Quelles sont les erreurs courantes à éviter dans les litiges commerciaux ?

Par Noémie Le Bouard, Avocat.

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Explorer : # litiges commerciaux # prévention des litiges # gestion des contrats # méthodes alternatives de résolution des conflits

Dans un monde commercial de plus en plus interconnecté et juridiquement complexe, les litiges commerciaux représentent une facette inévitable de la vie des entreprises. Ces conflits peuvent surgir de malentendus contractuels, de manquements aux obligations commerciales, ou encore de violations des droits de propriété intellectuelle.

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Lorsqu’ils ne sont pas gérés avec discernement, ces litiges peuvent avoir des conséquences économiques désastreuses, perturbant les opérations et infligeant de lourdes pertes financières. Cet article vise à équiper les entreprises d’une compréhension claire des erreurs courantes à éviter, s’appuyant sur des cas jurisprudentiels tels que l’arrêt [1], pour souligner l’importance de la vigilance et de la prévention dans la gestion des contrats commerciaux. En mettant en lumière les pièges fréquents et en proposant des stratégies pour les contourner, nous offrons aux entreprises les outils nécessaires pour sécuriser leurs transactions et préserver des relations commerciales saines et pérennes.

I. Introduction.

Les litiges commerciaux, souvent complexes, constituent une réalité incontournable du paysage entrepreneurial. Ils peuvent émaner de divergences sur les interprétations contractuelles, de manquements aux obligations commerciales ou de violations des droits de propriété intellectuelle. Ces différends, lorsqu’ils ne sont pas gérés avec acuité, peuvent entraîner des répercussions économiques significatives pour les entreprises concernées, allant de la perturbation des opérations quotidiennes à des dommages financiers considérables. Dans ce contexte, il est essentiel pour les entreprises de se doter d’une connaissance approfondie des erreurs habituelles afin de les esquiver. La jurisprudence, telle que celle illustrée par l’arrêt de la Cour de Cassation [2], souligne l’importance de la vigilance et de la prévention dans la gestion des contrats commerciaux pour éviter les litiges. La sensibilisation aux erreurs fréquentes est un levier stratégique pour les entreprises qui cherchent à sécuriser leurs transactions et à maintenir des relations commerciales saines et durables.

II. Manque de préparation.

Dans le cadre des litiges commerciaux, une préparation minutieuse est impérative, tant pour la compréhension des enjeux que pour la stratégie de défense ou de poursuite. Aborderons-nous donc les aspects suivants : la sous-estimation de la complexité des litiges, l’absence de documentation adéquate et la négligence dans la conservation des preuves.

A. Sous-estimation de la complexité des litiges.

Il est fréquent que les parties en litige sous-estiment la complexité inhérente à leur différend. Cette complexité peut résulter de la nature technique des questions en jeu, de la multiplicité des juridictions compétentes ou encore de la diversité des lois applicables. Dans l’arrêt rendu par la Cour de Cassation [3], la haute juridiction a souligné l’importance de l’appréhension complète des aspects techniques et juridiques du litige pour la détermination de la stratégie procédurale. L’absence d’une analyse approfondie peut mener à une évaluation erronée des risques et des opportunités, ce qui peut, in fine, compromettre la position de la partie concernée.

B. Absence de documentation adéquate.

La documentation joue un rôle crucial dans la substantiation des prétentions des parties. Une absence de documentation adéquate peut être préjudiciable à la démonstration de la réalité des faits allégués. En vertu de l’article 1353 du Code civil, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. La jurisprudence est constante à cet égard, comme en témoigne l’arrêt [4], où la cour a rappelé que l’insuffisance de preuve documentaire peut entraîner le rejet des demandes. Il est donc impératif de recueillir, de classer et de conserver avec rigueur tous les documents susceptibles de servir la cause.

C. Négligence dans la conservation des preuves.

La conservation des preuves est une étape souvent négligée qui peut s’avérer déterminante pour l’issue d’un litige. La loi impose des obligations spécifiques en matière de conservation des preuves, comme l’illustre l’article L123-22 du Code de commerce qui stipule que les commerçants doivent conserver les livres et documents commerciaux pour une durée de dix ans. La jurisprudence sanctionne sévèrement les manquements à ces obligations. Par exemple, dans un arrêt [5], la cour a souligné que la perte ou la destruction de documents pouvait être interprétée comme une tentative de dissimulation de preuves, influençant ainsi négativement la crédibilité de la partie fautive.
Une préparation adéquate pour un litige commercial est essentielle et doit être envisagée avec la plus grande rigueur. La sous-estimation de la complexité des litiges, l’absence de documentation adéquate et la négligence dans la conservation des preuves sont des écueils qui peuvent avoir des conséquences irréversibles sur l’issue d’un procès. Il est donc primordial pour les parties de s’entourer de conseils compétents et expérimentés afin de naviguer avec succès dans les méandres du droit commercial.

