Cet article 1253 Code civil dispose :
“Le propriétaire, le locataire, l’occupant sans titre, le bénéficiaire d’un titre ayant pour objet principal de l’autoriser à occuper ou à exploiter un fonds, le maître d’ouvrage ou celui qui en exerce les pouvoirs qui est à l’origine d’un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage est responsable de plein droit du dommage qui en résulte.
Sous réserve de l’article L311-1-1 du Code rural et de la pêche maritime, cette responsabilité n’est pas engagée lorsque le trouble anormal provient d’activités, quelle qu’en soit la nature, existant antérieurement à l’acte transférant la propriété ou octroyant la jouissance du bien ou, à défaut d’acte, à la date d’entrée en possession du bien par la personne lésée. Ces activités doivent être conformes aux lois et aux règlements et s’être poursuivies dans les mêmes conditions ou dans des conditions nouvelles qui ne sont pas à l’origine d’une aggravation du trouble anormal”.
Cette évolution législative soulève de nombreuses questions quant à son impact sur la pratique juridique et les relations de voisinage.
Dans cet article, nous nous proposons d’examiner en détail le régime juridique des troubles anormaux du voisinage en droit français, à la lumière de cette récente codification.
Notre analyse s’articulera autour de deux axes principaux : d’une part, les fondements et la définition du trouble anormal de voisinage, et d’autre part, les modalités de mise en œuvre de la responsabilité qui en découle.
Ce plan nous permettra d’aborder de manière exhaustive les aspects théoriques et pratiques de cette notion, tout en mettant en lumière les enjeux et les questions nouvelles soulevées par l’article 1253 du Code civil.
I. Les fondements et la définition du trouble anormal de voisinage.
A. Qu’est-ce qu’un trouble anormal de voisinage ?
Le trouble anormal de voisinage se définit comme une nuisance qui excède les inconvénients ordinaires du voisinage, compte tenu des circonstances de temps et de lieu.
Cette notion, désormais consacrée par l’article 1253 du Code civil, trouve son origine dans une jurisprudence classique de la Cour de cassation.
La définition légale, introduite par la loi du 15 avril 2024, reprend les éléments essentiels dégagés par la jurisprudence.
Ainsi, l’article 1253 du Code civil dispose que le trouble anormal de voisinage est celui qui "excède les inconvénients normaux du voisinage".
Cette formulation, volontairement large, permet aux juges de conserver une marge d’appréciation importante dans l’évaluation du caractère anormal du trouble.
Il convient de souligner que le trouble anormal de voisinage se distingue des nuisances ordinaires que l’on peut raisonnablement attendre de la vie en société. La jurisprudence a dégagé plusieurs critères pour apprécier l’anormalité du trouble, parmi lesquels :
- L’intensité du trouble
- Sa fréquence ou sa durée
- Le moment où il se produit (jour/nuit)
- Le contexte local (zone urbaine/rurale, résidentielle/industrielle)
- L’utilité sociale de l’activité à l’origine du trouble.
Des odeurs nauséabondes continues peuvent constituer un trouble anormal de voisinage.
De même, des bruits excessifs, des vibrations importantes ou des pollutions visuelles peuvent être qualifiés de troubles anormaux selon les circonstances.
La jurisprudence offre de nombreux exemples de situations ayant été qualifiées de troubles anormaux de voisinage. Ainsi, dans un arrêt du 9 mai 2001 [1], la Cour de cassation a considéré que :
“Attendu qu’ayant constaté que la réalisation d’un ensemble de 72 logements sur un terrain auparavant couvert de vignes, juste en face de leur maison d’habitation, située dans une commune d’environ 4 000 habitants, avait constitué pour les époux Y..., au titre de la dégradation du paysage et de l’environnement urbain, un trouble anormal et excessif de voisinage, peu important qu’une telle opération eût été réalisée conformément aux règles de l’urbanisme, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, a légalement justifié sa décision.”
Il est important de noter que l’appréciation du caractère anormal du trouble se fait in concreto, c’est-à-dire en tenant compte des circonstances particulières de chaque espèce.
Ainsi, un même type de nuisance pourra être considéré comme anormal dans certains contextes et pas dans d’autres. Par exemple, les bruits liés à une activité agricole seront plus facilement tolérés en zone rurale qu’en zone urbaine résidentielle.
B. Quels sont les fondements juridiques de la théorie des troubles anormaux du voisinage ?
La théorie des troubles anormaux du voisinage s’est construite progressivement par la jurisprudence, avant d’être consacrée par le législateur. On peut distinguer plusieurs étapes dans cette évolution :
Fondement jurisprudentiel initial :
À l’origine, la Cour de cassation a fondé cette théorie sur l’article 1382 (devenu 1240) du Code civil relatif à la responsabilité délictuelle. Cependant, elle s’en est progressivement détachée pour en faire un régime autonome de responsabilité sans faute.
