Mais il arrive que ce point soit complément omis ou qu’il ne soit pas mentionné que leur prise en charge est subordonnée à l’accord préalable du parent auquel les sommes sont réclamées. La jurisprudence est claire : si un parent décide d’engager la dépense sans l’accord de l’autre, il devra, sauf urgence, la supporter seul.
I) Le principe fixé par la Cour de cassation en 2012.
En 2012, la Cour de cassation a précisé que l’accord préalable était nécessairement requis avant tout engagement de frais exceptionnels.
Dans cette affaire, une précédente décision précisait que le père devait prendre en charge les frais de scolarité de son fils jusqu’à la fin de ses études supérieures. La mère ayant avancé unilatéralement des dépenses d’inscription dans des établissements privés, mais aussi des dépenses de soutien scolaire et de séjour linguistique à l’étranger, elle pensait pouvoir en obtenir remboursement de la part du père et, faute d’exécution spontanée, avait tenté une saisie-arrêt sur salaires. Le père avait alors saisi le juge de l’exécution, lequel a estimé que la mère aurait dû requérir l’accord préalable du père pour obtenir ensuite le remboursement des dépenses engagées.
La Cour d’appel de Versailles a confirmé le raisonnement du juge de l’exécution en ces termes :
« La charge des frais de scolarité de celui-ci étant dévolue à D Y, le choix de l’établissement, comme l’organisation de cours de rattrapage et de séjours à l’étranger, ne pouvaient se faire sans que son accord ait été, au préalable, recueilli (…) Qu’il s’ensuit que le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu’il a débouté Z A de sa demande de remboursement des frais de scolarité » [1].
La Cour de cassation a validé cette solution, posant le principe de la nécessité d’un accord pour l’ensemble des frais de scolarité [2] :
« Attendu que si le juge de l’exécution ne peut, sous le prétexte d’interpréter la décision dont l’exécution est poursuivie, en modifier les dispositions précises, il lui appartient d’en fixer le sens ; Et attendu que c’est par une interprétation nécessaire de la précédente décision que la cour d’appel a souverainement décidé que la prise en charge des frais de scolarité de l’enfant commun était subordonnée à l’accord des parents ».
II) Un accord préalable qui résulte en outre de l’autorité parentale conjointe.
Dans cette affaire, l’enfant était majeur et les juridictions n’ont donc pas fondé leur décision sur le principe de l’autorité parentale conjointe. L’arrêt de la Cour de cassation repose, en définitive, sur un raisonnement de bon sens économique : en dehors de la pension alimentaire, dont le montant est fixé par une décision, il n’est pas possible d’imposer une dépense indéterminée à un parent, sans recueillir préalablement son accord.
A fortiori, quand l’enfant est mineur, l’accord préalable est requis ; il découle du principe de l’autorité parentale conjointe, comme le soulignent de nombreuses décisions :
- « Les frais dits exceptionnels tels que les frais scolaires et extra-scolaires ne seront partagés entre les parents qu’après une décision concertée conformément à l’exercice conjoint de l’autorité parentale » [3].
- « Les frais de scolarité, des activités extra-scolaires des enfants et les frais exceptionnels engagés pour ces derniers, décidés préalablement entre les parents » [4].
- « Aucune demande de partage des frais exceptionnels n’est en l’état formée ; il sera néanmoins rappelé aux parties, en tant que de besoin, que les frais dits exceptionnels engagés d’un commun accord, pour l’enfant commune (…) sont par application des dispositions précitées, supportés au prorata des facultés contributives de chacun des deux parents » [5].
- « En principe, les frais exceptionnels comprenant les frais de scolarité en établissement privé, les voyages scolaires, les activités extra-scolaires, les frais d’études supérieures (scolarité, logement étudiant), les frais de santé non remboursés par la Sécurité sociale et une mutuelle, sont supportés par moitié par les parties, ou selon une autre clé de répartition, après accord entre eux sur ces frais et sur présentation de justificatifs comme des factures et à défaut, la dépense doit être supportée par celui qui l’a engagée unilatéralement » [6].
