[Droit comparé France-Espagne] Lettre d’intention (LOI) : analyse des législations.

Par Xiomara Jiménez, Juriste.

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La lettre d'intention (LOI) est un outil essentiel dans les négociations précontractuelles en droit français et espagnol. Elle formalise l'engagement des parties tout en restant non contraignante. Bien que similaire, chaque système juridique présente des différences sur la responsabilité précontractuelle et les obligations des parties.
Description rédigée par l'IA du Village

La lettre d’intention, aussi connue sous le nom de « Letter Of Intent » en anglais (ci-après, LOI), est un instrument juridique précontractuel fréquemment utilisé dans les négociations complexes. Son utilisation est particulièrement fréquente dans les opérations de fusion et d’acquisition, comme la vente ou l’achat d’actions d’une société, les alliances stratégiques ou les projets de grande envergure. La lettre d’intention établit les principaux éléments de la transaction sur lesquels un accord fondamental a déjà été conclu, ainsi que les étapes ultérieures du processus.

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L’un des principaux objectifs de la LOI est de souligner la volonté des parties de réaliser une transaction ou une affaire juridique déterminée à l’avenir, en fonction d’un certain nombre de conditions de base.

Bien que les lettres d’intention aient une fonction et une utilisation similaires dans de nombreux systèmes juridiques, elles sont encadrées par des dispositions légales et des pratiques spécifiques qui varient d’un pays à l’autre. Dans cet article, nous proposons une analyse comparative des lettres d’intention en droit français et en droit espagnol, en soulignant à la fois leurs similitudes ainsi que leurs principales différences.

En vertu de la loi française.

En droit français, bien que la LOI ne soit pas strictement réglementée quant à sa forme ou à son contenu, sa rédaction et son utilisation peuvent avoir des implications juridiques importantes, notamment en matière de responsabilité précontractuelle.

En France, la responsabilité précontractuelle est régie par l’article 1112-1 du Code Civil, qui instaure deux principes essentiels :

  • Devoir d’information : pendant les négociations, les parties ont le devoir de fournir des informations pertinentes susceptibles d’influencer la décision de l’autre partie de conclure le contrat. L’omission d’informations importantes ou la fourniture d’informations trompeuses peut engager la responsabilité précontractuelle.
  • Bonne foi dans les négociations : les parties doivent agir de bonne foi, ce qui implique un comportement loyal et honnête. Une rupture abusive des négociations ou un comportement de mauvaise foi peut donner lieu à des demandes de dommages et intérêts.

Ces principes visent à protéger les parties pendant la phase de négociation et à garantir que les négociations se déroulent de manière juste et transparente.

En droit français, la LOI n’a pas pour effet d’obliger les parties à conclure le contrat définitif. Cependant, un soin particulier doit être apporté à sa rédaction, car il arrive que les parties stipulent des obligations réelles ayant une valeur contractuelle. Il s’agit notamment de :

  • Obligation de résultat : elle peut comprendre des clauses obligeant l’une des parties à obtenir un résultat spécifique, tel que la conclusion du contrat envisagé.
  • Pénalités en cas de rupture injustifiée : les parties peuvent convenir de pénalités financières si l’une d’entre elles venait à rompre les négociations de manière injustifiée.

Principales fonctions de la LOI en droit français.

La LOI remplit plusieurs fonctions importantes au cours de la phase précontractuelle :

  • Formalisation de la négociation : établit un cadre clair pour les négociations, formalisant le processus et réduisant l’ambiguïté sur les intentions des parties.
  • Réglementation du processus de négociation : elle définit les procédures et les étapes de la négociation, telles que les délais pour la due diligence et les critères d’évaluation des informations.
  • Instauration d’une confiance entre les parties, car les parties démontrent leur engagement mutuel.
  • Elle permet de protéger les intérêts des parties par l’insertion de certaines clauses, telles que la clause de confidentialité.

Dans la pratique du droit français, les principales clauses que l’on retrouve dans la LOI sont les suivantes :

  • Conditions minimales de la future opération : structure de la transaction, prix d’achat, forme de paiement, actions ou participations à acquérir, délai estimé pour la réalisation de l’opération, etc.
  • Obligation d’exclusivité dans les négociations en faveur de l’acheteur.
  • Confidentialité.
  • Audit juridique ou due diligence.
  • Clause d’arbitrage.

Limites de la LOI.

Malgré ses avantages, la LOI présente également certaines limites :

  • Elle ne permet pas de garantir la conclusion du contrat final, car les parties ne sont généralement pas légalement obligées de le conclure. Sauf si une clause d’exécution est prévue comme indiqué ci-dessus.
  • Si elle n’est pas correctement négociée, elle peut entraver les négociations futures : élément très important car, dans la pratique, il sera très difficile de revenir sur un élément déjà établi par la LOI, à moins que des informations soient fournies au cours de la procédure de due diligence.
  • Elle peut donner lieu à des litiges si les parties ne parviennent pas à un accord ou si l’une d’entre elles estime que les négociations ont été interrompues de manière abusive.

