1.
La loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique dites loi « ELAN » est venue, significativement, modifier la loi Littoral et principalement le principe d’obligation de l’extension de l’urbanisation en continuité avec une agglomération ou un village (article L. 121-8 du Code de l’urbanisme), en y ajoutant la catégorie des secteurs déjà urbanisés, qui peuvent faire l’objet d’une densification.
En effet, en vertu de l’article 42-I de cette loi, un deuxième alinéa a été ajouté à l’article L. 121-8 précité pour prévoir que :
« Dans les secteurs déjà urbanisés autres que les agglomérations et villages identifiés par le schéma de cohérence territoriale et délimités par le plan local d’urbanisme, des constructions et installations peuvent être autorisées, en dehors de la bande littorale de cent mètres, des espaces proches du rivage et des rives des plans d’eau mentionnés à l’article L. 121-13, à des fins exclusives d’amélioration de l’offre de logement ou d’hébergement et d’implantation de services publics, lorsque ces constructions et installations n’ont pas pour effet d’étendre le périmètre bâti existant ni de modifier de manière significative les caractéristiques de ce bâti. Ces secteurs déjà urbanisés se distinguent des espaces d’urbanisation diffuse par, entre autres, la densité de l’urbanisation, sa continuité, sa structuration par des voies de circulation et des réseaux d’accès aux services publics de distribution d’eau potable, d’électricité, d’assainissement et de collecte de déchets, ou la présence d’équipements ou de lieux collectifs » (V. notre article L’assouplissement de la loi Littoral et le comblement des dents creuses).
Dans le but de permettre le prise en compte rapide de cette nouvelle catégorie d’espace urbanisé, le législateur est venu prévoir à l’article 42-III un régime transitoire.
Aux termes de cet article :
« Jusqu’au 31 décembre 2021, des constructions et installations qui n’ont pas pour effet d’étendre le périmètre du bâti existant, ni de modifier de manière significative les caractéristiques de ce bâti, peuvent être autorisées avec l’accord de l’autorité administrative compétente de l’Etat, après avis de la commission départementale de la nature des paysages et des sites, dans les secteurs mentionnés au deuxième alinéa de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction résultant de la présente loi, mais non identifiés par le schéma de cohérence territoriale ou non délimités par le plan local d’urbanisme en l’absence de modification ou de révision de ces documents initiée postérieurement à la publication de la présente loi ».
2.
Le sénateur M. Michel Vaspart, est venu interroger le Ministre en charge des collectivités, sur l’application de ce régime transitoire.
L’intéressé s’interrogeait alors sur le fait que « l’application de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République a profondément modifié le périmètre des intercommunalités et, par voie de conséquence, des schémas de cohérence territoriale. Ce sont donc désormais de nouveaux schémas qui sont en cours d’élaboration. Il en résulte une difficulté d’interprétation sur la possibilité ou non de recourir à la procédure d’autorisation préfectorale en cas d’élaboration d’un nouveau schéma de cohérence territoriale par les autorités chargées de cette élaboration ou les services de l’Etat. Il souhaiterait savoir si le Gouvernement entend adresser des recommandations aux services de l’État pour leur confirmer que la procédure d’élaboration se trouve bien dans le champ d’application du III de l’article 42 de la loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique ».
3.
D’après le ministre en charge des collectivités, le législateur a souhaité faciliter le comblement des dents creuses au sein des secteurs déjà urbanisés des communes littorales en instaurant une période transitoire (article 42-III).
Durant cette période et au plus tard jusqu’au 31 décembre 2021, lorsque le schéma de cohérence territoriale n’a pas identifié ces secteurs, éligibles à la densification, ou lorsque le plan local d’urbanisme ne les a pas délimités, il est possible d’y autoriser des constructions, sous réserve de l’accord du préfet après avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites (le ministre répond d’ailleurs ici implicitement à la question de savoir qui était l’autorité compétente de l’État pour donner son accord à une telle demande).
Toutefois, cette faculté n’est offerte que si les collectivités compétentes n’ont pas initié la modification ou la révision du plan local d’urbanisme ni du schéma de cohérence territoriale postérieurement au 24 novembre 2018, date de publication de la loi.
La fin de la période transitoire correspond à la date à laquelle une procédure de révision ou de modification du plan local d’urbanisme ou du schéma de cohérence territoriale est prescrite, que ces procédures portent sur les dispositions de déclinaison de la loi littoral ou non.
Il résulte toutefois des travaux parlementaires que cela ne vaut pas pour l’engagement de la procédure de modification simplifiée prévue au II de l’article 42 de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique spécifique à l’identification des secteurs de densification.
En effet, les amendements parlementaires à l’origine des dispositions du II de l’article 42, adoptés en première lecture au Sénat (amendements présentés les 27 juin et 3 juillet 2018 en commission des affaires économiques du Sénat COM-84 rect., COM-106, COM-219), étaient conçus par leurs auteurs comme ne faisant pas obstacle à ce que la faculté accordée pour autoriser des constructions dans les dents creuses, au titre du III du même article, puisse s’appliquer « dans l’attente de la modification des documents d’urbanisme » issue de la procédure simplifiée prévue par ces amendements (exposé des motifs de l’amendement COM-106).
En outre, seules les procédures de modification ou de révision initiées postérieurement au 24 novembre 2018 étant visées par le III de l’article 42, la procédure d’autorisation préfectorale peut donc bien être mobilisée en cas d’élaboration d’un schéma de cohérence territoriale.