Harcèlement moral au travail : prévention, réaction et sanction.

Par M. Kebir, Avocat.

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Explorer : # harcèlement moral # prévention # obligation de sécurité # sanctions disciplinaires

Ce que vous allez lire ici :

Cet article rappelle que le harcèlement moral au travail est strictement interdit en raison de l'obligation de sécurité et de protection de la santé des employés. Tout salarié peut dénoncer des cas de harcèlement sans subir de sanctions, mais la dénonciation doit être loyale et non motivée par la mauvaise foi.
Description rédigée par l'IA du Village

Encadré par une jurisprudence de plus en plus rigoureuse, le harcèlement moral au travail, défini à l’article L1152-1 du Code du travail, en plus d’entraîner la dégradation des conditions de travail, est, par-dessus tout, une atteinte aux droits, une violation du principe de dignité.

-

En matière de santé au travail, eu égard à la double obligation de sécurité et de la protection de la santé physique et mentale du salarié, la prohibition du harcèlement participe de la prévention des risques psychosociaux. Et, au fond, garantit la préservation, à la fois, du sens du travail, de l’intérêt collectif et de « l’avenir professionnel ».

Sur le terrain pénal, le délit de harcèlement est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende [1].

S’agissant du régime de l’alerte, conformément à l’article L1152-2 Code du travail, tout salarié (témoin, victime, élu du CSE...) peut dénoncer des comportements harcelants :

  • il ne peut subir des sanctions, discriminations ou licenciement pour avoir subi, refusé de subir ou dénoncé de tels faits,
  • le licenciement prononcé en méconnaissance de ces règles est nul.

Or, la dénonciation doit être loyale, non entachée de mauvaise foi : une salarié qui a dénoncé de façon mensongère des faits inexistants de harcèlement moral dans le but de déstabiliser l’entreprise et de se débarrasser du cadre responsable du département comptable a agi de mauvaise foi, constituant une faute grave [2].

Du reste, il va sans dire que, parallèlement, la voie de la dénonciation calomnieuse est ouverte.

Alerté, l’employeur, en vertu de son obligation de sécurité, instituée par les articles L4121-1 et suivants du Code du travail, doit immédiatement agir : à commencer par mener ou faire réaliser une enquête, sous peine de manquer à son obligation de prévention [3].

Prévention harmonisée du harcèlement : obligation de l’employeur.

Eu égard aux dispositions des articles L4121-1 et suivants Code du travail, s’impose à l’employeur une obligation légale de sécurité. Laquelle se décline en :

  • obligation de prévention des risques professionnels,
  • obligation de protection de la santé physique et mentale des salariés.

Dit autrement, l’employeur, non seulement il met en œuvre les mesures nécessaires pour assurer la santé et la sécurité des salariés, il doit, en plus, empêcher la réalisation du risque (Voir notre publication y afférente : Harcèlement au travail : de la prévention à la sanction, un cadre juridique renforcé).

En ce sens, entre autres mesures, la QCVT (Qualité de vie et des conditions de travail) effective et continue, le management humain et bienveillant en sont des leviers féconds. Sources d’épanouissement et de satisfaction collective.

Harcèlement moral et faute inexcusable de l’employeur.

L’employeur, tenu d’une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs se doit, invariablement, prévenir les situations de harcèlement et réagir, si celles-ci surviennent (Sur la notion de harcèlement managérial : Harcèlement managérial : contours juridiques et responsabilité).

« Manque à cette obligation, lorsqu’un salarié est victime sur le lieu de travail d’agissement de harcèlement moral ou sexuel exercés par l’un ou l’autre de ses salariés, quand bien même il aurait pris des mesures en vue de faire cesser ces agissements » [4].

Au fond, cette jurisprudence rappelle la portée de l’obligation de sécurité de résultat de l’employeur, appliquée aux situations de harcèlement moral. A cet égard, il convient de rappeler que, dès lors que le résultat n’est pas atteint, la responsabilité du débiteur de l’obligation de sécurité peut se voir engagée.

