L’usurpation d’identité peut s’entendre simplement comme le fait de s’approprier l’identité d’autrui sans son consentement. Cette pratique s’est rependue avec le développement de l’internet. En 1993, Peter Steiner signait dans le New Yorker un dessin resté célèbre sur lequel un chien assis devant un ordinateur explique à un autre chien que sur internet personne ne sait que vous êtes un chien (« On the Internet, nobody knows your’re a dog »).
Certains soutiennent qu’il serait enregistré plus de 210 000 cas d’usurpation d’identité en France chaque année. Se pose alors la question de savoir si le simple emprunt de l’identité d’autrui constitue en soi une infraction. A partir de quel moment l’usurpation d’identité devient-elle répréhensible ?
Avant 2011, l’usurpation d’identité en elle-même n’était pas sanctionnée. Seules ses conséquences pouvaient être punissables et l’usurpation d’identité à elle seule n’était pas considérée comme une infraction. En clair, l’usurpation d’identité n’était sanctionnée que si elle aboutissait à une atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne dont l’identité a été usurpée.
Dans un arrêt rendu le 29 mars 2006, la Cour de cassation précise que le délit de prise de nom d’un tiers, dans les circonstances pouvant déterminer des poursuites pénales pour diffamation ne pouvait être constaté sans établir l’atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne visée.
Pour réprimer l’usurpation d’identité, on faisait recours à différentes infractions telle que l’escroquerie, l’usage du nom d’un tiers dans les circonstances qui ont déterminées ou qui auraient pu déterminer à l’encontre de ce dernier des poursuites pénales [1], ou encore la protection de la vie privée et le droit à l’image garanti par l’article 9 du code civil.
La réglementation a largement évolué sur la question avec notamment l’intervention de la loi LOPPSI 2 qui ajoute un nouvel article 226-4-1 au Code pénal, lequel punit l’usurpation d’identité en tant que telle et la reconnait comme une infraction autonome.
Le nouvel article 226-4-1 du code pénal issu de la loi LOPPSI 2 du 14 mars 2011 dispose que :
« Le fait d’usurper l’identité d’un tiers ou de faire usage d’une ou plusieurs données de toute nature permettant de l’identifier en vue de troubler sa tranquillité ou celle d’autrui, ou de porter atteinte à son honneur ou à sa considération, est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende ».
On assiste ainsi à la création de l’infraction autonome d’usurpation d’identité directement réprimée par le code pénal.
Quid de l’usurpation de l’identité numérique ?
L’alinéa 2 de l’article 226-4-1 précité du Code pénal dispose que « Cette infraction est punie des même peines lorsqu’elle est commise sur un réseau de communication au public en ligne ».
C’est la naissance de l’infraction d’usurpation d’identité numérique enfin reconnue par le législateur après le rejet d’une première proposition de loi en la matière formulée par un député en 2006.
Reste à déterminer ce qui peut être considéré comme une identité numérique nécessitant d’être ainsi protégée.
La notion d’identité numérique renvoi à l’ensemble des informations associées à une personne qui sont mises à disposition sur internet.
Elle est protégée au même titre que l’identité dite « réelle » et plus que celle-ci, sa protection bénéficie en plus des dispositions relatives à la protection du système automatisé de traitement des données.
L’usurpation d’identité numérique se manifeste de deux façons :
Soit l’usurpateur souhaite nuire à la réputation de la personne dont elle a volé les données personnelles. Il crée un faux profil sur les réseaux sociaux ou un faux blog et rédige de faux commentaire sous l’identité de sa victime
Ou alors il souhaite se masquer derrière cette identité « empruntée » par des voies illicites pour s’octroyer des avantages tel un crédit contracté au nom de la personne usurpée.