On peut aussi considérer que le fondement juridique général de la notion de trouble anormal du voisinage serait l’article 544 du Code civil, qui dispose que : « La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements ».
Principe jurisprudentiel autonome :
Dans un arrêt de principe [2], la Cour de cassation a consacré le "principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage". Cette formulation a été reprise de manière constante par la jurisprudence ultérieure, faisant de ce principe une source autonome d’obligations.
Cet arrêt juge que :
“Vu le principe suivant lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que les époux X... habitant dans l’immeuble contigu à la boulangerie exploitée par M. Y... se plaignant des bruits et odeurs en émanant ont assigné celui-ci en réparation du dommage qui leur aurait été ainsi causé par des troubles anormaux de voisinage ;
Attendu que l’arrêt ayant constaté que le bruit provenant d’un compresseur installé dans la cave était doux et régulier, a ordonné cependant l’isolation de ce compresseur et la pose d’un capot de protection au motif que M. Y... l’avait fait pour un autre compresseur ;
Qu’en se déterminant ainsi la cour d’appel, qui n’a pas déduit les conséquences de ses propres constatations, a violé le principe susvisé.”
Une évolution plus récente avait été la création de la notion de voisin occasionnel pour retenir le trouble anormal du voisinage du constructeur intervenant sur un chantier [3] :
“Attendu, selon l’arrêt attaqué [4], que la société Quille s’est vu confier, en qualité d’entrepreneur général, la réalisation d’un immeuble sur un terrain voisin de celui sur lequel la société Pascal exploite une unité de production florale ; que les travaux de terrassement, qui ont été sous-traités à la société STPR, ayant occasionné la pose d’une pellicule de poussière sur les floraisons, la société Pascal a assigné la société Quille en réparation de son préjudice, laquelle a appelé en garantie la société STPR ;
Sur le moyen unique :
Attendu que la société Pascal fait grief à l’arrêt de la débouter de sa demande formée à l’encontre de la société Quille sur le fondement de la responsabilité pour troubles anormaux du voisinage, alors, selon le moyen que nul ne devant causer à autrui de troubles anormaux de voisinage, l’entrepreneur général qui est contractuellement chargé par le maître de l’ouvrage de la réalisation du chantier est responsable de plein droit, en sa qualité de voisin occasionnel, des troubles causés par ce chantier ; qu’il lui appartient ensuite de recourir éventuellement contre le sous-traitant auteur matériel des troubles ; que pour débouter la société Pascal de sa demande formée contre la société Quille, entrepreneur général chargé du chantier à l’origine des dégagements de poussières dommageables, la cour d’appel a retenu que les troubles étaient imputables aux travaux de terrassement sous-traités par la société Quille à la société STPR de sorte que la société Pascal n’était pas fondée à agir contre la société Quille, entrepreneur général ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a méconnu le principe selon lequel nul ne doit causer de troubles anormaux de voisinage ;
Mais attendu qu’ayant exactement retenu que le propriétaire de l’immeuble et les constructeurs à l’origine des nuisances sont responsables de plein droit des troubles anormaux du voisinage, ces constructeurs étant, pendant le chantier des voisins occasionnels des propriétaires lésés, et constaté que la société Quille, entrepreneur principal, qui n’avait pas réalisé les travaux, n’était pas l’auteur du trouble, la cour d’appel en a déduit à bon droit que la société Pascal ne pouvait agir à son encontre sur le fondement des troubles excédant les inconvénients normaux du voisinage ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Par ces motifs :
Rejette le pourvoi ;
Condamne la société Pascal aux dépens ;
Vu l’article 700 du Code de procédure civile, condamne la société Pascal à payer à la société Quille la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de la société Pascal.”
Consécration législative :
La loi n°2024-346 du 15 avril 2024 a finalement inscrit ce régime dans le Code civil, à l’article 1253.
Cette codification marque une étape importante dans l’évolution de la théorie des troubles anormaux du voisinage, en lui conférant une assise légale explicite.
Il est intéressant de noter que cette consécration législative s’inscrit dans un mouvement plus large de codification du droit de la responsabilité civile. Elle répond également à un souci de sécurité juridique, en clarifiant les règles applicables pour les justiciables et les praticiens du droit.
L’évolution des fondements juridiques de la théorie des troubles anormaux du voisinage reflète une tendance plus générale du droit de la responsabilité civile à s’adapter aux réalités sociales et économiques contemporaines. En effet, le passage d’un fondement basé sur la faute à un régime de responsabilité sans faute traduit une volonté d’offrir une protection accrue aux victimes de nuisances, tout en prenant en compte la complexité croissante des relations de voisinage dans nos sociétés modernes.