En clair, la mise en œuvre de mesures préventives peut ne pas suffire à exonérer l’employeur si celles-ci s’avèrent imparfaites.

A ce sujet, évolution notable, la Cour de Cassation consacre un droit à des réparations distinctes :

  • dédommagement au titre du manquement par l’employeur à son obligation de sécurité de résultat
  • dommages et intérêts résultant du harcèlement.

Concrètement, l’employeur est responsable des agissements de harcèlement de ses salariés ; sauf s’il justifie avoir pris toutes les mesures de prévention et, informé de l’existence de faits susceptibles de constituer une mesure de harcèlement moral, a pris les mesures immédiates propres à le faire cesser :

« Pour rejeter la demande du salarié au titre du harcèlement moral, la cour d’appel a retenu que s’agissant des dispositifs de prévention du harcèlement moral que tout employeur doit mettre en œuvre dans son entreprise, il convient de souligner que de par la nature même des faits de harcèlement moral qu’il s’agit de prévenir, un tel dispositif ne peut avoir principalement pour objet que de faciliter pour les salariés s’estimant victimes de tels faits la possibilité d’en alerter directement leur employeur ou par l’intermédiaire de représentants qualifiés du personnel, que l’employeur justifiait avoir modifié son règlement intérieur pour y insérer une procédure d’alerte en matière de harcèlement moral, avoir mis en œuvre dès qu’il a eu connaissance du conflit personnel du salarié avec son supérieur hiérarchique immédiat une enquête interne sur la réalité des faits, une réunion de médiation avec le médecin du travail, le directeur des ressources humaines et trois membres du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail en prenant la décision au cours de cette réunion d’organiser une mission de médiation pendant trois mois entre les deux salariés en cause confiée au directeur des ressources humaines.
Qu’en statuant ainsi, sans qu’il résulte de ses constatations que l’employeur avait pris toutes les mesures de prévention visées aux articles L4121-1 et L4121-2 du Code du travail et, notamment, avait mis en œuvre des actions d’information et de formation propres à prévenir la survenance de faits de harcèlement moral, la cour d’appel a violé les textes susvisés
 » [5] :

De là, conformément aux articles L1152-4 et L4121-1 du Code du travail, l’obligation organisationnelle se rapportant à la prévention du harcèlement recouvre, simultanément :

  • l’obligation de prendre des mesures pour éviter que des agissements de harcèlement y surviennent,
  • l’obligation de réaction : enquêter, faire cesser les agissements de harcèlement et, le cas échéant, sanctionner [6]. A défaut de quoi, sa responsabilité pour manquement à l’obligation de sécurité et de prévention peut être retenue.

Rôle du CSE.

Au stade de la connaissance des faits, la délégation du personnel dispose d’un droit d’alerte [7]. En effet, si le CSE (Comité social et économique) exerce son droit d’alerte, une procédure d’enquête avec l’employeur est, immédiatement, enclenchée [8].

Toujours est-il que l’employeur doit prendre les dispositions nécessaires pour y remédier [9]. Ainsi, en cas de carence de l’employeur ou de divergence sur la réalité de cette atteinte, si le salarié intéressé averti par écrit ne s’y oppose pas, le CSE saisit le bureau de jugement du Conseil de Prud’hommes qui statue selon la forme des référés [10].

Notons que La loi accorde également la possibilité au CSE de recourir à un expert [11] : frais à la charge de l’employeur [12].

En ce sens, il se déduit des dispositions de l’article L2312-9 Code du travail, que, dans le cadre de ses attributions générales, le CSE peut susciter toute initiative qu’il estime utile et proposer notamment des actions de prévention du harcèlement moral. Le refus de l’employeur est motivé.

Qui plus est, le comité peut également être amené à être informé et consulté sur des questions de harcèlement moral dans le cadre de ses compétences générales sur les questions intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise, et notamment sur les conditions d’emploi et de travail [13].

