Facebook et le droit du travail, par Isabelle Boukhris, Avocat

Isabelle BOUKHRIS- LEKS AVOCATS
Tél : 01.40.08.00.80
Mail : isabelle.boukhris chez wanadoo.fr et iboukhris chez leks-avocats.fr

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« Attention à ce que vous postez sur Facebook,
cela pourrait se retourner contre vous tôt ou tard ".
Barack Obama

Lors d’un discours, le Président Barack Obama a mis en garde le peuple américain sur les effets négatifs possibles des nouvelles technologies du net et plus particulièrement des blogs, réseaux sociaux comme Facebook et autres Twitter.

Récemment, dans de nombreux Etats la question de la censure de Facebook mais aussi de son interdiction sur les postes de travail s’est posée.

L’employeur a tendance à vouloir limiter le temps passé par ses salariés durant les pauses comme les tentations de se connecter sur Internet durant les heures de travail.
Plusieurs sociétés ont mis en place des filtres interdisant la connexion à des Sites tels que Facebook ou l’accès à certaines messageries comme msn sur les postes de travail des salariés. L’Employeur veille ainsi au travail effectif de ses salariés.

En France, le débat vient de rebondir sur la question des messages postés sur le réseau Facebook par des salariés d’une même entreprise.

S’agit-il de propos tenus dans la sphère privée ? Y-a-t-il confusion avec la sphère professionnelle ? L’employeur peut-il utiliser son pouvoir disciplinaire à l’encontre des salariés ? Y-a-t-il trouble objectif caractérisé pour l’entreprise ?

Pour y répondre, il faut prendre en compte l’équilibre qui existe entre deux notions : le domaine de la vie privée du salarié et l’intérêt légitime de l’entreprise avec en filigrane la loyauté des parties dans l’exécution du contrat de travail.

En principe, un fait relevant de la vie privée ne peut caractériser une faute du salarié (Cass. soc., 17 avr. 1991, n° 90-42.636 : Juris-Data n° 1991-001156 ; Bull. civ. 1991, V, n° 201). Le respect de la vie privée est un droit fondamental qui assure la dignité, l’intégrité et la liberté de l’être humain. La personne du salarié – et les droits et libertés qui y sont attachés – ne disparaît pas à raison du lien de subordination né de la relation de travail.

Par ailleurs, les salariés bénéficient d’un droit de s’exprimer « sur le contenu, les conditions d’exercice et l’organisation de leur travail » (L. 2281-1 du Code du travail) : ce droit d’expression peut parfaitement s’exercer en dehors de l’entreprise, sur un réseau communautaire par exemple.

La Cour de cassation a ainsi décidé que « le fait pour un salarié de porter à la connaissance de l’inspecteur du travail des faits concernant l’entreprise et lui paraissant anormaux, qu’ils soient ou non susceptibles de qualification pénale, ne constitue pas en soi une faute » (Cass. soc., 14 mars 2000, n° 97-43.268 : JurisData n° 2000-000983 ; Bull. civ. 2000, V, n° 104 ; RJS 2000, n° 388).

L’employeur ne peut, sans méconnaître le respect dû à la vie privée du salarié, se fonder sur le contenu d’une correspondance privée pour sanctionner son destinataire (Cass. ch. mixte, 18 mai 2007, n° 05-40.803, P+B+R+I, A. c/ SA Haironville : Juris-Data n° 2007-038898).

Les écrits diffusés sur un réseau communautaire virtuel relèvent assurément de la même protection.

Mais à quel moment s’arrête la protection de la vie privée du salarié ?

Cette protection s’arrête lorsque les propos d’un salarié causent un trouble objectif caractérisé au sein de l’entreprise (Cass. soc., 20 nov. 1991 : Juris-Data n° 1991-003219 ; Bull. civ. 1991, V, n° 512) et lorsque la correspondance n’est plus privée, car elle est diffusée.

L’employeur peut se servir de la correspondance privée d’un salarié pour le licencier, si le contenu du message a été révélé par l’un des destinataires qui s’en est plaint à l’employeur et qu’il y a trouble manifeste pour l’entreprise.

Sur Facebook, les informations données par les salariés ne peuvent être transmises qu’en comité restreint.

Ne peut-on alors faire un parallèle avec les conversations privées entre amis ? Les propos tenus devront être analysés et les juges devront dire si le licenciement (sanction disciplinaire la plus grave) était justifié.

Toutefois, le salarié reste tenu envers l’employeur d’une obligation née du contrat de travail qui est permanente et par conséquent se poursuit même en dehors du travail : c’est l’obligation de loyauté.

A-t-il failli à cette obligation ?

Affaire à suivre…

Isabelle BOUKHRIS- LEKS AVOCATS
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