Définition du bornage.
L’article 646 du Code civil ne définit pas en quoi consiste le bornage et la définition du bornage a été faite par les auteurs dans les termes suivants :
« Le bornage est l’opération qui consiste à déterminer définitivement la ligne divisoire entre deux fonds contigus par des signes matériels que l’on appelle les bornes » (Lamy Droit immobilier), « le bornage a pour objet de délimiter deux fonds » (Malaurie et Aynes).
L’intérêt du bornage est de permettre d’assurer une relative tranquillité entre les voisins, puisque chacun connaît, après le bornage, les limites de sa propriété.Il est aussi de permettre d’éviter les empiétements, et il permet également le respect des règles d’urbanisme quand les constructions sont soumises au respect de distance par rapport aux limites séparatives ou sont autorisées uniquement lorsque le terrain d’assise dispose d’une certaine surface.
Le bornage peut être réalisé sur des terrains bâtis ou non bâtis.
Le bornage se distingue de l’arpentage, qui est au sens large l’évaluation de la superficie des terres et au sens juridique le document établi à l’occasion de la division d’un terrain (pour le vendre, le plus souvent) et qui est soumis au service du cadastre avant la rédaction d’un acte portant cette division d’un terrain.
Le bornage ne suppose pas forcément que l’arpentage soit réalisé :
"Attendu que les consorts Y..., propriétaires de parcelles contiguës à celles appartenant à M. X..., font grief à l’arrêt attaqué (Agen, 7 novembre 1990) d’adopter les conclusions du rapport d’expertise et de dire que le bornage des propriétés sera effectué sur les bases de ce rapport, alors, selon le moyen, d’une part, que l’expert judiciaire a l’obligation de convoquer les parties à toutes les réunions d’expertise ; qu’en se bornant à constater que les consorts Y... avaient été convoqués à diverses réunions d’expertise et s’étaient abstenus d’y assister, sans rechercher si l’expert avait bien convoqué les consorts Y... à toutes les réunions d’expertise, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 160 du nouveau Code de procédure civile, d’autre part, que les opérations de bornage comprennent nécessairement l’arpentage des terrains afin de vérifier sur place la contenance réelle de chaque lot ; qu’en considérant qu’il n’était pas nécessaire de procéder à l’arpentage des parcelles, la cour d’appel a violé l’article 646 du Code civil ;
Mais attendu qu’ayant constaté que, bien que convoqués par l’expert à trois reprises, par lettres recommandées avec demande d’avis de réception des 23 juin, 16 août et 11 octobre 1989, les consorts Y... s’étaient dispensés de se présenter à toutes les réunions en vue d’établir les limites des propriétés tout en présentant leurs observations à l’encontre du projet de rapport et que, lors de la première réunion, Mlle Y... avait défendu à l’expert de pénétrer sur ses propriétés et s’était retirée, la cour d’appel a, sans violer le principe de la contradiction, légalement justifié sa décision de ce chef en retenant que l’arpentage ne correspondait nullement à la mission confiée à l’expert".
Imprescriptibilité de la demande en bornage.
Le bornage est un droit imprescriptible, ce qui signifie qu’il peut être demandé par un propriétaire à son voisin à tout moment, comme l’exprime l’article 646 du Code civil reproduit ci-dessus.
Pas de bornage avec le domaine public.