A cet égard, le cadre législatif attribue à la médecine du travail des missions non des moindres. Concrètement, les services de prévention et de santé au travail ont pour mission principale d’éviter toute altération de la santé des travailleurs du fait de leur travail.

Pour ce faire, lesdits services de prévention contribuent à :

« la réalisation d’objectifs de santé publique afin de préserver, au cours de la vie professionnelle, un état de santé du travailleur compatible avec son maintien en emploi » [14].

A cette fin, ces dispositifs :

« 1° Conduisent les actions de santé au travail, dans le but de préserver la santé physique et mentale des travailleurs tout au long de leur parcours professionnel ;
1° bis Apportent leur aide à l’entreprise, de manière pluridisciplinaire, pour l’évaluation et la prévention des risques professionnels ;
2° Conseillent les employeurs, les travailleurs et leurs représentants sur les dispositions et mesures nécessaires afin d’éviter ou de diminuer les risques professionnels, d’améliorer la qualité de vie et des conditions de travail, en tenant compte le cas échéant de l’impact du télétravail sur la santé et l’organisation du travail, de prévenir la consommation d’alcool et de drogue sur le lieu de travail, de prévenir le harcèlement sexuel ou moral, de prévenir ou de réduire les effets de l’exposition aux facteurs de risques professionnels mentionnés à l’article L4161-1 et la désinsertion professionnelle et de contribuer au maintien dans l’emploi des travailleurs
 » [15].

Toujours est-il que, en termes de mesures réalisables (Pour aller plus loin Harcèlement moral au travail : preuve en cas de licenciement, rôle du CSE), au regard de l’article L4624-3 Code du travail, le médecin du travail peut proposer, par écrit et après échange avec le salarié et l’employeur :

« des mesures individuelles d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail ou des mesures d’aménagement du temps de travail justifiées par des considérations relatives notamment à l’âge ou à l’état de santé physique et mental du travailleur » [16].

L’alerte harcèlement.

Tel que posé aux articles L2312-59 Code du travail, si un membre de la délégation du personnel au comité social et économique constate, notamment par l’intermédiaire d’un travailleur, qu’il existe une atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles dans l’entreprise qui ne serait pas justifiée par la nature de la tâche à accomplir, ni proportionnée au but recherché, il en saisit immédiatement l’employeur.

Substantiellement, cette atteinte, précise le même article,

« peut notamment résulter de faits de harcèlement sexuel ou moral ou de toute mesure discriminatoire en matière d’embauche, de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de classification, de qualification, de promotion professionnelle, de mutation, de renouvellement de contrat, de sanction ou de licenciement » [17].

Par conséquent, sur la base du même fondement, en cas d’alerte déclenché par un élu du CSE, l’employeur procède sans délai à une enquête avec le membre de la délégation du personnel du comité et prend les dispositions nécessaires pour remédier à cette situation.

Ici, en considération de la double obligation précitée - de prévention - prohibition du harcèlement et l’obligation de sécurité, l’employeur doit réagir au travers d’une enquête et des mesures provisoires [18], ce compris les sanctions disciplinaires.

Ainsi, l’inaction de l’employeur constitue un cas de recours au juge prud’homal. Qui statue selon une procédure spécifique- procédure accélérée au fond :

« En cas de carence de l’employeur ou de divergence sur la réalité de cette atteinte, et à défaut de solution trouvée avec l’employeur, le salarié, ou le membre de la délégation du personnel au comité social et économique si le salarié intéressé averti par écrit ne s’y oppose pas, saisit le bureau de jugement du conseil de prud’hommes qui statue selon la procédure accélérée au fond » [19].

A cet égard, au titre des mesures dissuasives, le juge « peut ordonner toutes mesures propres à faire cesser cette atteinte et assortir sa décision d’une astreinte qui sera liquidée au profit du Trésor » [20].

Dénonciation du harcèlement et bonne foi.

