I- Les conditions de jouissance de l’usufruit.
Aux termes de l’article 578 du Code civil, l’usufruit est le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais a la charge d’en conserver la substance.
L’article 600 du Code civil prévoit que l’usufruitier prend les choses dans l’état où elles sont, mais il ne peut entrer en jouissance qu’après avoir fait dresser, en présence du propriétaire, ou lui dûment appelé, un inventaire des meubles et un état des immeubles sujets à l’usufruit.
Il a toutefois été jugé que le défaut d’inventaire par l’usufruitier avant son entrée en jouissance ne saurait être considéré comme une cause nécessaire de déchéance dudit usufruit [1].
L’inventaire permet seulement au nu-propriétaire de prouver par tous moyens la consistance des biens soumis à usufruit [2].
II- La répartition des travaux entre usufruitier et nu-propriétaire.
L’article 605 du Code civil dispose que l’usufruitier n’est tenu qu’aux réparations d’entretien. Les grosses réparations demeurent à la charge du propriétaire, à moins qu’elles n’aient été occasionnées par le défaut de réparations d’entretien, depuis l’ouverture de l’usufruit ; auquel cas l’usufruitier en est aussi tenu.
Il ressort des dispositions de l’article 606 du Code civil que « les grosses réparations sont celles des gros murs et des voûtes, le rétablissement des poutres et des couvertures entières.
Celui des digues et des murs de soutènement et de clôture aussi en entier.
Toutes les autres réparations sont d’entretien. »
Si l’appréciation du caractère des réparations est une question de fait abandonnée à l’appréciation des tribunaux [3], les travaux à la charge du nu-propriétaire et énumérés à l’article 606 du Code civil sont quant à eux limitatifs [4].
La reconstitution d’un vignoble ravagé par le phylloxéra est une grosse réparation [5].
La réfection de zingueries affectant une partie importante de l’immeuble et nécessitant une dépense exceptionnelle est également une grosse réparation [6], tout comme la réfection des souches de cheminée [7].
En revanche, le recrépissement ou le ravalement d’un immeuble est une réparation d’entretien qui reste à la charge de l’usufruitier [8], ou le remplacement de la climatisation d’un immeuble [9].
L’usufruitier doit entretenir l’immeuble de telle sorte qu’il puisse le restituer à la fin de l’usufruit dans l’état dans lequel il se trouvait à l’ouverture de l’usufruit [10].
Le nu-propriétaire dispose de la faculté de contraindre l’usufruitier d’exécuter les réparations d’entretien lui incombant. Tel n’est pas le cas de l’usufruitier qui ne peut obliger le nu-propriétaire à réaliser les travaux visés à l’article 606 du Code civil durant l’usufruit, sauf clause particulière expresse [11].
L’usufruitier pourrait néanmoins exécuter les obligations qui incombaient au nu-propriétaire, à charge pour lui de demander le remboursement des fonds engagés ainsi que le paiement des sommes correspondant à la plus-value apportée au bien du fait de ses travaux [12].
Enfin, ni le propriétaire, ni l’usufruitier, ne sont tenus de rebâtir ce qui est tombé de vétusté, ou ce qui a été détruit par cas fortuit [13].
Discussions en cours :
Bonjour et merci pour votre article,
Un arbre est tombé sur la parcelle voisine.
Qui est responsable, l’usufruitier ou le nu-propriétaire ?
Est-ce que l’usufruitier a l’obligation d’être assuré ?
Il y a eu en fait 3 arbres tombés, pas des petits arbres, des cyprès de 18m de haut (1m90, 1m80 et 1m60 de circonférence). La clôture (en grillage et piquet/soubassement béton) a été endommagée.
L’usufruitier, mon voisin, s’en fiche complètement.
Comme les arbres sont tombés sur mon allée d’entrée de voiture, j’ai moi-même passé une semaine à remettre en état.
Ce qui est important : c’est qu’il y a encore 10 autres arbres qui menacent de tomber : 2 sont mourants et sont morts (scolytes), à noter qu’il y en a un qui penche à 60 degrés et qui n’est retenu que par les branchages d’un arbre de ma parcelle.
Ce qui m’inquiète c’est qu’il y a un risque qu’ils tombent sur ma fille, moi, mes invités ou un véhicule.
Puis-je contraindre l’usufruitier à enlever l’arbre qui penche dangereusement ?
Bien à vous
Michaël V.
Bonjour,
Selon le Code civil, l’usufruitier n’est tenu qu’aux réparations d’entretien.
Toutefois, il n’existe pas de définition légale des dépenses d’entretien. Le Code civil se limite à préciser que toutes les dépenses qui ne sont pas listées à l’article 606 du Code civil sont des dépenses d’entretien.
De manière générale, la jurisprudence considère que les dépenses d’entretien sont les dépenses destinées à maintenir le bien en bon état. Dès lors et dans le silence des textes, il y a lieu de considérer que l’entretien des espaces verts relève des dépenses d’entretien et est donc à la charge de l’usufruitier.
En ce qui concerne l’assurance, l’usufruitier qui occupe le logement est assimilé à un locataire. Il doit donc souscrire une assurance habitation pour le protéger contre les risques. De manière générale, il incombe toujours à la personne qui réside dans l’appartement ou la maison de s’assurer contre les risques.