Le bornage n’est possible qu’entre des propriétés privées, et n’est pas possible entre une propriété privée et le domaine public :
"Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 11 janvier 2000), que la commune de La Gaude ayant demandé le bornage entre les parcelles communales cadastrées n° 2063, 2033 et 2871 et la parcelle contiguë n° 2878, propriété de l’association Centaure club de Nice, celle-ci a soulevé l’incompétence de la juridiction saisie, au motif que les parcelles en cause dépendaient du domaine public de la commune ; Attendu que la commune fait grief à l’arrêt de déclarer irrecevable l’action en bornage, alors, selon le moyen, que l’action en bornage tendant à la délimitation de propriétés privées contiguës est de la compétence du juge judiciaire, sauf pour celui-ci, en cas de contestation sérieuse sur l’incorporation d’une parcelle à un domaine public, à surseoir à statuer et à renvoyer au juge administratif l’examen de cette question préjudicielle ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a cru pouvoir estimer que la parcelle était incorporée au domaine public communal, motifs pris de son affectation à un usage public et de l’existence d’aménagements spéciaux correspondants ; que, par suite, en se faisant juge de cette incorporation au domaine public et en déclarant irrecevable l’action en bornage, la cour d’appel a violé le principe de la séparation des pouvoirs, l’article 13 titre II de la loi des 16-24 août 1790, le décret du 16 fructidor an III et l’article 646 du Code civil ;
Mais attendu qu’ayant constaté que les parcelles 2063, 2033 et 2071 formaient le terrain d’assiette du stade communal de La Gaude et faisaient l’objet d’une servitude d’utilité publique figurant au plan d’occupation des sols de la commune et comportant interdiction, sauf autorisation du ministre chargé des Sports, d’exécuter des travaux ayant pour effet la suppression d’installations sportives de nature à en changer l’affectation, la cour d’appel a relevé que, par convention du 3 août 1981, la commune de La Gaude avait mis à la disposition de l’association Centaure club de Nice un terrain correspondant aux parcelles 901 à 904 et à une partie de la parcelle 2063, "incorporé dans le complexe sportif", que cette convention d’occupation visait l’aménagement d’équipements sportifs de moto-cross autorisé par arrêté du 4 décembre 1979, prévoyant une dépense de 151 704 francs, subventionnable à hauteur de 150 000 francs, que l’avenant à cette convention du 20 décembre 1988 prévoyait l’organisation sur le terrain de manifestations et compétitions sportives et culturelles, tant par l’association que par la commune, que la preuve était ainsi rapportée que les parcelles concernées, spécialement aménagées, présentaient un caractère d’utilité générale ; qu’en l’état de ces constatations et énonciations, desquelles il résultait que la question de la domanialité publique ne pouvait donner lieu à contestation sérieuse, la cour d’appel a retenu, à bon droit, sans violer le principe de la séparation des pouvoirs ni aucun des textes visés au moyen, que du fait de leur affectation à un service public et de l’aménagement dont elles avaient fait l’objet de la part de la commune ou par son intermédiaire, les parcelles relevant à l’origine du domaine privé de la commune se trouvaient incorporées au domaine public de celle-ci, ce dont elle a exactement déduit que, s’agissant de délimiter le domaine public par rapport aux propriétés privées, la procédure de bornage ne pouvait s’appliquer".
Mais le bornage est possible entre le domaine privé et la propriété privée.
Le bornage est-il obligatoire ?
Par principe, le bornage n’est pas obligatoire et des voisins peuvent très bien s’en dispenser.
Cependant si l’un d’entre veut que ce bornage soit réalisé, il peut l’imposer à l’autre : c’est la lettre de l’article 646 du Code civil :
"Tout propriétaire peut obliger son voisin au bornage de leurs propriétés contiguës. Le bornage se fait à frais communs"
Si ce voisin ne l’accepte pas ou s’ils ne s’accordent pas sur les limites des terrains, le juge sera saisi d’une action en bornage. Il désignera classiquement un expert qui donnera son avis que le juge homologuera (le plus souvent) ensuite par un second jugement, puis cet expert sera chargé de poser les bornes.
Il existe un cas où le bornage est obligatoire, c’est celui de l’article L115-4 du Code de l’urbanisme [1] qui est ainsi rédigé :
"Toute promesse unilatérale de vente ou d’achat, tout contrat réalisant ou constatant la vente d’un terrain indiquant l’intention de l’acquéreur de construire un immeuble à usage d’habitation ou à usage mixte d’habitation et professionnel sur ce terrain mentionne si le descriptif de ce terrain résulte d’un bornage.
Lorsque le terrain est un lot de lotissement, est issu d’une division effectuée à l’intérieur d’une zone d’aménagement concerté par la personne publique ou privée chargée de l’aménagement ou est issu d’un remembrement réalisé par une association foncière urbaine, la mention du descriptif du terrain résultant du bornage est inscrite dans la promesse ou le contrat.".
Voici d’ailleurs la question d’un député et la réponse d’un ministre qui évoque la responsabilité du notaire qui oublierait de veiller à l’application de ce texte :
La question : « M. Jacques Le Nay attire l’attention de Mme la ministre du Logement et de la ville sur les difficultés liées dans un certain nombre d’affaires après la signature d’un acte de vente, difficultés dues au défaut de bornage de la propriété vendue. Aussi, il lui demande de lui faire connaître les mesures qu’elle envisage de prendre pour garantir aux acquéreurs l’exactitude des limites séparatives de la propriété acquise par eux par rapport aux propriétés voisines ».