Sans équivoque, les dispositions du Code du travail se veulent protectrices de la dignité humaine, garantissant la libre expression. En sorte que la victime, le témoin et plus largement tout salarié, ayant dénoncé des faits de harcèlement ou « refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou ayant, de bonne foi, relaté ou témoigné de tels agissements » [21] ne peut faire l’objet de sanction visée à l’article L1121-2 Code du travail.

Aussi l’auteur du signalement est-il protégé par les dispositions applicables aux lanceurs d’alerte [22].

Si bien que, conséquence somme toute logique, le licenciement consécutif à une alerte harcèlement est nul :

« Toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L1152-1 et L1152-2 du Code du travail, toute disposition ou tout acte contraire est nul » [23].

Sur ce point, la Jurisprudence a eu à préciser le contenu de l’alerte. A la question de savoir si le signalement doit se référer expressément au harcèlement, la Haute juridiction répond par la négative : aux termes des articles L1152-2 et L1152-3 du Code du travail,

« après avoir rappelé que le salarié qui relate des faits de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter que de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu’il dénonce, et que le grief énoncé dans la lettre de licenciement tiré de la relation par le salarié de faits de harcèlement moral emporte à lui seul la nullité du licenciement »

 [24].

Dans le même ordre d’idées, il a été jugé que :

  • le salarié ne pouvait bénéficier de la protection légale contre le licenciement tiré d’un grief de dénonciation de faits de harcèlement moral que s’il avait lui-même qualifié les faits d’agissements de harcèlement moral [25],
  • l’absence éventuelle dans la lettre de licenciement de mention de la mauvaise foi avec laquelle le salarié a relaté des agissements de harcèlement moral n’est pas exclusive de la mauvaise foi de l’intéressé, laquelle peut être alléguée par l’employeur devant le juge [26].

Sur le fond, pour la Haute assemble, il résulte des articles L1121-1 du Code du travail et l’article 10, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales que : « sauf abus, le salarié jouit, dans l’entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d’expression, à laquelle seules des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché peuvent être apportées et que le licenciement prononcé par l’employeur pour un motif lié à l’exercice non abusif par le salarié de sa liberté d’expression est nul » [27].

Dès lors, « au regard, d’une part, de la faculté pour l’employeur d’invoquer devant le juge, sans qu’il soit tenu d’en avoir fait mention au préalable dans la lettre de licenciement, la mauvaise foi du salarié licencié pour avoir dénoncé des faits de harcèlement moral, d’autre part, de la protection conférée au salarié licencié pour un motif lié à l’exercice non abusif de sa liberté d’expression, dont le licenciement est nul pour ce seul motif à l’instar du licenciement du salarié licencié pour avoir relaté, de bonne foi, des agissements de harcèlement, il y a lieu désormais de juger que le salarié qui dénonce des faits de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif, peu important qu’il n’ait pas qualifié lesdits faits de harcèlement moral lors de leur dénonciation, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter que de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu’il dénonce » [28].

Toutefois, tel que dit infra, cette protection trouve sa limite dans la mauvaise foi du salarié. La protection légale ne bénéficie pas au salarié ayant agi de mauvaise foi.

En tout état de cause, le salarié dénonçant de façon mensongère des faits inexistants de harcèlement moral dans le but de déstabiliser l’entreprise et / ou ses supérieurs hiérarchiques n’est couverte par aucune protection et peut, le cas échéant, encourir un licenciement pour faute grave [29].

Substantiellement, pour la Cour de cassation, la mauvaise foi du salarié ne peut résulter que de la connaissance de la fausseté des faits qu’il dénonce [30].

Tel est le cas, par exemple, des accusations de harcèlement portées par un salarié à l’encontre de son directeur et divulguées auprès de collègues de travail, qui revêtent un caractère mensonger [31].

La médiation préventive.

De par les leviers humains, le dialogue contributif qui fondent sa vocation, la médiation est un recours de choix en matière, aussi bien des relations de travail que de la prévention des risques psychosociaux (Voir notre article : La médiation au travail : outil de prévention des conflits et des risques psychosociaux).

