De la codification de la portabilité.

Par Chudakova Valentyna, Juriste.

3842 lectures 1re Parution: 4 commentaires 4.73  /5

Explorer : # portabilité # sécurité sociale # prévoyance # financement

Avant la loi relative à la sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013, le dispositif de la portabilité s’appliquait limitativement :
- aux employeurs adhérents des organisations patronales signataires suivantes : MEDEF, UPA, CGPME ;
- aux autres employeurs entrant dans le champ d’application de l’ANI du 11 janvier 2008.

-

Le nouvel article L.911-8 du Code de la sécurité sociale élargit le champ d’application du dispositif de la portabilité à tous les employeurs couverts par le Code de la sécurité sociale.

1. Conditions d’application :

Pour bénéficier de cette portabilité des frais de santé et de la prévoyance trois conditions suivantes sont requises :

- la rupture du contrat de travail ne doit pas être liée à une faute lourde du salarié ;

- le salarié doit être pris en charge par l’assurance chômage ;

- le bénéfice du maintien des garanties est subordonné à la condition que les droits à remboursements complémentaires aient été ouverts chez le dernier employeur.

Concrètement, si le bénéfice de la prévoyance n’est ouvert dans l’entreprise qu’à condition que le salarié justifie d’une ancienneté d’un an et que le salarié ne justifie que d’une ancienneté de 6 mois au moment de la rupture de son contrat de travail, les droits à remboursements complémentaires ne sont pas ouverts lors de la rupture. En conséquence, le salarié ne peut bénéficier de la portabilité de la prévoyance.

2. Durée du maintien des garanties santé et prévoyance

Le maintien des garanties est applicable à compter de la date de cessation du contrat de travail et pendant une durée égale à la période d’indemnisation du chômage, dans la limite de la durée du dernier contrat de travail ou, le cas échéant des derniers contrats de travail lorsqu’ils sont consécutifs chez le même employeur. Cette durée est appréciée en mois, le cas échéant arrondie au nombre supérieur, sans pouvoir excéder 12 mois.

C’est ainsi que la durée maximale de la portabilité de la couverture de frais de santé et de prévoyance est portée de 9 à 12 mois.

Par ailleurs, il est à noter que la durée du maintien des garanties s’effectue désormais dans la limite du dernier contrat de travail ou le cas échéant des derniers contrats de travail s’ils sont consécutifs chez le même employeur.

Pour les contrats de travail à durée déterminée successifs, la durée du maintien des garanties sera donc celle de l’exécution d’une prestation de travail auprès du même employeur et non plus celle du dernier contrat signé par le salarié.

Rappelons à cet égard que l’avenant n°3 du 18 mai 2009 à l’ANI du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché du travail, limitait cette durée au dernier contrat du salarié.

3. Obligations de l’employeur

L’employeur est désormais tenu à :

- informer le salarié du maintien des garanties dans le certificat de travail ;
- informer l’organisme assureur de la cessation du contrat de travail du salarié concerné.

Il s’en suit qu’un attention particulière devra ainsi être portée à la rédaction des certificats de travail.

4. Garanties maintenues

Les garanties maintenues au bénéfice de l’ancien salarié sont celles en vigueur dans l’entreprise. Le maintien des garanties ne peut donc conduire l’ancien salarié à percevoir des indemnités d’un montant supérieur à celui des allocations chômage qu’il aurait perçues au titre de la même période.

5. Financement de la portabilité

L’avenant n°3 du 18 mai 2009 à l’ANI du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché prévoyait que le financement du maintien de ces garanties était assuré conjointement par l’ancien employeur et par l’ancien salarié dans les proportions et dans les conditions applicables aux salariés de l’entreprise ou par un système de mutualisation défini par accord collectif. A défaut d’accord, ce système de mutualisation pouvait être mis en place dans les autres conditions définies à l’article L. 911-1 du Code de la sécurité sociale.

C’est ainsi que l’avenant n°3 du 18 mai 2009 à l’ANI du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché de l’emploi prévoyait deux modalités alternatives de financement de ces garanties :

- soit par l’ancien employeur et par l’ancien salarié dans les mêmes proportions ;
- soit par un système de mutualisation défini par accord collectif.

En cas de financement conjoint de ces garanties :

- le salarié avait la possibilité de renoncer au maintien de ces garanties ;
- s’il entendait y renoncer, cette renonciation qui était définitive, concernait l’ensemble des garanties et devait être notifiée expressément par écrit à l’employeur, dans les 10 jours suivant la date de cessation du contrat de travail ;
- le non-paiement par l’ancien salarié de sa quote-part de financement de ces garanties, à la date d’échéance des cotisations, libérait l’ancien employeur de toute obligation et entraînait la perte des garanties pour la période restant à courir.

A compter du 1er juin 2014 les anciens salariés bénéficieront des garanties à titre gratuit. Le maintien de la couverture sera financé conjointement par l’employeur et les salariés actifs.