Enfin, s’agissant de l’arbre qui penche sur votre terrain, le principe est que vous ne pouvez contraindre votre voisin qu’à couper les branches qui dépassent sur votre propriété. En revanche, dès lors que l’arbre est situé sur le terrain de votre voisin et qu’il n’empiète pas sur votre propriété, vous ne pouvez pas le contraindre à le couper.
Si vous estimez que cet arbre présente un danger manifeste, je vous recommande d’écrire un courrier recommandé à votre voisin pour faire état de ce danger et lui demander de l’abattre. Vous pouvez aussi solliciter son assurance et l’informer qu’à défaut d’assurance, il sera personnellement redevable des frais de réparation en cas de dommage.
Cordialement
Bonjour
Nous avons laissé l’usufruit de l’appartement et du garage à notre père ma soeur, mon frère et moi meme sommes les nu proprietaire.
Mon père a decidé de remplacer la porte coulissante en bois du garage par une porte en aluminium avec éléctrification à faire afin que la porte s’ouvre.
Nous ne sommes pas d’accord nous les 3 nu propriétaires car ce remplacement et cette électrification ne se justifient pas.
Sans notre autorisation mon père peut il faire faire les travaux ?
Merci pour votre réponse.
Bonjour,
Un cas précis SVP : la situation dérape, l’usufruitier laisse volontairement dépérir le bien, et il faut intervenir à cause des nuisibles (entretien, à traiter par l’usufruitier) dont la prolifération peut entrainer des dégâts sur la structure (gros travaux, à financer par le nu-propriétaire).
Avant une procédure longue et coûteuse à tous égards, le nu-propriétaire peut-il sans l’accord de l’usufruitier :
sauver le bien, en faisant le nécessaire primordial (traitement nuisibles, nettoyage jardin et intérieur, réparation & sécurisation)
et dans la foulée, rénover la maison pour l’assainir ?
Auquel cas peut-il valoriser les factures, les déduire du prix de l’usufruit dans le cas d’un éventuel rachat ?
et si le nu-propriétaire fait des travaux lui-même : comment valoriser son "travail" ?
Enfin, peut-il ouvrir un compteur électrique et un pour l’eau en son nom ? (Le but n’étant pas d’y habiter mais de pouvoir y loger le temps des travaux.)
Merci de votre aimable réponse,
Bien à vous
Bonjour,
En principe, le nu-propriétaire ne peut pas effectuer des travaux de réparation sur un bien sans l’accord de l’usufruitier ; l’usufruitier ayant le droit de jouissance et d’usage du bien, toute intervention nécessite son consentement.
Dans l’hypothèse où l’usufruitier abandonne le bien, vous devez recourir à une action judiciaire afin de signaler le manquement de ce dernier à ses obligations d’entretien afin de mettre fin à l’usufruit conformément à l’article 618 du code civil. L’usufruit peut en effet cesser par l’abus que l’usufruitier fait de sa jouissance, soit en commettant des dégradations sur le fonds, soit en le laissant dépérir faute d’entretien.
Bien cordialement.
Bonjour, je m interroge sur les vérandas et piscine qui sont extérieurs au bâti principal. Sont ils considérés comme du 606 si la véranda s affaisse par exemple ou si la piscine nécessite une rénovation totale ? Merci à vous
Bonjour,
si la structure est affectée, on peut considérer qu’il s’agit de grosses réparations.
Cordialement.
Bonjour
Lusufruitier doit il avoir le concentement du nu propriétaire pour faire des travaux dans la maison ?
Que se passe t’il si les travaux change le caractère intérieur de la maison ?
Bonjour,
L’usufruitier doit exécuter les travaux d’entretien et les petites réparations.
Sont notamment concernés les travaux relatifs à la peinture, à l’entretien des sols et des espaces verts, ainsi que des petites réparations communes.
Lorsque l’usufruitier réalise un de ces travaux, il n’est pas tenu de solliciter l’accord du nu-propriétaire.
L’accord du nu-propriétaire s’impose, toutefois, en présence de travaux qui touchent à la substance du bien et dépassent le seul entretien dudit bien.
Cordialement.
Bonjour,
Que se passe t-il si l’usufruitier ne peut assumer les charges du bien tels que la taxe foncière ou l’entretien du bien ?
Pareil que se passe t-il si le nu proprietaire ne peut assumer la charge financière de gros travaux tels que la toiture par exemple ?
Je vous remercie
Bonjour,
Si l’usufruitier ne peut assumer la taxe foncière, ce dernier s’expose à des poursuites de l’administration fiscale.
S’il ne peut assumer les charges relatives à l’entretien du bien, l’usufruit peut faire l’objet d’une extinction c’est-à-dire prendre fin.
S’agissant du nu-propriétaire, il ne peut être contraint de réaliser les grosses réparations.
Toutefois, il convient de préciser que l’usufruitier peut, s’il le souhaite, procéder lui-même à ces réparations. Dans ce cas, l’usufruitier disposera d’un recours, contre le nu-propriétaire, pour le montant de la plus-value qui en résulte. Cette action ne pourra être exercée qu’en fin d’usufruit.