La rupture du CDD pour faute grave.

Par Xavier Berjot, Avocat.

15855 lectures 1re Parution: Modifié: 5  /5

Explorer : # faute grave # rupture anticipée # procédure disciplinaire # contrat à durée déterminée

Ce que vous allez lire ici :

La rupture anticipée d'un contrat à durée déterminée (CDD) peut être prononcée pour faute grave. La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. L'employeur doit prouver la faute grave et suivre une procédure disciplinaire. La rupture du CDD pour faute grave se déroule en trois étapes : convocation à l'entretien préalable, tenue de l'entretien préalable et notification des griefs. Le salarié peut se faire assister lors de l'entretien préalable. L'employeur doit notifier sa décision de rupture par lettre recommandée avec avis de réception. Le salarié n'a pas droit à l'indemnité de fin de contrat mais conserve le droit à l'indemnité compensatrice de congés payés.
Description rédigée par l'IA du Village

En principe, le contrat à durée déterminée (CDD) prend fin à l’échéance du terme. La loi prévoit, cependant, des cas particuliers pouvant justifier la résiliation unilatérale du CDD, dont la faute grave du salarié.

-

1. Règles générales.

Le CDD est la forme usuelle de la relation de travail et la conclusion d’un CDD n’est possible que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire et seulement dans les cas prévus par la loi [1].

Le CDD doit obligatoirement faire l’objet d’un écrit et il ne peut avoir ni pour objet, ni pour effet, de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

Lorsque la période d’essai est échue, le CDD ne peut s’achever, normalement, que dans deux cas :

  • Soit parce qu’il arrive à son terme
  • Soit parce qu’il fait l’objet d’une rupture anticipée.

La rupture anticipée du CDD est celle qui intervient :

  • Avant le terme initialement fixé s’il s’agit d’un contrat conclu « de date à date »
  • Avant la fin de la période initiale ou avant la réalisation de son objet s’il s’agit d’un contrat à terme incertain [2].

Plus précisément, le CDD peut être rompu de manière anticipée dans les cas suivants, limitativement énumérés aux articles L1243-1 et L1243-2 du Code du travail :

  • Accord entre l’employeur et le salarié
  • Demande du salarié qui justifie d’une embauche en CDI
  • Faute grave (ou faute lourde) du salarié ou de l’employeur
  • Force majeure
  • Inaptitude professionnelle ou non-professionnelle constatée par le médecin du travail.

Attention : s’il s’agit d’un salarié protégé (délégué syndical, membre élu du CSE, etc., la rupture du contrat ne peut intervenir que sur autorisation de l’inspecteur du travail.

2. La caractérisation de la faute grave.

La faute grave est, selon la formule de la Cour de cassation, « celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise » [3].

Cette faute résulte donc d’un fait (ou d’un ensemble de faits) imputable(s) au salarié, qui constitue(nt) une violation des obligations découlant du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien de l’intéressé dans l’entreprise.

L’employeur qui invoque la faute grave doit la prouver, ce qui implique notamment de la caractériser dans la lettre de rupture du CDD pour faute grave [4].

A titre d’exemple, commet une faute grave le salarié ayant refusé de partir en livraison puis ayant abandonné son poste [5].

3. Les règles de prescription.

En application des règles disciplinaires, la procédure doit être engagée au plus tard dans un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur a eu connaissance du ou des faits fautifs [6].

La connaissance des faits, par l’employeur, doit être comprise comme l’information exacte sur la réalité, la nature et l’ampleur des faits reprochés au salarié.

Par ailleurs, aucune sanction antérieure de plus de trois ans à l’engagement des poursuites disciplinaires ne peut être invoquée à l’appui d’une nouvelle sanction.

Attention : il convient de vérifier si la convention collective, un accord d’entreprise, le règlement intérieur, etc. prévoient une procédure particulière en cas de rupture du CDD pour faute grave.

4. Le respect de la procédure disciplinaire.

Il résulte de l’article L1242-14 du Code du travail que les dispositions relatives à la rupture du CDI ne s’appliquent pas aux salariés titulaires d’un CDD.

Cet article dispose en effet que

« les dispositions légales et conventionnelles ainsi que celles résultant des usages applicables aux salariés titulaires d’un contrat de travail à durée indéterminée s’appliquent également aux salariés titulaires d’un contrat à durée déterminée, à l’exception des dispositions concernant la rupture du contrat de travail ».

La jurisprudence a précisé la procédure applicable aux ruptures anticipées du CDD reposant sur une faute grave du salarié [7].

La rupture anticipée du CDD prononcée pour faute grave constituant une sanction, cette rupture ne peut être prononcée qu’après le respect de la procédure disciplinaire prévue aux articles L1332-1 à L1332-3 du Code du travail.

5. La procédure à suivre.

La procédure de la rupture du CDD pour faute grave se déroule en trois étapes : la convocation du salarié à un entretien préalable, la tenue de l’entretien préalable et la notification des griefs.

5.1. La convocation à l’entretien préalable.

L’employeur qui envisage de rompre le CDD d’un salarié pour faute grave doit le convoquer, avant toute décision, à un entretien préalable.

Une règle spécifique s’applique en outre à ce type de rupture : la mise à pied conservatoire.

