Cette notion se définit en ces termes : « familles constituée d’un parent ou d’une personne qui assume seul la charge d’au moins un enfant ».
Selon l’Insee, elles représentent un quart du paysage familial français. Le droit a donc dû s’adapter à ce public isolé, souvent victime de précarité.
En trois chiffres, la monoparentalité c’est : 82% de mamans seules à bord, 41% d’entre elles situées en dessous du seuil de pauvreté (pourcentage de 2022), et 1/3 de ces familles en difficulté au moment du retour à l’emploi...
A) Les aides sociales et éducatives.
1. Le revenu de solidarité active (RSA).
Visé par les articles L262-2 à L262-12 du Code de l’action sociale et des familles, le RSA remplace le revenu minimum d’insertion (RMI) et l’allocation de parent isolé (API). Sont concernées les personnes qui assument seules la charge d’un ou plusieurs enfants. Pour en bénéficier, deux conditions cumulatives sont requises : être âgé de 25 ans (ou moins de 25 ans avec un enfant né ou à naître), et être à la recherche d’un emploi. L’octroi et le montant de cette allocation varient en fonction de la nationalité, puis de la capacité d’accès au retour à l’emploi du demandeur.
2. L’allocation au soutien familial.
Modifié par la loi du 23 décembre 2021, ce dispositif réservé aux familles monoparentales est visé par l’article L523-1 et l’article L523-2 du Code de la Sécurité sociale. Il est ouvert à :
« 1°) tout enfant orphelin de père ou de mère, ou de père et de mère ;
2°) tout enfant dont la filiation n’est pas légalement établie à l’égard de l’un ou l’autre de ses parents ou à l’égard de l’un et de l’autre ;
3°) tout enfant dont le père ou la mère, ou les père et mère, se soustraient ou se trouvent, s’ils sont considérés comme tels, au regard de conditions fixées par décret, comme étant hors d’état de faire face à leurs obligations d’entretien ou au versement d’une pension alimentaire mise à leur charge par décision de justice ou d’une contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant fixée par les actes ou accords mentionnés au IV ;
4°) Tout enfant dont le père ou la mère, ou les père et mère, s’acquittent intégralement du versement d’une pension alimentaire mise à leur charge par décision de justice ou d’une contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant fixée par les actes ou accords mentionnés au même IV, lorsque le montant correspondant est inférieur à celui de l’allocation de soutien familial. Dans ce cas, une allocation de soutien familial différentielle est versée. Les modalités d’application du présent 4°, notamment les conditions dans lesquelles, en l’absence d’une décision de justice ou d’un accord ou d’un acte respectivement mentionnés aux 1° et 2° du IV, le montant de la contribution pris en compte pour le calcul de l’allocation de soutien familial différentielle est retenu, sont fixées par décret en Conseil d’Etat ».
Ainsi, cette prestation familiale versée par la CAF [1], se substitue soit à l’absence totale de participation financière de la part du parent non-gardien, soit à sa contribution partielle. Dans ce cas, l’ASF complète le montant insuffisant de la pension alimentaire due. Le parent bénéficiaire doit être en mesure d’apporter la preuve qu’il a initié une procédure de fixation de l’obligation alimentaire avant le quatrième mois du versement de cette prestation.
En pratique, au 1ᵉʳ avril 2021, le montant de l’ASF est de 195,86 euros par enfant à charge dans le cas d’une éducation en solo ; 261,06 euros par enfant à charge si l’enfant recueilli est privé de l’aide de ses deux parents.
En cas de versement de l’ASF différentielle (en complément d’une pension alimentaire faible), son montant sera de 195,86 euros soustraits à la somme de la pension fixée et versée (par exemple, si vous recevez une pension alimentaire équivalente à 50 euros, l’ASF sera de 195,86 - 50 = 145,86 euros).
3. La prestation d’accueil du jeune enfant.
Cette prestation en regroupe quatre :
a) La prime à la naissance (versement unique lors du 7ᵉ mois de grossesse) ou la prime à l’adoption (pour chaque enfant adopté au moment de l’arrivée au domicile familial) ;
b) L’allocation de base (à compter du 2ᵉ mois de bébé ou l’arrivée de l’enfant au foyer jusqu’au mois précédent ses 3 ans. En cas d’adoption, elle est versée pendant 1 an minimum jusqu’aux 20 ans de l’enfant maximum) ;
c) La prestation partagée d’éducation de l’enfant (sa durée dépend du nombre d’enfants et de la situation familiale) ;
d) Le complément de libre choix du mode de garde (jusqu’aux 6 ans de l’enfant en cas de garde par un salarié assistant maternel agréé ou garde à domicile, une association ou une entreprise de garde à domicile ou une micro-crèche) [2]. La Loi de financement de la Sécurité sociale de 2023 programme trois évolutions principales pour 2025. Parmi celles-ci figurent : rendre la garde du jeune enfant par un assistant maternel aussi accessible que la crèche par la modification du mode de calcul du CMG ; bénéficier du CMG jusqu’aux 12 ans de l’enfant (dispositif en vigueur à partir du 1ᵉʳ décembre 2025 au plus tard) ; lors d’une garde alternée de l’enfant, possibilité de partager le CMG « emploi direct » entre les deux parents (1ᵉʳ juillet 2025 au plus tard).
