Le viol se définit comme « Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui, par violence, contrainte, menace ou surprise, est un viol. » Article 222.23 du Code pénal.
Il peut s’agir d’une pénétration vaginale, fellation forcée, pénétration anale, avec le sexe, les doigts ou un objet ; par violence, contrainte (morale ou physique), menace ou surprise (la victime dormant, ou inconsciente par exemple).
Au sein du couple, la jurisprudence eut d’abord à statuer dans des hypothèses dans lesquelles les époux étaient en instance de divorce avec des résidences séparées (Cass. crim., 17 juill. 1984 : D. 1985, p. 7, note D. Mayer) ou bien les relations sexuelles imposées étaient déviantes ; commises sous la menace d’une arme en présence des enfants ou empreintes de barbarie comme ce fut le cas dans l’affaire donnant lieu à l’arrêt de la Cour de cassation du 5 septembre 1990 augurant le « viol conjugal » (N° de pourvoi : 90-83786). Il est utile de revenir sur l’argumentaire précis de cet arrêt très souvent cité à l’appui du « viol conjugal ».
L’époux avait été mis en accusation (renvoi devant la Cour d’Assises) pour viols aggravés, attentats à la pudeur avec violences et aggravés, accompagnés de tortures ou d’actes de barbarie. Des actes sexuels commis sur son épouse, alors enceinte, d’une extrême barbarie.
La chambre d’accusation avait estimé que si " le consentement au mariage peut faire présumer jusqu’à un certain point, de la part des époux et aussi longtemps qu’ils demeurent mari et femme, leur consentement aux relations sexuelles, il n’en demeure pas moins que cette présomption n’a rien d’irréfragable " ; que " la volonté des époux de mettre en commun et de partager tout ce qui a trait à la pudeur n’autorise nullement l’un d’entre eux à imposer à l’autre par violence un acte sexuel s’il n’y consent et que notamment doit être respectée la liberté sexuelle de la femme mariée " ;
L’époux avait contesté sa mise en accusation aux motifs notamment qu’étant d’ordre public, les effets du mariage transcenderaient ceux que produisent les conditions de sa validité, notamment le consentement ; " qu’ainsi le juge ne saurait être admis à instruire ni apprécier le consentement des époux à l’égard du caractère sexuel de leurs rapports. »
La Cour de Cassation n’a pas suivi l’argumentaire de l’époux, jugeant que « contrairement à ce que soutient le demandeur au pourvoi l’article 332 du Code pénal, en sa rédaction issue de la loi du 23 décembre 1980, qui n’a d’autre fin que de protéger la liberté de chacun, n’exclut pas de ses prévisions les actes de pénétration sexuelle entre personnes unies par les liens du mariage lorsqu’ils sont imposés dans les circonstances prévues par ce texte ;
Attendu par ailleurs que les sévices sexuels, consistant en des actes autres que de pénétration, relevés à la charge de X..., constitueraient de même le crime d’attentat à la pudeur accompagné de tortures prévu par l’article 333-1 du Code pénal dès lors qu’ils auraient été commis avec violence, contrainte ou surprise »
La Cour retenait donc que le viol entre époux était possible. La Chambre d’accusation avait, pour sa part, précisé que le mariage induisait une présomption simple au consentement aux relations sexuelles entre époux, la preuve contraire pouvant être rapportée.
Sollicitée de nouveau sur la question du consentement, la Cour de cassation a clairement posé dans un arrêt du 11 juin 1992 que « la présomption de consentement des époux aux actes sexuels accomplis dans l’intimité de la vie conjugale ne vaut que jusqu’à preuve contraire ». Il n’y avait aucune déviance sexuelle comme dans les affaires précédentes.
