La prime de transport domicile - travail : un dispositif optimisé.

Par Xavier Berjot, Avocat.

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Explorer : # prime de transport # frais de transport # salariés # exonération fiscale

L’employeur peut, à titre facultatif, prendre en charge tout ou partie des frais de carburant ou des frais d’alimentation d’un véhicule électrique, hybride rechargeable ou hydrogène, engagés pour leurs déplacements entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail, par les salariés (C. trav. art. L3261-3). Ce dispositif est très favorable, particulièrement en 2023.

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1/ Modalités de mise en place.

Le montant, les modalités et les critères d’attribution de la prise en charge de ces frais sont déterminés par accord d’entreprise ou interentreprises, et à défaut par accord de branche (convention collective).

A défaut d’accord, la prise en charge de ces frais est mise en œuvre par décision unilatérale de l’employeur (DUE), après consultation du CSE s’il existe [1].

2/ Salariés bénéficiaires.

L’employeur est tenu d’en faire bénéficier, selon les mêmes modalités et en fonction de la distance domicile-travail, l’ensemble des salariés en remplissant les conditions d’attribution [2].

Toutefois, il dispose de la faculté de moduler sa prise en charge en fonction de la distance séparant le domicile du lieu de travail.

En revanche, il ne peut pas totalement exclure les salariés pour lesquels il estimerait la distance trop importante [3].

Peuvent bénéficier de la prise en charge des frais de transport :

  • Le salarié qui exerce son activité sur plusieurs lieux de travail au sein d’une même entreprise qui n’assure pas le transport entre ces différents lieux et entre ces lieux et sa résidence habituelle. Ce salarié peut prétendre à la prise en charge des frais engagés pour lui permettre de réaliser l’ensemble des déplacements qui lui sont imposés entre sa résidence habituelle et ses différents lieux de travail, ainsi qu’entre ces lieux de travail [4] ;
  • Les travailleurs frontaliers qui résident dans un pays limitrophe et travaillent en France dès lors d’une part qu’ils relèvent des législations françaises du droit du travail et de la sécurité sociale et d’autre part qu’ils respectent l’un des critères d’éligibilité au dispositif [5].

NB. La loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative a supprimé ces deux conditions pour les années 2022 et 2023. La prime de transport est ainsi ouverte à tous les salariés pour leurs déplacements entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail.

La loi permet aussi, pour les années 2022 et 2023, le cumul de la prime de transport et de la prise en charge obligatoire par l’employeur des frais d’abonnements aux transports en commun.

3/ Salariés exclus.

Sont exclus du bénéfice de la prise en charge [6] :

  • Les salariés bénéficiant d’un véhicule mis à disposition permanente par l’employeur avec prise en charge par celui-ci des dépenses de carburant ou d’alimentation électrique ;
  • Ceux logés dans des conditions telles qu’ils ne supportent aucuns frais de transport domicile-travail ;
  • Ceux dont le transport est assuré gratuitement par l’employeur.

Enfin, les stagiaires ne sont pas concernés par la prise en charge facultative des frais de carburant ou d’alimentation des véhicules électriques, hybrides rechargeables ou hydrogène au titre de leur trajet domicile-lieu de stage [7].

4/ Modulation du dispositif.

Dans la mesure où les modalités d’attribution de la prise en charge des frais de carburant, qui doivent être identiques pour l’ensemble des salariés susceptibles d’en bénéficier, sont fixées par accord collectif ou DUE, le niveau de la prise en charge peut être réduit dans les situations de congés, maladie, embauche ou départ en cours de mois dès lors que ces règles s’appliquent selon les mêmes modalités à l’ensemble des bénéficiaires de cette prise en charge [8].

En cas de changement des modalités de remboursement, l’employeur est tenu d’en avertir les bénéficiaires au moins un mois avant la date fixée pour le changement [9].

5/ Modalités déclaratives.

Chaque salarié bénéficiaire doit fournir à l’employeur les éléments justifiant cette prise en charge [10].

L’employeur doit être en mesure de présenter la photocopie du certificat d’immatriculation (carte grise) du véhicule du salarié [11].

En revanche, aucun justificatif de dépenses de carburant n’est exigé lorsque la prise en charge par l’employeur n’excède pas 400 euros pour les frais de carburant, ou 700 euros pour les frais d’alimentation des véhicules électriques, hybrides rechargeables ou à hydrogène en 2022 et 2023.

Le bulletin de paie doit comporter le montant des frais de transport personnel pris en charge par l’employeur.

6/ Régime social et fiscal.