4. Le complément familial.
Le complément familial est une aide financière attribuée aux familles ayant au moins trois enfants à charge âgés de plus de trois ans. Sa création remonte à la loi nº 77-765 du 12 juillet 1977, visant à soutenir les familles nombreuses. Cette allocation est versée par la Caisse d’Allocations familiales (CAF) ou la Mutualité Sociale Agricole (MSA). Plusieurs conditions cumulatives sont nécessaires à son attribution :
- avoir au moins trois enfants à charge,
- âgés de quatre à 20 ans,
- les ressources du foyer ne doivent pas dépasser un certain plafond, qui varie selon la composition de la famille et est ajusté une fois par an (comme pour la plupart des évaluations, la CAF ou la MSA se base sur les revenus perçus il y a deux ans (N-2)).
Son montant prend en compte le statut de parent isolé (de 184 à 277 euros environ) [3].
5. Aide complémentaire santé.
L’article L861-1 du Code de la Sécurité sociale (CSS) accorde l’aide complémentaire santé à toute personne justifiant d’une résidence stable et régulière sur le territoire français et dont les ressources sont inférieures au seuil prévu par l’article D861-1 du CSS. Les titulaires du RSA dont les revenus sont inférieurs au montant forfaitaire du RSA bénéficient, pour leur part, de plein droit de la couverture maladie universelle complémentaire (CMUC). Les mineurs d’au moins 16 ans connaissant des difficultés familiales y sont aussi éligibles.
L’article L861-1 du CSS prévoit les modalités d’accès au remboursement de la part complémentaire des frais de santé : les demandeurs doivent d’abord bénéficier de la protection universelle maladie. Le requérant désireux de bénéficier de la couverture de la complémentaire santé solidaire doit pouvoir fournir la preuve que les conditions d’ouverture du droit à l’assurance maladie (soit au titre de l’activité professionnelle soit au titre de la résidence stable et régulière) en France prévues à l’article L160-1 du CSS sont réunies en l’espèce [4].
6. L’allocation de rentrée scolaire.
L’allocation de rentrée scolaire définie par l’article R543-1 du CSS vise à rendre accessible l’école à tout le monde conformément à l’article R543-3 du CSS. Il s’agit d’une prestation destinée à l’accompagnement financier du parent lors de la rentrée scolaire de chacun de ses enfants (du C.P au Baccalauréat). Son montant se répartit comme suit :
- 416,40 euros par enfant âgé de 6 à 10 ans
- 439,38 euros par enfant âgé de 11 à 14 ans
- 454,59 euros par enfant âgé de 15 à 18 ans.
7. Le Fonds social collégien, fonds social lycéen, fonds social pour les cantines.
Par la circulaire de 2017 [5], le gouvernement a souhaité s’engager dans une lutte contre la pauvreté au collège et au lycée. Le montant de l’aide s’indexe sur le prix des repas, déterminé par la commune. Celle-ci peut appliquer le quotient familial (l’adapter aux revenus et aux charges du parent). Pour rappel : il comprend le nombre de parts. Ce calcul dépend de la situation du contribuable (célibataire, marié, etc.) et des personnes à charge [6].
B) Le droit au logement.
i) L’aide personnalisée au logement (APL) a été créée par la loi du 3 janvier 1977.
Elle est soumise à des conditions de ressources. Elle s’adresse au parent qui occupe un logement conventionné avec l’Etat. Il s’agit d’une réduction mensuelle du loyer dû.
ii) L’allocation de logement à caractère familial (ALF).
Elle a été instituée par la loi du 1ᵉʳ septembre 1948, et relève du CSS. Elle est attribuée au locataire, colocataire ou sous-locataire (déclaré au propriétaire) d’un logement meublé ou pas, au résident en foyer d’hébergement.
iii) L’allocation de logement à caractère familial (ALF).
Elle a été créée par la loi du 1ᵉʳ septembre 1948, puis relève du Code de la Sécurité sociale. Elle est attribuée au locataire ou colocataire ou sous-locataire (déclaré au propriétaire) d’un logement meublé ou non, au résident en foyer d’hébergement.
iv) Le fonds de solidarité logement (FSL).
Ce fonds exceptionnel accorde des aides financières aux personnes en difficulté afin de leur permettre de louer (parc public ou privé) ou de conserver leur logement. Les conditions d’octroi des aides ainsi que les modalités de fonctionnement du FSL sont départementales (sous conditions de ressources).
v) Le chèque énergie remplace le Tarif de Première Nécessité (TPN électricité) et le Tarif Spécial de Solidarité (TSS gaz) à partir du 1ᵉʳ janvier 2018.