Cette évolution s’inscrit également dans un contexte de prise de conscience croissante des enjeux environnementaux et de qualité de vie. Le droit des troubles anormaux du voisinage apparaît ainsi comme un outil juridique permettant de concilier les intérêts parfois contradictoires des différents acteurs de la vie sociale, qu’il s’agisse de particuliers, d’entreprises ou de collectivités publiques.
La consécration législative de ce régime soulève néanmoins des questions quant à son articulation avec d’autres branches du droit, notamment le droit de l’environnement et le droit de l’urbanisme. En effet, ces domaines juridiques abordent également, sous des angles différents, les problématiques liées aux nuisances et aux conflits de voisinage.
Il conviendra donc d’être attentif à la manière dont la jurisprudence articulera ces différents corpus juridiques dans les années à venir.
II. La mise en œuvre de la responsabilité pour trouble anormal de voisinage.
A. Quelles sont les conditions d’engagement de la responsabilité ?
L’engagement de la responsabilité pour trouble anormal de voisinage repose sur plusieurs conditions, qui ont été précisées par la jurisprudence et sont désormais codifiées à l’article 1253 du Code civil :
L’existence d’un trouble :
Le demandeur doit prouver l’existence d’un trouble, c’est-à-dire d’une nuisance concrète et objectivement constatable.
Il peut s’agir de nuisances sonores, olfactives, visuelles, ou de toute autre forme de désagrément.
La preuve du trouble peut être apportée par tous moyens. Dans la pratique, les constats d’huissier, les rapports d’expertise, les témoignages ou encore les enregistrements sonores ou vidéo sont fréquemment utilisés pour établir l’existence et la nature du trouble.
Le caractère anormal du trouble :
Le trouble doit excéder les inconvénients normaux du voisinage. Cette appréciation se fait in concreto, en tenant compte des circonstances de temps et de lieu. Les juges du fond disposent d’un pouvoir souverain d’appréciation pour évaluer ce caractère anormal.
L’anormalité du trouble s’apprécie au regard de plusieurs critères, dont l’intensité, la fréquence, la durée, le moment où il se produit et le contexte local. Par exemple, le bruit continu et les vibrations générés par un transformateur électrique pouvaient être considérés comme anormaux, compte tenu de leur caractère permanent et de leur proximité immédiate avec l’habitation des plaignants.
Un lien de causalité :
Il doit exister un lien de causalité entre le trouble et le dommage subi par la victime. Ce lien doit être direct et certain.
Un préjudice :
La victime doit démontrer l’existence d’un préjudice, qui peut être matériel (dépréciation de la valeur d’un bien immobilier, par exemple) ou moral (atteinte à la tranquillité, au confort de vie). La jurisprudence admet une conception large du préjudice réparable en matière de troubles anormaux du voisinage.
Par exemple, dans un arrêt du 9 mai 2001 [5], la Cour de cassation a jugé ainsi que :
“Attendu qu’ayant constaté que la réalisation d’un ensemble de 72 logements sur un terrain auparavant couvert de vignes, juste en face de leur maison d’habitation, située dans une commune d’environ 4 000 habitants, avait constitué pour les époux Y..., au titre de la dégradation du paysage et de l’environnement urbain, un trouble anormal et excessif de voisinage, peu important qu’une telle opération eût été réalisée conformément aux règles de l’urbanisme, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, a légalement justifié sa décision.”
