Par une instruction [1], la ministre du travail, de la santé et des solidarités, prenant acte du fait que les PADHUE "sont indispensables à notre offre de soins", qu’ils "répondent à un besoin important en ressources humaines des établissements de santé et pourraient bénéficier de l’attestation provisoire de 13 mois prévues à l’article 35 de la loi n° 2023-1268 du 27 décembre 2023", a invité "les agences régionales de santé (ARS) à délivrer à titre dérogatoire une autorisation temporaire d’exercice aux praticiens" ayant échoué aux épreuves de vérification des connaissances.
Dans un contexte de désertification médicale, d’urgences submergées et de burn-out des personnels hospitaliers, il était en effet impératif de permettre aux PADHUE de pouvoir exercer dans les services.
Car ce sont aussi eux qui "font tourner les services" [2].
Qui sont les médecins éligibles à l’autorisation temporaire d’exercice (ATE) ?
L’instruction du 12 février 2024 qui prévoit cette ATE énonce qu’y sont éligibles l’ensemble des praticiens qui "pourraient bénéficier de l’attestation provisoire de 13 mois prévue à l’article 35 de la loi n° 2023-1268 du 27 décembre 2023 visant à améliorer l’accès aux soins par l’engagement des professionnels de santé", dite "loi Valletoux".
D’un point de vue juridique, le procédé souligne l’urgence à ouvrir des postes aux PADHUE. Car il s’agit d’appliquer de manière anticipée des dispositions législatives qui prévoient pourtant qu’"un décret en Conseil d’Etat définit les conditions d’application du présent article".
Mais nécessité fait loi, la continuité des soins impose sans nul doute possible que les services hospitaliers ne soient pas désorganisés du jour au lendemain, en perdant des milliers de médecins.
Et les dispositions claires et précises de l’article 35 de la loi Valletoux permettent d’identifier des critères d’éligibilité à l’ATE :
- justifier d’un diplôme obtenu hors Union européenne
- disposer d’une expérience professionnelle
- attester d’un niveau de langue
- s’engager à se présenter à la prochaine session des EVC (inscription jusqu’au 24 juin prochain).
Il en résulte que les ARS doivent se borner à mettre en œuvre ces critères : elle ne peuvent pas, de leur propre chef, en fixer de nouveaux et notamment exiger de s’être présenté aux EVC 2023.
Un refus d’ATE fondé sur un autre des critères que ceux prévus par la loi est illégal.
Quel statut pour les PADHUE titulaires d’une ATE ?
Autre question lourde de conséquences : une fois l’ATE obtenue, sous quel statut exercer ?
En la matière, la situation financière des hôpitaux [3] commande souvent les statuts imposés : le moins cher est trop souvent privilégié, au mépris des questions de légalité.
Ainsi, de nombreux établissements proposent le statut de stagiaire associé, lequel peut être octroyé aux
"médecins et pharmaciens titulaires d’un diplôme de docteur en médecine ou en pharmacie permettant l’exercice dans le pays d’obtention ou d’origine et n’effectuant pas une formation universitaire en France. Ils sont désignés en qualité de stagiaires associés pour une période de six mois renouvelable une fois, qui peut être fractionnée" [4].
La durée cumulée de ce statut ne peut excéder deux ans (arrêté du 16 mai 2011 relatif aux stagiaires associés).
Ce statut suppose la signature d’un contrat tripartite entre le médecin intéressé, l’établissement d’accueil et "l’organisme partie à la convention de coopération internationale" ; c’est cette troisième partie qui fait bien souvent défaut. Plus encore au-delà de deux années, ce contrat ne devrait plus être proposé. Il l’est pourtant souvent... pour des raisons financières sans doute : la rémunération est fixée "conformément aux dispositions applicables aux étudiants faisant fonction d’interne" soit à peine plus de 17 000 euros (montant brut annuel ; arrêté du 8 juillet 2022 relatif aux émoluments, rémunérations ou indemnités des personnels médicaux, pharmaceutiques et odontologiques exerçant leurs fonctions dans les établissements publics de santé), augmentée d’une indemnité de sujétions particulières de 435,18 euros (brut mensuel).
L’autre statut régulièrement proposé est celui de "faisant fonction d’interne" - au même (bas) prix.
Il peut être proposé aux
"médecins ou pharmaciens titulaires d’un diplôme de docteur en médecine ou en pharmacie permettant l’exercice dans le pays d’obtention ou d’origine qui effectuent des études en France en vue de la préparation de certains diplômes dont la liste est fixée par arrêté des ministres chargés de l’enseignement supérieur et de la santé" [5].
Tous les PADHUE qui ne sont pas étudiants en France ne devraient donc pas se voir proposer ce statut (même s’il n’est pas rare qu’on leur "force la main" pour le devenir, ce qui confine à la fraude).
Il reste donc le statut de praticien associé.
L’article R6152-901 du Code de la santé publique prévoit que
"relèvent du statut des praticiens associés les praticiens qui en vue d’exercer en France la profession de médecin, odontologiste ou pharmacien, sont tenus par le présent code ou par d’autres dispositions législatives ou réglementaires d’accomplir un parcours de consolidation des compétences ou un stage d’adaptation".
La rédaction de ce texte reflète mal l’objectif poursuivi, traduit en ces termes par le ministère de la santé : instituer "un processus de simplification et sécurisation de l’exercice des professionnels de santé à diplôme hors UE" (ministère de la santé, [6], mai 2021).
