Assiette de calcul des indemnités de rupture : le sujet des primes.

Par Xavier Berjot, Avocat.

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Explorer : # primes obligatoires # primes discrétionnaires # indemnités de rupture # salaire de référence

Par principe, tous les éléments de salaire entrent en compte dans l’assiette de calcul des indemnités de rupture (indemnité de licenciement, indemnité compensatrice de congés payés, indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, etc.).
En revanche, la question est plus incertaine s’agissant des primes.

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1/ Le principe : les primes font partie de l’assiette de calcul.

Les primes et gratifications présentent un caractère obligatoire pour l’employeur lorsqu’elles sont prévues par le contrat de travail ou les conventions et accords collectifs de travail, ou encore lorsqu’elles ont été instituées par un engagement unilatéral de l’employeur ou un usage.

Dans ces situations, elles présentent le caractère d’un salaire et doivent être prises en compte à chaque fois qu’il convient de déterminer un salaire de référence ou une moyenne des salaires (souvent, sur la base des 12 ou des 3 derniers mois).

Ainsi, lorsqu’elle est payée en exécution d’un engagement unilatéral de l’employeur, une prime constitue un élément de salaire et est obligatoire pour l’employeur dans les conditions fixées par cet engagement, peu important son caractère variable [1].

De même, un bonus attribué au salarié chaque année, sans exception, depuis plus de 10 ans et dont seul le montant annuel est variable et discrétionnaire, doit être inclus dans l’assiette de calcul de l’indemnité légale de licenciement [2].

Une solution identique s’applique a fortiori lorsque la prime revêt une nature contractuelle, même si elle ne présente pas un caractère de fixité.

Comme le considère la Cour de cassation, une prime prévue par le contrat de travail ou par un avenant est obligatoire, même si son versement n’est pas constant, et même si son montant, subordonné à des éléments non déterminés à l’avance avec certitude, ne revêt pas un caractère de fixité [3].

2/ L’exception : la prime discrétionnaire est exclue de l’assiette de calcul.

A l’inverse, une gratification dont l’employeur fixe discrétionnairement les montants et les bénéficiaires et qui est attribuée à l’occasion d’un événement unique n’a pas le caractère de salaire au sens des dispositions applicables en matière d’indemnités de rupture et ne doit pas être prise en compte dans l’assiette de calcul des indemnités de rupture et de l’indemnité minimale due en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse [4].

Tel est le cas, par exemple, de la prime versée sur décision de l’employeur à certains cadres ayant contribué aux bons résultats de l’entreprise en 2016, au nombre desquels figurent ceux qui ont permis l’obtention d’un important marché, dont le montant et les bénéficiaires étaient fixés discrétionnairement par l’employeur [5].

Cependant, la seule qualification de « prime discrétionnaire » ne suffit pas à l’exclure de l’assiette de calcul des indemnités de rupture, comme l’a rappelé la Cour de cassation dans un arrêt du 5 juillet 2023 [6].

En l’espèce, les bulletins de paie du salarié établissaient qu’il avait régulièrement perçu un bonus chaque année, au mois d’avril, dès l’exercice 2008/2009 et pendant 7 ans.

Pour la Cour d’appel [7], ces éléments faisaient ressortir que le bonus, malgré la qualification de « discrétionnaire » qui lui avait été donnée par l’employeur, n’était pas exceptionnel et constituait bien un élément de la rémunération globale du salarié.

La Cour de cassation approuve la Cour d’appel qui a :

« exactement déduit son intégration à l’assiette de calcul de l’indemnité compensatrice de congés payés afférents à la somme due à l’intéressé au titre de ce bonus pour 2015/2016, de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de l’indemnité pour manquement à l’obligation de respect de la priorité de réembauche ».

Xavier Berjot
Avocat Associé au barreau de Paris
Sancy Avocats
xberjot chez sancy-avocats.com
https://bit.ly/sancy-avocats
LinkedIn : https://fr.linkedin.com/in/xavier-berjot-a254283b

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Notes de l'article:

[1Cass. soc. 28-10-1997, n° 95-41.873.

[2Cass. soc. 28-01-2015, n° 13-23.421.

[3Cass. soc. 1-7-1997, n° 94-41.856.

[4Cass. soc. 14-10-2009, n° 07-45.587.

[5Cass. soc. 6-7-2022, n° 21-11.118.

[6Cass. soc. 5-7-2023, n° 21-16.694.

[7CA Paris, 16-3-2021, n° 18/13652.

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