Le trouble anormal est classiquement constitué par l’existence d’un dommage, mais la Cour de cassation a cependant reconnu l’existence d’un trouble anormal résultant simplement d’un risque de dommages [6] :
“Attendu que Mme Y... fait grief à l’arrêt d’avoir dit qu’elle devra, sous astreinte, procéder à la suppression de tout stockage de paille effectué, soit à l’extérieur, soit sous abri dans un bâtiment, à moins de 25 mètres de la limite séparative des fonds, procéder à l’enlèvement des dépôts divers de ferrailles, planches et autres matériels usagés situés à moins de 25 mètres de la limite côté pignon de l’immeuble des époux X... et de l’avoir condamnée à payer aux époux X... des dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1 / que l’application de la théorie des troubles de voisinage suppose que soit établie l’existence d’un trouble certain, actuel et excessif causé personnellement à un voisin ; qu’en jugeant en l’espèce que le simple "risque" d’un dommage suffisait à caractériser un trouble anormal de voisinage, la cour d’appel a violé le principe suivant lequel nul ne doit causer à autrui de trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage ;
2 / que la théorie du trouble anormal de voisinage ne peut être étendue lorsque la responsabilité d’un propriétaire a vocation à s’appliquer en cas de communication d’un incendie entre immeubles voisins ; qu’en interdisant à Mme Y... tout stockage de paille à proximité de l’immeuble X... au seul prétexte qu’il présente un risque pour ce voisin en cas de propagation d’un incendie, la cour d’appel a violé par fausse application le principe suivant lequel nul ne doit causer à autrui de trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage et par refus d’application l’article 1384, alinéa 2, du Code civil ;
3 / que le trouble anormal de voisinage doit exister et être caractérisé au jour où le juge statue ; qu’en l’espèce, pour dire que le stockage de paille constituait un trouble anormal de voisinage, la cour d’appel ne pouvait se borner à affirmer qu’il est constant que Mme Y... ne s’est pas conformée à l’arrêté municipal en date du 7 octobre 1997 ni se fonder sur les appréciations de l’expert, sans vérifier, ainsi qu’elle y était invitée, si depuis lors, Mme Y... ne s’était pas mise en conformité avec les lois et règlements, comme l’établissait la délivrance le 20 avril 1998 de l’arrêté municipal autorisant l’ouverture du haras de Chanteau au public ainsi que les procès-verbaux de constat réalisés les 26 juin 2000 et 12 août 2002, démontrant qu’il n’existait plus aucune meule de fourrage ou de paille ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision au regard du principe suivant lequel nul ne doit causer à autrui de trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage ;
Mais attendu que l’arrêt retient que l’expert a relevé la présence d’un tas de paille à moins de 10 mètres de la maison des époux X... stockage qui, selon lui posait un problème au niveau de la sécurité incendie, ainsi qu’un dépôt de paille dans une grange située à proximité de l’immeuble des intimés ; que, le stockage de paille ou de foin, en meules à l’extérieur ou entreposé dans une grange est bien de nature à faire courir un risque, dès lors qu’il était effectué en limite de propriété et à proximité immédiate d’un immeuble d’habitation ; que si la paille est effectivement un produit inerte, il n’en demeure pas moins que son pouvoir de combustion est particulièrement rapide et important, et qu’une simple étincelle peut suffire à provoquer son embrasement ; que, compte tenu du risque indéniable qu’elle faisait courir à l’immeuble des époux X..., la proximité immédiate du stockage de paille de Mme Y... constituait pour ceux-ci un trouble anormal de voisinage, auquel il devait être remédié ;
Qu’en l’état de ces constatations et énonciations, la cour d’appel, par une appréciation souveraine des éléments de preuve qui lui étaient soumis a caractérisé l’existence d’un trouble anormal de voisinage.”
Il est important de souligner que la responsabilité pour trouble anormal de voisinage est une responsabilité de plein droit, ce qui signifie qu’elle ne nécessite pas la démonstration d’une faute de la part de l’auteur du trouble.
Cette caractéristique, déjà affirmée par la jurisprudence, est désormais explicitement mentionnée à l’article 1253 du Code civil.
La responsabilité découlant des troubles anormaux du voisinage ne nécessite donc pas la preuve d’une faute et la Cour de cassation a ainsi juger que le respect des dispositions légales n’exclut pas l’existence éventuelle de troubles excédant les inconvénients normaux du voisinage [7] :
“Attendu, selon l’arrêt attaqué (Chambéry, 25 mars 2003), que les époux X... ont chargé la société ECC de la construction d’une maison d’habitation sur un terrain leur appartenant ; que cette maison n’étant pas conforme au permis de construire, les époux X... ont obtenu un permis de construire modificatif ; que, soutenant que cette construction, qui n’entrait pas dans les prévisions du plan d’occupation des sols, lui causait un préjudice, la société civile immobilière Fara Preu (la SCI) a assigné la société ECC en paiement de dommages-intérêts ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la SCI fait grief à l’arrêt de déclarer sa demande irrecevable, alors, selon le moyen :
1 / que les dispositions de l’article L480-13 du Code de l’urbanisme ne profitent qu’au seul propriétaire d’immeuble auquel il est reproché d’avoir méconnu les règles d’urbanisme ou une servitude d’utilité publique ; qu’en revanche, elle ne peuvent être utilement opposées par le constructeur de maisons individuelles pour tenir en échec l’action en responsabilité civile délictuelle intentée par les tiers à raison du non-respect de ces mêmes règles et servitudes qui, dans les rapports entre le constructeur et le maître d’ouvrage, s’analyse en un manquement aux devoirs et obligations découlant du contrat de construction ; qu’en décidant le contraire, la cour d’appel viole les articles L480-13 du Code de l’urbanisme et l’article 1382 du Code civil ;
