Les agents non-titulaires - de l’Etat comme des collectivités territoriales - sont en principe assujettis au régime général de la sécurité sociale. Comme chacun sait, cette affiliation permet de bénéficier de diverses prestations, parmi lesquelles la perception d’une retraite.
Mais ces agents bénéficient également, à titre obligatoire, d’un régime de retraite complémentaire dénommé Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’Etat et des collectivités publiques (Ircantec), dont le fonctionnement est principalement fixé par décret [1]. Concrètement, il s’agit d’un système permettant aux agents contractuels de droit public de cumuler des points tout au long de leur carrière en fonction des services effectués, lesquels servent ensuite de base au calcul de leur droit à pension.
L’Ircantec constitue toutefois un mécanisme subsidiaire. En effet, pour bénéficier de ce régime, les agents contractuels de droit public ne doivent pas être affiliés « pour les mêmes services », à un autre régime légal et obligatoire de retraite. Dit autrement, lorsqu’un agent contractuel est titularisé, il ne peut en principe plus rester affilié à l’Ircantec.
Mais qu’en est-il lorsqu’un agent titularisé conserve, par ailleurs, une activité d’agent contractuel exercée concomitamment à son activité principale ? Doit-il rester soumis à l’Ircantec s’agissant uniquement de cette activité accessoire ? Cette dernière question s’avère en pratique décisive pour de nombreux agents publics. Elle a, en tout cas, fait l’objet d’utiles précisions jurisprudentielles.
En effet, dès 2009, la Cour de cassation a répondu par l’affirmative en censurant un arrêt d’appel ayant refusé d’accorder le bénéfice de l’Ircantec à un musicien exerçant, en sus de son activité de titulaire au sein de l’école nationale de musique du Raincy, une activité de contractuel pour le compte de l’orchestre de Paris [2].
Solidement établie et fréquemment appliquée par les juridictions du fond, cette jurisprudence a été confirmée en 2014 par la Cour de cassation au sujet d’un agent exerçant, outre son activité de professeur territorial d’enseignement artistique employé par la communauté d’agglomération de la Plaine centrale du Val-de-Marne, une activité de professeur non-titulaire au sein du conservatoire du 11ème arrondissement de la Ville de Paris [3].
C’est dans ce sillage que s’inscrit le récent jugement prononcé par le tribunal judiciaire de Paris le 3 novembre 2020 (RG n° 19/19695), au terme duquel la Ville de Paris a été condamnée à procéder à l’affiliation à l’Ircantec d’une professeure d’enseignement artistique s’agissant de l’activité qu’elle avait exercée pour le compte d’un conservatoire municipal parisien.
En l’occurrence, l’intéressée avait été recrutée en 1982 par la Ville de Paris en qualité de professeur d’enseignement artistique non-titulaire au sein du conservatoire du 16ème arrondissement. Elle avait, à ce titre, été affiliée par la ville au régime complémentaire de l’Ircantec en sus de son affiliation au régime général. Puis, en 1994, l’intéressée a été titularisée par la commune de Levallois-Perret en qualité d’assistante territoriale d’enseignement artistique titulaire, tout en conservant son activité, à titre accessoire, au bénéfice du conservatoire du 16ème arrondissement de Paris.
A la suite de cette titularisation, la Ville de Paris a toutefois cessé d’affilier son agent à l’Ircantec, ce qu’elle a contesté en 2016 par une demande tendant à la régularisation de son affiliation au régime de retraite de l’Ircantec depuis 1994. La Ville de Paris n’a pas donné suite à cette demande, au motif de l’affiliation de l’intéressée à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) par la commune de Levallois-Perret.
C’est précisément ce raisonnement qu’a censuré le tribunal judiciaire de Paris au motif, notamment, que l’affiliation de l’agent à la CNRACL par la commune de Levallois-Perret ne pouvait être regardée comme effectuée « pour les mêmes services » que ceux effectués au bénéfice de la Ville de Paris.
En conclusion, il appartient donc aux administrations d’affilier à l’Ircantec leurs agents au titre des activités accessoires réalisées pour leur compte, et ce indépendamment de l’activité qu’ils exercent à titre principal en qualité de titulaire.
A défaut, ces agents disposent toujours de la possibilité de saisir le tribunal judiciaire dans le ressort duquel se trouve leur domicile.
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