Cette mesure peut être définie comme l’acte par lequel l’employeur demande au salarié de ne plus se rendre à son poste de travail dans l’attente de la décision à intervenir.

Elle a pour effet de suspendre immédiatement l’exécution du contrat de travail, dont la rémunération.

La convocation, comportant la mise à pied conservatoire, doit être effectuée par lettre recommandée ou remise en main propre contre décharge.

Cette lettre doit indiquer l’objet de la convocation.

L’entretien préalable ne peut pas avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation.

NB. Les jours ouvrables correspondent au lundi jusqu’au samedi inclus, à l’exclusion des dimanches et des jours fériés.

La lettre de convocation envoyée par lettre recommandée ou remise en main propre doit :

  • Préciser explicitement que la rupture du CDD est envisagée
  • Mentionner les dates, heure et lieu de l’entretien
  • Rappeler la possibilité, pour le salarié, de se faire assister.

Le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise.

La faculté, pour le salarié convoqué à un entretien préalable au licenciement dans une entreprise dépourvue d’institutions représentatives du personnel, de se faire assister par un conseiller de son choix ne sont applicables qu’à la procédure de licenciement et non à celle de la rupture du CDD [8].

5.2. La tenue de l’entretien préalable.

Le salarié qui a été convoqué à l’entretien préalable est libre de s’y rendre ou non.

Son absence à cet entretien ne rend pas la procédure irrégulière.

Au cours de l’entretien préalable, l’employeur doit indiquer les motifs de la décision envisagée et recueillir les explications du salarié.

En aucun cas, il ne doit faire part de sa décision de rompre le CDD.

En effet, au stade de l’entretien préalable, la mesure de rupture du contrat ne peut être considérée que comme un projet.

Ce n’est qu’à l’issue d’un délai de deux jours ouvrables minimum que l’employeur peut faire part de sa décision au salarié.

Le Code du travail n’instaure pas de durée particulière pour l’entretien préalable qui doit permettre au salarié de présenter toutes ses explications.

Enfin, précisons que l’employeur doit exposer au salarié, de manière exhaustive, tous les motifs qui seront, ensuite, mentionnés dans la lettre de rupture du CDD pour faute grave.

5.3. La notification de la rupture.

Lorsque l’employeur décide de rompre le contrat de travail du salarié, il doit lui notifier sa décision par lettre recommandée avec avis de réception.

Cette lettre comporte l’énoncé du ou des motifs invoqués par l’employeur [9].

Elle ne peut être expédiée moins de deux jours ouvrables après la date prévue de l’entretien préalable.

Outre le motif de faute grave, la lettre doit mentionner, le cas échéant :

  • Le fait que la mise à pied conservatoire est confirmée
  • La levée de la clause de non-concurrence
  • Le matériel qu’il doit restituer.

6. Les indemnités dues au salarié.

La faute grave prive le salarié de l’indemnité de fin de contrat [10] mais pas de l’indemnité compensatrice de congés payés, calculée sur la seule période antérieure à la rupture.

Xavier Berjot
Avocat Associé au barreau de Paris
Sancy Avocats
xberjot chez sancy-avocats.com
https://bit.ly/sancy-avocats
LinkedIn : https://fr.linkedin.com/in/xavier-berjot-a254283b

Recommandez-vous cet article ?

Donnez une note de 1 à 5 à cet article :
L’avez-vous apprécié ?

15 votes

Cet article est protégé par les droits d'auteur pour toute réutilisation ou diffusion (plus d'infos dans nos mentions légales).

Notes de l'article:

[1C. trav. art. L1242-2 à L1242-4.

[2Circ. DRT 90-18 du 30-10-1990.

[3Cass. soc. 27-9-2007, n° 06-43867.

[4Cass. soc. 17-5-1990, n° 88-42.123.

[5Cass. soc. 18-4-2008, n° 07-42.457.

[6C. trav. art. L1332-4.

[7Cass. soc. 11-4-1996, n° 93-42.632.

[8Cass. soc. 25-10-2000, n° 98-43.760.

[9Cass. soc. 21-5-2002, n° 00-41.400.

[10C. trav. art. L1243-10.

"Ce que vous allez lire ici". La présentation de cet article et seulement celle-ci a été générée automatiquement par l'intelligence artificielle du Village de la Justice. Elle n'engage pas l'auteur et n'a vocation qu'à présenter les grandes lignes de l'article pour une meilleure appréhension de l'article par les lecteurs. Elle ne dispense pas d'une lecture complète.

A lire aussi :

Village de la justice et du Droit

Bienvenue sur le Village de la Justice.

Le 1er site de la communauté du droit: Avocats, juristes, fiscalistes, notaires, commissaires de Justice, magistrats, RH, paralegals, RH, étudiants... y trouvent services, informations, contacts et peuvent échanger et recruter. *

Aujourd'hui: 156 320 membres, 27838 articles, 127 254 messages sur les forums, 2 750 annonces d'emploi et stage... et 1 600 000 visites du site par mois en moyenne. *


FOCUS SUR...

• Assemblées Générales : les solutions 2025.

• Voici le Palmarès Choiseul "Futur du droit" : Les 40 qui font le futur du droit.




LES HABITANTS

Membres

PROFESSIONNELS DU DROIT

Solutions

Formateurs