I/ Qu’est-ce que l’aménagement du temps de travail ?
En principe, les heures supplémentaires sont décomptées et majorées sur la semaine civile (du lundi au dimanche)
Exemple : pour un contrat de 35 heures hebdomadaire, les heures supplémentaires effectuées au-delà de cette durée sont calculées, payées ou récupérées avec les majorations, chaque semaine.
Cependant, l’article L3121-44 du Code du travail offre une dérogation : le temps de travail n’est plus calculé hebdomadairement, mais à la fin d’une période déterminée (appelée « période de référence »).
Cela permet de compenser les heures travaillées lors des pics d’activité par des heures non travaillées lors des creux.
Exemple : Le temps de travail pour un temps plein est de 1 607 heures/an
Le salarié peut par exemple travailler : 42 heures en haute activité ; 28 heures en basse activité.
Les heures supplémentaires dépassant 1 607 h seront calculées et majorées à la fin de la période retenue (par exemple l’année civile).
Ainsi, les employeurs n’ont plus à décompter les heures supplémentaires chaque semaine, mais au terme de la période retenue.
II/ Par quel biais est-il possible de mettre en place l’aménagement du temps de travail dans les hôtels, cafés, restaurants (HCR) ?
Les employeurs de la branche HCR peuvent mettre en place un dispositif d’aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine :
- Par accord d’entreprise
- Ou, à défaut d’accord d’entreprise, en appliquant l’avenant n° 19 du 29 septembre 2014 relatif à « l’aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l’année ».
Ainsi, l’accord négocié au sein de l’entreprise primera sur l’avenant n° 19 de la convention collective HCR.
III/ Que prévoit l’avenant n° 19 du 29 septembre 2014 de la convention collective HCR ?
1. Les salariés concernés.
Sont concernés :
- Les salariés à temps plein, en CDI et CDD.
Ne sont pas concernés :
- Les salariés à temps partiel
- Les salariés en contrat d’apprentissage ou de professionnalisation.
2. La période de référence.
Les entreprises peuvent organiser la durée du travail sur une « période de référence » supérieure à la semaine et, au plus, égale à l’année.
Dans les entreprises disposant d’un salarié mandaté ou d’un délégué syndical, la détermination de la période de référence doit faire l’objet d’une négociation.
Dans les autres entreprises, la période de référence est déterminée par l’article 2.1 de l’avenant n° 19 :
- Pour les entreprises permanentes : année civile ou exercice comptable
- Pour les salariés saisonniers des entreprises permanentes : la durée du CDD saisonnier
- Pour les entreprises saisonnières : la période d’ouverture de l’établissement.
3. La durée du travail sur la période de référence.
Lorsque la période de référence correspond à une période de 12 mois consécutifs, la durée du travail est fixée à 1 607 heures.
Lorsque la période de référence est inférieure à 12 mois, la durée du travail correspond au nombre de semaines multiplié par la durée légale de travail.
Exemple : un hôtel saisonnier est ouvert 4 mois dans l’année. La durée du travail de référence est égale à 4 mois x 4,333 (nombre moyen de semaines dans un mois) x 35 heures par semaine arrondi au chiffre inférieur, soit 606 heures.
A l’intérieur de la période de référence, la durée hebdomadaire peut varier de 0 à 48 heures, selon les besoins de l’entreprise.
Mais attention : la durée de travail ne doit pas être supérieure aux durées maximales journalières et hebdomadaires, rappelées par l’article 4 de l’avenant n° 19.
4. Information des salariés et délais de prévenance.
L’employeur est tenu de communiquer aux salariés les jours de travail ainsi que les horaires au moins 15 jours à l’avance, par tous moyens.
En cas de modification du planning, les salariés doivent être informés au moins 8 jours à l’avance. Ce délai peut être réduit en cas de circonstances exceptionnelles (Exemple : arrivées ou départs importants de clients non prévus, retards dans les arrivées et départs, conditions météorologiques, absences imprévues de personnel, etc.).
En pareil cas, le salarié a droit, si sa durée de travail dépasse la durée prévisionnelle initiale, à des contreparties définies au niveau de l’entreprise.
A défaut de contreparties fixées, le salarié a droit à un repos compensateur de 10% des heures effectuées au-delà de la durée initialement prévue.
