Divorcer sans argent : le pot de terre contre le pot de fer ? Par Olivier Rech, Avocat.

Divorcer sans argent : le pot de terre contre le pot de fer ?

Par Olivier Rech, Avocat.

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Explorer : # divorce # aide financière # justice familiale # pensions alimentaires

Un conjoint qui a de faibles ressources hésite ou renonce parfois à divorcer uniquement pour des raisons financières. Il peut craindre de ne pouvoir se loger, assumer les enfants seul ou avoir peur des frais du procès. Afin de dépasser ces craintes, il existe différentes aides mais également des moyens judiciaires destinés à faciliter un libre accès au droit pour tous et en particulier pour le conjoint en situation de faiblesse.

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Les différentes aides.

- L’aide juridictionnelle.

Il s’agit d’une aide financière accordée par l’Etat aux personnes qui n’ont pas les moyens de prendre en charge les frais du procès. Elle couvre la rémunération des auxiliaires de justice (avocat, huissier, notaire, …) et les frais liés aux actes ordonnés par le juge (expertise, enquête sociale, …). La demande est faite auprès du bureau d’aide juridictionnelle du Tribunal saisi.

L’aide est accordée sous certaines conditions, à savoir :
- Ne pas avoir une assurance protection juridique qui couvre la totalité des frais de justice ;
- Être de nationalité française ou européenne, ou résider de manière habituelle en France ;
- Avoir un revenu fiscal de référence et une valeur de patrimoine mobilier et immobilier inférieurs aux plafonds.

Au regard de ces éléments, l’aide, si elle est accordée, peut être totale ou partielle.
En cas d’attribution d’aide juridictionnelle totale, le bénéficiaire ne paiera aucun frais de justice. En cas d’aide partielle, les frais d’acte ordonnés judiciairement seront toujours pris en charge totalement par l’État mais, dans ce cas, une partie des frais des auxiliaires de Justice resteront à la charge du bénéficiaire.

- L’aide du Centre Communal d’Action Sociale (CCAS) :
Il se trouve en mairie et a notamment pour objet d’aider financièrement les personnes aux faibles ressources.

- Les allocations familiales :
Elles bénéficient au parent chez lequel est fixée la résidence des enfants. Elles varient en fonction du nombre d’enfants à charge.

- Le revenu de solidarité active majoré pour isolement (RSA) :
Il peut être perçu par le parent qui assume seul la charge des enfants et a vocation à remplacer l’allocation de parent isolé depuis l’année 2009.

- Le complément familial.
Cette aide peut vous être versée si vous vivez seul et que vous élevez au moins 3 enfants dont l’âge est compris entre 3 ans révolus et moins de 21 ans.

- L’affiliation à la Sécurité sociale.
Le conjoint séparé sans emploi, ayant droit de son époux et parent d’un enfant de moins de 3 ans, peut bénéficier du maintien du droit aux prestations jusqu’au 3e anniversaire de son enfant. À l’issue de cette période, il peut solliciter l’affiliation à la Couverture Maladie Universelle (CMU) en fonction de ses ressources s’il n’a pas retrouvé d’emploi.

- La prime de déménagement.
La demande est faite auprès de la CAF du nouveau domicile dans les 6 mois suivant le déménagement, en même temps que la demande d’aide au logement. L’APL aide à payer le loyer mais également les mensualités de prêt immobilier.

Les possibilités judiciaires.

Nous examinerons ici les sommes fixées ou les moyens de prise en charge décidés par le Juge aux affaires familiales, en début de procédure de divorce, lors de l’ordonnance sur mesures provisoires, décision de Justice destinée à organiser la vie séparée des époux pendant la procédure de divorce.

- L’attribution en jouissance du domicile conjugal et la prise en charge du crédit immobilier.

Un époux peut se voir attribuer la jouissance du domicile conjugal pendant la procédure de divorce. Le Juge peut décider que cela se fera à titre gratuit, c’est-à-dire en dispensant l’époux bénéficiaire de reverser une indemnité d’occupation à l’autre époux lors de la liquidation du bien.
Le Juge peut décider, dans ce cadre, que le prêt immobilier finançant le domicile conjugal sera pris en charge par l’époux qui ne réside pas au domicile.

- La prise en charge des crédits à la consommation et la jouissance des biens.
Le juge décidera par exemple à quel époux sera attribué le ou les véhicules automobiles pendant la procédure et quel époux devra payer les crédits à la consommation.

Un des époux pourrait, dans ce cadre, se voir attribuer un des véhicules pour lui permettre par exemple de se rendre sur son lieu de travail ou transporter les enfants, alors même que pour des raisons financières, la charge du crédit à la consommation finançant ce véhicule serait mis à la charge de l’autre époux.

- Les pensions alimentaires.

L’époux dont les ressources sont inférieures à celles de son conjoint peut bénéficier de la part de ce dernier d’une compensation au titre du devoir de secours.
Elle permet de satisfaire à l’état de besoin de l’époux dans l’impossibilité d’assurer sa subsistance mais au-delà, doit tendre au maintien du niveau de vie existant du temps de la vie commune.
Elle peut prendre la forme d’une pension alimentaire sous forme de rente mensuelle, d’un avantage en nature comme la jouissance gratuite du domicile conjugal ou un cumul pension/ avantage en nature.

Par ailleurs, concernant les enfants, l’époux qui les prend en charge peut solliciter une pension alimentaire destinée à faire face à leur entretien et à leur éducation.
Elle peut prendre la forme d’une pension alimentaire sous forme de rente mensuelle ou d’une autre forme comme la prise en charge directe de certains frais de l’enfant. La décision de Justice fixant la pension prévoit généralement que la rente sera due jusqu’à l’autonomie financière de l’enfant, et ce, au-delà de la majorité de l’enfant.

Lorsqu’elle prend la forme de rentes mensuelles, les pensions sont fixées par le Juge en tenant compte des ressources et charges de chacun des parents.

- La provision pour frais d’instance (article 225 6° du Code civil).

Il s’agit d’une somme permettant au conjoint démuni, de financer sa procédure de divorce et qui est versée par l’autre conjoint qui bénéficie de ressources suffisantes.
Elle pourra être octroyée par le Juge s’il existe un patrimoine commun ou des économies permettant de l’accorder. Il sera précisé que dans la mesure où il s’agit d’une provision, c’est une avance sur le futur partage des biens du couple qui sera récupérée sur la part du bénéficiaire de l’avance.

Certains juges ont une analyse restrictive de cette aide en considérant que l’aide juridictionnelle est justement destinée à cet effet. Il s’agit néanmoins d’une possibilité à envisager au cas par cas.

- L’avance à valoir sur les droits dans la liquidation du régime matrimonial (article 225 7° du Code civil).
Le juge peut accorder à l’un des époux une avance sur sa part de communauté ou de biens indivis.

Les juges sont souverains dans leur pouvoir d’appréciation.
Ils l’ordonnent parfois lorsqu’un des époux a des difficultés financières sérieuses et que des indices laissent craindre que l’autre époux ne disperse le patrimoine.

Dans un arrêt rendu le 15 septembre 2016, les juges de la Cour d’appel de Versailles ont estimé qu’il y avait lieu de faire droit à la demande de l’épouse d’avance sur sa part de communauté dans la mesure où le patrimoine des époux était important, que la part de l’épouse était déterminable et que le caractère extrêmement conflictuel de la séparation laissait présager une procédure très longue.

Olivier RECH, Avocat, Ancien Bâtonnier
Barreau de Thionville
www.rech-avocat.fr
rechavocats chez orange.fr

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