La réponse : « la garde des sceaux, ministre de la Justice, fait connaître à l’honorable parlementaire que le bornage est une obligation de voisinage et qu’aux termes de l’article 646 du Code civil, tout propriétaire peut obliger son voisin au bornage de leurs propriétés contiguës. Lorsque le bornage est réalisé à l’amiable, un procès-verbal d’abornement consigne la limite séparative des fonds. Lorsque le propriétaire se heurte au refus de son voisin, il peut exercer une action en bornage devant le juge judiciaire et une décision de justice détermine alors la limite séparative des fonds. Les procès-verbaux et les décisions judiciaires constatant un bornage étant obligatoirement publiés à la conservation des hypothèques, le futur acquéreur et son notaire, sont en mesure de savoir si un bornage a déjà été réalisé et publié. À cet égard, les prescriptions de l’article L111-5-3 du Code de l’urbanisme, qui concernent toute promesse unilatérale de vente ou d’achat, tout contrat réalisant ou constatant la vente d’un terrain, indiquant l’intention de l’acquéreur de construire un immeuble à usage d’habitation ou à usage mixte, obligent le notaire à rechercher l’existence d’un bornage pour assurer la perfection formelle de son acte. En l’absence de prescription légale, le notaire, investi d’un devoir de conseil, apprécie les vérifications qu’il doit accomplir dans l’intérêt de son client et, sous réserve de l’appréciation souveraine des juridictions, engage sa responsabilité professionnelle si un défaut d’investigation a causé un préjudice à son client. À défaut de bornage, déjà réalisé, il est toujours loisible au futur acquéreur de demander au vendeur de procéder à celui-ci avant la passation de la vente. Les différentes possibilités ainsi offertes aux acquéreurs apparaissent suffisantes pour leur permettre de connaître l’exactitude des limites séparatives de la propriété acquise ».
Bornage amiable ou judiciaire ?
Lorsque les deux voisins ne s’accordent pas sur un bornage amiable, c’est le juge judiciaire qui est saisi d’une action en bornage.
Il n’a rien été prévu dans le Code civil concernant le bornage amiable, ses modalités et la façon dont il peut être procédé à ce bornage.
Le plus souvent, le bornage amiable est effectué contradictoirement par les voisins, en recourant à un géomètre expert. Il est établi un procès-verbal d’abornement qui comporte en particulier un plan et un tracé de la limite séparative des propriétés, et ce document est signé par chacun des voisins.
Les bornes sont alors posées.
Le procès-verbal peut mentionner précisément en quoi consistent les bornes (qui peuvent être des bornes normalisées, ou tout ouvrage dont le maintien dans le temps à l’emplacement choisi est certain, tels que par exemple une grosse pierre ou un piquet).
Il est rappelé que le procès-verbal de bornage et le bornage lui-même ne sont pas des actes constitutifs de propriété, mais seulement un accord sur les limites séparatives des propriétés respectives.
Le procès-verbal de bornage peut comporter le cas échéant, cependant, un accord sur l’échange d’une partie des terrains respectifs.
Le procès-verbal de bornage est un contrat qui a autorité de chose jugée et qui s’impose à tous et s’oppose en particulier à une demande de bornage.
L’expert et le juge recherchent d’après les titres et les documents qui leur seront remis les limites de propriété.
Les juges apprécient souverainement les éléments qui leur sont soumis.
Les énonciations du cadastre ont valeur de simples présomptions en matière de bornage :
"Attendu qu’ayant retenu, par motifs propres et adoptés, que pour fixer la limite séparative au pied du talus, l’expert avait tenu compte de l’existence du talus datant d’avant 1948 selon les témoignages des anciens propriétaires, de l’implantation de la borne et du calage cadastral faisant apparaître que la ligne SZ coupait deux limites bornées par le géomètre expert, que l’auteur de M. Z..., M. Y... avait signé le procès-verbal de bornage amiable qui fixait au pied du talus la borne E dès lors insusceptible d’être remise en cause et que l’expert avait écarté la solution proposée par M. Z... à partir des surfaces cadastrales en estimant qu’elle ne respectait pas la configuration des lieux résultant de la présence d’un talus très ancien considéré par les usages locaux comme une dépendance du fonds supérieur et en démontrant, par superposition, à la même échelle, du cadastre et du plan produit par M. Z... que la parcelle 780 se trouvait amputée d’un morceau de terrain, la cour d’appel, par une appréciation souveraine des éléments de preuve soumis à son appréciation, répondant aux conclusions, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision".
