"Le travail éloigne de nous trois grands maux : l’ennui, le vice et le besoin." écrivait Voltaire dans son conte philosophique Candide.
Ces vertus pratiques du travail ne sont naturellement pas incompatibles avec des temps de pauses, journaliers, hebdomadaires, annuels. Le Code du travail garantit ces derniers et certaines dispositions légales, certains accords d’entreprise ou conventions prévoient parfois des règles spécifiques à certains métiers.
Dans tout pays, existent aussi des jours fériés, qui sont par principe des jours non-travaillés, en hommage à des événements nationaux ou liés à des célébrations religieuses.
Origine ?
Partout dans le monde, les Français sont souvent considérés comme les rois des manifestations et des grèves ; il est donc tentant de penser que le 1ᵉʳ mai trouve son origine en France...
En réalité, c’est aux Australiens que l’on doit ce célèbre jour férié. En 1856, les ouvriers australiens décidèrent de se mettre en grève afin d’obtenir la journée de travail de 8 heures.
L’idée parvint aux oreilles des Américains, qui firent alors grève le 1ᵉʳ mai 1886. Mais le processus y est plus chaotique : après moins d’une semaine de manifestations, on déplore des blessés et des morts.
En hommage aux victimes américaines, le 1ᵉʳ mai est devenu la Journée internationale des travailleurs.
Le 1ᵉʳ mai en France n’a commencé son histoire qu’en 1890. Les ouvriers ont manifesté pour réclamer la journée de 8 heures. Ils portaient un triangle rouge à la boutonnière (remplacé plus tard par la fleur d’églantine, puis par le muguet) ; ses trois côtés symbolisent la division du temps entre : travail, loisirs et sommeil. Le 1ᵉʳ mai 1891, les manifestations ont été renouvelées, mais ont tourné au drame, avec plusieurs morts.
Le 1ᵉʳ mai est devenu un jour de manifestations ouvrières en France. Cette date fait également écho à des événements nationaux dramatiques (fusillade ouvrière ‘Fourmies’ du 1ᵉʳ mai 1891, 1ᵉʳ mai 1906 syndical violent à Paris).
Le gouvernement de Georges Clemenceau a créé le ministère du Travail en octobre 1906, pour devenir le point central des revendications ouvrières. Peu avant le 1ᵉʳ mai 1919, la loi a légalisé la réduction du temps de travail à 8 heures par jour.
Puis, en 1941, le maréchal Pétain a baptisé le 1ᵉʳ mai en « Journée du Travail et de la Concorde Sociale ».
Enfin, après avoir été abandonné comme jour chômé, la loi n°48-746 du 29 avril 1948 fit définitivement du 1ᵉʳ mai un jour férié et chômé… et payé !
En France, travailler le 1ᵉʳ mai :
En principe : c’est interdit.
Le 1ᵉʳ mai est le seul jour férié obligatoirement chômé (non travaillé) et payé pour tous les salariés sans condition d’ancienneté (Article L3133-4 du Code du travail : « Le 1ᵉʳ mai est jour férié et chômé ».)
Exceptions : certains secteurs peuvent travailler.
« Les établissements et services qui, en raison de la nature de leur activité, ne peuvent interrompre le travail » indique l’article L3133-6 du Code du travail.
Des exceptions existent ainsi pour les métiers où l’interruption du travail est impossible :
- Hôpitaux
- Transports publics
- Forces de l’ordre
- Certains services considérés par la loi comme ‘‘essentiels’’.
Quelle rémunération ?
Dans les établissements et services qui, en raison de la nature de leur activité, ne peuvent interrompre le travail, les salariés travaillant le 1ᵉʳ mai ont droit, en plus de leur salaire habituel, à une indemnité égale à ce salaire (Article L3133-5 du Code du travail : « le chômage du 1ᵉʳ mai ne peut être une cause de réduction de salaire. Les salariés rémunérés à l’heure, à la journée ou au rendement ont droit à une indemnité égale au salaire perdu du fait de ce chômage. Cette indemnité est à la charge de l’employeur »).
En pratique, si vous travaillez le 1ᵉʳ mai, vous bénéficiez d’une rémunération majorée de 100%.
Si le jour férié tombe un dimanche ou sur un jour de repos, serez-vous indemnisé ? Quel est l’impact sur votre salaire ?
Lorsque le jour férié tombe sur votre jour de repos hebdomadaire, vous n’avez droit ni à une indemnisation supplémentaire, ni à un congé supplémentaire.
Toutefois, certaines conventions collectives peuvent prévoir que, lorsque le jour férié coïncide avec un jour de repos, le salarié bénéficie d’un jour de repos supplémentaire rémunéré.
Que se passe-t-il si un jour férié tombe pendant les congés payés ?
Si le jour férié est un jour ouvrable :
- chômé dans l’entreprise : il n’est pas décompté sur les congés payés ;
- travaillé dans l’entreprise : il est décompté des congés payés (vous devez poser un jour de congé).
Et parmi ces derniers, la baguette française est-elle considérée comme essentielle le 1ᵉʳ mai ? Notre allusion fait référence aux divers contrôles effectués en France, le 1ᵉʳ mai 2022, dans des boulangeries, par l’Inspection du travail.
Or, la règle est la suivante : il appartient à celui qui se prévaut d’une dérogation d’établir que la nature de l’activité exercée ne permet PAS d’interrompre le travail le jour du 1ᵉʳ mai.
En l’état, le cadre juridique applicable ne justifie pas une dérogation pour les salariés de la boulangerie-pâtisserie en cas de contentieux.
Seul le patron, qui, s’il n’a pas la qualité de salarié et qu’il est indépendant, peut travailler le 1ᵉʳ mai.
En pratique, à défaut d’évolution de la loi, il est souhaitable que les Juges raisonnent au cas par cas. Ainsi, une boulangerie qui ferait travailler des salariés pour livrer des établissements hospitaliers publics ou des EHPAD pourrait être considérée comme répondant aux normes juridiques applicables, à savoir, qu’elle exerce une activité ne permettant pas d’interrompre son travail le jour du 1ᵉʳ mai, indispensable à la continuité de la vie sociale en ce qu’elle concourt à un besoin essentiel du public.
En revanche, si la boulangerie ne répond pas à ces critères, même si elle peut être ouverte le 1ᵉʳ mai, elle ne pourra pas faire travailler ses salariés. Seul le chef d’entreprise pourra travailler !