L’inaptitude d’un salarié peut être constatée durant un arrêt-maladie.

Par Xavier Berjot, Avocat.

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Explorer : # inaptitude # médecin du travail # arrêt maladie # licenciement

Dans un arrêt du 24 mai 2023 (n° 22-10.517), la chambre sociale de la Cour de cassation indique que le médecin du travail peut constater l’inaptitude d’un salarié à son poste, même si l’examen médical a été sollicité par ce dernier et s’est déroulé durant son arrêt de travail pour maladie.

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1/ Le constat habituel de l’inaptitude.

Le médecin du travail peut constater l’inaptitude physique d’un salarié dans le cadre d’une visite de reprise ou de tout autre examen médical pouvant intervenir en cours d’exécution du contrat de travail.

L’inaptitude peut être constatée par le médecin du travail à l’occasion :

  • d’un examen médical d’aptitude à l’embauche, pour les salariés bénéficiant d’un suivi médical renforcé ;
  • d’une visite médicale de reprise ;
  • d’un examen ponctuel à l’initiative du salarié, de l’employeur ou du médecin lui-même.

Sur le plan pratique, le salarié doit bénéficier d’un examen médical de reprise pratiqué par le médecin du travail après [1] :

  • un congé de maternité ;
  • une absence pour cause de maladie professionnelle ;
  • une absence d’au moins 30 jours pour cause d’accident du travail ;
  • une absence pour maladie ou accident non professionnel d’au moins 60 jours.

Cet examen a pour objet de vérifier si le poste occupé par le salarié est compatible avec son état de santé, le cas échéant, d’examiner les suites données par l’employeur aux propositions émises par le médecin dans le cadre d’une visite de préreprise, de préconiser l’aménagement ou l’adaptation du poste ou, à défaut, d’émettre un avis d’inaptitude [2].

Ainsi, après avoir procédé ou fait procéder par un membre de l’équipe pluridisciplinaire à une étude de poste et après avoir échangé avec le salarié et l’employeur, le médecin du travail qui constate qu’aucune mesure d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail occupé n’est possible et que l’état de santé du travailleur justifie un changement de poste, déclare le travailleur inapte à son poste de travail [3].

Le texte ajoute que l’avis d’inaptitude rendu par le médecin du travail est éclairé par des conclusions écrites, assorties d’indications relatives au reclassement du travailleur.

Les avis d’inaptitude au poste de travail sont généralement émis à l’occasion d’une visite de reprise du salarié, consécutive à un arrêt de travail d’origine professionnelle ou non professionnelle.

2/ La solution générale retenue par l’arrêt du 24 mai 2023.

En l’espèce, un salarié en arrêt maladie avait formulé une demande pour bénéficier d’une visite médicale conformément aux dispositions du Code du travail.

Cette démarche peut être entreprise lorsque le salarié anticipe un risque d’inaptitude et souhaite engager une démarche de maintien en emploi, ainsi que bénéficier d’un accompagnement personnalisé [4].

À l’issue de cette visite médicale, le médecin du travail avait conclu que le salarié était inapte, cet avis conduisant à son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le salarié avait contesté la résiliation de son contrat, soutenant que le médecin du travail ne pouvait pas constater son inaptitude à la suite d’une visite médicale qu’il avait lui-même demandée et qui avait eu lieu pendant la suspension de son contrat de travail liée à un arrêt maladie.

Cette argumentation est rejetée par la Cour de cassation, posant pour principe que

« Le médecin du travail peut constater l’inaptitude d’un salarié à son poste à l’occasion d’un examen réalisé à la demande de celui-ci sur le fondement de l’article R4624-34 du Code du travail, peu important que l’examen médical ait lieu pendant la suspension du contrat de travail ».

La Cour de cassation avait déjà jugé que les dispositions du Code du travail fixant les conditions de la constatation par le médecin du travail de l’inaptitude physique du salarié à son poste n’imposent pas que cette constatation soit faite lors d’un examen médical de reprise consécutif à une suspension du contrat de travail [5].

La solution avait été réaffirmée par la Cour de cassation dans un arrêt postérieur [6].

Dans cette affaire, un salarié avait spontanément passé un premier examen médical pendant l’exécution de son contrat de travail.

Le deuxième examen, lors duquel il avait été déclaré inapte par le médecin du travail, avait eu lieu 15 jours plus tard, alors qu’il se trouvait en arrêt de travail pour maladie.

Pour la Cour de cassation, l’inaptitude avait été régulièrement constatée par le médecin du travail, même si l’avis avait été rendu alors que le contrat de travail était suspendu.

La décision du 24 mai 2023 a une portée plus générale et devrait notamment permettre au salarié de solliciter une visite médicale durant un arrêt de travail, afin que le médecin du travail statue sur son aptitude au poste.

Xavier Berjot
Avocat Associé au barreau de Paris
Sancy Avocats
xberjot chez sancy-avocats.com
https://bit.ly/sancy-avocats
LinkedIn : https://fr.linkedin.com/in/xavier-berjot-a254283b

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[1C. trav. art. R4624-31.

[2C. trav. art. R4624-32.

[3C. trav. art. L4624-4.

[4C. trav. art. R4624-34.

[5Cass. soc. 21-9-2011 n° 10-14.748.

[6Cass. soc. 7-7-2016 n° 14-26.590.

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