- « Les frais dits exceptionnels doivent être engagés d’un commun accord, et ce conformément aux règles régissant l’exercice conjoint de l’autorité parentale. À défaut, ils demeureront à la charge du parent qui aura pris l’initiative de les engager seul » [7].
III) Une dérogation limitée : les cas d’urgence avérée.
La jurisprudence admet une seule dérogation au principe de l’accord préalable : elle concerne les cas d’urgence. Dans ces situations bien particulières et dûment justifiées (par exemple pour des dépenses de santé), les juges acceptent que le parent qui engage les dépenses puisse ensuite réclamer un remboursement de la part de l’autre parent, et ce même s’il est affranchi de son autorisation préalable avant d’engager ladite dépense :
- « Dit que pour les dépenses énumérées ci-dessus, le parent faisant la dépense devra recueillir l’accord préalable de l’autre parent, sauf urgence, et devra justifier à l’autre parent de la facture acquittée » [8].
- « Les frais exceptionnels réglés pour les enfants (scolarité, voyages scolaires, santé importants restant à charge, activités de loisirs) seront pris en charge en plus de la pension alimentaire et par moitié par les parents sur présentation d’un justificatif de la dépense engagée au parent concerné, sous réserve hors urgence avérée d’avoir été décidés d’un commun accord préalable » [9].
IV) Toujours privilégier les modes amiables dans la résolution des différends.
Ce qui doit dans tous les cas guider les parents, c’est l’intérêt supérieur de l’enfant mais également la préservation d’une « entente cordiale » autour de lui pour qu’il ne soit jamais lésé dans ses besoins, ni placé au cœur de leur désaccord. Ce qui lui est avant tout nécessaire, plus que les dernières baskets à la mode, c’est d’avoir des parents qui s’entendent et qui conserveront une cohérence éducative pour les choix les plus importants. A défaut, son équilibre et sa construction d’adulte en souffriront.
Les dépenses dites exceptionnelles, c’est-à-dire non comprises dans ce qui est communément appelé la « pension alimentaire » (contribution à l’entretien et l’éducation des enfants), peuvent être majoritairement anticipées : en effet, on connait approximativement les besoins sur l’année à venir (l’abonnement et les fournitures pour le club sportif, la musique ou le théâtre, le soutien ou les voyages scolaire,…).
On peut donc dresser une liste commune avec un budget annuel, anticiper en se partageant par exemple sur un drive les souhaits exprimés par l’enfant pour l’an prochain et le coût potentiel pour avoir le temps d’y réfléchir ensemble et voir si cela rentre dans les deux budget parentaux, ce qui évitera toute contestation ultérieure.
Dans tous les cas, il est plus qu’indispensable de se concerter avant d’engager une dépense « exceptionnelle ». Si le dialogue est difficile, les avocats respectifs formés aux modes amiables ou les médiateurs peuvent vous aider à renouer un dialogue constructif tant bénéfique à l’enfant qu’aux adultes pour que chacun conserve une vie sereine.
Discussions en cours :
Bonjour,
Dans le cas de l’autorité parentale exclusive pour l’un des parents, si le jugement indique que les frais exceptionnels seront partagés pour moitié par chacun des parents, est ce que le parent qui n’a pas l’autorité parentale doit tout de même payer la moitié des frais alors qu’il n’a pas été nécessairement consulté ?
Bien cordialement,
Bonjour,
Tout dépend de ce qui a été indiqué dans le jugement (A vérifier au cas par cas). Attention, il ne faut pas confondre autorité parentale et accord parental sur l’engagement des dépenses qui sont disctincts. De manière générale, si les frais sont mentionnés comme soumis à l’accord des deux parents pour leur engagement dans la décision (par exemple pour les activités extrascolaires), si vous inscrivez l’enfant seul sans accord de l’autre sur l’engagement de la dépense, vous la payerez seul. Pour les dépenses médicales obligatoires, elles sont partagées par moitié sans même accord de l’autre pour l’engagement s’agissant de frais de santé indispensables pour l’enfant ( par exemple reste à charge en matière d’hospitalisation).
