Les plus-values immobilières des biens détenus depuis plus de 15 années désormais imposées !

Par Nicolas Marguerat, Avocat

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Dans une chronique mise en ligne en novembre 2010, nous nous interrogions sur « L’alourdissement de l’imposition des plus-values immobilières » alors même que la loi de finances pour 2011 était en discussion devant le Parlement.

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A cette époque, nous avions conclu notre chronique en indiquant que : « les propriétaires de biens immobiliers qui souhaitent vendre leurs biens ont tout intérêt à ne pas trop attendre !!! ».

Espérons que nombre d’entre eux ont suivi notre conseil !

En effet, dans son communiqué du 24 août 2011 relatif au « Plan gouvernemental de réduction contre les déficits publics », le gouvernement a retenu l’une des pistes de réflexion que nous avions avancées, à savoir la suppression définitive de l’abattement de 10% par année de détention au delà de la 5ème année et ceci à effet immédiat c’est-à-dire pour les compromis ou promesses de ventes signées à compter du 25 août 2011.

Il s’agit là pour nombre de contribuables qui envisagent de céder un bien immobilier d’une bien mauvaise surprise au retour de leurs vacances !

Cette réforme ne concerne pas les plus-values afférentes à la cession de la résidence principale du contribuable qui sont et demeureront (pour l’instant) intégralement exonérées d’imposition.

Un petit rappel, depuis la réforme de l’imposition des plus-values immobilières intervenue en 2004, les plus-values sont imposées de la manière suivante :

La plus-value brute est égale à la différence entre le prix de cession et le prix de revient du bien (qui correspond au prix d’acquisition majoré, d’une part, des frais d’acquisition évalués forfaitairement à 7,5% du prix d’acquisition et, d’autre part, des éventuels travaux pris pour leur montant réel ou, éventuellement si le bien a été détenu plus de 5 années, pour un montant forfaitaire de 15% du prix d’acquisition).

On applique sur cette plus-value brute un abattement de 10% pour chaque année de détention au-delà de la 5ème année puis ensuite un abattement forfaitaire de 1.000 euros (ou de 2.000 euros si le bien est détenu par un « couple ») pour obtenir la plus-value nette.

La plus-value nette (après application de ces 2 abattements) est ensuite imposée, dans le délai de 2 mois, au taux forfaitaire de 19% majoré des contributions sociales de 12,3%, soit 31,3% au total (depuis 2011).

Ce régime, qui était applicable, avait une double conséquence, d’une part, l’exonération des plus-values immobilières pour les biens cédés plus de 15 années après leur acquisition et, d’autre part, de faire échapper à l’Impôt progressif sur le revenu les plus-values immobilières puisqu’elles sont taxées à un taux forfaitaire (de 19% + contributions sociales de 12,3%).

Lorsque le Président de la République avait, en novembre 2010, annoncé une « réforme de la fiscalité du patrimoine », il avait été envisagé une modification, ou plus précisément une augmentation, de l’imposition des plus-values immobilières.

Cependant, la réforme de la fiscalité du patrimoine adoptée en juin dernier n’avait finalement introduit aucune modification concernant l’imposition de ces plus-values immobilières.

Seule la loi de finances pour 2011 adoptée le 30 décembre 2010 avait déjà augmenté à compter du 1er janvier 2011, d’une part, le taux d’imposition forfaitaire des plus-values immobilières de 16 à 19% afin de les aligner sur celui des plus-values mobilières et, d’autre part, le taux du prélèvement social sur les revenus du capital de 2 à 2,2% faisant passer les contributions sociales de 12,1 à 12,3%.

Lors des débats parlementaires le député Gilles Carrez avait présenté un amendement, qui avait été finalement rejeté, proposant d’assujettir aux prélèvements sociaux les plus-values immobilières quelle que soit la durée de détention du bien, et ce sans abattement.

Il s’agissait d’une préfiguration de la réforme annoncée au Conseil des Ministres de mercredi dernier mais en plus « soft ».

La solution qui a été finalement retenue est plus radicale puisqu’elle consiste en la suppression définitive de l’abattement de 10% par année de détention au delà de la cinquième année de détention aussi bien pour l’imposition forfaitaire que pour les prélèvements sociaux.

Cette suppression va avoir pour conséquence d’aboutir à une imposition de l’intégralité de la plus-value résultant de l’augmentation intrinsèque de la valeur du bien au taux de 32,5% (imposition forfaitaire des plus-values immobilières de 19% + contributions sociales de 12,3 passant à 13,5% compte tenu d’une augmentation de 1,2% de celles-ci également annoncée le 24 août 2011).

Pour parer à toute critique, ainsi qu’à une éventuelle censure du Conseil Constitutionnel, le gouvernement a annoncé un dispositif ayant pour effet de corriger les effets de l’inflation en fonction de la durée de détention du bien sur le montant de la plus-value dégagée.

Il est probable que ce dispositif sera inspiré du « coefficient d’érosion monétaire » qui existait jusqu’en 2003 et qui avait déjà, à l’époque, pour effet de neutraliser l’inflation.

En conclusion, le propriétaire qui pensait être exonéré, totalement ou partiellement, sur l’imposition de la cession d’un bien qu’il possédait (généralement depuis plus de 15 années) va être prélevé d’une imposition de 32,5%, soit près d’un tiers du montant de sa plus-value, pour autant qu’il n’ait pas signé de compromis ou de promesse de vente avant le 25 août 2011.

Et les propriétaires de biens immobiliers ne sont peut être pas au bout de leurs (mauvaises) surprises…

Il existe encore une solution qui serait encore plus radicale et qui consisterait en la suppression de l’imposition forfaitaire des plus-values immobilières pour soumettre la plus-value imposable à l’Impôt sur le Revenu et à son barème progressif…

Cette dernière hypothèse aurait néanmoins l’avantage ou l’inconvénient, selon le cas, de réintroduire la progressivité dans l’imposition des plus-values et, ainsi, de ne pas traiter (et pénaliser) tous les contribuables de manière uniforme mais elle aurait des conséquences négatives sur le taux de l’impôt sur le revenu l’année de la cession d’un bien immobilier.

Maigre consolation, seule l’exonération de la résidence principale devrait demeurer … pour l’instant !

En effet, une telle suppression serait un frein à l’acquisition par les ménages de résidences principales plus grandes et donc, par voie de conséquence, à l’accession à la propriété et serait extrêmement impopulaire, surtout en année électorale !

Nicolas MARGUERAT
Avocat à la Cour
nmarguerat.avocat chez orange.fr

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