Baisse du plafond de calcul des Indemnités journalières de Sécurité sociale (IJSS) au 1er avril 2025 : quels impacts pour les salariés et les employeurs ?

Par Noémie Le Bouard, Avocat.

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Explorer : # indemnités journalières # réforme sociale # employeurs

La réforme adoptée par décret n° 2025-160 du 20 février 2025 introduit une modification substantielle du calcul des indemnités journalières de Sécurité sociale. À compter du 1ᵉʳ avril 2025, le plafond de revenus d’activité pris en compte pour le calcul des Indemnités journalières de Sécurité sociale (IJSS) en cas d’arrêt maladie est abaissé de 1,8 à 1,4 fois le Smic. Cette mesure, présentée comme technique, entraînera des conséquences financières immédiates pour les assurés à revenus intermédiaires et élevés, ainsi que pour les employeurs soumis à des obligations de maintien de salaire.
L’article analyse les effets de cette réforme, ses implications pour les entreprises et les régimes de prévoyance, et les ajustements que devront anticiper les acteurs concernés.

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Un nouveau plafond applicable aux indemnités journalières maladie.

Le décret n° 2025-160 du 20 février 2025, publié au Journal officiel du 21 février, modifie en profondeur les modalités de calcul des indemnités journalières de Sécurité sociale (IJSS) versées aux assurés en cas d’arrêt maladie. Ce texte abaisse le plafond de revenus d’activité antérieurs pris en compte pour déterminer le montant des IJSS de 1,8 à 1,4 fois le montant mensuel du salaire minimum interprofessionnel de croissance (Smic).

Ce nouveau plafond est applicable aux arrêts de travail qui débutent à compter du 1ᵉʳ avril 2025. Il ne s’applique pas aux arrêts en cours d’indemnisation avant cette date. Il s’agit d’une réforme majeure qui affectera aussi bien les assurés du régime général que ceux du régime agricole, ainsi que les artistes-auteurs relevant de l’article R382-34 du Code de la Sécurité sociale.

Une réduction significative du montant maximal des IJSS.

Le nouveau mode de calcul instauré par le décret du 20 février 2025.

Selon l’article R323-4 du Code de la Sécurité sociale, l’indemnité journalière maladie est calculée sur la base de la moitié du gain journalier de base, déterminé à partir des salaires bruts soumis à cotisations perçus au cours des trois mois précédant l’arrêt de travail. Ce gain est plafonné, jusqu’à présent, à 1,8 fois le montant mensuel du Smic.

Le décret n° 2025-160 abaisse ce plafond à 1,4 Smic à compter du 1ᵉʳ avril 2025 [1]. Avec un Smic mensuel actuellement fixé à 1 801,80 €, le plafond passe donc de 3 243,24 € à 2 522,52 €. Le montant maximal de l’indemnité journalière maladie, calculé sur cette base dans la limite du 1/730e du plafond annuel, est également revu à la baisse : de 53,31 €, il passe à 41,47 € [2].

Les assurés les plus touchés par cette réforme.

Cette réduction du plafond affecte directement les assurés ayant un salaire brut mensuel supérieur à 2 522,52 €. Pour ces derniers, l’indemnité journalière ne couvrira plus qu’une fraction réduite de leur rémunération. Ceux qui ne remplissent pas les conditions pour percevoir un complément employeur ou dont la convention collective ne prévoit aucun maintien de salaire se verront donc plus lourdement pénalisés.

Les salariés cadres, les techniciens supérieurs ou les professions intermédiaires sont les premiers concernés. En revanche, pour les assurés dont les revenus sont inférieurs ou proches du Smic, cette réforme n’aura pas d’impact significatif sur le montant de leurs IJSS.

Le maintien de salaire et ses conséquences pour les employeurs.

L’obligation de maintien de salaire.

Conformément à l’article L1226-1 du Code du travail, les salariés ayant au moins un an d’ancienneté bénéficient, en cas d’arrêt de travail, d’un maintien partiel de leur rémunération pendant une durée minimale de 30 jours. Cette obligation est renforcée dans de nombreuses conventions collectives qui prévoient le maintien à 100% de la rémunération.

Or, dans le cadre de ce dispositif, l’indemnité versée par l’employeur s’entend comme un complément aux IJSS perçues par le salarié. La diminution des IJSS aura donc pour effet d’accroître le montant du complément à verser par l’entreprise.

Les effets induits sur les régimes de prévoyance.

Pour les employeurs ayant souscrit un contrat de prévoyance collective incluant le risque incapacité, cette baisse du plafond pourrait également entraîner une hausse des prestations dues par les assureurs. En conséquence, une réévaluation des taux de cotisation n’est pas à exclure lors des renouvellements de contrat. Les partenaires sociaux devront être vigilants sur ce point, en négociation comme en gestion courante.

Une harmonisation du vocabulaire juridique dans le Code de la Sécurité sociale.

Le décret n° 2025-160 procède également à une mise en cohérence terminologique dans plusieurs articles du Code de la Sécurité sociale. Ainsi, les termes « gain journalier » sont remplacés par « revenu d’activité antérieur » dans les articles R382-34 et R382-34-1, afin d’assurer l’harmonisation avec les règles applicables aux autres assurés [3].

Cette clarification terminologique contribue à renforcer la lisibilité du droit applicable et la sécurité juridique des assurés et de leurs employeurs.

Une réforme budgétaire aux effets concrets immédiats.

Sous couvert d’un alignement technique, la baisse du plafond de calcul des IJSS constitue en réalité une mesure d’économie à impact direct pour les assurés à revenus moyens ou supérieurs. Si elle répond à une logique de maîtrise de la dépense publique, elle reporte partiellement la charge de l’indemnisation sur les employeurs et les organismes de prévoyance.

Les directions des ressources humaines, les cabinets d’expertise sociale et les assureurs doivent dès à présent anticiper ces conséquences. L’information des salariés, l’ajustement des dispositifs internes et la renégociation des contrats collectifs devront être menés avec rigueur.

Enfin, cette mesure pourrait relancer le débat sur la revalorisation des compléments employeurs ou l’encadrement plus strict du niveau minimal d’indemnisation dans les branches professionnelles. Une évolution que les partenaires sociaux devront surveiller avec la plus grande attention.

Noémie Le Bouard, Avocat
Barreau de Versailles
Le Bouard Avocats
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Notes de l'article:

[1Décret n° 2025-160 du 20 février 2025, art. 1

[2CSS, art. R323-9

[3CSS, art. R382-34 mod. par Décret n° 2025-160, art. 1.

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