Ayant vocation à se substituer aux statuts de praticien attaché associé et d’assistant associé, la logique veut que tout PADHUE titulaire d’une ATE en bénéficie, à tout le moins, dans l’attente de l’énième statut qui devrait être publié [7] en application de l’article 35 de la Loi Valletoux.
Une simple question de rémunération le justifie : au-delà de l’indécence de payer 1 400 euros par mois un médecin, qui plus est expérimenté, l’éligibilité à la carte pluriannuelle portant la mention "talent-profession médicale et de la pharmacie" issue de l’article 31 de la dernière loi immigration est subordonnée au "respect d’un seuil de rémunération fixé par décret en Conseil d’Etat" (article L421-13-1 du CESEDA).
Si ce texte n’est pas encore publié (il est encore annoncé pour juillet 2024), nul ne peut sérieusement croire que ce seuil de rémunération pourrait être inférieur à la rémunération de 1ᵉʳ échelon du statut de praticien associé, soit 36 624,45 euros brut annuel (annexe VII de l’arrêté du 8 juillet 2022 relatif aux émoluments, rémunérations ou indemnités des personnels médicaux, pharmaceutiques et odontologiques exerçant leurs fonctions dans les établissements publics de santé), alors pour les passeports talent existants, les seuils sont globalement de 40 à 50 000 euros.
Il n’y a aucun espoir, pour les PADHUE, de se voir délivrer cette carte pluriannuelle avec une rémunération de stagiaire associé ou de faisant fonction d’interne.
L’intention du législateur serait donc frontalement méconnue en privant les PADHUE titulaire d’une ATE d’un poste sous statut de praticien associé.
Discussions en cours :
Dans mon contrat de praticien PAA non-lauréat 2023 la durée au date d’affectation . Mais en cas d’échec en 2024 estce que sera renouvable ?
Médecin Chef de Pôle dans un CH, j’ai de grandes difficultés à faire renouveler le contrat d’un médecin étranger de mon équipe ayant atteint les 2 ans de FFI. Inscrit aux prochaines ECV et ayant obtenu un renouvellement de son ATE par l’ARS le 01/07/2024 jusqu’aux résultats des ECV :
Quel statut notre CH peut-il lui proposer ?
Quelle rémunération attractive ?...
Et après les ECV s’il échoue ?...
Vous remerciant d’avance pour votre réponse
bonjour,
je suis très interessé par une réponse.
En effet, dans une question Publiée dans le JO Sénat du 05/06/2024 - page 3570
Question de Mme GERBAUD Frédérique (Indre - Les Républicains) publiée le 11/04/2024
Réponse du Ministère auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargé des personnes âgées et des personnes handicapées publiée le 05/06/2024
Réponse apportée en séance publique le 04/06/2024
"En outre, la même loi prévoit la création d’une attestation d’exercice temporaire de treize mois dans l’attente de la réussite aux épreuves de vérification des connaissances, un document renouvelable une fois en cas de premier échec. Les Padhue ont la possibilité de se présenter au concours à quatre reprises. En conséquence, à la suite de quatre échecs, le praticien doit impérativement se réorienter."
Dans ce cas, en cas de 2 échecs, le PADHUE devrait rentrer dans son pays ? comment peut il se représenter au concours s’il a 4 "chances" ? changer de région ?
En vous remerciant,
J’ai reçu l’ATE en mars après avoir passé 2 ans de stagiaire associé. Il est mentionné sur cette ATE"peut continuer à exercer ses fonctions ".
L’hôpital était d’accord pour le changement de statut mais vu qu’il n’y a aucune instruction ou loi qui le mentionne, il m’a fait un contrat FFI qui a été refusé 5 fois pour l’autorisation de travail. Comme motif de refus : l’interssé ne peut pas être recruté sous le statut de FFI ni interne ni stagiaire associé et que l’instruction ministérielle sur laquelle est basée l’ATE est consacrée pour les personnes concernés par un contrat de praticien.
Que puis je faire dans cette situation ?
Étant médecin sous le contrat de stagiaire associé depuis 2021 à. 2023 à l’hôpital d Mercy à metz, l’ARS du grand est refuse de me. Délivrer l’attestation d’excice temporaire sous prétexte que je ne me suis pas présenté aux EVC 2023 sans prendre en compte la justification de l’hôpital par rapport aux conditions de travail aux quels j’étais exposé durant cette période( accident, ayant couvert 1 mois entier d’astreintes dû à la démission de plusieurs collègues) le chef de pôle avait attesté m’avoir sollicité à couvrir les gardes durant cette période mais malgré tout ça, l’ARS maintient son refus. Avez vous d’autres solutions svp. Puis je faire à recours ? Mais a’qui ? ’
Bonjour,
Votre situation nécessite un échange confidentiel, je vous invite à m’envoyer un mail pour que nous puissions échanger.
Bien à vous,
Merci pour votre article , malheureusement l’ARS du grand est refuse de nous dilvrer l’ATE pour seule raison qu on doit etre en poste en 2024 !?
Il faudrait analyser précisément la réponse de l’ARS. Mais en principe, s’il est possible d’exiger une expérience professionnelle antérieure, il n’y a pas de condition telle que celle que vous décrivez.
Idem refus de la part de la responsable de l’ARS Bretagne (liste B)