La loi 23 juin 2006 (article 1094 -1 du Code civil) dispose que : « Sauf stipulation contraire du disposant, le conjoint survivant peut cantonner son émolument sur une partie des biens dont il a été disposé en sa faveur. Cette limitation ne peut être considérée comme une libéralité faite aux autres successibles. »
Le conjoint survivant peut ainsi fixer son émolument et ainsi cantonner !
La loi du 23 juin 2006 a également étendu l’exercice de cette faculté à tout légataire (C. civ., art. 1002-1).
Ainsi, le cantonnement est bien un outil de gestion post-successorale et de transmission « sur mesure » à l’instar de la représentation du renonçant, qui participe du même objectif : augmenter les droits des autres héritiers.
Il s’applique à toutes les libéralités à cause de mort (donation et legs) alors même qu’aucune clause n’aurait été prévue en ce sens. Il s’agit ainsi d’une acceptation partielle d’une libéralité à cause de mort.
Notons que le cantonnement est une option à ne pas confondre avec l’option successorale dont le régime juridique est bien établi.
Avant 2006 l’ancien régime de renonciation, impliquait une double mutation et donc une double taxation. Ce qui n’est plus le cas depuis.
Il conviendra donc d’examiner, les aspects légaux et conventionnels du cantonnement puis sous un angle pratique, d’en étudier sa mise en œuvre.
1° Conditions
Le cantonnement s’applique au dernier des vivants et à tous les legs, consentis même avant l’entrée en vigueur de la nouvelle loi du 23 juin 2006, sauf volonté contraire du disposant. L’initiative du dispositif lui appartient donc.
Il faut faire attention à la pression potentielle des héritiers indirectement bénéficiaires d’un cantonnement ne doit pas être négligée. Et par ailleurs, limiter l’étendue du cantonnement peut aussi être motivé par des raisons fiscales ou patrimoniales.
Enfin, il faut qu’au moins un héritier ait accepté la succession.
Quelles sont les libéralités dont l’émolument peut être cantonné ?
Il y a les legs de l’article 1002-1 du code civil
Ce texte s’applique tant aux legs universels qu’à titre universel ou particulier. Un conjoint survivant, bénéficiaire de plusieurs legs, peut cantonner les uns et pas les autres. S’il est à la fois héritier et légataire, il peut avoir intérêt à renoncer à sa qualité d’héritier pour n’accepter que celle de légataire, qui est susceptible de cantonnement.
Notons que les legs graduel ou résiduel ne peuvent faire l’objet d’un cantonnement.
Les donations au dernier vivant :
Principalement les donations entre époux. Toutefois, la faculté de cantonnement n’est pas applicable aux droits légaux du conjoint survivant.
La doctrine est unanime à considérer que même hors la présence de descendant, une donation entre époux peut faire l’objet d’un cantonnement
De quelles transmissions s’agit-il ?
Les libéralités qui, prenant effet au décès, portent sur des biens présents et non sur des biens à venir, ne peuvent faire l’objet d’un cantonnement.
Concernant la donation d’usufruit successif, (donation à terme de biens présents), cela reviendrait à revenir sur une acceptation, qui a rendu la donation parfaite.
Les modalités d’exercice du cantonnement
La faculté de cantonnement n’obéit pas au régime juridique de l’option successorale. Son régime n’est pas défini par le législateur, d’où la nécessité de le définir dans l’acte constitutif (donation entre époux ou legs)
Aucun formalisme ou délai particulier n’est ici prévu. On peut prévoir dans l’acte conférant la libéralité que le cantonnement se fera dans l’acte de délivrance de legs ou acte d’option par exemple.
Il faut savoir que le cautionnement est un acte unilatéral.
En pratique il faudrait encadrer l’option pour le cantonnement dans un délai.
2° Effets du cantonnement vis-à-vis des héritiers
L’idée est que l’émolument délaissé et « qui ne sera pas vu par le bénéficiaire », ne fera plus l’objet de la libéralité.