III. Mauvaise gestion de la communication.

Dans le cadre de la gestion des affaires commerciales, la communication occupe une place prépondérante et doit être maniée avec une rigueur exemplaire. Les manquements dans ce domaine peuvent entraîner des conséquences juridiques significatives, notamment en matière de litiges commerciaux.

A. Communications non sécurisées ou non professionnelles.

L’usage de moyens de communication non sécurisés ou non professionnels peut porter atteinte à l’intégrité et à la confidentialité des échanges. En effet, la jurisprudence regorge d’exemples où la négligence dans le choix des canaux de communication a été préjudiciable aux parties concernées. Par exemple, l’envoi d’informations sensibles par courrier électronique non crypté peut constituer une violation des obligations de sécurité stipulées dans le Règlement Général sur la Protection des Données [6], et engager la responsabilité de l’entreprise en cas de fuite de données.

B. Échec à maintenir la confidentialité.

Le devoir de confidentialité est un pilier de la relation d’affaires et sa violation peut entraîner des litiges. La divulgation d’informations confidentielles, intentionnelle ou accidentelle, est susceptible de constituer un manquement contractuel, voire un acte de concurrence déloyale. La jurisprudence est claire à cet égard, comme le souligne l’arrêt [7], où la Cour de cassation a sanctionné une entreprise pour avoir divulgué des informations confidentielles à des tiers.

C. Réactions émotionnelles et personnelles.

Dans le domaine des affaires, les réactions émotionnelles et personnelles doivent être évitées, car elles peuvent altérer la perception de professionnalisme et d’objectivité nécessaire à la conduite des négociations. Les décisions prises sous le coup de l’émotion sont souvent irréfléchies et peuvent être préjudiciables aux intérêts de l’entreprise. La jurisprudence administrative, par exemple, met en lumière l’importance de la retenue et de l’objectivité dans la prise de décision, comme en témoigne l’arrêt [8], où une décision prise sans le recul nécessaire a été annulée pour excès de pouvoir.

La gestion de la communication dans les affaires commerciales doit être effectuée avec la plus grande prudence. Les communications doivent être sécurisées, professionnelles et dépourvues de toute émotion personnelle. Le respect de la confidentialité doit être une priorité absolue. L’omission de ces principes peut entraîner des conséquences juridiques graves et nuire à la réputation et à la crédibilité de l’entreprise. Il est donc impératif de former les employés aux bonnes pratiques de communication et de mettre en place des politiques et des procédures adéquates pour prévenir tout manquement susceptible de conduire à un litige.

IV. Contrats incomplets ou ambigus.

A. Importance des clauses claires.

Dans le cadre juridique des contrats commerciaux, la clarté des clauses s’avère être d’une importance capitale. En effet, une rédaction précise et sans équivoque des termes contractuels est essentielle pour garantir la sécurité juridique des parties prenantes. Selon l’article 1156 du Code civil français, [9], il est impératif que les clauses contractuelles soient formulées de manière à ce que l’intention des parties soit clairement exprimée, évitant ainsi toute interprétation qui serait en contradiction avec le bon sens et l’usage établi.

La jurisprudence abonde en exemples où l’absence de clauses claires a conduit à des litiges prolongés. Par exemple, dans un arrêt rendu par la Cour de cassation [10], il a été souligné que l’ambiguïté des termes contractuels avait engendré une incertitude quant aux obligations réciproques des parties, ce qui a mené à un contentieux coûteux et évitable.

B. Conséquences des termes vagues ou mal définis.

Les conséquences des termes vagues ou mal définis dans les contrats peuvent être multiples et particulièrement préjudiciables. L’article 1188 du Code civil [11] stipule que le contrat doit être interprété selon la commune intention des parties plutôt que se cantonner à la lettre qui pourrait conduire à une signification différente de la volonté initiale. Lorsque les termes sont imprécis, cela ouvre la porte à des interprétations divergentes, pouvant aboutir à des décisions de justice défavorables pour l’une ou l’autre des parties, comme l’illustre l’affaire [12], où la cour a dû trancher sur la base d’une clause mal définie, entraînant des conséquences financières importantes pour le débiteur.

