L’actualité du travail dissimulé est sans conteste dominée ce mois-ci par la décision qui vient d’être rendue par la Chambre sociale de la Cour de cassation du 6 février 2013 (pourvoi n° 11-23738)
Cet arrêt était déjà remarquable pour sa partie qui concernait la validation des enregistrements réalisés sur un répondeur de téléphone portable qui ne constituaient pas un moyen déloyal de preuve, en l’occurrence pour contester un licenciement : c’était déjà une petite révolution.
Et voilà que le deuxième moyen de cet arrêt décidément novateur est relatif à la problématique bien connue du cumul de l’indemnité conventionnelle ou légale de licenciement et l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé que refusait obstinément d ’appliquer les tribunaux.
En effet, l’employeur faisait grief à l’arrêt confirmatif d’appel de l’avoir condamné à verser à son salarié abusivement licencié à la fois une indemnité conventionnelle de licenciement et une indemnité pour travail dissimulé, alors que les dispositions de l’article L. 8223-1 du Code du travail ne feraient, selon l’employeur, pas obstacle au cumul de l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé qu’elles prévoient avec les indemnités de toute nature auxquelles le salarié à droit en cas de rupture de la relation de travail, à la seule exception de l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement.
Rappelons que l’article L 8223-1 dispose depuis 2008 qu’ "En cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l’article L 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire".
C’était une position restrictive qui était retenue jusqu’alors par les juridictions sociales qui estimaient que l’indemnité pour travail dissimulé et une indemnité conventionnelle de licenciement n’étaient pas cumulables, seule la plus élevée des deux devant être allouée au salarié, sauf à violer l’article L. 8223-1 du Code du travail susvisé.
Un récent arrêt de la Cour de cassation du 24 octobre 2012 adoptait encore cette analyse très ferme.
La Chambre sociale ne l’entend cependant manifestement plus de cette oreille et sa formation plénière va refaire une lecture sans doute plus rigoureuse (pour les employeurs) de cet article L. 8223-1 du Code du travail, et nous indiquer qu’en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l’article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus par l’article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire et qu’au regard de la nature de sanction civile de cette indemnité, ces dispositions ne font pas obstacle au cumul de l’indemnité forfaitaire qu’elles prévoient avec les indemnités de toute nature auxquelles le salarié a droit en cas de rupture de la relation de travail.
Bref : les deux indemnités peuvent désormais se cumuler, ce qui constitue un revirement de jurisprudence pour le moins spectaculaire et inattendu, mais totalement justifié et que nombre de praticiens attendaient avec impatience !