Avez-vous bien affiché votre permis de construire ?

Par Christophe Buffet, Avocat.

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Explorer : # permis de construire # affichage # recours contentieux # urbanisme

Dans le monde de la construction, le permis de construire est un document essentiel qui donne l’autorisation de réaliser des travaux. Cependant, l’obtention de ce permis n’est que la première étape du processus. Une fois le permis en main, il est important de respecter certaines procédures, dont l’une des plus cruciales est l’affichage du permis de construire.
Cet article se propose d’explorer l’importance de cet affichage et le processus à suivre pour le mettre en place correctement.

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I. L’importance de l’affichage du permis de construire et ses effets.

A) Pourquoi un affichage du permis de construire ?

L’affichage du permis de construire est une étape cruciale dans le processus de construction. Il s’agit d’une obligation légale qui permet d’informer le public de votre intention de construire.

Le panneau d’affichage doit être installé de telle sorte que les renseignements qu’il contient demeurent lisibles de la voie publique ou des espaces ouverts au public pendant toute la durée du chantier.

Cette obligation d’affichage est prévue par cet article du Code de l’urbanisme, qui évoque aussi l’affichage en mairie :

Article R424-15 du Code de l’urbanisme :

«  Mention du permis explicite ou tacite ou de la déclaration préalable doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l’extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l’arrêté ou dès la date à laquelle le permis tacite ou la décision de non-opposition à la déclaration préalable est acquis et pendant toute la durée du chantier. Cet affichage n’est pas obligatoire pour les déclarations préalables portant sur une coupe ou un abattage d’arbres situés en dehors des secteurs urbanisés.
Cet affichage mentionne également l’obligation, prévue à peine d’irrecevabilité par l’article R600-1, de notifier tout recours administratif ou tout recours contentieux à l’auteur de la décision et au bénéficiaire du permis ou de la décision prise sur la déclaration préalable.
En outre, dans les huit jours de la délivrance expresse ou tacite du permis ou de la décision de non-opposition à la déclaration préalable, un extrait du permis ou de la déclaration, le cas échéant accompagné de la décision explicite de l’autorité administrative mentionnée au II de l’article L632-2 du Code du patrimoine, est publié par voie d’affichage à la mairie pendant deux mois. Lorsqu’une dérogation ou une adaptation mineure est accordée, l’affichage en mairie porte sur l’intégralité de l’arrêté. L’exécution de la formalité d’affichage en mairie fait l’objet d’une mention au registre chronologique des actes de publication et de notification des arrêtés du maire prévu à l’article R2122-7 du Code général des collectivités territoriales.
La publication par voie d’affichage en mairie prévue au troisième alinéa peut être remplacée par une publication par voie électronique sur le site internet de la commune.
Un arrêté du ministre chargé de l’urbanisme règle le contenu et les formes de l’affichage
 ».

C’est à partir de cet affichage que commence le délai de deux mois pendant lequel les tiers peuvent contester la validité de votre permis :

Article R600-2 du Code de l’urbanisme :

« Le délai de recours contentieux à l’encontre d’une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d’un permis de construire, d’aménager ou de démolir court à l’égard des tiers à compter du premier jour d’une période continue de deux mois d’affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l’article R424-15 ».

Notons toutefois que le délai de recours est aussi limité par cet article à un délai de six mois à compter de l’achèvement de la construction ou de l’aménagement :

Article R600-3 du Code de l’urbanisme :

« Aucune action en vue de l’annulation d’un permis de construire ou d’aménager ou d’une décision de non-opposition à une déclaration préalable n’est recevable à l’expiration d’un délai de six mois à compter de l’achèvement de la construction ou de l’aménagement.
Sauf preuve contraire, la date de cet achèvement est celle de la réception de la déclaration d’achèvement mentionnée à l’article R462-1
  ».

B) La visibilité de l’affichage.