C. Nécessité de révisions régulières des contrats.

La dynamique des affaires et l’évolution constante des cadres légaux rendent impérative la révision périodique des contrats. Cette pratique permet d’adapter les termes contractuels aux changements législatifs, jurisprudentiels et économiques. L’article 1195 du Code civil [13] introduit la théorie de l’imprévision, permettant à une partie de demander une renégociation du contrat si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l’exécution excessivement onéreuse. Cela souligne l’importance de prévoir des mécanismes de révision dans les contrats pour pallier aux éventuelles évolutions qui pourraient affecter l’équilibre contractuel, comme l’a démontré l’arrêt [14], où la cour a validé la révision d’un contrat en raison de l’évolution imprévisible du marché qui avait bouleversé l’économie du contrat initial.

La rédaction méticuleuse des contrats avec des clauses claires, la prise en compte des conséquences potentielles de termes vagues ou mal définis, et l’incorporation de clauses de révision régulière sont des pratiques juridiques essentielles pour assurer la pérennité et l’efficacité des accords contractuels. Ces éléments constituent le socle d’une relation contractuelle saine et équilibrée, capable de résister aux aléas du temps et aux évolutions du droit.

V. Négliger les méthodes alternatives de résolution des conflits.

A. Avantages de la médiation et de l’arbitrage.

La médiation et l’arbitrage représentent des alternatives pragmatiques aux procédures judiciaires traditionnelles, offrant des avantages significatifs en termes de temps, de coûts et de confidentialité. La médiation, en particulier, permet aux parties de parvenir à une solution mutuellement acceptable sous la guidance d’un médiateur neutre, souvent évitant ainsi l’acrimonie qui peut accompagner un litige prolongé. L’arbitrage, quant à lui, offre une procédure plus formelle mais toujours moins rigide que le système judiciaire, avec l’avantage supplémentaire de pouvoir choisir des arbitres spécialisés dans le domaine concerné.

B. Coûts et temps associés aux procédures judiciaires.

Les procédures judiciaires peuvent être onéreuses et chronophages, avec des coûts directs et indirects qui s’accumulent rapidement. Les frais de justice, les honoraires d’avocats, et le temps consacré à la préparation et à l’attente des décisions judiciaires peuvent peser lourdement sur les ressources financières et opérationnelles d’une entreprise.

C. Choix de la bonne méthode en fonction du litige.

Le choix entre médiation, arbitrage et procédure judiciaire dépend de la nature du litige, des relations entre les parties et de leurs objectifs respectifs. La médiation peut être préférable lorsque les parties souhaitent maintenir ou restaurer leur relation commerciale, tandis que l’arbitrage peut être approprié pour des questions techniques nécessitant une expertise spécifique. Les procédures judiciaires peuvent être inévitables en cas de non-respect des lois ou de violations contractuelles graves.

Il est donc essentiel de ne pas négliger les méthodes alternatives de résolution des conflits, car elles peuvent offrir des solutions plus rapides, moins coûteuses et plus adaptées aux besoins spécifiques des parties en litige. Une évaluation soignée des options disponibles et de leurs implications potentielles est conseillée pour tout différend commercial.

VI. Erreurs dans la procédure judiciaire.

Dans le cadre de la procédure judiciaire, il est impératif de porter une attention méticuleuse à la conformité des actions entreprises, afin de prévenir toute nullité ou vice de procédure susceptible d’entraîner des conséquences préjudiciables pour les parties concernées.

A. Délais de prescription non respectés.

La question des délais de prescription est régie par les dispositions du Code civil, notamment celles des articles 2224 et suivants, qui déterminent les périodes au-delà desquelles les actions en justice ne sont plus recevables. Une erreur fréquente dans la procédure judiciaire est le dépôt d’une action au-delà de ces délais, ce qui peut entraîner l’irrecevabilité de la demande. Par exemple, l’article 2224 du Code civil [15] dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. Il est donc crucial de veiller à l’engagement des actions dans les délais impartis pour éviter leur prescription.

B. Mauvaise identification de la juridiction compétente.

L’attribution de compétence aux juridictions est un principe fondamental du droit processuel, énoncé notamment dans le Code de procédure civile. Une méprise quant à la juridiction compétente peut résulter en un déclinatoire de compétence, voire en une annulation de la procédure. L’article 42 du Code de procédure civile [16] précise que la compétence est déterminée par la nature de l’affaire. Il est donc essentiel de bien identifier la nature du litige pour saisir la juridiction adéquate, qu’il s’agisse du tribunal de grande instance, du tribunal de commerce, du conseil de prud’hommes, ou d’une autre juridiction spécialisée.