Pour améliorer l’effectivité de la portabilité de la couverture santé et prévoyance prévues par l’article 14 de l’ANI du 11 janvier 2008 modifié par avenant n°3 du 18 mai 2009, l’ANI du 11 janvier 2013 pour un nouveau modèle économique et social au service de la compétitivité des entreprises et de la sécurisation de l’emploi et des parcours professionnels des salariés prévoit de généraliser au niveau de branches professionnelles et des entreprises, le système de mutualisation du financement du maintien des garanties de couverture de frais de santé et de prévoyance.

Le système de financement de la portabilité santé et prévoyance est donc celui de la mutualisation.

Pour atteindre cet objectif, il a été décidé d’ouvrir un délai d’un an, à compter de l’entrée en vigueur de l’ANI du 11 janvier 2013, pour permettre aux branches professionnelles et aux entreprises, de mettre en place un tel système de mutualisation du financement du maintien des garanties de couverture complémentaire de frais de santé. Ce délai a été porté à 2 ans pour la mutualisation du maintien des garanties de prévoyance.

C’est ainsi que les dispositions de l’article L.911-8 du Code de la Sécurité Sociale entrent en vigueur à compter du :

- 1er juin 2014 au titre des garanties liées aux rais de santé : garanties liées aux risques portant atteinte à l’intégrité physique de la personne ou liés à la maternité ;

- au 1er juin 2015 au titre des garanties de prévoyance : garanties liées au risque décès ou aux risques d’incapacité de travail ou d’invalidité.

6. L’article 4 de la loi Evin et la portabilité

L’article 4 de la loi Evin du 31 décembre 1989 dispose que le contrat collectif à adhésion obligatoire doit fixer les modalités selon lesquelles l’organisme s’engage à maintenir la couverture santé au profit des anciens salariés de l’entreprise.

La demande de l’ancien salarié pouvait être effectuée même si ce dernier bénéficiait d’une mutuelle complémentaire au titre de l’article 14 de l’ANI du 11 janvier 2008. L’article 4 de la loi Evin prenait donc le relais lorsque les droits au titre de la portabilité disparaissaient, à condition que le salarié en fasse la demande dans les 6 mois suivant la rupture de son contrat de travail.

Rappelons toutefois que pour prétendre à l’application de l’article 4 de la loi Evin et du maintien de la couverture santé, le salarié doit avoir été assuré précédemment à titre collectif et obligatoire.

Le maintien des garanties au titre de l’article 4 de la loi Evin n’est pas limité dans le temps contrairement à la portabilité des droits de l’article 14 de l’ANI du 11 janvier 2008. Cependant, le maintien de ces garanties ne concerne que la couverture santé, la portabilité des droits prévoyant quant à elle le maintien des droits de couverture santé/ prévoyance.

La loi relative à la sécurisation de l’emploi, l’article 1, modifie les dispositions de l’article 4 de la loi n°89-1009 du 31 décembre 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certaines risques.

C’est ainsi qu’à compter du 1er janvier 2014, les salariés qui ont perdu leur emploi et qui bénéficient de la portabilité pourront présenter une demande de maintien de leur couverture frais de santé :

- dans les 6 mois qui suivent la rupture de leur contrat de travail ;

- dans les 6 mois suivant l’expiration de leur période durant laquelle ils bénéficieront à titre temporaire du maintien de ces garanties.

Le délai pour pouvoir prétendre au maintien des garanties au titre de l’article 4 de la loi Evin tient désormais compte non seulement de la date de cessation du contrat de travail du salarié, mais également de la date d’expiration de la période de portabilité des droits.

L’organisme assureur adressera une proposition à l’ancien salarié, au plus tard dans les 2 mois à compter de la date de cessation du contrat de travail ou de la fin de la période du maintien des garanties.

Chudakova Valentyna, Juriste
valentinachudo chez yahoo.fr

Recommandez-vous cet article ?

Donnez une note de 1 à 5 à cet article :
L’avez-vous apprécié ?

33 votes

Cet article est protégé par les droits d'auteur pour toute réutilisation ou diffusion (plus d'infos dans nos mentions légales).

Commenter cet article

Discussions en cours :

  • par Virginie , Le 28 novembre 2014 à 17:42

    Bonjour,

    J’ai quitté mon employeur par rupture conventionnelle en étant en arrêt maladie et suis toujours arrêtée. Donc, je n’ai toujours pas pu m’inscrire à pole emploi et justifier de l’assurance chômage m’ouvrant droit à la portabilité mutuelle et prévoyance.
    Mon employeur a donc résilié mon affiliation mutuelle entreprise et me dit que je ne peux bénéficier de la portabilité.

    En recherchant sur internet, j’ai lu que le relevé des indemnités journalières, au même titre que l’attestation pôle emploi, me permettait d’avoir droit à cette portabilité ?
    Je vous serai fort reconnaissante de bien vouloir éclairer ma lanterne.

    Merci.
    Cordialement.