On notera qu’en cas de difficultés relatives à l’exécution du jugement ordonnant l’implantation des bornes, il est jugé que c’est le juge de l’exécution qui connaît du litige :
"Vu l’article L311-12-1 du Code de l’organisation judiciaire ;
Attendu que le juge de l’exécution connaît des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s’élèvent à l’occasion de l’exécution forcée même si elles portent sur le fond du droit, que tout juge autre que le juge de l’exécution doit relever d’office son incompétence ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Basse-Terre, 11 janvier 1999), que M. X... a fait assigner devant le juge des référés Mmes Z... et Lucienne Y..., propriétaires de fonds voisins, pour les faire condamner sous astreinte à rétablir les limites des propriétés telles qu’elles ont été décidées par un jugement définitif rendu le 4 juin 1980 et obtenir la désignation d’un expert pour matérialiser les bornes telles que fixées par ce jugement, ainsi qu’une provision sur dommages-intérêts pour résistance abusive et réparation du préjudice causé ; que Mmes Z... et Lucienne Y... ont soulevé l’incompétence de la juridiction saisie ;
Attendu que, pour accueillir ces demandes, l’arrêt retient que le litige est très ancien puisqu’un jugement avant-dire droit du 21 septembre 1966 ordonnait déjà le bornage des propriétés, qu’en raison des rapports conflictuels régnant entre les parties et de l’absence de contestation sérieuse sur le bien-fondé de la demande de M. X..., c’est à bon droit que le juge des référés, sur le fondement de l’article 848 du nouveau Code de procédure civile, a ordonné l’implantation des bornes ;
Qu’en statuant ainsi, alors que seul le juge de l’exécution est compétent pour connaître des difficultés relatives à l’exécution du jugement rendu entre les mêmes parties le 4 juin 1980, la cour d’appel a violé le texte susvisé".
Le bornage prouve-t-il la propriété ?
C’est un point qui est toujours difficile à concevoir (pourquoi poser des bornes comme limites de propriété si cela ne prouve que l’on est propriétaire ?) mais il est classiquement jugé que le bornage n’a pas pour effet de prouver la propriété :
"Attendu que l’autorité de chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement ;
Attendu que pour rejeter la demande en expulsion de M. Y... d’une parcelle dont les consorts X... se prétendaient propriétaires, l’arrêt attaqué (Basse-Terre, 18 décembre 1989) retient que le jugement du 27 mars 1980 a entériné le rapport de l’expert qui a fixé les limites séparatives des deux fonds en tenant compte du titre de propriété de M. Y... et de son occupation trentenaire et que cette décision, devenue irrévocable, ayant relevé que la superficie de 15 680 m2, attribuée à la propriété de M. Y..., n’était pas contestée par les consorts X..., constitue, dès lors, pour chacune des parties concernées, un titre de propriété définitif ;
Qu’en statuant ainsi, alors que le jugement du 27 mars 1980, passé en force de chose jugée, qui avait statué sur une demande en bornage tendant exclusivement à la fixation de la ligne divisoire entre les fonds, n’avait pas eu à trancher la question de propriété de la parcelle litigieuse et ne faisait pas obstacle à l’action en revendication, la cour d’appel a violé le texte susvisé".
Voici d’ailleurs un autre arrêt qui juge que le procès-verbal de bornage ne constitue pas un acte translatif de propriété.
