Un sujet proposé par la Rédaction du Village de la Justice

Statut du tiers digne de confiance pour le placement d’enfants mineurs.

Par Agathe Gaume-Bertier, Juriste.

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Explorer : # protection des enfants # accueil familial # tiers de confiance # aide sociale à l'enfance

Le décret n°2023-826 du 28 août 2023 relatif aux modalités d’accompagnement du tiers digne de confiance, de l’accueil durable et bénévole par un tiers et de la désignation de la personne de confiance par un mineur est paru au Journal officiel du 30 août 2023. Ce texte fait suite à la loi n°2022-140 du 7 février 2022 relative à la protection des enfants.

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Le décret ajoute une section 5 bis au chapitre 1ᵉʳ du titre II du livre II du Code de l’action sociale et des familles. Cette nouvelle section s’intitule « Accueil de l’enfant chez un membre de la famille ou un tiers digne de confiance » et a pour objet de définir :

  • les modalités de l’information et de l’accompagnement du tiers de confiance désigné par le juge
  • les modalités de l’accueil durable et bénévole
  • les modalités de désignation, par chaque mineur bénéficiant d’une prestation d’aide sociale à l’enfance, de la personne de confiance de son choix.

Sa date d’entrée en vigueur est fixée au lendemain de sa publication, c’est-à-dire le 31 août 2023.

I. Rappel de la loi du 7 février 2022 relative à la protection des enfants.

Pour comprendre le décret en question, il faut avoir en tête la loi n°2022-140 du 7 février 2022 relative à la protection des enfants qui dans son article 1er modifie et complète l’article 375-3 du Code civil.

Cet article modifié oblige désormais le juge à ne confier l’enfant à un service départemental de l’aide sociale à l’enfance ou à un service ou à un établissement habilité pour l’accueil de mineurs qu’après avoir fait évaluer par le service compétent, des conditions d’éducation et de développement physique, affectif, intellectuel et social de l’enfant dans le cadre d’un accueil par un membre de la famille ou par un tiers digne de confiance, en cohérence avec le projet pour l’enfant prévu à l’article L223-1-1 du Code de l’action sociale et des familles et après audition de l’enfant lorsque ce dernier est capable de discernement.

D’autre part, la loi en question complète l’article L221-4 du Code de l’action sociale et des familles et énonce que dans le cas où l’enfant est confié par le juge à un autre membre de la famille ou à un tiers digne de confiance, en l’absence de mesure éducative en milieu ouvert, un référent du service de l’aide sociale à l’enfance ou un organisme public ou privé habilité informe et accompagne le membre de la famille ou la personne digne de confiance à qui l’enfant a été confié. Ce référent est chargé de la mise en œuvre du projet pour l’enfant. Le décret est venu préciser les conditions d’application de cette nouvelle disposition.

Enfin, cette loi est venue, par son article 17, insérer un article L223-1-3 énonçant que le mineur peut désigner une personne de confiance majeure, qui peut être un parent ou toute personne de son choix. La désignation de cette personne de confiance est effectuée en concertation avec l’éducateur référent du mineur. Le décret vient définir les modalités de cette désignation

II. Les modalités de l’information et de l’accompagnement du tiers de confiance désigné par le juge.

Le juge des enfants charge le service de l’aide social à l’enfance ou un autre organisme habilité d’informer et d’accompagner la personne à qui l’enfant est confié.

Cette information et cet accompagnement doivent permettre d’assurer :

  • la prise en compte des besoins fondamentaux de l’enfant par les personnes à qui il est confié
  • l’implication de ces personnes dans la mise en œuvre du projet de l’enfant en veillant à sa bonne santé et à sa scolarité
  • le développement physique, affectif, intellectuel et social de l’enfant.

Le texte indique que cet accompagnement prend notamment la forme d’entretiens et de visites au domicile de la personne accueillant l’enfant. Le référent désigné par le service d’aide à l’enfance rencontre la personne à qui a été confiée l’enfant ainsi que l’enfant lui-même de manière régulière. Il est à noter que pour les enfants de moins de trois ans, cet accompagnement est renforcé.

L’accueil en question fait l’objet d’évaluations régulières qui sont transmises au juge des enfants, mais le texte reste imprécis sur les modalités de cette évaluation rendue obligatoire par la loi.

III. Les modalités de l’accueil durable et bénévole.

Il est ainsi prévu que le membre de la famille ou le tiers digne de confiance auquel est confié l’enfant puisse percevoir une allocation couvrant les dépenses d’entretien, d’éducation et de conduite de l’enfant. Dès que la décision de placement est notifiée, le président du conseil départemental fixe le montant et les modalités de versement de cette allocation.

Cette allocation est calculée conformément à l’article R228-3 du Code de l’action sociale et des familles.

Cet article énonce :

« Les frais d’entretien et d’éducation des mineurs mentionnés aux 1°, 3° et dernier alinéa de l’article L228-3 sont remboursés aux particuliers sur la base :

  • d’un prix de pension mensuel auquel s’ajoute une indemnité d’entretien et de surveillance lorsque le mineur est placé dans une famille, se trouve en apprentissage ou poursuit ses études
  • d’une indemnité de surveillance et, éventuellement, d’entretien lorsque le mineur est salarié
    Des arrêtés déterminent les conditions dans lesquelles sont fixés les prix de pension et les indemnités ainsi que les modalités de calcul des frais de transfèrement des mineurs ci-dessus mentionnés
     ».

IV. Les modalités de désignation, par chaque mineur bénéficiant d’une prestation d’aide sociale à l’enfance, de la personne de confiance de son choix.

L’article D223-11-1 du Code de l’action sociale et des familles énonce que le service d’aide sociale à l’enfance prévient le mineur qu’il peut désigner une personne de confiance.

Conformément à l’article L223-1-3 du même code, cette personne de confiance doit être majeure et peut être un parent ou toute autre personne de son choix. La désignation de cette personne de confiance est effectuée en concertation avec l’éducateur référent du mineur. Cette personne peut, si le mineur le souhaite, l’accompagner dans ses démarches, notamment en vue de préparer son autonomie.

Le mineur doit désigner cette personne de confiance par écrit ou oralement. Le texte est peu précis sur la personne de confiance désignée par le mineur qui devrait sans doute revêtir quelques qualités spécifiques pour accompagner au mieux le mineur.

L’Observatoire National de la Protection de l’Enfance (ONPE) a publié une synthèse sur l’accueil des enfants par des tiers à l’occasion de la sortie de ce décret consultable sur leur site « l’accueil des enfants par des tiers : des formes et des besoins pluriels » [1].

Agathe Gaume-Bertier
Juriste/DPO

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  • par Aurélie S. , Le 6 octobre 2024 à 20:50

    Merci pour cet article !
    Petite question lexicologie : est-ce que l’on doit comprendre que le tiers digne de confiance et le tiers bénévole sont 2 termes pour le même accueillant ? J’avais compris avant le décret que le 1er était désigné par le juge, tandis que le second l’était par le président du Conseil Départemental. N’est-ce plus le cas ?

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