C. Incompréhension des procédures et des formalités légales.

Les procédures judiciaires sont encadrées par des règles strictes, dont la méconnaissance peut entraîner des erreurs préjudiciables. Par exemple, l’article 56 du Code de procédure civile [17] stipule que l’assignation doit contenir certaines mentions obligatoires, sous peine de nullité. De même, l’article 748-1 du même code [18] établit les règles relatives à la communication électronique des actes. Une incompréhension des exigences formelles, telles que les modalités de signification des actes, les délais de convocation, ou les formalités de dépôt des pièces, peut conduire à des irrégularités susceptibles d’annuler la procédure ou de retarder le procès.

Il est donc primordial pour les justiciables, et les avocats les représentant, de maîtriser ces aspects procéduraux pour assurer la validité et l’efficacité de leurs démarches judiciaires. La vigilance et l’expertise juridique sont des atouts indispensables pour naviguer avec précision dans le labyrinthe procédural et éviter les écueils qui pourraient compromettre le droit à un procès équitable.

VII. Mauvaise gestion des relations avec les avocats et conseillers.

La gestion des relations avec les avocats et conseillers juridiques est un aspect crucial dans la conduite des affaires juridiques d’une entreprise. Une mauvaise gestion de ces relations peut entraîner des conséquences désastreuses, notamment dans le cadre de litiges commerciaux.

A. Choix de l’avocat spécialisé.

Le choix d’un avocat ne doit pas être laissé au hasard. Il est essentiel de sélectionner un professionnel du droit spécialisé dans le domaine concerné par le litige. La jurisprudence regorge d’exemples où le choix d’un avocat non spécialisé a été préjudiciable à l’issue d’une affaire, comme en témoigne l’affaire [19], où la Cour de cassation a souligné l’importance de l’expertise de l’avocat dans le domaine du litige. Un avocat spécialisé apportera non seulement une connaissance approfondie des subtilités juridiques spécifiques mais aussi une expérience pratique dans la gestion des cas similaires.

B. Communication et collaboration efficaces avec les conseillers.

Une communication ouverte et régulière avec les conseillers juridiques est indispensable. Cela implique de fournir toutes les informations nécessaires à la compréhension du dossier et à la défense des intérêts de l’entreprise. L’article 22 du Code de procédure civile [20] stipule que chaque partie doit apporter son concours à la justice. Cela sous-entend une collaboration active entre le client et son avocat, qui doit être basée sur la confiance et la transparence.

C. Comprendre et suivre les conseils juridiques.

Il est impératif que les clients comprennent les conseils qui leur sont donnés et les suivent. Les décisions de justice montrent que les pertes de chance de gagner un procès peuvent souvent être attribuées à un manque de suivi des recommandations de l’avocat, comme illustré par l’arrêt [21], où la cour a sanctionné une partie pour ne pas avoir suivi les conseils de son avocat. Il est donc crucial de prendre en considération les recommandations de son conseiller juridique et de les mettre en œuvre de manière appropriée.
La gestion des relations avec les avocats et conseillers juridiques doit être menée avec rigueur et professionnalisme. Un choix judicieux de l’avocat, une communication efficace et le suivi des conseils juridiques sont des éléments déterminants pour la protection des intérêts de l’entreprise dans le cadre de litiges commerciaux. Ces relations sont le socle sur lequel repose la stratégie de défense et, par conséquent, elles doivent être traitées avec la plus grande attention.

VIII. Sous-estimation des coûts et des ressources.

A. Budget pour les litiges.

Dans le cadre de la gestion d’entreprise, l’allocation d’un budget spécifique pour les litiges est souvent reléguée au second plan, considérée comme une dépense non stratégique. Cependant, cette perception peut s’avérer être une erreur coûteuse. En effet, la jurisprudence récente souligne l’importance d’une provision adéquate pour les litiges potentiels. À titre d’exemple, l’arrêt rendu par la Cour de Cassation [22] illustre les conséquences financières d’une sous-estimation des risques litigieux. Il est donc impératif pour les entreprises de revoir leur approche budgétaire et d’intégrer une ligne de provision pour les litiges, en se basant sur une analyse des risques juridiques et des antécédents de contentieux.

