1/ La procédure d’homologation de la rupture conventionnelle.
L’article L1237-14 du Code du travail dispose qu’à l’issue du délai de rétractation, la partie la plus diligente adresse une demande d’homologation à l’autorité administrative, avec un exemplaire de la convention de rupture.
L’autorité administrative dont il est question est la Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (Dreets) [1].
Depuis le 1ᵉʳ avril 2022, la demande d’homologation doit être présentée exclusivement sur le site telerc.travail.gouv.fr (pour la rupture conventionnelle du salarié non protégé) [2].
La Dreets dispose d’un délai d’instruction de 15 jours ouvrables, à compter de la réception de la demande, pour s’assurer du respect des conditions légales de la rupture conventionnelle et de la liberté de consentement des parties [3].
Le délai d’instruction commence à courir à compter du lendemain du jour ouvrable de la réception de la demande par l’administration.
Par ailleurs, lorsque le dernier jour de ce délai tombe un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant.
A défaut de notification dans ce délai, l’homologation est réputée acquise et l’autorité administrative est dessaisie.
La validité de la convention est subordonnée à son homologation [4].
Ainsi, sans homologation expresse ou tacite, la rupture du contrat par l’employeur est sans cause réelle et sérieuse [5].
2/ Les cas de refus d’homologation et d’irrecevabilité.
La demande d’homologation peut être refusée dès lors qu’une condition imposée par la loi n’a pas été respectée (vice de consentement de l’une des parties, indemnité inférieure au minimum légal ou conventionnel applicable, absence d’entretien, non-respect des règles de l’assistance des parties, non-respect du délai de rétractation, etc.) [6].
Le refus d’homologation doit être motivé.
Sur le plan pratique, l’administration envoie un courrier postal aux parties (employeur et salarié) qui précise les motifs retenus.
Le refus d’homologation peut faire l’objet d’un recours devant le Conseil de prud’hommes [7].
Le ministère du Travail précise, par ailleurs, que la demande d’homologation peut être déclarée irrecevable si le formulaire Cerfa est incomplet.
Ici encore, l’administration envoie un courrier postal aux parties qui précise les éléments manquants.
La question se pose de savoir ce qu’il advient de la rupture conventionnelle en cas d’irrecevabilité.
Le site teleRC répond à cette question dans les termes suivants : « Oui, il est possible de faire une nouvelle demande. Il convient alors de saisir en ligne un nouveau formulaire, de l’imprimer, de le dater et de le signer. Un nouveau délai de rétractation commencera à courir le lendemain du jour de la signature du nouveau formulaire. Ce délai n’est pas réduit du fait d’une demande précédente ».
La Cour de cassation ne retient pas cette solution.
3/ L’arrêt du 19 juin 2024.
Dans cette affaire, la difficulté portait sur le montant des salaires mentionnés dans le formulaire Cerfa (généré sur le site TeleRC), la salariée concernée ayant été en arrêt de travail.
Après une décision d’irrecevabilité de la Dreets, l’employeur n’avait pas recommencé la procédure de la rupture conventionnelle « depuis zéro ».
En effet, il s’était contenté d’apporter des explications à l’administration au sujet des salaires renseignés sur le formulaire Cerfa d’origine.
Selon la salariée, dont l’argumentation avait été retenue par le Conseil de prud’hommes de Troyes, l’employeur aurait dû recommencer la procédure et lui permettre de bénéficier d’un nouveau délai de rétractation.
Pour la Cour d’appel de Reims [8] :
- C’est à tort que le Conseil de prud’hommes a annulé l’homologation de la rupture conventionnelle dans la mesure où aucune formalité substantielle n’avait été violée et qu’aucun vice du consentement n’était démontré.
- L’employeur n’avait pas à recommencer la procédure après la décision d’irrecevabilité de la demande prononcée par l’administration.
Dans son arrêt du 19 juin 2024 [9], la Cour de cassation approuve la Cour d’appel :
« La cour d’appel, qui a constaté que l’autorité administrative avait déclaré irrecevable la demande d’homologation de la convention de rupture au regard du montant des salaires mentionné dans le formulaire de rupture et relevé que l’employeur n’avait pas recommencé la procédure après cette décision mais avait donné des explications à l’administration sans modifier les montants de salaires indiqués initialement, ces observations ne nécessitant pas une telle modification, en a exactement déduit que les formalités substantielles de la rupture avaient été respectées ».
Dans un précédent arrêt [10], la Cour de cassation avait déjà jugé qu’une décision de refus d’homologation d’une convention de rupture ne crée de droits acquis ni au profit des parties à la convention, ni au profit des tiers et peut, par suite, être légalement retirée par son auteur.
En l’occurrence, il avait été jugé que la Direccte (aujourd’hui : la Dreets), ayant retiré sa décision de refus d’homologation de la rupture après l’obtention d’informations complémentaires, avait pu ensuite valablement homologuer la convention de rupture conclue entre les parties.