Par définition, le complice n’est pas celui qui commet l’infraction.
Pour autant, le Code pénal dispose que le complice sera puni des mêmes peines que celles encourues par l’auteur principal de l’infraction.
1. Quels sont les conditions de la complicité ?
Pour être reconnu comme complice en droit français, trois éléments sont nécessaires.
1.1. Un fait principal punissable.
Le fait principal punissable peut être un crime, un délit ou une contravention, la seule exception étant que la complicité par aide ou assistance ne peut se faire que pour un crime ou un délit.
L’infraction peut être consommée ou tentée. Elle peut être volontaire ou involontaire.
Par exemple :
- un maître d’œuvre peut être reconnu coupable de complicité de blessures involontaires [1].
- un médecin en charge du contrôle de la technique d’épilation laser et sous la responsabilité duquel ces actes avaient lieu peut être reconnu coupable de complicité de blessures involontaires dès lors qu’il n’est pas intervenu pendant les séances d’épilation contrairement à ses obligations [2].
Le fait doit être punissable, mais non nécessairement sanctionné. Il ne peut donc pas y avoir complicité quand :
- Il existe un fait justificatif pour l’auteur principal
- L’auteur principal bénéficie d’une immunité qui fait obstacle à la répression
- La prescription est dépassée
- Il y a amnistie.
En revanche, l’auteur principal n’a pas besoin d’avoir été réellement sanctionné.
1.2. L’acte matériel de complicité.
(1) La complicité par aide ou assistance.
Selon l’article 121-7, al.1 du Code pénal,
« est complice d’un crime ou d’un délit la personne qui sciemment, par aide ou assistance, en a facilité la préparation ou la consommation ».
Il faut alors un acte matériel ou moral, c’est-à-dire, en principe, un acte positif et non une simple abstention.
Par exemple, l’individu qui procure l’arme ayant servi au fait principal en sachant qu’elle allait y servir [3], ou le surveillant pénitentiaire qui avertit un détenu d’une fouille à venir afin qu’il puisse dissimuler des objets détenus illicitement [4], ou encore le maire qui fait pression sur un administré pour qu’il renonce à vendre un terrain à une personne de la communauté des gens du voyage peut être reconnu complice d’un délit de discrimination [5].
Au contraire :
- celui qui a été seulement le spectateur d’une infraction ne peut être considéré comme un complice, même s’il ne l’a pas empêchée [6],
- n’est pas complice celui qui a eu la simple connaissance d’un acte délictueux [7], ou encore l’armurier ayant vendu l’arme ayant servi au crime sans savoir qu’elle allait y servir.
Néanmoins, par exception, l’abstention peut constituer une aide ou une assistance si :
i) Cette omission constitue un encouragement, par exemple lorsque l’individu qui s’abstient possède une autorité morale sur le responsable, à condition que cet individu soit présent sur les lieux ;
ii) Cette omission est faite par une personne ayant un devoir juridique d’agir, notamment en raison de sa profession.
A titre d’exemple :
- peut être reconnu complice le membre du directoire d’une société qui avait connaissance des abus de biens sociaux commis par son président et qui s’est abstenu d’agir alors qu’il avait les moyens de s’y opposer [8].
- l’expert-comptable qui ne respecte pas son obligation professionnelle d’organisation et de vérification de la comptabilité de son client peut être reconnu complice du délit de fraude fiscale [9].
- l’individu qui fortifie moralement les auteurs d’une agression par sa seule présence dans le groupe et alors qu’elle adhérait pleinement à leur intention délictueuse [10].
Il n’est pas nécessaire que l’aide ou l’assistance ait été indispensable. Il n’est pas non plus nécessaire que l’aide ou l’assistance ait été utile matériellement, il suffit que cette aide ou assistance ait conforté le responsable dans son choix d’action.
Enfin, l’aide ou l’assistance doit intervenir avant ou pendant l’infraction. Les actes postérieurs à l’infraction ne sont punissables que s’il y a eu un accord antérieur ou s’ils révèlent un acte antérieur constitutif de complicité.
A titre d’exemple, celui qui aide les auteurs d’un vol dans leur fuite peut être considéré comme leur complice si cette aide a été convenue par un accord antérieur au délit [11].
(2) La complicité par instigation (provocation ou fourniture d’instruction).
Selon l’article 121-7, al.2 du Code pénal,
« est également complice la personne qui par don, promesse, menace, ordre, abus d’autorité ou de pouvoir aura provoqué à une infraction ou donné des instructions pour la commettre ».
La provocation est le fait de peser sur la volonté de l’auteur de l’infraction au point de le déterminer à faire l’infraction : don, promesse, menace, ordre, abus d’autorité ou de pouvoir.
La provocation doit être circonstanciée (avec des moyens, dits adminicules), déterminée, directe, personnelle, et en principe suivie du fait principal punissable.
Par exemple, se rend coupable de complicité par provocation celui qui promet un repas ou de l’argent à l’ouvrier d’une usine pour l’inciter à y mettre le feu [12].
En revanche, n’est pas complice par provocation le passager d’un véhicule ayant donné l’ordre au conducteur, qui n’était pas son subordonné, de prendre la fuite [13] : la provocation doit être accompagnée de circonstances qui la renforcent comme un don, une promesse, une menace, un abus d’autorité ou de pouvoir.
La fourniture d’instruction n’a pas besoin d’être circonstanciée, mais doit être suffisamment précise et doit être personnelle, même s’il est possible de passer par un tiers : c’est le fait de fournir des renseignements nécessaires à la réalisation de l’infraction.
3) L’élément intentionnel.
Concernant l’élément moral, la négligence ne suffit pas, il faut i) une connaissance de l’acte criminel projeté et ii) une conscience de s’assimiler à cet acte.
A titre d’exemple :
- n’ont pas été considérés comme complices du délit d’exercice illégal de la médecine des journalistes qui avaient publié des articles élogieux sur un guérisseur, car l’élément moral faisait défaut [14].
- l’auteur de propos repris par un journaliste doit avoir eu la volonté de s’associer à ce que fera ledit journaliste [15].
2. Quelles sont les sanctions de la complicité ?
Selon l’article 121-6 du Code pénal, le complice sera puni comme auteur. Il s’expose donc théoriquement aux mêmes peines.
Ainsi, le fait qu’une personne soit auteur principal ou complice d’une infraction n’a pas d’incidence sur les peines encourues.
Le complice est considéré comme un auteur, mais non comme l’auteur. Cela signifie que :
- Les circonstances personnelles (propres à l’auteur) ne s’étendent pas au complice (ex. absence de discernement du mineur ou d’un handicapé mental auteur)
- Les circonstances réelles s’étendent au complice (ex. les circonstances aggravantes, comme le vol avec usage d’une arme), dès lors que l’infraction est de même nature que celle à laquelle le complice entendait s’associer (complicité pour tous les éléments prévisibles)
Enfin, le fait d’être complice d’une tentative de crime ou délit est punissable. En revanche, le fait de tenter d’être complice n’est pas sanctionnable.