Ainsi, en application des dispositions de l’article L1152-6 Code du travail, en tant que mode amiable de résolution des conflits prônant l’issue par l’échange éclairé et l’altérité :

« Une procédure de médiation peut être mise en œuvre par toute personne de l’entreprise s’estimant victime de harcèlement moral ou par la personne mise en cause. Le choix du médiateur fait l’objet d’un accord entre les parties. Le médiateur s’informe de l’état des relations entre les parties ».

Au cas où la médiation échouerait,

« le médiateur informe les parties des éventuelles sanctions encourues et des garanties procédurales prévues en faveur de la victime »

 [32].

Enquêtes harcèlement.

Face à une accusation de harcèlement moral au sein de l’entreprise, comme exposé plus haut, l’employeur est tenu d’agir et doit immédiatement mener ou faire réaliser une enquête, sous peine de manquer à son obligation de prévention [33].

Ce faisant, l’enquête qui n’est pas contradictoire [34], tend à vérifier si les faits dénoncés sont établis.

Qu’elles soient internes ou externes, les enquêtes peuvent être réalisées par une équipe interne composée de représentants du personnel, de représentants de la direction de l’entreprise et, éventuellement, du médecin du travail. En outre, il n’existe aucune obligation d’associer les élus du personnel à l’enquête qui peut être menée par la direction des ressources humaines, ou encore un prestataire extérieur [35].

Sur ce point, même en cas d’enquête interne incomplète, le rapport d’enquête constitue un élément de preuve recevable qui doit être pris en considération par les juges sans pouvoir être écarté de manière péremptoire des débats pour un motif d’absence d’exhaustivité et d’impartialité [36].

De même, pour la Cour régulatrice, il ne pourrait y avoir de violation des droits de la défense et du principe du contradictoire au motif que le salarié mis en cause pour harcèlement n’a pas été mis à même de pouvoir accéder au dossier et aux pièces recueillies, ni d’être entendu ou confronté aux collègues qui le dénoncent. Ceci, dans la mesure où la décision prise par l’employeur ou éléments dont ils disposent pour la fonder pourront être débattus devant le juge judiciaire [37].

Enfin, les éléments de l’enquête effectuée consécutivement à la dénonciation de faits de harcèlement moral, « ne constitue pas une preuve illicite comme issue d’un procédé clandestin de surveillance de l’activité du salarié ». Dès lors, le rapport de l’enquête « peut être produit par l’employeur pour justifier la faute imputée au salarié » [38].

Les sanctions.

Conformément aux stipulations de l’article L1152-5 du Code du travail,

« tout salarié ayant procédé à des agissements de harcèlement moral est passible d’une sanction disciplinaire ».

Ainsi, si la réalité des agissements de harcèlement moral est établie, l’employeur est tenu - compte tenu de son obligation de sécurité et de prévention - de sanctionner l’auteur présumé. Or, si le fait pour un salarié d’avoir commis des faits de harcèlement constitue nécessairement une faute, la qualification de faute grave, elle, n’est pas toujours reconnue.

Renforçant sa jurisprudence, la Cour de cassation a retenu que, à défaut, pour le salarié de démontrer l’existence d’un harcèlement moral, il peut engager la responsabilité de l’employeur au titre de l’obligation de prévention et de protection de la santé du salarié [39]. Autrement dit, l’inaction de l’employeur, la tardiveté de réaction sont susceptibles d’engager sa responsabilité :

« L’employeur, tenu d’une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, manque à cette obligation lorsqu’un salarié est victime, sur son lieu de travail, de violences physiques ou morales exercées par l’un ou l’autre de ses salariés, quand bien même il aurait pris des mesures en vue de faire cesser ces agissements.
Est nul le licenciement d’un salarié en raison d’un comportement qui lui est reproché mais qui est une réaction au harcèlement
 » [40].

En dernière analyse, la prévention, obligation légale, préserve la santé ; réduit la survenance des risques professionnels ; promeut la primauté de l’humain au sein des organisations.

