.449).
Toutefois, il ne peut ni se prononcer sur une demande de remise de majorations de retard, ni accorder des délais de paiements (Cass. soc., 22 mars 2001, no 99-18.456).
La décision du TASS est susceptible de recours : appel ou pourvoi en cassation selon les montants en cause.
Enfin, soulignons que l’opposition à contrainte relève également de la compétence du TASS en cas de redressement et de liquidation judiciaire, quand bien même l’administrateur judiciaire aurait contesté la créance devant le tribunal qui a ouvert la procédure collective.
Discussions en cours :
Bonjour,
Y a t’il un délai de prescription quand à l’opposition à contrainte lors de la saisie du TASS ?
En conflit avec le RSI sur des cotisations, j’avais entamé une démarche en 2016.
Je me vois convoqué cette année de 2021 soit presque 5 ans après avoir sollicité le TASS.
Bonjour
Je suis une particulière. je viens d’être déboutée d’un litige contre la caf au motif que n’ayant pas répondu à la contrainte ds le délai de 15 jours,le délai de forclusion prévaut. Sauf que tous les courriers précédant l’envoi de la contrainte ne nous ont pas été envoyés ! Le manque de formalisme n’est il pas un motif d’annulation d’une procédure de recouvrement il y a un décret Qui le mentionne. Il précise qu’il est très important se respecter ce formalisme au vu des conséquences d’une procédure de recouvrement. J’ai besoin de cette reponse Pr savoir si je peux faire appel
merci beauxoup
cordialement
florence
dans les cas ou la contrainte est frappée de nullité, sa signification a t’elle quand même pour effet de faire courir le délai d’opposition de 15 jours ? ou bien celui à qui l’on oppose la forclusion peut il s’en libérer au motif que la contrainte signifiée était nulle ?
En d’autre termes la forclusion a t’elle pour effet de régulariser toutes les nullités de procédures qui l’ont précédé ?
Bonjour,
Cet article est très clair et bien construit mais je voulais vous signaler que les informations qui y figurent ne sont plus à jour :
les délais de prescriptions ont été ramenés à 3 ans (article L. 244-8-1) par la LOI n°2016-1827 du 23 décembre 2016 - art. 24 (V)
Pour être le plus précis possible, il faut également ajouter que contrairement à ce qu’indique l’article, la contrainte n’est pas soumise au délai de droit commun.
En effet, par deux arrêts du 17 mars 2016, la Cour de cassation a décidé que la contrainte, est soumise à la prescription de la nature de la créance concernée, c’est-à-dire 3 ans s’il s’agit par exemple de créances de cotisations sociales. Cf les arrêts de la Cour de cassation, Chambre civile 2, 17 mars 2016, 14-22.575.
Si par la suite, la contrainte est validée par le tribunal, elle a un délai de prescription de 10 ans (délai identique à celui du jugement qui la valide) Code des procédures civiles d’exécution - Article L111-4.