En effet, en cas de doute sur la consistance du patrimoine de la succession, toute personne ayant vocation à hériter a la possibilité de déclarer qu’elle n’entend prendre la qualité d’héritier que dans la limite de l’actif net de la succession (actif – passif). Cette option s’appelle l’acceptation de la succession à concurrence de l’actif net (anciennement acceptation sous bénéfice d’inventaire).
Elle permet à l’héritier :
d’éviter la confusion de ses biens personnels avec ceux de la succession,
de conserver contre celle-ci tous les droits qu’il avait antérieurement sur les biens du défunt,
de n’être tenu au paiement des dettes de la succession que jusqu’à concurrence de la valeur des biens qu’il a recueillis.
Accepter une succession à concurrence de l’actif net suppose pour l’héritier d’effectuer une déclaration au greffe du tribunal de grande instance du lieu d’ouverture de la succession (lieu du dernier domicile du défunt) dans laquelle il est tenu notamment de mentionner un domicile unique qui peut être le domicile de l’un des acceptants à concurrence de l’actif net, ou celui de la personne chargée du règlement de la succession (généralement le Notaire). Ce domicile doit être situé en France (article 788 du Code civil voir l’article).
La déclaration d’acceptation doit faire l’objet d’une double publicité :
à l’initiative du greffe : publicité (nationale) au BODACC (Bulletin des annonces civiles et commerciales),
à l’initiative de l’héritier : publicité (locale) par l’insertion d’un avis dans un journal d’annonces légales diffusé dans le ressort du tribunal compétent, dans le délai de 15 jours à compter de la déclaration.
Dans les 15 mois de la publicité nationale au BODACC, les créanciers de la succession doivent déclarer leurs créances par une notification adressée au domicile élu de la succession (article 792 du Code civil voir l’article).
Le défaut de déclaration de créance dans le délai imparti est sanctionné sévèrement : les créances non assorties de sûretés sur les biens de la succession sont éteintes à l’égard de celle-ci. Cette disposition bénéficie également aux cautions et coobligés, ainsi qu’aux personnes ayant consenti une garantie autonome portant sur la créance (non assortie de sureté) ainsi éteinte.
Dans deux arrêts rendus les 31 mars 2016 (voir l’arrêt) et 22 mars 2017 (voir l’arrêt) la Cour de cassation a rappelé que le délai de 15 mois court à compter de la publicité nationale faite au BODACC de sorte qu’une déclaration qui aurait été effectuée avant ce point de départ et qui n’aurait pas été réitérée dans le délai de 15 mois imparti, n’est pas régulière. De même, le fait de disposer d’un titre exécutoire antérieur à la date de cette publication ne dispense pas le créancier de déclarer sa créance dans le délai qui s’impose à lui.
Le respect de ce délai n’est pas la seule condition, ainsi que vient de le rappeler la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 8 mars 2017 (voir l’arrêt).
Dans l’affaire ayant donné lieu à cette décision, le créancier de la succession avait adressé un courrier de réclamation au domicile personnel de l’héritier acceptant à concurrence de l’actif net, dans le délai de 15 mois à compter de la publicité de sa déclaration, et l’avait ensuite assigné en paiement. Il s’agissait du seul héritier.
Ce dernier lui a opposé l’extinction de sa créance estimant que le créancier n’avait pas déclaré sa créance au domicile mentionné dans la déclaration d’acceptation à concurrence de l’actif net (domicile élu).
Les juges de première instance et d’appel ont rejeté l’argumentation de l’héritier estimant que les démarches entreprises par le créancier au domicile personnel de l’héritier équivalaient à la déclaration de créance instaurée par la loi et qu’en conséquence, sa créance n’était pas éteinte.
La Cour de cassation sanctionne cette position rappelant qu’en exécution des articles 788 et 792 précités, lorsque la succession a été acceptée par un héritier à concurrence de l’actif net, les créanciers de la succession doivent déclarer leurs créances en notifiant leur titre au domicile élu de la succession.
Autrement dit, même si l’héritier était unique, il ne résulte pas des faits de l’espèce que son propre domicile avait été choisi. Pour faire valoir sa créance, le créancier aurait donc dû notifier sa déclaration de créance à l’adresse indiquée dans la déclaration d’acceptation à concurrence de l’actif net.
La déclaration de créance n’est pas soumise à un formalisme très précis mais implique que les conditions de délai et de domicile élu soient strictement respectées sous peine de voir la créance (non assortie de sûreté) éteinte.
Il appartient donc au créancier d’une succession d’être réactif et rigoureux.
A noter que, pour les successions qui seront ouvertes à compter du 1er novembre 2017, l’acceptation à concurrence de l’actif net pourra être déclarée devant notaire concurremment avec le greffe du tribunal de grande instance du lieu d’ouverture de la succession. De plus, le délai imparti à l’héritier pour effectuer la publicité de sa déclaration d’acceptation à concurrence de l’actif net (faite devant notaire ou auprès du greffe du tribunal) passe de 15 jours à 1 mois.