"Vu l’article 544 du Code civil, ensemble l’article 646 du même code ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 6 mai 2003), que M. X..., aux droits duquel viennent les consorts X..., a assigné M. Y... en revendication d’un chemin séparant la parcelle lui appartenant, anciennement cadastrée 1041, de la parcelle de M. Y... ;
Attendu que pour les débouter de leur demande, l’arrêt retient que M. Y... a acquis le 28 mai 1963 une parcelle de terrain provenant d’une propriété appartenant à M. Z..., ayant fait l’objet d’un procès-verbal de bornage amiable établi le 10 avril 1963, que l’acte de vente mentionnait que le nouveau numéro cadastral provenait aussi pour son surplus "de partie de la parcelle cadastrale voisine n° 1041 par suite d’une rectification de limite" de cette parcelle et que M. X... a signé ce procès-verbal de bornage décrivant précisément les limites, les points d’implantation des bornes, les fonds concernés, et attribuant l’assiette du chemin litigieux au fonds Z..., et qu’en signant cet acte et en acceptant l’implantation des bornes et marques sur son fonds, M. X... n’a pu qu’accepter la rectification des limites cadastrales et reconnaître les limites ainsi déterminées ;
Qu’en se fondant exclusivement sur un procès-verbal de bornage, lequel ne constitue pas un acte translatif de propriété, la cour d’appel a violé les textes susvisés".
Un autre arrêt : "Vu l’article 544 du Code civil, ensemble l’article 1134 de ce Code ; Attendu, selon l’arrêt attaqué (Saint-Denis La Réunion, 1ᵉʳ décembre 2000), que, par acte du 7 mars 1984, Mme X... a vendu à M. Y... une parcelle de terrain ; que, se prétendant propriétaire de cette parcelle, M. René Raoul Z... a assigné en revendication et en expulsion M. Y..., lequel a appelé en garantie Mme X... ;
Attendu que pour débouter M. René Raoul Z... de ses demandes, l’arrêt retient qu’un document d’arpentage établi le 12 février 1984, dont les données correspondent au terrain vendu, a été signé par M. Martial Z... agissant en qualité de mandataire apparent de son frère, M. René Raoul Z..., et que la "limite d’occupation" a été acceptée à ce moment-là ;
Qu’en statuant ainsi, alors que l’accord des parties sur la délimitation des fonds, n’implique pas, à lui seul, leur accord sur la propriété des parcelles litigieuses, la cour d’appel a violé les textes susvisés".
Les conditions du bornage.
Ces conditions sont les suivantes :
Il faut tout d’abord que les propriétés qui doivent être bornées soient des propriétés privées, et qu’elles appartiennent à des propriétaires différents.
Il faut que les fonds soient attenants l’un à l’autre. Il est par exemple exclu qu’un bornage soit opéré entre des propriétés qui sont séparées par un ruisseau qui forme entre elles une limite naturelle :
"Vu l’article 646 du Code civil ;
Attendu que tout propriétaire peut obliger son voisin au bornage de leurs propriétés contiguës ;
Attendu que, pour accueillir l’action en bornage et fixer la limite est des fonds X... Y..., l’arrêt retient l’axe du ruisseau, limite naturelle reconnue comme telle par les parties sur le parcours amont ;
Qu’en statuant ainsi, alors que l’action en bornage ne peut être exercée lorsque les fonds sont séparés par un ruisseau formant entre eux une limite naturelle, la cour d’appel a violé le texte susvisé".
Un bornage ne peut pas non plus être établi lorsque les propriétés respectives comportent des bâtiments qui se touchent, puisque dans ce cas, ce sont les murs qui permettent de déterminer la limite séparative.
Un bornage ne peut pas non plus être envisagé dans le cadre d’une copropriété :
"Attendu que les consorts Y... font grief à l’arrêt de déclarer irrecevable leur action en bornage, alors, selon le moyen, que l’objet de l’action en bornage est de matérialiser la limite entre deux propriétés distinctes ; que les parties privatives sont la propriété exclusive de chaque copropriétaire et sont donc des propriétés distinctes puisqu’elles sont l’objet de droits de propriété distincts ; que, de plus, les copropriétaires peuvent agir individuellement dans le cadre d’une action pétitoire comme l’action en bornage ; que la matérialisation des limites de leurs parties privatives peut être tout autant nécessaire qu’entre deux fonds ne faisant pas l’objet d’une copropriété ; qu’en l’espèce, la cour d’appel, qui a déclaré irrecevable l’action en bornage de M. X... et Mme A... pour obtenir la matérialisation de la limite non contestée entre leur jardin privatif et celui de M. B... et Mme Z..., a alors violé les dispositions des articles 646 du Code civil et 4, 9 et 15 de la loi du 10 juillet 1965 ;
Mais attendu qu’ayant relevé que l’article 646 du Code civil exigeait que les fonds à délimiter appartiennent à des propriétaires différents, la cour d’appel, qui a retenu que les consorts Y..., comme les consorts C... étaient tous deux copropriétaires de l’immeuble dont faisait partie le jardin, en a exactement déduit que l’action en bornage était irrecevable".