L’affichage doit être visible et lisible depuis la voie publique pendant toute la durée du chantier. Il doit mentionner le nom du propriétaire, la nature des travaux, la superficie du terrain, ainsi que la mention du droit de recours des tiers.

Un affichage trop discret n’est pas valable et ne fait pas courir le délai de recours :

« Considérant qu’il est constant que, si le permis litigieux a été affiché pendant plus de deux mois sur le terrain, la seule affiche était placée à l’opposé de l’accès à la construction situé sur la voie communale dite "ruelle des Chocas", en bordure d’une voie privée appartenant à l’Office national des forêts qui, bien qu’ouverte à la circulation publique, n’est pas une voie empruntée habituellement par les voisins de la salle de culte ; que, par suite, cette route forestière ne peut être regardée comme une voie publique au sens des dispositions précitées ; qu’ainsi cet affichage irrégulier n’a pu faire courir le délai de recours contentieux pour les tiers ; que c’est à bon droit que le tribunal administratif a estimé que la demande formée par M. X, voisin de la construction autorisée et domicilié ruelle des Chocas n’était pas tardive »  [1].

II. Le Processus d’affichage du permis de construire.

A) Le contenu de l’affichage.

Avant d’afficher votre permis, vous devez vous assurer que vous avez tous les éléments nécessaires. Cela comprend le panneau d’affichage réglementaire, qui doit être de dimensions suffisantes (au moins 80 cm), et les informations à afficher, qui doivent être précises et à jour.

Ces mentions sont : le nom, la raison sociale ou la dénomination sociale du bénéficiaire, le nom de l’architecte auteur du projet architectural, la date de délivrance, le numéro du permis, la nature du projet et la superficie du terrain ainsi que l’adresse de la mairie où le dossier peut être consulté.

Il faut aussi mentionner, en fonction de la nature du projet :

a) Si le projet prévoit des constructions, la surface de plancher autorisée ainsi que la hauteur de la ou des constructions, exprimée en mètres par rapport au sol naturel
b) Si le projet porte sur un lotissement, le nombre maximum de lots prévus
c) Si le projet porte sur un terrain de camping ou un parc résidentiel de loisirs, le nombre total d’emplacements et, s’il y a lieu, le nombre d’emplacements réservés à des habitations légères de loisirs
d) Si le projet prévoit des démolitions, la surface du ou des bâtiments à démolir.

Il doit en outre mentionner ceci, relativement au délai de recours et à l’obligation de notifications du recours des tiers :

« Droit de recours :
Le délai de recours contentieux est de deux mois à compter du premier jour d’une période continue de deux mois d’affichage sur le terrain du présent panneau [2].
Tout recours administratif ou tout recours contentieux doit, à peine d’irrecevabilité, être notifié à l’auteur de la décision et au bénéficiaire du permis ou de la décision prise sur la déclaration préalable. Cette notification doit être adressée par lettre recommandée avec accusé de réception dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du recours
 » [3].

Que se passe-t-il en cas d’erreur sur les mentions portées sur l’affichage ?

Il est jugé par le Conseil d’Etat que :

« Si les mentions prévues par l’article A424-16 doivent, en principe, obligatoirement figurer sur le panneau d’affichage, une erreur affectant l’une d’entre elles ne conduit à faire obstacle au déclenchement du délai de recours que dans le cas où cette erreur est de nature à empêcher les tiers d’apprécier l’importance et la consistance du projet. La circonstance qu’une telle erreur puisse affecter l’appréciation par les tiers de la légalité du permis est, en revanche, dépourvue d’incidence à cet égard, dans la mesure où l’objet de l’affichage n’est pas de permettre par lui-même d’apprécier la légalité de l’autorisation de construire » [4].

Cette décision juge que le caractère erroné de la mention relative à la superficie du terrain d’assiette n’a pas pour effet de faire obstacle au déclenchement du délai de recours contentieux.

