Donations, donations-partages et Pacte Dutreil : anticiper, transmettre et préserver.
« Transmettre, ce n’est pas seulement donner des biens : c’est aussi transmettre des valeurs, des choix, une histoire ».
Préparer la transmission de son patrimoine, c’est faire le choix de la sérénité. C’est organiser aujourd’hui ce qui pourrait diviser demain. Pour cela, deux outils juridiques se distinguent : la donation simple et la donation-partage. Et lorsqu’il s’agit de transmettre une entreprise, le pacte Dutreil vient compléter ce dispositif avec une fiscalité allégée, à condition de bien respecter les règles.
1. La donation : donner de son vivant, avec simplicité.
La donation est définie par l’article 893 du Code civil comme :
« un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement d’une chose en faveur du donataire qui l’accepte ».
Elle permet de transmettre, de son vivant, un bien (immeuble, somme d’argent, parts sociales, etc.) à la personne de son choix.
Avantages :
- Transmission immédiate du bien donné ;
- Possibilité de conserver un usufruit [1] ;
- Fiscalité avantageuse grâce aux abattements renouvelables tous les 15 ans [2] :
- 100 000 € par enfant et par parent,
- 31 865 € pour un petit-enfant,
- 15 932 € entre frères et sœurs.
Une donation peut être faite hors part successorale (libre répartition dans la quotité disponible) ou en avancement d’hoirie (pris en compte pour l’équilibre successoral).
2. La donation-partage : répartir équitablement et fortifier l’harmonie familiale.
Encadrée par les articles 1075 à 1078-3 du Code civil, la donation-partage permet à un ascendant de transmettre et répartir ses biens entre ses héritiers présomptifs (souvent les enfants).
« Transmettre en choisissant les lots, c’est garantir l’équilibre et éviter les comparaisons futures ».
Il y aura reprise d’un même fiscalité que concernant une donation simple.
Spécificités de la donation-partage :
- Les biens sont évalués au jour de l’acte [3], pas au décès du donateur, ce qui évite les conflits liés à l’évolution de leur valeur.
- Elle nécessite l’accord de tous les bénéficiaires, qui acceptent leur lot.
- Elle peut inclure des clauses "d’équilibrage" : soultes, lots compensatoires, charges…
- Elle permet aussi, sous conditions, de réaliser une donation conjointe entre époux [4].
3. Donation-partage et Pacte Dutreil : une stratégie puissante pour la transmission d’entreprise
Le pacte Dutreil [5] permet de transmettre une entreprise (société ou entreprise individuelle) avec une exonération de 75% des droits de donation ou succession, à condition de respecter certains engagements.
Ce mécanisme est parfaitement compatible avec une donation-partage, et même fortement conseillé, car il combine optimisation fiscale et sécurisation de la transmission familiale.
« Le pacte Dutreil permet de transmettre une entreprise à ses enfants, sans sacrifier l’équilibre entre eux ».
Conditions principales du pacte Dutreil :
- Engagement collectif de conservation des titres pendant au moins 2 ans, signé avant la transmission, par le donateur et un ou plusieurs autres associés ;
- Engagement individuel de conservation par chaque donataire pendant au moins 4 ans à compter de la fin de l’engagement collectif ;
- Un des donataires (ou plusieurs ensemble) doit exercer une fonction de direction dans la société pendant au moins 3 ans après la transmission.
Avantages cumulés avec une donation-partage :
- Possibilité d’attribuer à un enfant repreneur les titres de la société, tout en compensant les autres enfants avec d’autres biens ou une soulte ;
- L’exonération Dutreil porte sur 75% de la valeur des titres (seulement 25% soumis aux droits), sur une base déjà abattue par les seuils classiques (100 000 €/parent/enfant) ;
- La valeur des titres est figée au jour de la donation-partage, limitant les contestations ultérieures.
Exemple :
Un chef d’entreprise souhaite transmettre son entreprise valorisée à 1 000 000 € à son fils repreneur. Grâce au pacte Dutreil, 750 000 € sont exonérés. Les droits ne s’appliqueront que sur 250 000 €, et après abattement personnel, la base taxable est encore réduite.
Les autres enfants reçoivent un bien immobilier ou une somme d’argent, dans un acte global de donation-partage équilibrée.
D’autres montages sont possibles, notamment à travers une holding. Il y aura lieu de vous rapprocher d’un notaire, pour affiner l’ingénierie patrimoniale.
4. L’étape notariale obligatoire.
Tous les actes de donation et de donation-partage doivent être passés devant notaire lorsqu’ils concernent des biens immobiliers [6] ou des sociétés. Mais surtout, le notaire est un expert du droit patrimonial de la famille et de la fiscalité des transmissions.
Il vous aide à :
- Identifier les biens à transmettre et leur mode d’évaluation ;
- Rédiger les engagements nécessaires dans le cadre du pacte Dutreil ;
- Respecter les droits des héritiers réservataires ;
- Préparer l’avenir de l’entreprise tout en protégeant l’équilibre familial.
5. En conclusion : anticiper, c’est protéger.
Donner de son vivant, ce n’est pas se dépouiller : c’est organiser avec clairvoyance.
La donation-partage permet d’agir dans l’intérêt de tous les enfants, dans le respect de leurs situations personnelles.
Le pacte Dutreil, quant à lui, est une véritable opportunité fiscale pour la transmission d’entreprise, mais aussi un acte fort de pérennisation du patrimoine professionnel.