Le reclassement du salarié inapte : obligations de l’employeur et risques juridiques.

Par Noémie Le Bouard, Avocat.

935 lectures 1re Parution: 4.28  /5

Explorer : # reclassement # inaptitude # obligations de l'employeur # risques juridiques

Ce que vous allez lire ici :

Le reclassement des salariés déclarés inaptes est une obligation légale pour l’employeur, qui doit agir rapidement et de bonne foi. Une inaction prolongée peut entraîner des sanctions. Les employeurs doivent respecter des procédures claires et impliquer le salarié pour éviter des contentieux.
Description rédigée par l'IA du Village

Le reclassement du salarié inapte est une problématique récurrente en droit du travail. Ce processus soulève des enjeux importants pour l’employeur, notamment au regard des délais et de la bonne foi dans l’exécution des obligations légales. Une gestion inappropriée peut conduire à des litiges lourds de conséquences, comme l’a récemment illustré une affaire portée devant la Cour de cassation [1].

-

Les fondements juridiques du reclassement du salarié inapte.

1. Déclaration d’inaptitude et obligations de l’employeur.

Lorsqu’un salarié est déclaré inapte par le médecin du travail, l’employeur se trouve face à deux choix :

  • Proposer un reclassement conforme aux capacités résiduelles du salarié.
  • Procéder à un licenciement pour inaptitude, si aucune solution de reclassement n’est possible.

Ces obligations découlent des articles L1226-2 et L1226-10 du Code du travail, qui précisent que le reclassement doit être effectué dans un délai d’un mois après la déclaration d’inaptitude. En l’absence de solution, l’employeur doit reprendre le paiement du salaire du salarié.

2. Bonne foi dans l’exécution du contrat de travail.

L’article L1222-1 du Code du travail impose l’exécution de bonne foi du contrat. Cet impératif s’applique particulièrement en cas d’inaptitude, où l’employeur doit démontrer une démarche proactive et transparente dans la recherche de reclassement [2].

La lenteur dans le reclassement : manquement ou tolérance ?

1. Analyse des délais de procédure.

Dans l’affaire jugée par la Cour de cassation en décembre 2024, l’employeur a tardé à entreprendre les démarches de reclassement, laissant le salarié dans une situation d’inactivité forcée pendant plusieurs mois. Bien que le salaire ait été repris, cette inaction a été perçue comme un manquement à l’obligation de bonne foi.

Il est important de noter que le Code du travail n’impose pas un délai strict pour finaliser le reclassement, mais uniquement pour initier les démarches. Cependant, une prolongation injustifiée peut être interprétée comme une violation de l’article L1222-1 [3].

2. Résiliation judiciaire et licenciement.

Le salarié peut, face à une inaction prolongée, demander une résiliation judiciaire de son contrat. La jurisprudence reconnaît cette possibilité lorsque l’inactivité est le résultat d’une négligence ou d’un abus de l’employeur [4].

Les critères de gravité du manquement de l’employeur.

1. L’obligation de diligence dans la recherche de reclassement.

Le non-respect des délais, bien qu’il ne soit pas explicitement sanctionné, peut constituer une faute si :

  • L’employeur ne consulte pas le salarié sur ses préférences.
  • Il tarde à solliciter le médecin du travail pour clarifier les conditions de reclassement.

Dans l’affaire précitée, l’employeur avait attendu plusieurs mois avant de consulter les filiales du groupe pour des solutions de reclassement, ce qui a contribué à une condamnation partielle.

2. Maintien dans une situation d’inactivité.

Laisser un salarié sans perspective, même avec le paiement du salaire, est perçu comme un manquement grave. Cela empêche le salarié de se projeter dans son avenir professionnel et peut justifier une résiliation judiciaire [5].

Les enseignements jurisprudentiels récents.

1. L’affaire de décembre 2024 : clarification des obligations.

Dans cette affaire, la Cour de cassation a rappelé que :

  • Le paiement du salaire ne dispense pas l’employeur de son obligation de reclassement.
  • Une lenteur excessive peut être interprétée comme un manquement à l’exécution de bonne foi.

La cour a ainsi censuré la décision de la cour d’appel, estimant que le maintien du salarié dans une situation d’inactivité forcée constituait une faute [6].

2. Une jurisprudence en évolution.

Les décisions récentes montrent une volonté de protéger davantage les salariés contre les abus liés à l’inaptitude. Les employeurs doivent donc agir avec diligence et respecter les procédures pour éviter des sanctions lourdes.

Recommandations pour les employeurs.

Pour limiter les risques juridiques, il est recommandé aux employeurs de :

  • Initier rapidement les démarches de reclassement : consulter le médecin du travail et le salarié.
  • Documenter chaque étape : réunions, propositions, refus éventuels.
  • Impliquer les sociétés du groupe : rechercher activement des postes compatibles.
  • Respecter la bonne foi : agir dans l’intérêt du salarié, même en cas de difficulté.

Conclusion.

Le reclassement des salariés inaptes est une obligation légale et morale pour l’employeur. Bien que le Code du travail ne fixe pas de délai pour finaliser la procédure, toute négligence ou inaction prolongée peut être considérée comme un manquement à l’exécution de bonne foi du contrat. Les enseignements jurisprudentiels récents renforcent cette exigence, appelant les employeurs à une gestion proactive et diligente de ces situations sensibles.

Face à ces enjeux, il est essentiel pour les entreprises de mettre en place des procédures internes adaptées et de recourir à un conseil juridique spécialisé pour éviter des contentieux coûteux et préjudiciables à leur image.

Noémie Le Bouard, Avocat
Barreau de Versailles
Le Bouard Avocats
https://www.lebouard-avocats.fr
https://www.avocats-lebouard.fr/

Recommandez-vous cet article ?

Donnez une note de 1 à 5 à cet article :
L’avez-vous apprécié ?

72 votes

Cet article est protégé par les droits d'auteur pour toute réutilisation ou diffusion (plus d'infos dans nos mentions légales).

Notes de l'article:

[1Cass. Soc., 4 déc. 2024, n°22-22.917.

[2Cass. Soc., 25 févr. 1992, n°89-41.634.

[3Cass. Soc., 10 mai 2006, n°04-41.880.

[4Cass. Soc., 23 sept. 1992, n°90-44.466.

[5Cass. Soc., 31 mars 2016, n°14-19.711.

[6Cass. Soc., 4 déc. 2024, n°22-22.917.

"Ce que vous allez lire ici". La présentation de cet article et seulement celle-ci a été générée automatiquement par l'intelligence artificielle du Village de la Justice. Elle n'engage pas l'auteur et n'a vocation qu'à présenter les grandes lignes de l'article pour une meilleure appréhension de l'article par les lecteurs. Elle ne dispense pas d'une lecture complète.

A lire aussi :

Village de la justice et du Droit

Bienvenue sur le Village de la Justice.

Le 1er site de la communauté du droit: Avocats, juristes, fiscalistes, notaires, commissaires de Justice, magistrats, RH, paralegals, RH, étudiants... y trouvent services, informations, contacts et peuvent échanger et recruter. *

Aujourd'hui: 156 320 membres, 27837 articles, 127 254 messages sur les forums, 2 750 annonces d'emploi et stage... et 1 600 000 visites du site par mois en moyenne. *


FOCUS SUR...

• Voici le Palmarès Choiseul "Futur du droit" : Les 40 qui font le futur du droit.

• L'IA dans les facultés de Droit : la révolution est en marche.




LES HABITANTS

Membres

PROFESSIONNELS DU DROIT

Solutions

Formateurs