2 / que la SCI Fara Preu soulignait que le permis modificatif avait exclusivement porté sur l’assiette du bâtiment et sur sa hauteur, originairement déclarée à 7,65 mètres et finalement portée à 9,55 mètres ; qu’elle en déduisait que la non-conformité de la construction au permis de construire initial n’avait pas été régularisée et ne pouvait être régularisée, s’agissant de la hauteur illicite du remblai par rapport au niveau naturel du terrain ; qu’en retenant néanmoins que la SCI Fara Preu ne contestait pas la conformité de la construction réalisée par la société ECC au permis de construire modificatif du 19 avril 1999, la cour d’appel méconnaît les termes du litige dont elle était saisie et partant méconnaît les exigences de l’article 4 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu’ayant relevé, par une interprétation souveraine des conclusions ambiguës de la SCI, sans modifier l’objet du litige, que la société ECC soutenait sans être contredite que la construction était conforme au permis de construire modificatif, lequel n’avait pas fait l’objet de recours devant la juridiction administrative, la cour d’appel a exactement retenu que la SCI ne pouvait avoir davantage de droits contre l’entrepreneur qui avait fait les travaux que contre le maître de l’ouvrage puisque le préjudice éventuel résultait du même fait générateur ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu le principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage ;
Attendu que pour rejeter la demande de la SCI fondée sur l’existence d’un tel trouble, l’arrêt retient que celle-ci ne prétend pas que les vues créées sur ses fonds l’avaient été en violation des dispositions des articles 678 et 679 du Code civil ;
Qu’en statuant ainsi, alors que le respect des dispositions légales n’exclut pas l’existence éventuelle de troubles excédant les inconvénients normaux du voisinage, la cour d’appel a violé le principe susvisé ;
Par ces motifs :
Casse et annule, mais seulement en ce qu’il a rejeté la demande de la SCI Fara Preu en ce qu’elle était fondée sur l’existence de troubles anormaux de voisinage, l’arrêt rendu le 25 mars 2003, entre les parties, par la cour d’appel de Chambéry ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Grenoble ;
Condamne la société ECC aux dépens ;
Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société ECC à payer à la société Fara Preu la somme de 2 000 euros.”
Cette responsabilité sans faute constitue une spécificité importante du régime des troubles anormaux du voisinage. Elle traduit la volonté du législateur et des juges d’offrir une protection efficace aux victimes de nuisances, en facilitant l’engagement de la responsabilité de l’auteur du trouble. Cette approche se justifie par la nécessité de maintenir un équilibre entre les droits des différents occupants d’un même voisinage, indépendamment de la licéité ou de l’utilité sociale de l’activité à l’origine du trouble.
B. Quels sont les moyens de défense et les cas d’exonération ?
Face à une action en responsabilité pour trouble anormal de voisinage, le défendeur dispose de plusieurs moyens de défense :
La contestation du caractère anormal du trouble :
Le défendeur peut tenter de démontrer que le trouble allégué n’excède pas les inconvénients normaux du voisinage. Cette appréciation dépendra largement des circonstances de l’espèce et du contexte local.
L’exception de pré-occupation :
L’article 1253 alinéa 2 du Code civil, introduit par la loi du 15 avril 2024, prévoit un cas d’exonération de responsabilité lorsque l’activité à l’origine du trouble est antérieure à l’installation de la personne qui s’en plaint. Cette exception, déjà reconnue, est désormais consacrée légalement.
Elle s’applique sous réserve que l’activité respecte le cadre législatif et réglementaire en vigueur et qu’elle se poursuive dans les mêmes conditions.
Cette exception de pré-occupation peut trouver son fondement dans l’adage "venire contra factum proprium", selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d’autrui.
Elle vise à protéger les activités préexistantes contre les recours abusifs de nouveaux arrivants qui se seraient installés en connaissance de cause.
Cependant, la jurisprudence avait déjà apporté des nuances importantes à cette exception en décidant que l’antériorité de l’activité ne fait pas obstacle à l’action en responsabilité pour trouble anormal de voisinage si le trouble s’est aggravé postérieurement à l’installation de la victime.
C. L’exonération spécifique pour les activités agricoles.
La loi du 15 avril 2024 a également introduit un nouvel article L311-1-1 dans le Code rural et de la pêche maritime, prévoyant des cas d’exonération spécifiques pour les activités agricoles.
“La responsabilité prévue au premier alinéa de l’article 1253 du Code civil n’est pas engagée lorsque le trouble anormal provient d’activités agricoles existant antérieurement à l’acte transférant la propriété ou octroyant la jouissance du bien ou, à défaut d’acte, à la date d’entrée en possession du bien par la personne lésée. Ces activités doivent être conformes aux lois et aux règlements et s’être poursuivies dans les mêmes conditions, dans des conditions nouvelles qui ne sont pas à l’origine d’une aggravation du trouble anormal ou dans des conditions qui résultent de la mise en conformité de l’exercice de ces activités aux lois et aux règlements ou sans modification substantielle de leur nature ou de leur intensité.”
