Les obligations de l’employeur en matière de visite de reprise après un arrêt maladie.

Par Noémie Le Bouard, Avocat.

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Reprendre le travail après une absence prolongée pour des raisons médicales ne se fait pas à la légère. Pour les employeurs, cette étape est encadrée par des règles strictes destinées à protéger la santé des salariés tout en respectant les obligations légales. Cet article détaille les responsabilités incombant à l’employeur lors de l’organisation des visites médicales de reprise, explore les implications juridiques de ces visites et offre un aperçu des meilleures pratiques à adopter pour assurer une transition en toute sécurité.

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La gestion du retour au travail après un arrêt maladie est une étape cruciale tant pour les employeurs que pour les salariés. Elle permet d’assurer que le salarié est apte à reprendre son poste tout en respectant les obligations légales. Cet article explore en détail les responsabilités de l’employeur concernant la visite médicale de reprise et les implications juridiques associées.

Quand organiser la visite de reprise ?

L’employeur doit prévoir une visite de reprise dans certains cas spécifiques :

  • Arrêt de travail d’au moins 30 jours suite à un accident du travail
  • Arrêt de travail d’au moins 60 jours dû à une maladie ou un accident, qu’ils soient professionnels ou non.

Cette visite doit être organisée dans les 8 jours suivant le retour effectif du salarié, conformément aux articles L4624-2-3 et R4624-31 du Code du travail [1]. La jurisprudence, comme dans l’arrêt de la Cour de cassation [2], précise que l’employeur doit agir rapidement pour organiser cette visite, soulignant l’importance de respecter ces échéances légales pour éviter des sanctions.

Responsabilité de l’organisation.

Généralement, c’est à l’employeur de prendre l’initiative d’organiser cette visite. Toutefois, le salarié peut également en faire la demande auprès de l’employeur ou directement auprès du médecin du travail, après en avoir informé son employeur [3].

Conséquences de l’absence de visite de reprise.

Suspension du contrat de travail.

Tant que la visite de reprise n’a pas eu lieu, le contrat de travail demeure suspendu.

Cela signifie que :

  • Le salarié ne reprend pas ses fonctions
  • L’employeur n’est pas tenu de payer le salaire [4].

Sanctions potentielles pour l’employeur.

Si l’employeur ne respecte pas cette obligation [5], il s’expose à des sanctions sous forme de dommages et intérêts. Néanmoins, ce défaut d’organisation ne force pas l’employeur à rémunérer le salarié qui ne travaille pas.

Exemples et cas pratiques.

Pour mieux illustrer les obligations de l’employeur lors de la gestion des visites de reprise, voici trois scénarios qui montrent différentes approches et leurs conséquences :

Anticipation et communication.

Dans le secteur de la construction, un employeur prépare le retour d’un employé après un arrêt de trois mois suite à un accident de travail. La visite de reprise est planifiée et communiquée au salarié deux semaines avant son retour. Elle est organisée le premier jour de son retour, assurant une reprise en douceur et en sécurité.

Négligence et retard.

Dans une petite entreprise, un employé reprend le travail après un arrêt de 60 jours sans que l’employeur n’organise la visite de reprise nécessaire. L’employé se blesse peu après, aggravant son état de santé initial. L’employeur est sanctionné pour non-respect des obligations légales et doit faire face à des demandes de dommages-intérêts de la part de l’employé.

Gestion proactive des complications.

Un employé d’une entreprise technologique, prêt à reprendre le travail après un burnout, bénéficie d’une approche proactive de l’employeur qui organise la visite de reprise et une consultation avec un conseiller en santé au travail. Cette démarche permet d’ajuster le poste de travail et de prévenir une rechute, témoignant de l’engagement de l’employeur envers le bien-être de ses employés.

Cas particuliers et jurisprudence.

Refus de revenir travailler sans visite de reprise.

Un salarié à la fin de son arrêt de travail qui ne manifeste aucune intention de reprendre son poste ou de passer une visite de reprise n’oblige pas l’employeur à le payer [6].

Cependant, si le salarié reste disponible pour une visite de reprise demandée mais non programmée, il a droit à son salaire, comme confirmé par la Cour de cassation [7].

