Les articles L227-16, alinéa 1er, et L227-19 alinéa 2, du Code de commerce portent-ils atteinte au droit de propriété ?

Par Natal Yitcko, Avocat.

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Explorer : # droit de propriété # exclusion d'associé # société par actions simplifiée # question prioritaire de constitutionnalité

Un récent arrêt de la Cour de cassation du 12 octobre 2022 a renvoyé les questions au Conseil Constitutionnel.
Les questions posées présentent un caractère sérieux et une décision du Conseil Constitutionnel permettra de trancher et de dire si les articles L227-16, alinéa 1er, et L227-19, alinéa 2 du Code de commerce seraient de nature à porter atteinte au droit de propriété et à ses conditions d’exercice, garantis par les articles 17 et 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789.

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Dans cette affaire, un salarié et associé d’une SAS avait donné sa démission. Or, un article des statuts prévoyait que la rupture du contrat de travail permettait au président de la société de convoquer l’assemblée générale extraordinaire des associées afin qu’elle se prononce sur l’exclusion de l’associé.

L’associé exclu par la suite a formé une QPC (Question prioritaire de Constitutionnalité) au sujet des deux textes du Code de Commerce rendant possible la cession forcée des titres d’un associé : les articles L227-16 et L227-19 du Code de Commerce, ce dernier ayant été modifié par la loi n°2019-744 du 19 juillet 2019.

La QPC formée par l’associé exclu est jugée sérieuse par la Cour de Cassation qui l’a transmis au Conseil Constitutionnel.

L’on fera remarquer que les dispositions contestées sont d’une part le premier alinéa de l’article L227-16 du Code de commerce qui rappelons le, dispose, que dans les sociétés par actions simplifiées, « dans les conditions qu’ils déterminent, les statuts peuvent prévoir qu’un associé peut être tenu de céder ses actions », et d’autre part, le second alinéa de l’article L227-19 du même code, dans sa rédaction issue de la loi n°2019-744 du 19 juillet 2019 qui dispose que

« les clauses statutaires mentionnées aux articles L227-14 et L227-16 ne peuvent être adoptées ou modifiées que par une décision prise collectivement par les associés dans les conditions et formes prévues par les statuts ».

En l’espèce, ces dispositions étaient applicables au litige, la décision d’exclusion de l’associé ayant été prise en application d’une clause d’exclusion stipulée dans les statuts de la Société par actions simplifiée dont il était salarié et associé, laquelle a été adoptée sur le fondement de l’article L227-16 du Code de commerce et modifiée à la majorité prévue par les statuts, ainsi que le permet comme déjà indiqué plus haut l’article L227-19 du Code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi n°2019-744 du 19 juillet 2019.

Les questions renvoyées au Conseil Constitutionnel présentent un caractère sérieux en ce que, l’article L227-16, alinéa 1er du Code de commerce a pour conséquence de permettre à une société par actions simplifiée de priver, en exécution d’une clause statutaire d’exclusion, un associé de la propriété de ses droits sociaux sans que cette privation repose sur une cause d’utilité publique, et en ce que, il résulte de la combinaison de ce texte avec l’article L227-19, alinéa 2, de ce code, dans sa rédaction issue de la loi n°2019-744 du 19 juillet 2019, qu’une société par actions simplifiée peut désormais, par une décision non prise à l’unanimité de ses membres, priver un associé de la propriété de ses droits sociaux sans qu’il ait consenti par avance à sa possible exclusion dans de telles conditions, de sorte que ces dispositions seraient de nature à porter atteinte au droit de propriété et à ses conditions d’exercice, garantis par les articles 17 et 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789.

Ces dernières dispositions modifiées, qui suppriment l’exigence d’unanimité pour l’adoption ou la modification d’une clause statutaire d’exclusion dans les sociétés par actions simplifiées créées antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi n°2019-744 du 19 juillet 2019.

La décision du Conseil Constitutionnel sur question de la validité de telles clauses au regard du droit de propriété qui n’a de cesse d’agiter la doctrine est fort attendue et permettra de trancher définitivement le débat.

Natal Yitcko
Avocat au Barreau de Paris
Société d’avocats Chatel et Associés
avocats chez cabinetchatel.fr

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