Cette disposition vise à protéger les exploitants agricoles contre les recours abusifs, dans un contexte de tensions croissantes entre activités agricoles et développement urbain.
Cette exonération s’applique lorsque les activités agricoles, exercées dans le respect des lois et règlements en vigueur, sont antérieures à l’installation des voisins se plaignant du trouble. Toutefois, elle ne couvre pas les cas où l’activité agricole aurait subi des modifications substantielles après l’arrivée des nouveaux voisins.
D. La force majeure.
Comme dans tout régime de responsabilité civile, la force majeure peut exonérer l’auteur du trouble de sa responsabilité si les conditions en sont réunies (extériorité, imprévisibilité, irrésistibilité).
E. Quelles sont les sanctions et les réparations possibles ?
En cas de trouble anormal de voisinage, plusieurs types de sanctions et de réparations peuvent être envisagés.
La cessation du trouble :
La première mesure généralement sollicitée est la cessation du trouble. Le juge peut ordonner toutes mesures propres à faire cesser le trouble, comme la réalisation de travaux d’insonorisation, la modification des horaires d’une activité bruyante, ou même, dans les cas les plus graves, la cessation totale de l’activité à l’origine du trouble.
La réparation du préjudice :
La victime peut obtenir des dommages et intérêts pour réparer le préjudice subi. Cette réparation peut couvrir tant le préjudice matériel (par exemple, la dépréciation d’un bien immobilier) que le préjudice moral (atteinte à la tranquillité, au confort de vie).
La jurisprudence admet une conception large du préjudice réparable. Ainsi, elle a reconnu que la perte de tranquillité et de sommeil due aux nuisances sonores d’une discothèque constituait un préjudice réparable au titre des troubles anormaux du voisinage.
L’astreinte :
Le juge peut assortir ses décisions d’une astreinte, c’est-à-dire d’une somme d’argent à payer par jour de retard dans l’exécution de la décision, afin d’en assurer l’effectivité.
D’origine prétorienne, l’astreinte a été définie par le législateur à l’article 33 de la loi n°91-650 du 9 juillet 1991 abrogée. Son régime juridique est actuellement codifié aux articles L131-1 à 131-4 du CPCE.
Les mesures préventives :
Dans certains cas, le juge peut ordonner des mesures préventives pour éviter la survenance ou la répétition du trouble, comme la réalisation d’études d’impact ou la mise en place de dispositifs de contrôle.
Il peut ainsi ordonner l’installation d’un limiteur de pression acoustique dans une salle de spectacles pour prévenir les nuisances sonores.
Il est important de souligner que le juge dispose d’un large pouvoir d’appréciation dans le choix des sanctions et des réparations, qui doivent être proportionnées à la gravité du trouble et adaptées aux circonstances de l’espèce.
F. Quelles sont les procédures applicables en matière de troubles anormaux du voisinage ?
Plusieurs voies procédurales sont ouvertes aux victimes de troubles anormaux du voisinage.
La conciliation préalable obligatoire :
En application de l’article 4 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016, à peine d’irrecevabilité que le juge peut prononcer d’office, la demande en justice est précédée, au choix des parties, d’une tentative de conciliation menée par un conciliateur de justice, d’une tentative de médiation ou d’une tentative de procédure participative, lorsqu’elle tend au paiement d’une somme n’excédant pas 5 000 euros ou lorsqu’elle est relative à l’une des actions mentionnées aux articles R. 211-3-4 et R211-3-8 du Code de l’organisation judiciaire ou à un trouble anormal de voisinage.
Le référé :
En cas d’urgence, la victime peut saisir le juge des référés pour obtenir des mesures provisoires ou conservatoires. Cette procédure permet d’obtenir rapidement une décision, sans préjuger du fond de l’affaire.
Le référé est particulièrement adapté aux situations où le trouble nécessite une intervention rapide.
L’action au fond :
L’action en responsabilité pour trouble anormal de voisinage relève de la compétence du tribunal judiciaire. La procédure suit les règles habituelles du procès civil.
Il convient de noter que le délai de prescription de l’action en responsabilité pour trouble anormal de voisinage est de cinq ans, conformément au droit commun de la responsabilité civile extracontractuelle selon l’article 2224 du Code civil qui dispose :
"Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer."
Ainsi il est jugé que [8] :
« Selon l’arrêt attaqué (Montpellier, 20 juillet 2023), la société Alliance environnement exploitation (la société Alliance environnement), venant aux droits de la société Orga d’Oc, gère depuis le 3 décembre 2013 un centre de compostage de déchets organiques dont l’activité a donné lieu à déclaration en décembre 2004, puis en mai 2006, lors du début d’activité effective. Par arrêté du 24 mai 2011, le préfet a imposé à l’installation en cause un certain nombre de prescriptions, visant notamment à limiter les nuisances olfactives pour le voisinage.
