Lorsque des telles violences sont commises au sein du couple, même lorsqu’il n’y a plus de cohabitation, le juge aux affaires familiales peut délivrer une ordonnance de protection, en urgence, visant à mettre la personne qui en est victime hors de danger.
La délivrance d’une ordonnance de protection est un outil juridique rapide et efficace permettant de :
Solliciter une mesure d’éloignement et une interdiction d’entrer en contact avec la victime ;
Interdire à la personne violente de détenir ou de porter une arme ;
Proposer à la personne violente une prise en charge sanitaire, sociale ou psychologique ou un stage de responsabilisation pour la prévention et la lutte contre les violences au sein du couple et sexistes ;
Statuer sur la résidence séparée des époux en attribuant notamment à la personne victime la jouissance du domicile conjugal s’il en fait la demande,
Autoriser la victime à dissimuler son adresse et à élire domicile chez son avocat ou toute autre personne morale qualifiée ;
En présence d’un ou de plusieurs enfants, le juge aux affaires familiales, lorsqu’il rend une ordonnance de protection se prononce également sur les modalités d’exercice d’autorité parentale (autorité parentale, résidence habituelle du ou des enfants, droits de visite, pension alimentaire).
Après plusieurs réformes, ce dispositif tend à être de plus en plus sollicité car il offre une meilleure protection immédiate des victimes de violences conjugales.
En 2024, on dénombrait encore une centaine de féminicides, ce qui conduit à continuer à lutter contre les violences conjugales et à rester vigilants face à ces situations graves, qui ne peuvent en aucun cas être minimisées.
Conformément à l’article 515-11 du Code civil, l’ordonnance est délivrée si les conditions suivantes sont réunies :
Si le juge estime que les faits de violences alléguées sont vraisemblables : à cet effet, il convient de produire tout document permettant de considérer que des violences ont été commises tels qu’un dépôt de plainte, un certificat médical des UMJ, des photographies datées des blessures, des attestations de témoin…
et si le juge constate que la victime ou un ou plusieurs enfants sont en danger : cette notion de danger est particulièrement subjective car, parfois, lorsqu’il n’y a plus de cohabitation, le danger n’est plus forcément constaté.
Auparavant valable 6 mois, la durée de l’ordonnance de protection a été rallongée à une année.
Depuis la loi du 13 juin 2024, un nouveau dispositif a également vu le jour : l’ordonnance provisoire de protection immédiate. Le décret n° 2025-47 du 15 janvier 2025 est venu préciser les modalités de saisine du juge aux affaires familiales par le procureur de la République aux fins de délivrance d’une ordonnance provisoire de protection immédiate.
Le procureur de la République, lorsqu’une plainte est déposée, a le pouvoir de saisir lui-même, avec l’accord de la personne menacée, le juge aux affaires familiales aux fins qu’une ordonnance de protection immédiate soit délivrée sans audience et dans un délai de 24 heures.
Ce nouveau dispositif permet de protéger la victime, en cas d’extrême urgence, dans l’attente que le juge aux affaires familiales statue sur une demande d’ordonnance de protection plus longue.
Il convient donc, d’une part, d’être en mesure de rapporter la preuve des violences physiques et/ou verbales et, d’autre part, d’être particulièrement réactif dans la mesure où le danger doit être actuel au moment où la demande d’ordonnance de protection est formulée devant le juge aux affaires familiales.
Plusieurs ordonnances de protection, dans diverses situations, ont récemment été obtenues par des personnes victimes de violences conjugales :
Une femme victime de violences réitérées anciennes et actuelles (violences physiques et verbales, menaces de mort, appels téléphoniques répétés) avait quitté le domicile conjugal avec l’enfant commun du couple. Au cours du mois de juillet 2023, alors que le couple ne cohabitait plus, le conjoint violent avait défoncé délibérément la porte d’entrée de l’appartement dans lequel se trouvait son épouse, en lui causant un hématome constaté médicalement au niveau du coude. L’époux violent avait alors pris la fuite après avoir été immédiatement chassé par un voisin. Les allégations de la victime étaient corroborées par une photographie de la porte défoncée, le dépôt de plainte de l’épouse, outre une attestation du voisin confirmant qu’il avait surpris l’époux en train de s’introduire dans le logement pour la frapper. Compte tenu de ces faits, le juge a considéré que les craintes de la victime n’étaient pas subjectives, que le danger était au contraire actuel, et que cela contribuait à dégrader ses conditions de vie ainsi que celles de l’enfant.
Une femme victime de violences physiques commises dans l’espace public, après que l’époux ait quitté le domicile conjugal, avait obtenu une ordonnance de protection au motif que le conjoint violent continuait à sa présenter régulièrement à l’ancien domicile conjugal pour y récupérer son courrier. Les violences étaient vraisemblables compte tenu du dépôt de plante et du certificat des UMJ, et le danger était caractérisé dès lors que le couple pouvait, à tout moment, se croiser.
Une femme vivait au domicile conjugal avec son époux, dans un climat de violences majoritairement psychologiques (insultes) mais n’osait pas partir avec l’enfant par peur des représailles. Or, au cours du mois de juillet 2023, elle a été contrainte de se rendre au commissariat en pleine nuit après avoir été agressée physiquement par son époux. Après avoir été mise temporairement à l’abri dans un hébergement d’urgence, elle a obtenu une ordonnance de protection afin, notamment, de pouvoir réintégrer le domicile conjugal avec l’enfant et que son conjoint violent en soit expulsé, outre une interdiction d’entrer en contact.
Révéler des faits de violences conjugales s’avère bien souvent difficile pour la victime qui craint des représailles ou l’éclatement de la cellule familiale. Néanmoins, des professionnels formés, tels que l’avocat, peuvent leur permettre de retrouver confiance et d’engager des procédures judiciaires pour faire valoir leurs droits.