Il ne faut pas non plus qu’un précédent bornage ait déjà été effectué :
"Attendu, selon l’arrêt attaqué (Dijon, 18 mars 2003), que M. X... qui contestait un bornage amiable établi pour délimiter sa parcelle de celle de M. Y..., a assigné ce dernier en bornage ;
Attendu que M. X... fait grief à l’arrêt de déclarer son action irrecevable, alors, selon le moyen :
1/ que la cour d’appel, qui déclare que les paraphes figurant sur le procès-verbal et le croquis sont identiques, a dénaturé ces pièces et violé l’article 1134 du Code civil.
2/ que les juges du fond doivent examiner toutes les pièces versées aux débats ; que la cour d’appel, qui considère que le procès-verbal de bornage et le plan annexé amiable sont opposables à M. X... pour avoir été signés par lui, sans prendre en considération l’acte de l’huissier Z... du 26 janvier 2000 constatant, sur sommation interpellative, que l’expert avait reconnu que le plan annexé n’avait pas été dressé le jour de la signature du procès-verbal, mais par lui à son bureau, a violé l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
3/ que la cour d’appel qui n’a pas examiné la lettre de M. A... du 15 mai 2000, par laquelle il reconnaissait que le croquis n’avait pas été signé par les parties et avait été établi par lui à son bureau, a violé l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
4/ que nul ne peut se constituer de preuve à lui-même ;
que, pour rejeter les prétentions de M. X... faisant valoir que des mentions avaient été ajoutées après sa signature, la cour d’appel ne se fonde que sur les déclarations de l’expert auteur des actes contestés, de sorte qu’elle a violé, ensemble, l’article 1315 du Code civil et l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme ;
5/ que si le procès-verbal de bornage amiable fait la loi des parties, il peut être annulé pour erreur ou dol ; que M. X... faisait valoir qu’il s’était aperçu ultérieurement que les mesures de M. A... étaient erronées ; qu’en statuant comme elle l’a fait, bien qu’il soit démontré qu’il avait signé par erreur sur des éléments qu’il pensait vrais pour émaner de l’expert mais qui ne l’étaient pas, sans s’expliquer sur l’existence d’un vice du consentement de M. X..., la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1109 du Code civil ;
6/ que la cour d’appel, qui n’a pas répondu au moyen selon lequel le bornage amiable était de nul effet, dès lors qu’il n’avait pas été établi avec tous les riverains concernés, qui n’étaient pas tous convoqués, a violé l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu’ayant constaté, sans dénaturation, qu’en apposant leurs signatures précédées de la mention "lu et approuvé" et leurs sept paraphes en pages 1, 2, 3 du procès-verbal ainsi que sur le croquis annexé, les parties énoncées au procès-verbal, y compris M. X..., avaient entendu approuver et accepter l’ensemble, y compris le croquis annexé, du procès-verbal litigieux, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de s’expliquer sur les éléments de preuve qu’elle décidait d’écarter ni de suivre les parties dans le détail de leur argumentation et qui a souverainement retenu que le procès-verbal de bornage faisait la loi des parties, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision".
Un autre arrêt :
"Attendu qu’ayant relevé, sans avoir à procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, que les parcelles 396 et 397 appartenant aux époux B... jouxtaient pour partie le lot 4 et pour partie le lot 5 du lotissement des Antes, appartenant respectivement aux époux Y... et aux époux Z..., le bornage des lots étant intervenu, le 15 octobre 1970, et ayant souverainement retenu qu’il résultait des pièces produites, plans et photographies que le lot 5 de ce lotissement avait été entièrement délimité, le bornage étant matérialisé par la pose de cinq bornes, la limite nord de la parcelle demeurant par ailleurs bornée par le poteau de fer existant faisant partie intégrante du bornage, même s’il n’avait pas été implanté par le géomètre, la cour d’appel, répondant aux conclusions, a relevé, à bon droit, que la nouvelle demande en bornage était irrecevable".