Ainsi, le cantonnement profitera à tous les héritiers du défunt dans la mesure de leur vocation successorale.
Fiscalement, les biens recueillis par les héritiers, du fait du cantonnement, sont réputés transmis à titre gratuit par le défunt et ne sont donc pas considérés comme une libéralité faite aux autres successibles.
Attention, le cantonnement peut, au premier décès, entraîner plus de droits de succession ! Il est fortement recommandé de demander conseil au notaire chargé du règlement de la succession.
Les raisons du cantonnement :
Ce peut être pour des raisons fiscales : le conjoint survivant peut ne pas vouloir appréhender l’usufruit de biens inutiles pour lui mais coûteux en termes d’IFI (impôt sur la fortune immobilière) ; il peut vouloir cantonner l’usufruit légué à un droit d’usage qui pourrait être plus adapté à ses besoins.
Cependant, ce sera avec les enfants (ou autres héritiers) au vu de l’économie d’ensemble du règlement successoral que la décision sera prise par le conjoint survivant.
Dans le cadre d’une optimisation fiscale maximale, le cantonnement pourra servir le démembrement de propriété (avec des droits en usufruit et des droits en pleine propriété).
Discussions en cours :
Quand un conjoint survivant a rédigé, signé et déposé au notaire son exercice de cantonnement puis qu’il change de notaire et ne veut plus exercer ce cantonnement sous l’influence du nouveau notaire, est-ce légal ? Quels sont les recours pour que ce cantonnement soit respecté ?
En vous remerciant par avance pour votre explication
Quand le cantonnement cantonnement prend effet ?
A la date du décès ou à la signature de la succession ?
Vous n’évoquez pas le cas d’un conjoint survivant bénéficiaire d’un contrat de mariage de communauté universelle qui ne peut pas cantonner son émolument en raison de ce que les avantages matrimoniaux ne sont pas des dispositions à cause de mort et le cantonnement est donc inapplicable à une clause d’attribution intégrale. En effet, aucune faculté n’est laissée au survivant quant à la mise en jeu de cet avantage. La clause d’attribution intégrale développe tous ses effets dès la survenance du décès de l’époux et indépendamment de toute manifestation de volonté de la part du survivant.
Donc, toute renonciation totale ou partielle à l’attribution intégrale qui serait faite par le survivant serait translative de propriété au profit de ceux appelés à en bénéficier (généralement les enfants) et constitutive d’une mutation à titre gratuit taxable en conséquence.
Bonjour,
Est-ce un texte uniquement destiné à des spécialistes en droits ?
Car pour ce qui est du lecteur lambda, même avec étude supérieures (mais pas dans le droit) ces explications sont incompréhensibles.
Pourquoi un juriste ne pourrait-il pas parler un langage simple ?
Bonjour,
en effet cet article est indiqué en LECTURE "EXPERT".
Il y a différents niveaux de connaissance du droit, d’où divers niveaux d’approfondissement des articles publiés sur notre site. Celui-ci ne s’adresse en effet pas à tous, mais vous en trouverez peut-être d’autres sur ce thème de type "TOUT PUBLIC" par une recherche sur notre site.
Vous dites que le cantonnements’applique à toutes les libéralités à cause de mort (donation et legs) alors même qu’aucune clause n’aurait été prévue en ce sens. Il s’agit ainsi d’une acceptation partielle d’une libéralité à cause de mort.
Vous indiquez ensuite de façon contradictoire :Les libéralités qui, prenant effet au décès, portent sur des biens présents et non sur des biens à venir, ne peuvent faire l’objet d’un cantonnement.
Concernant la donation d’usufruit successif, (donation à terme de biens présents), cela reviendrait à revenir sur une acceptation, qui a rendu la donation parfaite.
Dans mon cas la donation d’usufruit successif ayant fait l’objet d’une donation partage en 2008 et la donation au dernier vivant en 1998,.
Il ne s’agit donc pas d’un bien présent , mais futur. Que faut il comprendre ?? Cantonnement possible ou pas