Comme toute infraction pénale, l’usurpation d’identité numérique nécessite la réunion d’un élément matériel et d’un élément intentionnel :
L’élément matériel c’est l’utilisation de l’identité d’un tiers ou de données de toute nature permettant de l’identifier sur un réseau de communication électronique
L’élément intentionnel c’est la volonté de troubler la tranquillité d’un tiers ou de porter atteinte à son honneur et à sa réputation.
La sanction appliquée à cette infraction est la même que celle prévue pour les appels téléphoniques malveillants : un an d’emprisonnement et 15 000€ d’amende.
Si l’infraction est commise par une personne morale , la sanction prévue passe à 75 000€ d’amende avec une possible dissolution si la personne morale a été créée en vue de commettre l’infraction, une interdiction définitive ou temporaire d’exercer l’activité à l’occasion de laquelle l’infraction a été commise, l’exclusion temporaire ou définitive des marchés publics ou un placement sous surveillance judiciaire.
Discussions en cours :
Bonjour ,
lorsque qu’une personne autorise un proche d’utiliser son identité pour obtenir des informations à sa place sur un dossier. ,
s’agit -il d’une usurpation qui peut être répréhensible ?
Merci pour votre réponse
Merci de votre "article" qui me servira de "support" pour mon dossier de droit pour mon examen. :)Bonne continuation. J’espère que cela ne posera aucun soucis, je préciserai mes sources.
Bonjour,
La mère de mon compagnon a utiliser son identité en février 2011 pour contracter un crédit pour partir en Égypte. a ll’heure actuel la compagnie lui demande de rembourser ce crédit.
Il a découvert tous ça en novembre en partant de chez elle et en récupérant tout c’est document car jusque ici c’est elle qui s’occuper de l’administratif..
De plus ce n’est pas la première fois son autre fils a du lui aussi faire une main courante contre elle car elle avait utiliser son identité pour contracter une assurance voiture hors qu’il était mineur.
Le comissaria ne prend pas notre plainte car comme ils nous l’ont dit [ vous avez un ans après la fraude pour vous retourner]
Que peut on faire maintenant ?
Aujourd’hui il se retrouve avec plusieurs dettes et ne sais pas quoi faire ..
Si l’utilisation de l’identité d’un tiers afin de porter atteinte à sa considération ou à sa tranquillité est punissable, est-ce à dire que les Guignols de l’info sont en danger ? De la même façon, si une personne édite un blog parodique prêtant à une personne publique des propos ridicules, (comme les interview rêvées du Canard enchaînée), est-ce qu’elle devrait envisager le risque de poursuite pénale ? Comment se conjuge cette infraction avec le droit de la presse (y compris en ligne) et le droit à la liberté d’expression, nottament par voie de parodie ?
Je pense qu’il faut reconnaitre l’exception de la parodie et de la caricature s’agissant notamment des Guignols de l’info qui à mon avis restent dans le domaine du comique et se revendiquent comme tel. Il en ai de même pour "Les interviews rêvées du canard enchaîné".
On ne peut à mon avis pas parler dans ce cas d’usurpation d’identité puisqu’il n’ y a pas une intention (volonté tendue vers...) de tromper la vigilance de ses auditeurs ou téléspectateurs en leur faisant croire que les propos tenus sont de la personne parodiée.
Les Guignols de l’info est une émission comique et se revendique comme telle dans le cadre de la liberté de la presse et bénéficient dans ce cas du régime de l’exception du comique, de la parodie et de la caricature.
Il me semble que ce qu’il est important de rechercher pour concilier l’infraction d’usurpation d’identité à la liberté d’expression contenue dans le droit de la presse c’est la volonté ou non des média de vouloir sortir du cadre du comique pour faire croire que les propos cités ont été prononcés dans le même conteste par la personne parodiée.
Le canal de l’information rend improbable d’envisager l’usurpation d’identité pour les média.
On peut envisager plutôt des cas de diffamation puisque le journaliste ne se masque pratiquement jamais dernière l’identité d’une autre personne pour faire croire que c’est cette personne qui aurait tenue certains propos.