Il est attribué en fonction de la situation financière et familiale, selon les ressources et la composition de la famille et envoyé automatiquement. Il peut être utilisé pour payer les factures d’électricité et/ou de gaz, ainsi que pour financer certains travaux de rénovation énergétique.
NB : La SNCF, France Télécom, et certains lieux sportifs et culturels appliquent également leurs systèmes de réductions tarifaires.
C) Les aides relatives à la procédure de divorce et les avantages fiscaux.
1. L’aide juridictionnelle.
Les familles monoparentales sont éligibles à l’aide juridictionnelle. Ce dispositif soumis au revenu fiscal de référence permet la prise en charge totale (s’il est inférieur à 11 262 euros) ou partielle des frais (s’il est inférieur à 16 890 euros) (article 3 du décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020) portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique et relatif à l’aide juridictionnelle et à l’aide à l’intervention de l’avocat dans les procédures non juridictionnelles pour chaque situation individuelle.
2. La pension alimentaire ( Cf.3°).
3. L’agence de recouvrement et d’intermédiation des pensions alimentaires.
La séparation, le divorce ou encore le choix d’un modèle familial conduisant à l’éducation monoparentale ne saurait justifier une quelconque dérogation aux principes posés par le Code civil de 1804. Celui-ci fixe des devoirs parentaux. Aussi, son article 372-2 énonce-t-il :
« Chacun des parents contribue à l’entretien et à l’éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l’autre parent, ainsi que des besoins de l’enfant. Cette obligation ne cesse de plein droit ni lorsque l’autorité parentale ou son exercice est retiré, ni lorsque l’enfant est majeur ».
Or, l’un des problèmes majeurs rencontré par les familles monoparentales reste la précarité, source importante de vulnérabilité. Pour pallier cette inégalité entre modèles traditionnels/monoparentaux, un arsenal juridique tente l’équilibre entre obligations alimentaires et respect de l’intérêt supérieur de l’enfant. Cette recherche d’harmonisation respecte l’article 3 de la Convention internationale du droit de l’enfant du 20 novembre 1989 (CIDE).
Trois arrêts ont consacré l’applicabilité des articles 16 et 3 § 1 de la CIDE, affirmant le devoir de respect de la primauté de l’intérêt supérieur de l’enfant [7].
La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2020 s’est aligné sur ce mouvement jurisprudentiel (article 72 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2020). Ce texte est à l’origine d’un nouveau dispositif public d’intermédiation financière des pensions alimentaires (IFPA), sous l’égide de l’agence de recouvrement et d’intermédiation des pensions alimentaires (ARIPA). Comme son nom l’indique, il s’agit d’un organisme de collecte indirecte de la somme à recevoir par le parent créancier. De cette manière, en cas de non-respect du devoir légal de contribution à l’entretien puis à l’éducation, il n’y a aucun détournement du principe d’interdiction d’immixtion arbitraire dans la vie privée de l’enfant. Le débiteur défaillant a la possibilité de participer à la sauvegarde souhaitable d’une zone pacifique. De fait, ARIPA contribue sur le long terme à l’atteinte de la coparentalité casuistique dans le respect de l’intérêt supérieur de l’enfant.
En tout état de cause, si l’ex-couple s’entend sur la détermination du montant de la pension alimentaire, il a la possibilité de signer une Convention parentale. Une demande à la CAF/MSA de délivrance d’un titre exécutoire peut alors être effectuée.
La formalisation de ce document par acte authentique devant notaire ou son homologation par le juge aux affaires familiales est aussi envisageable (article 373-2-2 du Code civil).
Dans le cas contraire, l’intermédiation est ouverte aux cas suivants [8] :
i) Dans les jugements de divorce fixant une contribution à l’éducation et l’entretien de l’enfant ;
ii) Dans un jugement fixant ou révisant une CEEE « hors divorce » ;
iii) En accord entre les parents, dans une convention organisant les modalités d’exercice de l’autorité parentale soumise à l’homologation du juge [9] ;
iiii) En accord entre les parents, dans une convention de divorce (ou de séparation de corps) par consentement mutuel par actes d’avocats [10].
Bien sûr, en situation d’échec total de la conciliation, le recours contentieux devant le JAF est accessible.
Par ailleurs, toute famille peut bénéficier de parts fiscales supplémentaires, lors du calcul de l’impôt sur le revenu (entre 1,5 et 6 parts) (article 194 du Code général des impôts).
Pour terminer cette cartographie des droits et des aides à destination des familles monoparentales avec un optimisme estival, voici le témoignage encourageant d’Amélie, l’une des jeunes mamans isolée, interrogée au micro de France 3, le 14/09/2022 :
« Effectivement il y a des moments difficiles, des passages à vide. Mais ça passe. Il ne faut surtout pas hésiter à dire que c’est difficile, il ne faut surtout pas avoir honte de cela. On trouve son rythme au fil du temps » [11].