Les sommes versées par l’employeur au titre de la prise en charge des frais personnels de transport sont exonérées dans une limite globale fixée, pour les années 2022 et 2023, à 700 euros par salarié et par an, dont 400 euros au maximum pour les frais de carburant [12] :

  • De toute cotisation d’origine légale ou conventionnelle rendue obligatoire par la loi : cotisations de sécurité sociale, prélèvements dont l’assiette est alignée sur celle de ces cotisations (cotisations d’assurance chômage et d’assurance des créances des salariés, versement mobilité, contributions Fnal, solidarité autonomie et dialogue social, cotisations de retraite complémentaire Agirc-Arrco, contributions à la formation et à l’alternance et participation-construction), CSG et CRDS et par voie de conséquence taxe sur les salaires, l’assiette de cette taxe étant alignée sur celle de la CSG [13] ;
  • D’impôt sur le revenu (sauf option du salarié pour la déduction des frais réels).

L’exonération de la prise en charge des frais personnels de transport n’est pas cumulable avec l’application d’une déduction forfaitaire spécifique pour frais professionnels, qu’il s’agisse de la prise en charge des frais de carburant ou d’alimentation de véhicules électriques [14] ou du forfait mobilités durables, ce forfait devant être réintégré dans l’assiette des cotisations en cas d’application d’une telle déduction [15].

Dans les collectivités de Guadeloupe, Martinique, Guyane, La Réunion et Mayotte la limite d’exonération sociale et fiscale est portée, pour les années 2022 et 2023, à 900 euros dont 600 euros au maximum pour les frais de carburant [16].

En 2024, le plafond d’exonération sociale et fiscale devrait, comme avant 2022, être fixé à 500 euros par salarié et par an, dont 200 euros au maximum pour les frais de carburant [17].

7/ Règles de cumul.

La prime de transport est cumulable avec :

  • Le versement d’indemnités forfaitaires kilométriques ;

Dans ce cas, le cumul des sommes versées (prime de transport + indemnités kilométriques) peut être exonéré de cotisations dans la limite des frais réellement engagés par le salarié pour ses trajets résidence habituelle - lieu de travail.

L’employeur doit être en mesure d’établir la réalité des frais en produisant des justificatifs de la situation du salarié (résidence en dehors d’un périmètre de transports urbains ou utilisation indispensable du véhicule personnel en raison des horaires de travail, photocopie du certificat d’immatriculation du véhicule du salarié, distance séparant la résidence habituelle du lieu de travail).

  • Le forfait mobilités durables dans la limite globale de 700 euros en 2022 et 2023 (500 euros en 2021) par an et par salarié ;
  • La prise en charge obligatoire par l’employeur de 50% du prix du titre d’abonnement aux transports publics (en 2022 et 2023).

Cette prime n’est pas cumulable avec la déduction forfaitaire spécifique pour frais professionnels. Dans ce cas, il convient de réintégrer la prime de transport dans la base de calcul puis d’appliquer la déduction forfaitaire.

8/ Consultation du CSE.

Lorsqu’il existe, le CSE des entreprises de 50 salariés et plus doit être informé et consulté avant la mise en place, dans l’entreprise, de la prime de transport via une DUE.

La consultation du CSE n’est pas requise en cas de conclusion d’un accord d’entreprise.

En conclusion, précisons qu’à partir de 2024, la prime de transport devrait, comme avant 2022, être réservée aux salariés [18] :

  • Dont la résidence habituelle ou le lieu de travail soit est situé dans une commune non desservie par un service public de transport collectif régulier ou un service privé mis en place par l’employeur, soit n’est pas inclus dans le périmètre d’un plan de mobilité obligatoire ;
  • Ou dont les horaires de travail ne leur permettent pas d’utiliser un mode collectif de transport.

De même, le cumul de la prime de transport et de la prise en charge des frais de transport public ne devrait plus être possible.

Xavier Berjot
Avocat Associé au barreau de Paris
Sancy Avocats
xberjot chez sancy-avocats.com
https://bit.ly/sancy-avocats
LinkedIn : https://fr.linkedin.com/in/xavier-berjot-a254283b

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[1C. trav. art. L3261-4.

[2C. trav. art. R3261-11.

[3BOSS-FP-920.

[4BOSS-FP-1040.

[5BOSS-FP-870.

[6C. trav. art. R3261-12.

[7BOSS-FP-1010.

[8BOSS-FP-1050.

[9C. trav. art. R3261-13.

[10C. trav. art. R3261-11.

[11BOSS-FP-980.

[12Loi 2022-1157 du 16-8-2022 art. 2-I.

[13BOI-TPS-TS-20-10 n° 10 s.

[14BOSS-FP-990.

[15BOSS-FP-1170.

[16Loi 2022-1157 du 16-8-2022 art. 2-I.

[17CSS art. L136-1-1, III-4° et L242-1 ; CGI art. 81, 19° ter-b.

[18C. trav. art. L3261-3.

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