Inscrire la prévention du harcèlement dans la culture d’entreprise éthique, appuyée par une QVCT effective et une RSE continue, procède d’une vision éminemment responsable. Un alignement porteur de progrès ; protecteur des droits ; générateur de sens et d’épanouissement professionnel et personnel.

M. Kebir
Avocat à la Cour - Barreau de Paris
Médiateur agréé, certifié CNMA
Cabinet Kebir Avocat
contact chez kebir-avocat-paris.fr
www.kebir-avocat-paris.fr
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Notes de l'article:

[1Article 222-33-2 Code pénal.

[2Cass. Soc. 6 juin 2021 n° 10-28.345P.

[3Cass. Soc. 27 nov. 2019 n° 18-10.551.

[4Cass. soc., n° 13-17.729 du 19 nov. 2014.

[5Cass. Soc. 1er juin 2016, n° 14-19.702.

[6Article L1152-5 Code du travail.

[7Article L2312-59 Code de travail.

[8Article L3212-59 Code du travail.

[9Article L2312-59 Code du travail.

[10Article L2312-59 Code du travail.

[11Article L2315-94 Code du travail.

[12Article L2315-80 Code du travail.

[13Article L2312-8, 3° Code du travail.

[14Article L4622-2 Code du travail.

[15Article L4622-2 Code du travail.

[16Article L4624-3 Code du travail.

[17Article L2312-59 Code du travail.

[18Article L1152-4 et L1152-5 Code du travail.

[19Idem.

[20Idem, voir aussi les articles L2312-59 et L2312-5 Code du travail.

[21Article 1152-2 Code du travail.

[22Articles 12 à 13-1 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016.

[23Article L1152-3 Code du travail.

[24Cass. Soc., 7 février 2012,n° 10-18.035, Bull. 2012, V, n° 55 ; Cass. Soc., 10 juin 2015, n° 13-25.554, Bull. 2015, V, n° 115.

[25Cass. Soc., 13 septembre 2017, n° 15-23.045, publié au Bulletin.

[26Cass. Soc., 16 septembre 2020, n° 18-26.696, publié au Bulletin.

[27Cass. Soc., 16 février 2022, pourvoi n° 19-17.871, publié au Bulletin.

[28Cass. Soc, 19 avril 2023, 21-21.053, Publié au Bulletin.

[29Cass. Soc. 6 juin 2012 n° 10-28.345.

[30Cass. Soc. 7 février 2012 n° 10-18.035.

[31Cass. Soc. 22-1-2014 n° 12-28.711.

[32Article L1152-6 Code du travail.

[33Cass. Soc. 27 novembre 2019, n° 18-10.551.

[34Cass. Soc. 29 juin 2022 n°20-22.220.

[35Cass. Soc. 1er juin 2022 n°20-22 .058.

[36Cass. Soc. 29-6-2022 n° 21-11.437.

[37Cass. Soc. 29-6.2022 n°20-22220.

[38Cass. Soc., 6 décembre 2023, n°22-14.062.

[39Cass. Soc, 07 décembre 2022 n 21-18114.

[40Cass. Soc., 29 juin 2011, n° 09-70.902.

"Ce que vous allez lire ici". La présentation de cet article et seulement celle-ci a été générée automatiquement par l'intelligence artificielle du Village de la Justice. Elle n'engage pas l'auteur et n'a vocation qu'à présenter les grandes lignes de l'article pour une meilleure appréhension de l'article par les lecteurs. Elle ne dispense pas d'une lecture complète.

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  • par Mo Sa , Le 14 février 2024 à 08:02

    Bonjour
    Il n’est stipulé nul part l’obligation ou pas de l’employeur à fournir les conclusions de l’enquête par écrit. Comment faire pour obtenir les concludions d’une enquête pour harcèlement moral pour un employé qui a été dénoncé de façon calomnieuse, sans qu’il n’y ait eu de médiation ? Une simple entrevue avec le cse et l’employeur a été organisée pour signifier à l’accusé qu’il n’y a aucun élément de harcèlement moral.
    Merci

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