5. Le décompte des heures supplémentaires.
Constituent des heures supplémentaires, les heures effectuées au-delà de 1.607 heures sur une période de référence égale à 12 mois.
Ces heures supplémentaires donnent droit à une majoration de salaire ou à un repos compensateur de remplacement (RCR), calculées comme suit :
- Les heures supplémentaires effectuées entre 1 607 heures et 1 790 heures (correspondant en moyenne aux 36,37, 38, 39ème heures) sont majorées de 10%
- Les heures supplémentaires effectuées entre 1 791 et 1 928 heures (correspondant en moyenne aux 40,41, et 42ème heures) sont majorées de 20%
- Les heures supplémentaires effectuées entre 1 929 et 1 973 heures (correspondant en moyenne à la 43ème heure) sont majorées de 25%
- Les heures supplémentaires effectuées à partir de 1 974 heures (correspondant en moyenne à la 44ème heure et au-delà) sont majorées de 50%.
Lorsque l’aménagement est inférieur à 12 mois, il sera nécessaire d’effectuer un calcul par rapport à la période de référence retenue.
Exemple : un hôtel ouvre 4 mois dans l’année. Le volume d’heure à effectuer sur la période de référence est de 606 heures (Cf. exemple ci-dessus).
A la fin des 4 mois, le salarié a travaillé 696 heures, soit 90 heures supplémentaires :
- 69,32 heures seront majorées ou compensées à 10% (équivalent à 4 heures supplémentaires entre 36 et 39 heures x 17,33 semaines travaillées (soit 4 mois x 4,333)
- 20,68 heures majorées ou compensées à 20%.
6. Le lissage de la rémunération.
Le lissage de la rémunération permet de maintenir une même rémunération mensuelle sans prendre en considération les variations de la durée de travail.
L’avenant n° 19 indique que les entreprises assurent aux salariés concernés un lissage de leur rémunération mensuelle :
- Soit sur la base d’un horaire mensuel de 151,67 heures
- Soit sur la base d’un horaire incorporant un nombre défini d’heures supplémentaires (exemple : un horaire mensuel de 169 heures).
Dans ce dernier cas, une régularisation interviendra à l’échéance de la période de référence, déduction faite des heures supplémentaires payées durant la période de référence.
IV/ Comment mettre en place, concrètement, l’aménagement du temps de travail dans son hôtel, son café ou son restaurant ?
L’article L3121-43 du Code du travail prévoit que la mise en place d’un dispositif d’aménagement du temps de travail sur une période excédant la semaine par le biais d’un accord collectif ne constitue pas une modification du contrat de travail pour les salariés à temps complet.
Cette disposition a été validée par le Conseil constitutionnel, qui a considéré que l’atteinte à la liberté contractuelle (des salariés) était justifiée par les exigences « d’adaptation du temps de travail aux évolutions des rythmes de production de l’entreprise » [1].
Ainsi, les entreprises de la branche HCR peuvent mettre en œuvre directement cet aménagement, sur la base de l’avenant n°19 du 29 septembre 2014.
Il n’est pas requis d’obtenir l’accord préalable des salariés, puisqu’il s’agit d’un simple changement des conditions de travail.
Afin d’assurer une transition en douceur, nous recommandons d’informer les salariés, de manière transparente et pédagogique, de la mise en œuvre de ce dispositif (réunions de services, affichages, etc.)
Par ailleurs, le CSE (lorsqu’il existe) doit être consulté avant la mise en œuvre de l’aménagement du temps de travail, au titre de ses compétences relatives à la politique sociale de l’entreprise, des conditions de travail et de l’emploi (Art. L2312-17 Code du travail).
Discussions en cours :
Bonjour,
L’avenant n°19 du 29 septembre 2014, n’exclut pas expréssement la modulation pour les salariés à temps partiel, comme il le précise (article 1) pour "les salariés embauchés sous contrat en alternance".
Les dispositions de l’avenant précédent du 5 février 2007, ont donc vocations à s’appliquer pour les salariés à temps partiel.
Le problème réside dans le fait que rien n’est précisé pour la majoration des heures complémentaires.
Par analogie avec le décompte et les majorations des heures supplémentaires (temps plein), j’applique un taux de majoration de 10% et 25%.
Bonjour
L’article 1 de l’avenant précise que "Le présent avenant concerne l’ensemble des salariés embauchés à temps plein" ce qui à mon sens exclu les collaborateurs à temps partiel.