B. Impact sur les ressources internes.

La gestion des litiges ne se limite pas à une question de budget ; elle affecte également les ressources internes de l’entreprise. Les litiges en cours exigent souvent l’implication de plusieurs départements, notamment les ressources humaines, la comptabilité et le service juridique. Cette mobilisation peut entraîner une déviation des ressources de leurs fonctions principales, impactant ainsi la productivité globale de l’entreprise. La Cour de Cassation a mis en lumière cette problématique dans un arrêt [23], où l’absorption excessive de temps par la gestion d’un litige a été reconnue comme un facteur perturbateur significatif. Il est donc essentiel d’évaluer l’impact des litiges sur les ressources internes et de mettre en place des stratégies pour minimiser ces perturbations.

C. Planification financière et allocation des ressources.

La planification financière et l’allocation des ressources sont des composantes cruciales de la stratégie d’entreprise, particulièrement en ce qui concerne la gestion des litiges. Une entreprise doit être en mesure d’anticiper les coûts liés aux litiges et d’allouer les ressources nécessaires pour y faire face efficacement. La sous-estimation des coûts peut mener à des situations où l’entreprise se trouve dans l’incapacité de couvrir les frais de justice, comme l’indique l’arrêt [24], où une provision insuffisante a conduit à un déséquilibre financier. Pour éviter de telles conséquences, il est conseillé d’intégrer une analyse des risques litigieux dans la planification financière et de prévoir une allocation de ressources qui reflète la réalité des risques encourus.

La sous-estimation des coûts et des ressources nécessaires pour la gestion des litiges peut avoir des répercussions graves sur la santé financière et opérationnelle d’une entreprise. Il est donc primordial d’adopter une approche proactive et stratégique dans la planification budgétaire, l’évaluation de l’impact sur les ressources internes et l’allocation des ressources pour la gestion des litiges. Cela permettra non seulement de se prémunir contre les risques financiers, mais aussi de maintenir l’intégrité et la performance de l’entreprise à long terme.

IX. Ignorer les aspects internationaux des litiges commerciaux.

A. Complexités des litiges transfrontaliers.

Dans le cadre de la mondialisation économique, les entreprises sont de plus en plus confrontées à des litiges transfrontaliers dont la complexité ne cesse de croître. Ces contentieux se caractérisent par une pluralité de systèmes juridiques et de normes applicables, ce qui requiert une analyse rigoureuse des règles de conflit de lois ainsi que des règles de compétence internationale. À titre illustratif, le Règlement Bruxelles I bis [25] établit les règles de compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale au sein de l’Union européenne. Cependant, en dehors de l’UE, les entreprises doivent se référer à des conventions internationales telles que la Convention de New York sur la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères [26], ou à des principes de droit international privé propres à chaque pays.

B. Importance de la connaissance des lois internationales.

La connaissance des lois internationales est primordiale dans la gestion des litiges commerciaux internationaux. Elle permet non seulement de comprendre les droits et obligations des parties dans différents territoires, mais aussi de déterminer la loi applicable et la juridiction compétente. Par exemple, la Convention de Vienne sur les contrats de vente internationale de marchandises [27] fournit un cadre juridique pour les transactions commerciales internationales, mais sa portée est limitée aux États parties. Les avocats doivent donc être vigilants quant à l’incorporation de clauses de choix de loi et de juridiction dans les contrats internationaux pour éviter des incertitudes juridiques et des litiges prolongés.

C. Gestion des différences culturelles et juridiques.

La gestion des différences culturelles et juridiques est un autre défi majeur dans les litiges commerciaux internationaux. Les avocats doivent non seulement maîtriser les aspects juridiques, mais aussi être sensibles aux nuances culturelles qui peuvent influencer la négociation, la médiation et le règlement des litiges. La diversité des pratiques commerciales et des attentes peut entraîner des malentendus et des conflits. Par conséquent, une approche interculturelle et une communication efficace sont essentielles pour la résolution des litiges. Les avocats doivent également être conscients des différences dans les procédures judiciaires et les pratiques de preuve, qui peuvent varier considérablement d’un pays à l’autre.

L’ignorance des aspects internationaux des litiges commerciaux peut entraîner des conséquences désastreuses pour les entreprises, telles que des jugements inapplicables, des sanctions financières, et une perte de réputation. Il est donc impératif pour les praticiens du droit de développer une expertise en droit international privé et de se tenir informés des évolutions législatives et jurisprudentielles pour naviguer avec succès dans le labyrinthe des litiges commerciaux internationaux.