Les effets du bornage.
Le bornage a pour objet de déterminer, et c’est là son effet essentiel, les limites des propriétés.
Il n’est pas un moyen de preuve de la propriété elle-même.
On dit qu’il a un caractère déclaratif, en ce sens qu’il a pour objet la constatation d’un tracé de frontières conformes à la contenance des propriétés, le bornage n’est pas un acte translatif de propriété.
Il a également une valeur définitive, ce qui signifie qu’il ne peut être remis en cause et il ne peut être fait un bornage nouveau si la preuve est apportée qu’un bornage a déjà été effectué.
Il n’empêche pas cependant la prescription acquisitive de s’exercer que si une possession contraire au bornage est exercée par l’un des propriétaires ou occupants.
Si le procès-verbal de bornage comporte un accord sur la cession d’une parcelle objet d’un empiètement, il fait obstacle à la demande en démolition de la construction qui est ainsi édifiée sur l’empiètement :
"Attendu qu’ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que selon l’expert, "à la suite de la reconstruction de l’hôtel en 1972 ou 1973 est résulté un empiètement d’une surface de 18 mètres carrés de la propriété Père sur la propriété Y..." qui était parfaitement connu de Mme Y... et de Mlle Z... depuis un bornage réalisé le 26 juin 1978 et que le procès-verbal de bornage incluait un accord aux termes duquel Mme Y... acceptait de céder à Mlle Z... les parcelles, objet de l’empiètement, les parties s’engageant à signer le document d’arpentage nécessaire à cette cession, et constaté que l’accord ne contenait aucune condition, que sa validité avait été confirmée par Mme Y... qui produisait le courrier adressé le 20 septembre 1979 par son notaire à Mlle Z..., en vue de la signature du document d’arpentage et que Mme Y... ne produisait aucune autre mise en demeure, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, appréciant souverainement la volonté des parties, a, sans dénaturation, répondant aux conclusions, exactement retenu que l’accord interdisait à Mme Y... de réclamer la démolition de l’ouvrage incriminé".
Il peut être attaqué en cas de vice du consentement tel que l’erreur, le dol ou la violence.
Faut-il publier le procès-verbal de bornage ou le jugement de bornage ?
Il n’est pas obligatoire de faire publier le procès-verbal de bornage au fichier immobilier.
Mais il est prudent de le faire, afin qu’aucune contestation sur les limites du terrain ne soit possible par les propriétaires actuels des terrains concernés et par les suivants.
Le recours à un notaire est nécessaire pour cette publication.
Discussions en cours :
Bonjour
Merci pour cet article tres complet.
Je suis sur une operation de division de batis, qui decoupe un tenement en 4 lots d’habitation (apres changement de destination de granges). Il n’y a pas de TAB et l’unité foncière est bornée soit par les batis soit par un mur (separations avec d’autres proprietes privées).
Le bornage dans mon cas est il obligatoire ?
Merci par avance.
Bonjour,
Est il possible que les bornes ne soient pas respecté pour délimiter un terrain.
Et de plus est il normal que cette même limite ne soit pas droite et donc ne rejoigne pas les bornes entre elles
Que ce passe-t-il lorsque le bornage ne respecte pas les dimensions précises écrites dans l’ancien acte de vente ? Les dimensions se trouvent modifiées.
J’avais trouvé un article parlant de la réussite de l’action en annulation de bornage mais impossible de la retrouver :(
Merci
Bonjour, le faire de déterminer si un mur est mitoyen ou appartenant à l un des fonds relève bien d’une action de bornage. Le bornage, réalisé par un géomètre-expert foncier, sert à préciser les limites d un fonds vis àvis des fonds voisins, pas seulement à "poser des bornes" (les bornes servent seulement à matérialiser la limite entre deux fonds s il n existe pas de limite concrète déjà existante).
Cela montre aussi que il ne faut pas lancer des procédures à la légère et que seuls les avocats, vrais spécialistes de ces questions peuvent vous indiquer la marche à suivre.
Le seul spécialiste en matière foncière reste le géomètre expert (cf. loi du 7 mai 1946), qu’il convient de consulter au préalable.
En cas d’échec d’une procédure de bornage amiable, il convient alors en effet de consulter un avocat pour intenter une procédure judiciaire.