Elle apporte ainsi des clarifications essentielles sur leur mise en application en conformité au droit civil.
Si le principe de ces clauses a effectivement été validé par la Cour de cassation c’est au regard de la rédaction de la clause qui, dans le pacte d’associés soumis à la cour, était particulièrement clair et explicite quant à ses modalités de mise en œuvre.
Rappelons que le pacte d’associés permet, en complément des statuts, de définir des règles claires sur la gouvernance, les modalités d’entrée et de sortie des associés et la résolution des litiges.
Il peut également contenir des clauses spécifiques entre associés afin notamment de prévoir les modalités de sortie en cas de conflit.
L’objectif étant principalement d’éviter un contentieux et de prévoir amiablement le règlement du différend.
Les « clauses américaines », également appelé clause de « buy or sell » ou clauses « shotgun », offrent la possibilité pour les associés de prévoir une sortie négociée et d’éviter les blocages.
Cette clause permet à un associé de proposer à l’autre de lui céder ses parts sociales à un prix déterminé. Si l’autre associé refuse l’offre, il est alors tenu de vendre ses parts au même prix fixé que celui fixé initialement.
La fixation unilatérale du prix par l’un des associés est encadrée par la réciprocité de l’option.
Dans le cas soumis à la Cour de cassation, deux associés d’une SARL, l’un détenteur de 60% des parts sociales et, l’autre, de 40%, avaient signé un pacte d’associés dans lequel était insérée une clause dite « clause américaine » qui prévoyait qu’en cas de désaccord grave paralysant la société, chaque associé pouvait imposer à l’autre :
- Soit de vendre ses parts au prix fixé par l’initiateur
- Soit d’acheter des parts de l’initiateur à ce même prix.
Un des associés a activé la clause en proposant 40 000€ pour ses parts (avec inversion possible à 60 000€), la Cour d’appel puis la Cour de cassation ont validé ce mécanisme.
Dans sa décision du 12 février 2025, la Cour de cassation a considéré que :
« Après avoir énoncé qu’en application de l’article 15 91 du Code civil, le prix de vente doit être déterminable et désigné par les parties puis rappeler les termes de l’article cinq du pacte d’associé, l’arrêt retient que c’est en vertu d’un engagement synallagmatique librement consenti des associés pour régler une situation de blocage, que la vente a lieu. Il ajoute que les modalités prévues pour la mise en œuvre de la clause permettre la détermination du prix si la procédure a été respecté et qu’une offre remplissant les conditions prévues par le pacte d’associé à étape valablement faite, en ce que le prix est déterminable à partir du prix proposé par le potentiel vendeur qui sert de référence aux bénéficiaires de l’offre qui choisirait finalement de ne pas racheter les titres du premier et qui, dès lors, s’engage à vendre ses propres titres aux conditions de prix fixés dans l’offre de vente, que lui a faite l’autre associé ».
« De ses dénonciations et appréciations, la cour d’appel, qui a par ailleurs constaté que le déclenchement de la clause été soumis à des conditions objectives, a déduit à bon droit que le mécanisme instauré par la clause d’offres alternative ne laissait pas la fixation du prix à la volonté d’une seule des parties, de sorte que la vente des parfaite dès l’exécution par celle-ci de leurs engagements résultant du pacte d’associés ».
Pour synthétiser, la cour a estimé que le prix devenait objectivement déterminable par le jeu de la clause elle-même :
- L’offre initiale fixe un prix de référence
- L’option inverse crée un effet miroir contraignant
- Ce mécanisme est conforme aux dispositions de l’article 1591 du Code civil sur la détermination du prix.
Il est précisé dans le pacte d’associé que le déclenchement de la clause nécessite de démontrer l’existence d’un désaccord grave et persistant entre les deux associés, susceptible d’entraîner une paralysie dans le fonctionnement de la société.
Cette appréciation au regard des circonstances de cette affaire a nécessairement cristallisé les débats au sein des juridictions.
La chambre commerciale a estimé que cette paralysie au sein de la société était avérée et matérialisée par :
- Un blocage des résolutions lors d’une assemblée générale
- Un conflit sur le transfert du siège social
- Un dépôt de plainte entre associés.
La Cour de cassation confirme l’appréciation des juges du fond et considère donc que la paralysie entre associés était démontrée et justifiée pour permettre l’application de la clause. Encore fallait-il vérifier que la clause avait été appliquée conformément aux termes du pacte. Ce qui était le cas en l’espèce.
La cour a rejeté la mauvaise foi soulevée par l’associé non-gérant qui invoquait son absence d’information suffisante sur la situation économique et financière de la société.
Elle a considéré que la clause ne prévoyait aucune condition tenant à des vérifications quelconques et que ces éléments n’étaient pas nécessaires à l’application de la clause.
Cette décision illustre une nouvelle fois l’importance de la rédaction des clauses dans les pactes d’associés tant sur les conditions de mise en œuvre que sur ses modalités.
Il est rappelé par ailleurs que pour éviter un contentieux, il est particulièrement opportun de prévoir également une clause de médiation préalable.