Le dénigrement commercial constitutif d'acte de concurrence deloyale, par Anthony Bem, Avocat

Le dénigrement commercial constitutif d’acte de concurrence deloyale, par Anthony Bem, Avocat

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Le dénigrement est un phénomène aussi ancien que celui du commerce et des relations commerciales, où certains commerçants croient devoir jeter le discrédit sur un concurrent, en répandant à son propos, ou au sujet de ses produits ou services, des informations malveillantes.

C’est d’ailleurs, cette définition qu’en donne un arrêt rendu le 21 mai 1974 par la Cour d’appel de Lyon.

Avec l’Internet, le dénigrement commercial se repend, se développe et innove dans ses modalités de diffusion.

A titre liminaire, contrairement à ce que peut lire sur la toile, le dénigrement concerne l’atteinte à la réputation et à l’honneur de personnes morales (associations, sociétés, groupements, etc ...) et de diffamation lorsque cette atteinte concerne des personnes physiques que sont les particuliers (http://www.legavox.fr/blog/maitre-anthony-bem/injure-diffamation-publique-819.htm).

Tout comme les actes de concurrence déloyale, le dénigrement est protéiforme.

La jurisprudence a déjà eu l’occasion de juger que constituent un dénigrement sanctionné sur le fondement de la concurrence déloyale :

- Une simple comparaison, même fondée sur des faits exacts, mais pouvant « entraîner le discrédit ou le dénigrement des marques, noms commerciaux, autres signes distinctifs, biens, services, activité ou situation d’un concurrent » ;

- Un tableau comparatif comportant des allégations fausses sur un produit concurrent (CA Versailles, 12e ch., 30 janv. 1997) ;

- La présentation d’un produit concurrent comme obsolète (CA Paris, 4e ch., 14 janv. 2000)

- La présentation d’un produit comme « l’aliment no 1 », ce qui implique une comparaison dénigrante avec les autres aliments (T. com. Paris, 6 nov. 2002) ;

- Soutenir l’incompétence professionnelle du concurrent (Cass. com., 5 janv. 1961 ; CA Versailles, 12e ch., 9 sept. 1999) ;

- Remettre en cause l’honorabilité du concurrent (CA Paris, 7 juill. 1954 ; TGI Strasbourg, 1re ch. civ., 29 févr. 2000), son honnêteté (CA Versailles, 12e ch., 19 févr. 1998), son crédit (Cass. com., 22 févr. 2005) ;

- Révéler l’appartenance du concurrent à une religion, une secte, ou une obédience (CA Rennes, 27 déc. 1904), ses sentiments prétendument antisémites (TGI Paris, 2 mai 1968), sa nationalité (CA Lyon, 27 juill. 1936), sa race ou celle de ses clients (TGI Paris, 2 mai 1968).

- Critiquer la qualité des services rendus par l’entreprise concurrente (Cass. com., 20 janv. 1987 ;T. com. Paris, 12e ch., 15 janv. 2002), le prix de ses services (Cass. com., 15 nov. 1982), les conditions de vente et notamment la garantie (T. com. Paris, 19 févr. 1969).

- Divulguer des poursuites intentées contre un concurrent, mais tant que la décision n’est pas devenue définitive (Cass. com., 8 févr. 1967 ; CA Paris, 4e ch., sect. A, 3 avr. 1995, Cass. com., 12 mai 2004)

Quelques observations générales doivent cependant être rappelées afin d’appréhender parfaitement l’appréciation jurisprudentielle faite du dénigrement.

L’affirmation de la vérité elle-même constitue aussi un acte de concurrence déloyale. Le dénigrement est constitué même si le défendeur apporte la preuve de l’exactitude des faits révélés ; l’exceptio veritatis admise en matière de diffamation n’efface pas le dénigrement et n’enlève pas à l’acte du concurrent son caractère déloyal (Cass. com., 12 oct. 1966).

Depuis, la loi no 92-60 du 18 janv. 1992 a autorisé la publicité comparative à condition d’être limitée à une comparaison objective, loyale, véridique et de ne pas être de nature à induire en erreur le consommateur.

De plus, le dénigrement nécessite que le concurrent soit nommément désigné ou facilement identifiable et peu importe qu’il atteigne une seule personne ou entité ou un ensemble de commerçants ou d’industriels.

Enfin, peu importe que le dénigrement soit contenu dans un tract, un prospectus, une plaquette publicitaire, une circulaire, un livre, un journal, une revue, une lettre, un email ou tout autre document écrit ; une déclaration orale, une émission de radio à condition d’en rapporter la preuve, un « spot » ou film publicitaire télévision ou radio, du moment que la diffusion est rendue publique et a atteint des clients actuels ou éventuels.

S’agissant des sanctions des actes de dénigrement, je vous invite à prolonger votre lecture en lisant mon article rédigé sur mon blog à ce sujet : http://legavox.fr/blog/maitre-anthony-bem/concurrence-deloyale-definition-sanctions-1645.htm

Anthony Bem

Avocat à la Cour

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