Spécificités pour les travailleurs temporaires.

Rôle des agences de travail temporaire.

Pour les travailleurs intérimaires, les mêmes règles concernant la visite de reprise s’appliquent, mais la responsabilité incombe aux agences de travail temporaire (ETT) plutôt qu’à l’entreprise utilisatrice.

Exemple d’un travailleur intérimaire.

Un conducteur d’ambulance intérimaire victime d’un accident sur son lieu d’affectation avait contesté la non-programmation d’une visite de reprise par l’ETT.

Cependant, le tribunal a jugé que la suspension due à l’accident de travail ne prolongeait pas la durée du contrat d’intérim.

Recommandations pour éviter les litiges.

Planification anticipée.

Afin d’éviter toute dispute potentielle, il est fortement conseillé d’organiser les visites médicales de reprise dès que possible, coïncidant avec la date prévue de retour du salarié.

Liste de contrôle pour les employeurs.

  • Identifier les cas obligatoires pour la visite de reprise
  • Informer le salarié de l’obligation de cette visite
  • Coordonner avec le service de santé au travail : programmer la visite dans les délais impartis
  • Documenter toutes les communications et démarches relatives à l’organisation de la visite médicale.

L’organisation d’une visite de reprise après un arrêt de travail prolongé est essentielle et encadrée par des contraintes légales strictes. En suivant ces directives, les employeurs peuvent assurer une gestion efficace du retour au travail, minimiser les risques de contentieux et garantir le bien-être de leurs employés.

Noémie Le Bouard, Avocat
Barreau de Versailles
Le Bouard Avocats
https://www.lebouard-avocats.fr

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Notes de l'article:

[1C. trav. art. L4624-2-3 et R4624-31.

[2Cass. soc., 14 sept. 2016, n° 15-18.189.

[3Cass. soc., 26 janv. 2011, n° 09-68.544.

[4Cass. soc., 12 nov. 1997, n° 94-40.912.

[5Cass. soc., 12 mars 2008, n° 07-40.039.

[6Cass. soc., 16 sept. 2015, n° 14-12.613.

[7Cass. soc., 23 sept. 2014, n° 12-24.967.

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Discussions en cours :

  • Dernière réponse : 19 août à 11:19
    par Patrick LE ROLLAND , Le 18 juin à 10:34

    Sur le maintien de la rémunération au salarié qui se tient à disposition de l’employeur, le temps que ce dernier fasse diligence auprès de la médecine du travail pour passer la visite de reprise idoine, cet arrêt plus récent :

    - Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 24 janvier 2024, 22-18.437

    Sur le fond, mettons-nous un instant à la place du salarié. Peu peuvent attendre (même 8 jours) et se retrouver sans revenus dans cette période !

    A décharge des entreprises, elles ont parfois du mal à obtenir le rendez-vous de la médecine du travail pour leur salarié de retour en raison de la pénurie de ces professionnels de santé.

    Force est de constater que certaines entreprises réemploient le salarié avant la visite de reprise ! D’ailleurs, un médecin du travail interrogera parfois le salarié pour qu’il lui dise si sa reprise se passe bien, ce qui au-delà de l’examen clinique sera un indicateur de son aptitude.

    Sur les réseaux sociaux dédiés au conseil et à la vulgarisation juridique pour les salarié(e)s, il n’est pas rare que des salarié(e)s témoignent qu’au moment de partir en quête de cette visite de reprise, ils constatent qu’ils ne sont pas ou plus rattachés à un médecin du travail (si, si !).

    Patrick LE ROLLAND
    auteur "Le guide pratique des prud’hommes"
    Ellipses

    • par Manu , Le 19 août à 11:19

      Bonjour, je suis en arrêt maladie depuis le mois Avril, mon arrêt s’arrête le 28 août. Mon employeur m’a envoyé un mail en m’indiquant que mon rdv de reprise de travail aura lieu le 29 août à 8h45 et me demande de venir à l’entreprise avant ce rdv donc pour 8h et de partir après pour la visite. Je suis dans une démarche d’inaptitude à l’entreprise avec la médecine du travail. Mon employeur est-il en droit de me demander de venir dans l’entreprise avant mon rdv à la médecine du travail. ?
      Très cordialement

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