Se plaignant de nuisances olfactives excédant selon lui les inconvénients normaux du voisinage, M. [U], après avoir obtenu en référé la désignation d’un expert par ordonnance du 26 juin 2018, a assigné la société Alliance environnement par acte du 8 avril 2021 en réalisation des travaux nécessaires et en indemnisation de son préjudice.
La société Alliance environnement a soulevé une fin de non-recevoir tirée de la prescription de l’action.
Moyens
Examen du moyen
Enoncé du moyen
M. [U] fait grief à l’arrêt de déclarer irrecevable ses demandes, alors :
« 1°/ que l’action pour troubles anormaux du voisinage se prescrit à compter de la première manifestation du trouble ; que lorsqu’elles sont répétées sur une longue période, les nuisances constituent autant de troubles dont la manifestation fait courir un délai de prescription spécifique ; qu’en l’espèce, M. [U] demandait au tribunal judiciaire de condamner la société Alliance environnement à réaliser les travaux préconisés par l’expert et à lui payer la somme de 96 000 euros à parfaire jusqu’à l’achèvement des travaux en réparation de son préjudice de jouissance « depuis juin 2013 » ; que pour déclarer M. [U] irrecevable « en l’ensemble de ses demandes », la cour d’appel a retenu qu’ « en matière de trouble anormal de voisinage, le point de départ se situe au jour de la première manifestation de ce trouble, et plus précisément la date à laquelle les nuisances invoquées sont apparues dans
leur anormalité », que « les troubles olfactifs émanant de l’installation en cause sont apparus pour les riverains, dont M. [U] fait partie, au moins depuis l’année 2011 » et qu’en conséquence « à la date de délivrance de l’assignation en référé-expertise du 26 mars 2018, le délai de prescription quinquennale était déjà expiré depuis le début de l’année 2016 » ; qu’en statuant ainsi quand des émanations odorantes ne constituent pas un trouble unique mais une succession de troubles se prescrivant distinctement, la cour d’appel a violé l’article 2270-1 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, et l’article 2224 du même code, dans sa rédaction issue de cette loi ;
2°/ que la prescription ne court pas contre celui qui est dans l’impossibilité d’agir par suite d’un empêchement résultant de la loi ; qu’en l’espèce, M. [U] exposait que « l’origine du désordre était liée aux conditions d’exploitation de sorte qu[’il] […]était parfaitement recevable à agir à l’encontre des propriétaires successifs et donc directement à l’encontre de la SAS Alliance Environnement dont il rappelle qu’elle a commencé son exploitation à compter du 3 décembre 2013 de sorte que l’action n’est nullement prescrite » ; qu’en retenant que la prescription avait commencé à courir à compter de l’année 2011 et que « c’est ainsi à tort que le premier juge a retenu comme point de départ de la prescription le 3 décembre 2013 correspondant à la date à laquelle la SAS Alliance environnement est venue aux droits de la SARL Orga d’Oc, cette date ne pouvant être considérée comme le jour où M. [U] a eu connaissance du trouble ou de l’aggravation du risque susceptible de créer un trouble anormal de voisinage », quand M. [U] ne pouvait agir contre la société Alliance environnement avant qu’elle reprenne l’exploitation du centre de compostage et qu’elle cause des nuisances olfactives, la cour d’appel a violé l’article 2234 du Code civil dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 ».
En premier lieu, il résulte de l’article 2224 du Code civil que la prescription quinquennale à laquelle est soumise l’action en responsabilité pour trouble anormal de voisinage court à compter de la première manifestation des troubles, leur seule répétition sur une longue période ne faisant pas courir un nouveau délai de prescription.
En second lieu, M. [U] ayant soutenu devant la cour d’appel qu’il était recevable à agir à l’encontre des propriétaires successifs et donc directement à l’encontre de la société Alliance environnement, en faisant valoir qu’elle avait commencé son exploitation à compter du 3 décembre 2013, de sorte que son action n’était pas prescrite, il n’est pas recevable à présenter devant la Cour de cassation un moyen contraire à ses propres écritures, tiré de ce qu’il aurait été dans l’impossibilité d’agir contre le précédent exploitant.”
G. Quelles sont les questions nouvelles soulevées par l’article 1253 du Code civil ?
L’introduction de l’article 1253 dans le Code civil soulève plusieurs questions nouvelles qui méritent une attention particulière :
L’articulation avec la jurisprudence antérieure :
Bien que l’article 1253 codifie largement la jurisprudence existante, certaines nuances ou évolutions pourraient apparaître dans son interprétation. Les juges devront préciser comment cette nouvelle disposition s’articule avec la jurisprudence antérieure.