En vertu du droit espagnol.

En droit espagnol, comme en droit français, la LOI ne fait pas l’objet d’une réglementation spécifique concrète ; il s’agit d’une figure issue du droit anglo-saxon.

Elle est donc régie par le principe de l’autonomie de la volonté, qui permet aux parties contractantes d’y prévoir le contenu qu’elles jugent approprié.

En droit espagnol, la phase précontractuelle est régie par le principe de bonne foi, établi à l’article 7 du Code Civil. Ce principe oblige les parties à agir avec honnêteté et loyauté pendant les négociations. La jurisprudence espagnole a développé le concept de culpa in contrahendo pour traiter de la responsabilité qui survient lorsque l’une des parties manque à cette obligation de bonne foi durant la phase précontractuelle.

La culpa in contrahendo fait référence à la responsabilité des dommages qu’une partie peut réclamer si l’autre partie agit de manière déloyale, négligente ou injuste au cours des négociations. Ce concept est crucial car il reconnaît que, même si un contrat final n’a pas été signé, les parties doivent néanmoins respecter certaines obligations de comportement.

Comme en droit français, la LOI est un instrument qui ne constitue pas en soi un contrat définitif. Elle n’impose pas aux parties l’obligation légale de conclure l’opération ou de conclure le contrat définitif en cours de négociation, et n’est donc pas contraignante.

La nature non contraignante de la LOI permet aux parties d’explorer et de discuter les termes de l’accord potentiel sans la pression d’une obligation légale de procéder.

Cela s’avère particulièrement utile dans les négociations complexes où il faut du temps pour mener une vérification approfondie, évaluer les risques et les avantages et examiner tous les aspects de l’opération proposée. La souplesse offerte par une LOI facilite un environnement de collaboration et de communication ouverte, où les parties peuvent échanger des informations et discuter des conditions préliminaires sans être contraintes sur le plan juridique.

Fonctions clés de la LOI et clauses principales.

Bien que non contraignante, la LOI joue un rôle clé dans le renforcement de la bonne foi et la due diligence dans les négociations précontractuelles :

  • Mettre évidence l’existence de négociation : la LOI formalise le processus de négociation en attestant que les parties sont engagées dans des discussions sérieuses en vue d’un éventuel accord, établissant ainsi un cadre clair quant aux intentions des parties.
  • Réglementer le processus de négociation : si la LOI n’oblige pas à conclure le contrat, elle peut spécifier certaines procédures et étapes que les parties conviennent de suivre pendant les négociations, telles que les délais pour la due diligence, les critères d’évaluation des informations et les accords sur la confidentialité des données partagées.
  • Preuve documentée de la bonne foi : en cas de litige, la LOI peut servir de preuve que les parties se sont engagées à négocier de bonne foi. Si l’une des parties agit de manière déloyale, la LOI servira à étayer sa demande de dommages-intérêts sur la base de la culpa in contrahendo.

Quant aux principales clauses que l’on peut trouver dans la LOI espagnole, elles sont similaires à celles déjà mentionnées dans le droit français et la plupart d’entre elles sont directement liées aux principales fonctions citées ci-dessus :

  • Conditions de la future opération : structure de la transaction, prix d’achat, forme de paiement, actions ou parts à acquérir, délai estimé pour la réalisation de l’opération, etc.
  • Obligation d’exclusivité dans les négociations en faveur de l’acheteur.
  • Confidentialité.
  • Audit juridique ou due diligence.

Limites de la LOI en droit espagnol.

  • La LOI n’oblige pas à concrétiser ultérieurement l’opération envisagée, en raison de son caractère non contraignant.
  • Si elle n’est pas clairement rédigée, elle peut donner lieu à des interprétations, voire conférer à certaines clauses un caractère obligatoire.

Conclusion.

En droit français comme en droit espagnol, la LOI représente la phase initiale des négociations entre les parties. Elle ne constitue pas une offre contraignante ou un contrat définitif et vise à préparer le terrain pour le lancement d’une opération de fusion et d’acquisition.

Malgré les similitudes en termes d’objectifs et de structure, il existe de légères différences en termes de réglementation et d’implications juridiques de leurs clauses. En France, la responsabilité précontractuelle est plus claire et plus détaillée en raison de l’article 1112-1 du Code Civil, tandis qu’en Espagne, la LOI repose sur des principes généraux, le principe de l’autonomie de la volonté et la jurisprudence.

Ces différences reflètent les particularités de chaque système juridique et sont essentielles pour les parties impliquées dans des transactions internationales.

Xiomara Jiménez, Legal Counsel
AGM Abogados

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