Bonjour
Je rejoins cette discussion qui me concerne également. Je souhaiterais avoir un éclaircissement sur le paiement des frais exceptionnels. Sur un premier jugement il avait été précisé que cela était sur présentation de factures et avec l’accord des deux parents. Sur le deuxième jugement cette mention n’a pas été reprise et il est seulement indiqué que les frais exceptionnels seront partagés par moitié.
Ma question est de savoir si on peut me réclamer des sommes sans factures et sans concertation ? Sachant que certaines sommes sont des assurances moto, des frais de permis déjà validés sans m’avoir concerté, des frais d’achats de téléphones etc… il n’y a pas de limite.
Une autre question concernant mes revenus, les frais exceptionnels ne doivent-ils pas prendre en compte ma capacité de payer car on m’a déjà réclamé 6000€ de frais exceptionnels qui ont été revu à 1500€ par le JEX (après saisie attribution) aujourd’hui on me réclame 2500€…
J’aimerais avoir réellement qu’on me guide car il y a concrètement un abus et je n’ai pas d’appui d’articles de loi ou autres sur lesquels je pourrais me reposer.
Je vous remercie par avance
Cordialement
Bonjour pour répondre à votre question :
Bonjour
Je vous remercie pour votre réponse. Il y a eu deux jugements le premier qui stipulait que les frais devaient être partagés d’un commun accord et sur présentation de facture. Sur le deuxième cela n’a pas été repris et il est juste mentionné :« dit que les parents supporteront chacun pour moitié les frais exceptionnels pour l’entretien et l’éducation, en ce compris la part non-remboursable des frais médicaux et para-médicaux, les frais de scolarisation, les frais liés à la pratique d’activités culturelles, artistiques ou sportives. »
Est-ce que du coup cela laisse la possibilité de devoir tout payer sans être consulté ou y a-t-il malgré tout une obligation de concertation et de présentation de facture. Pour exemple, un tableau récapitulant des frais sur l’année 2024 qui reprend des assurances moto, abonnements téléphone… le précédent tableau sur l’année 2023 m’avait valu une saisie attribution demandée par mon ex conjointe à un huissier. Sur ce tableau figurait les frais cités plus haut, des vêtements, l’achat de plusieurs téléphones, coiffeur… il y avait juste des frais médicaux auxquels je ne me suis jamais opposés à régler mais dont je n’avais pas les feuilles de remboursement de soins.
Aujourd’hui donc nouveau tableau pour l’année dernière et futur tableau qui concernera le premier trimestre 2025 où l’on m’annonce d’ores et déjà un permis de conduire à 1879€ et un autre pour conduire une moto pour adolescents ! Les frais ayant déjà commencé à être réglés donc une fois de plus sans en avoir été averti.
Je vous remercie pour votre aide et serais réellement preneur d’articles de loi ou quelque chose qui me permettrait de stopper cet abus sans fin car je vois arriver qu’après le permis ce sera l’achat de véhicules…
Bien cordialement
Bonjour,
Quel est le délai de paiement ?
quel recours en cas de non paiement des frais exceptionnels ?
Cas de garde alternée depuis 7 ans pour une fillette de 10 ans . Aucun différend financier depuis mais actuel litige au sujet du choix du collège . Pas d’entente préalable pour le moment . La maman a contacté une avocate et la procédure est entamée. Le seul souci est une interrogation sur la transmission des revenus et charges de chacun y compris ceux de leur conjoint ( pacs)
Dans la mesure où il n’y a pas de pension alimentaire , aucun problème au sujet du partage des frais , juste un désir de choisir le meilleur pour l’enfant , est-il indispensable de communiquer des salaires , avis d’imposition , charges .. à la partie adverse . A son avocat soit mais à l’autre parent puisque vraiment pas nécessaire ? Merci
infiniment de bien vouloir me donner cette simple information . Bien cordialement . Madame Desprez -Leuwers . Versailles
Chère madame, la transparence financière permet une certaine confiance réciproque. Vous indiquez que la difficulté concerne uniquement le choix du collège. Si la question est le choix entre privé/public, il y a, j’imagine, la question de son financement qui se pose ? Elle nécessite alors de se communiquer des pièces financières. Difficile de vous répondre avec plus de précision sans étude du dossier. Cordialement