Une autre décision a jugé que le défaut de mention de l’adresse de la mairie ou peut être consulté le dossier est sans effet sur la validité de l’affichage  :

« En imposant que figurent sur le panneau d’affichage du permis de construire diverses informations sur le permis et le lieu de consultation du dossier, les dispositions citées au point précédent ont notamment pour objet de mettre les tiers à même de consulter le dossier du permis. Il s’ensuit que, si les mentions relatives à l’identification du permis et au lieu de consultation du dossier prévues par l’article A424-16 du Code de l’urbanisme doivent, en principe, figurer sur le panneau d’affichage, une erreur ou omission entachant l’une d’entre elles ne conduit à faire obstacle au déclenchement du délai de recours que dans le cas où cette erreur est de nature à affecter la capacité des tiers à identifier, à la seule lecture du panneau d’affichage, le permis et l’administration à laquelle il convient de s’adresser pour consulter le dossier.
Pour juger que l’affichage du permis de construire litigieux sur le terrain n’était pas régulier et n’avait pu ainsi déclencher le délai de recours contentieux à l’égard des tiers, le Tribunal administratif de Bastia a relevé que le panneau ne mentionnait pas l’adresse de la mairie où le dossier pouvait être consulté et que, compte tenu de la taille de la commune d’Ajaccio et de la dispersion des services municipaux sur le territoire de la commune, une telle mention revêtait un caractère substantiel. En statuant ainsi, alors qu’en mentionnant la mairie d’Ajaccio le panneau d’affichage renseignait les tiers sur l’administration à laquelle s’adresser, le tribunal administratif a commis une erreur de droit
 » [5].

B) La preuve de l’affichage.

Une fois que vous avez tout préparé, vous pouvez procéder à l’affichage de votre permis de construire. Le panneau doit être installé de manière à être bien visible depuis la voie publique, sans obstruction.

N’oubliez pas que l’affichage doit rester en place pendant toute la durée des travaux.

Comment faire la preuve de l’affichage ?

Le but est de prouver que cet affichage a été fait pendant deux mois continus.

La preuve que l’affichage du permis du construire a été maintenu pendant deux mois se fait idéalement par des constats d’huissier au début, au milieu et à la fin de la période de deux mois.

Mais cette preuve est libre et vous pouvez recourir en particulier à des témoignages par des tiers (ces témoignages devront respecter les articles 202 et suivants du Code de procédure civile) ou encore à des photos du panneau prises avec un journal quotidien.

Une telle preuve a même été rapportée par un reportage TV :

« Qu’en outre, la SCI de l’Avenue produit un dvd contenant un reportage télévisé de la chaîne TLM, diffusé le 26 janvier 2007 et établi, aux dires non contestés de cette société, à cette même date, au cours duquel apparaît le panneau d’affichage qui a été photographié dans le constat d’huissier précité du 22 décembre 2006 ; que, contrairement à ce qui est soutenu par M. et Mme A et les autres intimés, ce document présente un caractère probant » [6].

D’autres modes de preuve peuvent aussi être envisagés  : photographies publiées sur les réseaux sociaux, applications de smartphone et en ligne…

En conclusion, l’affichage du permis de construire est une étape essentielle qui nécessite une attention particulière.

Christophe Buffet, Avocat
Avocat inscrit au Barreau d’Angers
Droit immobilier et droit public
SCP ACR Avocats Angers Nantes Paris
http://www.bdidu.fr/
https://www.linkedin.com/in/christophe-buffet-avocat/
https://twitter.com/CBuffetAvocat

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Notes de l'article:

[1Cour administrative d’appel de Bordeaux, 1ère chambre - formation à 3, du 23 février 2006, 02BX02437, inédit au recueil Lebon.

[2Art. R600-2 du Code de l’urbanisme.

[3Art. R600-1 du Code de l’urbanisme.

[4Conseil d’État, 10ème - 9ème chambres réunies, 16/10/2019, 419756.

[5Conseil d’État, 2ème - 7ème chambres réunies, 16/10/2020, 429357.

[6Cour Administrative d’Appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 12/10/2010, 10LY00291, Inédit au recueil Lebon.

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