1) Faits.
Un directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) a validé par le biais d’une décision, l’accord collectif portant rupture conventionnelle collective d’un établissement d’une société.
Un syndicat n’ayant pas signé l’accord collectif, a par conséquent saisi le Tribunal administratif d’Orléans pour lui demander l’annulation de la DIRECCTE.
Toutefois la demande a été rejetée par le Tribunal administratif.
Par conséquent, le syndicat a fait appel du jugement rendu par le tribunal sur le fondement de l’article L1237-19 du Code du travail qui dispose qu’
« un accord collectif peut déterminer le contenu d’une rupture conventionnelle collective excluant tout licenciement pour atteindre les objectifs qui lui sont assignés en termes de suppression d’emplois ».
2) Moyens.
Le syndicat demande à la Cour administrative d’appel de Versailles d’annuler le jugement du Tribunal administratif d’Orléans ainsi que la décision du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi sur la validation de l’accord collectif portant rupture conventionnelle collective.
En effet, le syndicat soutient que l’accord collectif portant rupture conventionnelle collective au sein de la société, tendait en fait à la fermeture d’un site de la société, et que cela était en conséquence, pas exclusif de tout licenciement, contrairement à l’application de l’article L1237-19 du Code du travail.
A cet égard, le syndicat relève que le projet de réorganisation industrielle des activités de la société prévoyait la fermeture du site visé par l’accord collectif, devant être vendu après sa désindustrialisation.
De cette manière, le syndicat considère que dès lors que la
« société avait d’ores et déjà décidé la fermeture du site, les salariés concernés par l’accord collectif ne pouvaient être regardés comme ayant été en mesure de faire un réel choix entre le départ volontaire et le maintien dans leur emploi ».
3) Dès lors qu’un site est voué à la fermeture, peut-il y avoir accord sur une rupture conventionnelle collective ? Non, répond la Cour administrative d’appel de Versailles.
La Cour administrative d’appel répond par la négative et annule le jugement du Tribunal administratif d’Orléans et la décision de la DIRECCTE.
Ainsi, la DIRECCTE ne peut pas valider un accord collectif portant rupture conventionnelle collective visant les salariés d’un établissement qui est destiné à fermer.
Les ruptures conventionnelles collectives ont été créées par l’ordonnance n°2017-1887 du 22 septembre 2017, pour faciliter les ruptures de contrat de travail et surtout pour éviter le recours aux PSE
Du fait de la relative nouveauté de ce régime de rupture du contrat de travail, qui est exclusif de tout licenciement, la jurisprudence joue donc un rôle majeur dans son interprétation, notamment au regard de son application à la fermeture définitive d’un site entier d’une entreprise, conformément à l’article L1237-19 du Code du travail.
Par conséquent, il s’agissait surtout de déterminer si la mise en place d’une rupture conventionnelle collective dans ce contexte particulier, s’assimilait ou non, à un licenciement ?
La Cour administrative d’appel de Versailles a répondu sévèrement par l’affirmative, restreignant de ce fait, le régime de la rupture conventionnelle collective, qui peut se révéler être un instrument dangereux dans les mains des employeurs qui peuvent l’utiliser pour éviter le recours à un PSE.
En fait, la Cour administrative d’appel n’a fait qu’assurer le respect de la finalité de la rupture conventionnelle collective, qui consiste à exclure tout licenciement.
La décision de la Cour administrative d’appel n’est toutefois pas novatrice en ce qu’elle permet de mettre en application les réponses données par le Ministère du travail en novembre 2019 sur plusieurs questions concernant la rupture conventionnelle collective :
« La RCC ne peut et ne doit pas être proposée dans un contexte de difficultés économiques aboutissant de manière certaine à une fermeture de site, ce qui aurait pour effet de fausser le caractère volontaire de l’adhésion au dispositif et de ne pas permettre le maintien dans l’emploi des salariés non candidats à un départ ».
Cet arrêt doit être approuvé.
A lire également :
Rupture conventionnelle collective : le jackpot fiscal pour les salariés ! (Merci Macron).
French labour law - The Rupture Conventionnelle Collective (RCC - collective mutual agreed Termination) [1].
Source :
CAA Versailles, 4e chambre, arrêt n°21VE02220 du 20 octobre 2021.