  • par MOREL , Le 2 juillet 2014 à 16:11

    Bonjour,

    Bel article en effet, avec cependant une zone d’ombre de mon point de vue.
    Je ne trouve pas de référence ou dans votre article expliquant que l’on peut accepter la portabilité de la mutuelle et refuser la prévoyance (ou vice-versa).

    Merci à celles et ceux qui me trouveraient un référence juridique sur le sujet.

    Meilleures salutations.

  • Bravo pour cet excellent article qui n’omet pas de rappeler l’existence de l’article 4 de la loi EVIN
    Néanmoins force est de constater que les assureurs font tout pour dissuader les rares salariés partant en retraite d’adhérer à ce dispositif.
    La principale raison en est tout d’abord que les salariés ignorent tout de l’existence de cette loi.
    Parce que les employeurs ne les informent pas, souvent il faut bien le dire souvent par ignorance.
    Et de nombreux contrats collectifs ne mentionnent les conditions de sorties de l’entreprise ..Les assureurs rejetant alors la responsabilité sur leur client employeur.

    Reste aussi que les assureurs refusent de prendre en compte les ayants droits de l’assuré, dans le cadre de l’article 4 de la loi EVIN alors que ceux-ci étaient pourtant assurés par le contrat collectif .

    Voir http://www.cfecgc-chimie.org/droit-social/962-19-septembre-2013-complementaire-sante-la-loi-evin-trop-peu-connue-des-salaries-trop-souvent-eludee-par-les-assureurs-par-g-laune-cfe-cgc-chimie

    • Bonjour et merci pour votre article qui m’apporte plusieurs questions.
      Permettez moi de vous exposer le cas suivant.
      Un cadre de 56 ans ayant plus de 15 ans d’ancienneté dans une société de services qui vient de changer d’actionnariat et de président fin mars 2013, interroge en début septembre par mail son président et son actionnaire sur le scenario de fin de carrière que ceux-ci peuvent lui proposer. En guise de réponse il reçoit verbalement une convocation chez son actionnaire le 24septembre.
      Lors de cet l’entretien était également présent le président de ce cadre. Il lui a été annoncé que son successeur était déjà choisi et que son éviction se ferai dans les semaines avenir.
      Ce cadre a pris acte de ces dires et a répondu par mail (au bout de 10 jours) qu’il n’était pas contre un départ anticipé et qu’il attendait une proposition équitable pour les deux parties.
      Des lors un flux de reproches c’est abattu de la part du président sur ce salarié qui par dépit a appelé le 21 octobre la médecine du travail pour prendre un rendez-vous.
      Le médecin du travail ne pouvant le recevoir de suite et le faisant parlé a compris la détresse de ce salarié qui était en pleur et lui a conseiller de quitter sur le champs l’entreprise et de consulter son médecin traitant (qui l’a mis en arrêt) et lui a donné rendez vous quelques jours plus tard.
      En guise de proposition de la présidence, ce salarié fut mis à pied de manière conservatoire en date du 31 octobre avec un entretien préalable au 13 novembre. Ce salarié n’a pas été à cet entretien, n’étant pas en état psychique de s’y rendre.
      Un licenciement pour faute grave lui a été signifié le 22 novembre (entre temps il a déposé une saisine au Conseil de Prud’hommes).
      Ce cadre est toujours en arrêt de travail de puis ce 21 octobre et est actuellement suivi par le psychologue de la Médecine du travail et d’un Psychiatre Neurologue.
      Avec la lettre de licenciement il lui a été proposé la portabilité de sa garantie santé et prévoyance sur 9 mois et non 12 ?

      Questions :
      - Il vient de recevoir l’accord de sa portabilité sur 9 mois, doit il demander sur 12 mois ?
      - Ne faut il pas être inscrit à Pôle Emploi et bénéficier d’ARE pour bénéficier de cette portabilité ?
      - Par ailleurs comme son arrêt de travail pour maladie est antérieur à la date son licenciement ses garanties santé et prévoyance collective ne doivent elles pas être poursuivies ? Car ce salarié ne peut pas s’inscrire à Pôle Emploi, il est en arrêt maladie indemnisé par la CPAM.

      Merci pour vos conseils.
      Cordialement.

      _

A lire aussi :

Village de la justice et du Droit

Bienvenue sur le Village de la Justice.

Le 1er site de la communauté du droit: Avocats, juristes, fiscalistes, notaires, commissaires de Justice, magistrats, RH, paralegals, RH, étudiants... y trouvent services, informations, contacts et peuvent échanger et recruter. *

Aujourd'hui: 156 320 membres, 27838 articles, 127 254 messages sur les forums, 2 750 annonces d'emploi et stage... et 1 600 000 visites du site par mois en moyenne. *


FOCUS SUR...

• Voici le Palmarès Choiseul "Futur du droit" : Les 40 qui font le futur du droit.

• L'IA dans les facultés de Droit : la révolution est en marche.




LES HABITANTS

Membres

PROFESSIONNELS DU DROIT

Solutions

Formateurs