Le préavis en cas de licenciement pour faute grave.

Par Silvia Diaz, Avocat.

16617 lectures 1re Parution: Modifié: 3.2  /5

Explorer : # faute grave # licenciement # préavis # contrat de travail

Si le licenciement pour faute grave du salarié suppose la rupture immédiate du contrat de travail sans préavis ni indemnité, le contrat de travail ou la convention collective peuvent prévoir des dispositions plus favorables au salarié.
Une bonne rédaction du contrat permet d’éviter les pièges.

-

La définition de la faute grave.

La faute grave a été traditionnellement définie comme celle qui, par son importance, empêche la poursuite des relations de travail pendant la durée du préavis [1].

Depuis 2007, la Cour de cassation qualifie de faute grave « celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise » [2].

S’agissant d’un contrat à durée déterminée, la faute grave autorisant le terme anticipé de la relation contractuelle est celle qui rend « impossible la poursuite du contrat jusqu’à son terme » [3].

Le principe de la rupture immédiate du contrat sans préavis…

Le salarié qui commet une faute grave voit ainsi son contrat rompu immédiatement dès la notification de la lettre de licenciement, sans préavis ni indemnité compensatrice, et sans indemnité de licenciement.

En effet, les articles L1234-1 et L1234-5 du Code du travail disposent que sauf en cas de faute grave, le salarié licencié a droit à un préavis dont la durée dépend de son ancienneté ou bien à une indemnité compensatrice équivalente si le préavis n’est pas exécuté.

Il en résulte que la qualification de faute grave ne pourra pas être retenue si l’employeur accepte que le contrat se poursuive pendant la durée du préavis, même lorsque le salarié est dispensé de l’exécuter [4].

Dès lors, l’employeur qui a laissé exécuter le préavis ou qui a reporté les effets du licenciement à la date d’expiration du préavis en se bornant à dispenser le salarié de son exécution, ne pourra pas invoquer la faute grave à l’appui de sa décision.

La jurisprudence de la Cour de cassation est constante sur ce point, même lorsqu’il s’agit pour l’employeur de différer de quelques jours les effets de la rupture [5].

… Peut être remis en cause par des dispositions contractuelles prévoyant un régime plus favorable au salarié.

Le principe de l’immédiateté du licenciement pour faute grave privatif d’indemnité et de préavis n’exclut pas la nécessité de vérifier si les dispositions conventionnelles ou encore les clauses du contrat de travail prévoient un régime plus favorable au salarié.

Une telle vérification s’impose au regard notamment de la jurisprudence récente de la Cour de Cassation.

La Haute juridiction s’est prononcée en 2019 à propos du licenciement pour faute grave sans préavis ni indemnité d’un salarié dont le contrat de travail prévoyait le versement d’une indemnité compensatrice de préavis de 6 mois sans précision relative au motif de la rupture.

Débouté de l’intégralité de ses demandes par le Conseil des prud’hommes, le salarié a interjeté appel de la décision.

La Cour d’Appel de Paris a confirmé le jugement rendu en première instance, en indiquant que le préavis de 6 mois prévu contractuellement n’était pas dû en application des dispositions de l’article L1234-1 du Code du travail, dans la mesure où le licenciement était motivé par une faute grave.

La Haute juridiction a censuré le raisonnement de la Cour d’Appel en précisant que la faute grave n’est privative des indemnités de préavis que dans la mesure où le contrat de travail liant les parties ne contient pas de dispositions plus favorables .

Ainsi, dès lors que le contrat de travail prévoit un préavis de 6 mois, en cas de rupture du contrat du fait de l’une ou de l’autre des parties, sans établir de distinction selon le motif de la rupture, la cour d’appel ne peut pas débouter le salarié licencié pour faute grave de sa demande d’indemnité de préavis [6].

L’importance de bien rédiger les clauses du contrat de travail.

La faute grave n’est donc privative de préavis qu’en l’absence de dispositions contractuelles ou conventionnelles plus favorables [7].

Il est donc essentiel de veiller à une bonne rédaction des clauses contractuelles.

Ainsi, en cas de contractualisation du préavis, il conviendra d’exclure expressément le licenciement pour faute grave ou lourde des cas de rupture ouvrant lieu à préavis.

Il est enfin indispensable de vérifier le contrat ainsi que la convention collective applicable à chaque étape de la relation contractuelle, notamment lors de la rupture du contrat quel qu’en soit le motif.

Silvia Diaz
Avocat au Barreau de Rouen.

Recommandez-vous cet article ?

Donnez une note de 1 à 5 à cet article :
L’avez-vous apprécié ?

10 votes

Cet article est protégé par les droits d'auteur pour toute réutilisation ou diffusion (plus d'infos dans nos mentions légales).

Notes de l'article:

[1Cass. soc., 26.02.1991, n° 88-44.908

[2Cass. soc., 27.09.2007, n° 06-43.867

[3Cass. Soc. 27.09.2005, n° 03-45705

[4Cass. Soc. 12.07.2005, n° 03-41536 ; 21.11.2000, n° 98-45609

[5Cass. Soc. 19.11.1992, n° 92-40578

[6Cass. Soc. 20.03.2019, n° 17-26999

[7Cass. soc. 1.10.2003 - n° 01-43.601

A lire aussi :

Village de la justice et du Droit

Bienvenue sur le Village de la Justice.

Le 1er site de la communauté du droit: Avocats, juristes, fiscalistes, notaires, commissaires de Justice, magistrats, RH, paralegals, RH, étudiants... y trouvent services, informations, contacts et peuvent échanger et recruter. *

Aujourd'hui: 156 320 membres, 27852 articles, 127 254 messages sur les forums, 2 750 annonces d'emploi et stage... et 1 600 000 visites du site par mois en moyenne. *


FOCUS SUR...

• Voici le Palmarès Choiseul "Futur du droit" : Les 40 qui font le futur du droit.

• L'IA dans les facultés de Droit : la révolution est en marche.




LES HABITANTS

Membres

PROFESSIONNELS DU DROIT

Solutions

Formateurs