X. Manque de stratégie à long terme.

A. Vision à court terme dans la gestion des litiges.

Une approche myope des litiges commerciaux, concentrée exclusivement sur des résultats immédiats, peut s’avérer préjudiciable à la pérennité de l’entreprise. Les décisions prises dans l’urgence, sans considération pour leurs répercussions à long terme, peuvent entraîner des conséquences inattendues, telles que la détérioration des relations d’affaires ou la création de précédents juridiques défavorables. Il est donc crucial d’adopter une vision stratégique, en évaluant les implications de chaque action en matière de litige sur l’avenir de l’entreprise.

B. Importance d’une stratégie globale de résolution des conflits.

L’élaboration d’une stratégie globale de résolution des conflits est essentielle pour naviguer efficacement dans le paysage complexe des litiges commerciaux. Cette stratégie doit inclure une analyse approfondie des risques et des avantages de différentes options de résolution, ainsi que la mise en place de politiques et de procédures visant à prévenir les litiges. La jurisprudence montre que les tribunaux valorisent les efforts de prévention et de gestion proactive des conflits, comme en témoigne l’arrêt [28], qui souligne l’importance de la bonne foi et de la prévention dans la gestion contractuelle.

C. Préparation pour l’après-litige et les relations futures.

La gestion des litiges ne s’achève pas à la résolution du conflit en cours ; elle doit également prendre en compte la préparation pour l’après-litige et les relations futures. Les entreprises doivent envisager les effets à long terme de la résolution des litiges sur leur réputation et leurs relations commerciales. La mise en place de mécanismes de retour d’expérience et d’amélioration continue est donc indispensable pour tirer les leçons des litiges passés et renforcer les stratégies de prévention.

XI. Conclusion.

En récapitulatif, la gestion efficace des litiges commerciaux exige une vigilance constante et une stratégie judicieuse. Les entreprises doivent éviter les erreurs courantes telles que la négligence dans la préparation et la documentation, la mauvaise gestion de la communication, et la rédaction imprécise de contrats. Il est essentiel d’adopter une approche proactive, en privilégiant la médiation et l’arbitrage comme alternatives aux procédures judiciaires coûteuses et en veillant à une collaboration étroite avec des conseillers juridiques compétents.

La sous-estimation des coûts et des ressources nécessaires pour les litiges peut compromettre la stabilité financière d’une entreprise, tandis que l’ignorance des aspects internationaux peut entraîner des complications majeures dans un contexte globalisé. Enfin, une vision à long terme est cruciale, non seulement pour résoudre les conflits présents mais aussi pour préparer l’entreprise aux défis futurs, en tirant des leçons des expériences passées et en mettant en place des politiques de prévention des litiges. C’est en intégrant ces principes que les entreprises pourront minimiser les risques et favoriser leur croissance et leur pérennité.

Noémie Le Bouard, Avocat
Barreau de Versailles
Le Bouard Avocats
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Notes de l'article:

[1Cass. Com., 5 juin 2012, n°11-15237.

[2Cass. Com., 5 juin 2012, n°11-15237.

[3Cass. Com., 23 oct. 2019, n°18-20090.

[4Cass. Civ. 1re, 7 janv. 2015, n°13-27243.

[5Cass. Com., 28 mai 2014, n°13-16679.

[6RGPD, art. 32.

[7Cass. com., 5 janv. 2016, n°14-16942.

[8CE, 10 avril 2019, n° 425981.

[9Code civil, art. 1156.

[10Cass. Com., 4 janv. 2005, n°02-19602.

[11Code civil, art. 1188.

[12Cass. Civ. 3e, 9 juill. 2008, n°07-14367.

[13Code civil, art. 1195.

[14Cass. Com., 3 mai 2012, n°11-10735.

[15Code civil, art. 2224.

[16Code proc. civ., art. 42.

[17Code proc. civ., art. 56.

[18Code proc. civ., art. 748-1.

[19Cass. Com., 5 janv. 2010, n°08-17883.

[20Code proc. civ., art. 22.

[21Cass. Civ. 2, 14 juin 2012, n°11-18753.

[22Cass. Com., 22 sept. 2020, n°18-23607.

[23Cass. Soc., 11 janv. 2017, n°15-28493.

[24Cass. Civ. 3e, 9 déc. 2015, n°14-29785.

[25Règlement (UE) n°1215/2012.

[26Convention de New York, 10 juin 1958.

[27Convention de Vienne, 11 avril 1980.

[28Cass. Com., 4 janv. 2005, n°02-19638.

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