Par exemple, la prise en compte explicite du respect des dispositions législatives et réglementaires dans l’appréciation du trouble pourrait conduire à une évolution de la jurisprudence sur ce point.
La portée de l’exception de pré-occupation :
L’exception de pré-occupation, désormais légalement consacrée, pourrait donner lieu à des débats quant à son champ d’application exact. Comment apprécier, par exemple, la continuité d’une activité dans le temps ?
La jurisprudence devra notamment préciser dans quelle mesure des modifications ou des extensions d’une activité préexistante peuvent remettre en cause le bénéfice de cette exception.
L’impact sur les contentieux en cours :
La question de l’application dans le temps de cette nouvelle disposition se pose, notamment pour les contentieux en cours au moment de son entrée en vigueur.
En principe, les lois nouvelles s’appliquent immédiatement aux effets à venir des situations juridiques non contractuelles en cours. Cependant, des précisions jurisprudentielles seront sans doute nécessaires pour déterminer les modalités exactes d’application de l’article 1253 aux procédures en cours.
L’articulation avec les régimes spéciaux :
L’article 1253 du Code civil devra être articulé avec les régimes spéciaux existants, notamment en matière de droit de l’environnement ou d’urbanisme.
Par exemple, comment cette disposition s’articulera-t-elle avec les règles spécifiques applicables aux installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) ?
L’évolution possible des critères d’appréciation du trouble :
La codification pourrait conduire à une évolution des critères d’appréciation du trouble anormal, les juges étant désormais tenus par un texte de loi.
Il sera intéressant d’observer si cette consécration législative conduira à une uniformisation des critères d’appréciation ou si, au contraire, elle laissera place à une diversification des approches selon les juridictions.
Ces questions nouvelles appellent une vigilance particulière de la part des praticiens du droit et feront sans doute l’objet de clarifications jurisprudentielles dans les années à venir.
On peut s’interroger aussi sur le maintien de la jurisprudence du voisin occasionnel, le constructeur voisin, puisqu’il n’est pas mentionné à l’article 1253 du Code civil.
Conclusion.
L’introduction de l’article 1253 dans le Code civil marque une étape importante dans l’évolution du régime juridique des troubles anormaux du voisinage en droit français. Cette codification, si elle reprend largement les acquis jurisprudentiels, ouvre également de nouvelles perspectives et soulève des questions inédites.
La consécration législative de ce régime de responsabilité devrait contribuer à renforcer la sécurité juridique, tant pour les victimes que pour les auteurs potentiels de troubles. Elle offre un cadre plus clair pour l’appréciation des situations de conflit de voisinage, tout en préservant la souplesse nécessaire à l’adaptation aux circonstances particulières de chaque espèce.
Cependant, de nombreux points restent à préciser et à interpréter. Le rôle de la jurisprudence demeurera donc crucial dans les années à venir pour affiner les contours de ce régime et répondre aux nouvelles questions soulevées par sa codification.
Le droit des troubles anormaux du voisinage se trouve à un tournant de son histoire. Son évolution future dépendra de la manière dont les juges, les avocats et les justiciables s’approprieront ce nouveau cadre légal, et de la capacité du droit à s’adapter aux enjeux contemporains des relations de voisinage, notamment dans un contexte d’urbanisation croissante et de sensibilité accrue aux questions environnementales.
Il est probable que nous assisterons dans les prochaines années à une jurisprudence abondante visant à préciser les contours de l’article 1253 du Code civil. Les praticiens du droit devront être particulièrement attentifs à ces évolutions pour conseiller au mieux leurs clients, qu’ils soient victimes ou auteurs présumés de troubles anormaux de voisinage.
Enfin, il convient de souligner que si la codification apporte une plus grande sécurité juridique, elle ne résout pas toutes les difficultés inhérentes aux conflits de voisinage. La prévention de ces conflits, notamment par le dialogue et la médiation, reste un enjeu majeur pour maintenir des relations de bon voisinage et limiter le recours au contentieux.
En conclusion, l’introduction de l’article 1253 dans le Code civil marque une étape importante dans l’évolution du droit des troubles anormaux du voisinage en France. Cette codification, tout en apportant une plus grande sécurité juridique, ouvre de nouvelles perspectives et soulève des questions inédites qui alimenteront sans doute les débats doctrinaux et jurisprudentiels dans les années à venir. Il appartiendra aux juges, aux avocats et aux juristes de donner vie à ce nouveau texte, en l’interprétant et en l’appliquant de manière à répondre aux enjeux contemporains des relations de voisinage, dans un souci constant d’équilibre entre les droits des différentes parties prenantes.