Dans le même temps, la Cour européenne des droits de l’homme a également retenu une position dans le même sens (CEDH, 22 nov. 1995, série A, n° 335-C et 335-B, CR et SW c/ Royaume-Uni )
Jurisprudences interne et internationale ont conduit le législateur, dans une loi du 4 avril 2006, à ajouter à l’article 222-22 du Code pénal un alinéa 2 précisant que : "le viol et les autres agressions sexuelles sont constitués lorsqu’ils ont été imposés à la victime (...) quelle que soit la nature des relations existant entre l’agresseur et sa victime, y compris s’ils sont unis par les liens du mariage. Dans ce cas, la présomption de consentement des époux à l’acte sexuel ne vaut que jusqu’à preuve du contraire".
C’est aussi une circonstance aggravante de la peine, jusqu’à 20 ans (au lieu de 15 ans).
La notion de couple est prise dans son acception large (mariage, PACS, concubinage) et aux termes du second alinéa de l’article 132-80, lui-même inséré au Code pénal par la même loi, l’aggravation est également encourue lorsque les faits ont été commis par l’ancien conjoint, l’ancien concubin ou l’ancien partenaire lié à la victime par un PACS, dès lors que "l’infraction est commise en raison des relations ayant existé entre l’auteur des faits et la victime".
En 2010, la référence à la présomption de consentement disparaît (loi du 9 juillet 2010). L’article 222-22 du code pénal prévoit désormais :
« Le viol et les autres agressions sexuelles sont constitués lorsqu’ils ont été imposés à la victime (...) quelle que soit la nature des relations existant entre l’agresseur et sa victime, y compris s’ils sont unis par les liens du mariage. »
Que retenir ?
Un conjoint, pacsé, concubin ou ex, peut être poursuivi pour viol ;
Il s’agit d’un viol aggravé ; un crime qui peut être jugé devant la Cour d’Assises ;
Le consentement aux rapports sexuels n’est pas présumé : ce qui signifie que ce n’est pas parce que l’on est marié ou pacsé, etc que l’on consent à tout à acte sexuel (par exemple, un mari ne peut imposer la pratique de la sodomie à son épouse qui refuse), que l’on peut refuser, que ce n’est pas parce que l’on a consenti la veille que l’on consent le lendemain, que l’on ne consent pas en dormant...
Voir à ce sujet la vidéo très bien faite pour expliquer le consentement sexuel à l’aide d’une tasse de thé : https://www.youtube.com/watch?v=fENmp2vNL7A
Discussions en cours :
Après discussion avec des amis, je cherchais simplement à leur prouver par a + b, qu’il existe bien une loi sur le viol conjugal. Merci de la clarté de vos textes.
Je n’ai pas,encore, eu la force de déposer plainte. Je suppose que c’est "normal".
Il y a moins de 2 semaines, pour me libérer d’une partie de ce poids, j’ai écrit pour raconter, sommairement, ces horribles moments.
J’ai intitulé ce récit : # Me too,# Balance ton porc et je l’ai publié sur Facebook. Les réactions de mes ami.e.s m’ont fait chaud au cœur.
Je pensais que ce serait plus "guérisseur" mais c’est loin d’être le cas. Cela a, plutôt, eu tendance à tout faire remonter à la surface et je suis,presque,plus mal qu’avant.
Ce texte, pour que mon mari soit au courant de ma démarche,je lui ai envoyé par mail. Sa réponse est : "C’est bien de parler de soi. Ça fait du bien de parler de soi."
Il n’a pas nié, n’a rien ajouté d’autre.
Sa réponse peut-elle être, juridiquement,considérée comme des aveux ?
Qu’en pensez-vous ?
Que feriez-vous a ma place ?
Que me conseillez-vous ?
Pour "situer" un peu mieux le personnage :
Je tiens à préciser que mon fils a été placé en foyer,il y a 4 ans pour le protéger de la violence physique de son père.
Je suis certaine que c’est un Pervers Narcissique et il continue à me mener la vie dure malgré notre séparation depuis mai 2015.
Bonjour, Pourriez-vous prendre un RDV ou me téléphoner pour en discuter de vive voix ? Ce serait préférable. Très cordialement.