Rupture conventionnelle : les pièges à éviter pour l’employeur.

Par Fanny Metra-Faucon, Avocat.

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Explorer : # rupture conventionnelle # entretien préalable # délai de rétractation # homologation

Les parties au contrat de travail peuvent décider de rompre conventionnellement le contrat qui les lie. À la différence du licenciement, point besoin de motifs donc.
La Cour de cassation comme le Conseil d’état valident les ruptures conclues avec un salarié en arrêt maladie ou congé maternité (sauf fraude ou pressions, naturellement).
(Article actualisé par l’auteur en septembre 2018)

-

1) La convocation.

Les règles sont beaucoup plus souples que pour le licenciement :
– il n’existe aucun formalisme pour la convocation. Pour des questions de preuve, il est cependant préférable d’adresser un courrier recommandé, ou remis en main propre contre décharge.
– il n’existe aucun délai légal ou réglementaire entre la convocation et la tenue de l’entretien préalable. Il est cependant préférable de respecter un délai raisonnable, permettant au salarié de se faire assister s’il le souhaite (idéalement, 5 jours ouvrables, comme pour le licenciement).
un seul entretien peut être prévu.

2) L’entretien.

– Attention à la façon dont les imprimés Cerfa sont rédigés : l’employeur ne peut pas être assisté si le salarié ne l’est pas lui-même. Le salarié est cependant tenu de prévenir son employeur qu’il va se faire assister.
– Le formulaire de rupture (en double exemplaire) peut être signé dès le premier (voire unique) entretien, puisque la loi n’impose aucun délai de réflexion.
– La convention de rupture doit définir les conditions de cessation du contrat et notamment le montant de l’indemnité de rupture (au moins égale à l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement) et la date de la rupture prévue, qui ne peut intervenir avant le lendemain du jour de l’homologation par l’administration.

3) Le délai de rétractation.

A compter de la date de signature du formulaire, chaque partie peut se rétracter dans un délai de 15 jours calendaires (chaque jour compte), par lettre attestant de sa date de réception par l’autre partie.

Attention : si le délai expire un samedi, un dimanche, ou un jour férié, il est reporté au jour ouvrable suivant.

4) L’homologation.

Le lendemain de la fin du délai de rétractation, la partie la plus diligente adresse le formulaire à la DIRRECTE de son département (en LRAR : il s’agit du seul moyen de connaître avec certitude la date de réception et donc la date de rupture du contrat car la DIRECCTE n’accuse pas réception des demandes).

L’administration dispose d’un délai de 15 jours ouvrables (dimanches et jours fériés exclus du décompte) pour homologuer ou non la convention. Son silence vaut acceptation (il est particulièrement fréquent que l’homologation soit tacite).

Le contrat peut être rompu dès le lendemain de la fin du délai. Les bulletins de salaire et documents de rupture peuvent être remis ou adressés dès la rupture.

5) Et après ?

La rupture conventionnelle n’empêche pas le salarié de saisir le Conseil de prud’hommes pour toute demande relative tant à l’exécution qu’à la rupture de son contrat de travail. Il faut en effet distinguer rupture conventionnelle et transaction. Si l’employeur veut se protéger, il a donc intérêt à faire signer une transaction à son salarié, une fois le contrat rompu (après la décision d’homologation) – et non avant : à défaut la transaction est nulle.

Fanny Metra-Faucon
Avocat en Droit du Travail à Bordeaux

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Discussions en cours :

  • Il me semble que la Cour de Cassation a permis (décision n°14-10149 en date du 25/03/2015) de conclure une rupture conventionnelle avec une salariée pendant la période de suspension du contrat liée au congé de maternité ?

    Bien cordialement

    • par Fanny METRA-FAUCON , Le 24 novembre 2016 à 12:27

      En réalité, la position de l’Administration et celle de la Cour de Cassation divergent.
      L’Administration préconise de ne pas conclure de rupture conventionnelle avec un salarié bénéficiant d’une protection particulière.
      La Cour de Cassation a, elle, admis la régularité d’une rupture conventionnelle conclue pendant une période de suspension du contrat travail consécutive à un accident du travail, ou avec une salariée en congé maternité.
      Attention cependant aux risques encourus… La salariée en congé maternité pourrait évoquer un vice du consentement : arguer du fait que, du fait de sa situation, elle n’a pas véritablement consenti à la rupture conventionnelle de son contrat de travail.

    • par Eric VERMOT-GAUCHY , Le 14 décembre 2016 à 13:28

      Les juridictions des deux ordres l’admettent. Les juges administratifs considèrent que les dispositions légales ne font pas obstacle à ce que la procédure de RC soit menée alors que l’employé bénéficie d’un congé de maladie(1). Même interprétation du côté des juges judiciaires ; la chambre sociale a approuvé une CA qui avait déclaré valable la convention de rupture du contrat de travail d’une salariée déclarée apte avec réserves après avoir été placée en arrêt maladie pendant plusieurs mois. Les juges du fond avaient alors constaté l’absence de fraude de l’employeur et relevé que la salariée n’invoquait pas un vice du consentement(2). Quatre mois plus tard la Cour réitérait sa solution(3). Elle s’explique ainsi : considérant la volonté des partenaires sociaux et du législateur de favoriser le rapprochement des parties tout en garantissant particulièrement l’intégrité de leur consentement, la chambre sociale s’est attachée, à veiller essentiellement à la liberté des consentements(4). Enfin, la Cour a confirmé sa doctrine à rebours des préconisations de la DGT(5) et décidé que sauf en cas de fraude ou de vice du consentement, une RC peut être valablement conclue au cours de la période de suspension du contrat de travail consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle(6).

      Par ailleurs, la chambre a affirmé qu’une RC peut être valablement conclue au cours des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles la salariée a droit au titre de son congé de maternité, ainsi que pendant les 4 semaines suivant l’expiration de ces périodes(7), mais elle précise toujours sauf en cas de fraude ou de vice du consentement.

      Certains ont pu être heurtés(8) par cette position tandis que d’autres en appréhendent mieux le fondement juridique(9). Rappelons cependant que la RC est exclusive du licenciement, qu’il s’agit donc d’un mode de rupture autonome auquel ne s’applique pas les règles relatives au droit du licenciement. Son autonomie (voulue par les partenaires sociaux) est à mettre en corrélation avec les garanties d’ordre public qui l’entourent et qui contribuent à en faire un acte sécurisé.

      1- CAA DOUAI, 3e ch., 17/3/2016, n°14DA01730.
      2- Soc., 28/5/2014, n°12-28.082, FS-P+B, Mme D. C. L. c/ SARL Biscuiterie Les Deux Soleils.
      3- Soc., 30/9/2014, n°13-16.297, FS P+B+R, Mme C., épse C. c/ SA Strand Cosmetics Europe.
      4- Note ss arrêt : Soc., 30/9/2014, n°13-16.297 (préc.).
      5- JCP S, 2014, 1436, note G. Loiseau : « La RC, indépendante et exclusive ». (V. Circ. DGT n°2009-04 du 17/3/2009).
      6- Soc., 16/12/2015, n°13-27.212, FS-P+B, EURL Sibel Bati c/ M. A.
      7- Soc., 25/3/2015, n°14-10.149, FS-P+B, Mme N. c/ SA Sword.
      8- B. Lardy-Pélissier : « RC : la chambre sociale frappe un nouveau coup » RDT 2014, p.684.
      9- JCP S, 2016, 1079, note G. Loiseau : Variations sur l’homologation de la convention de rupture.

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