Résiliation anticipée du bail commercial par le bailleur.

Par Benjamin Vidal, Avocat.

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Conformément à l’article L145-4 du Code de commerce, la durée d’un bail commercial ne peut pas être inférieure à 9 ans. Normalement, le bailleur est lié avec son locataire jusqu’au terme du bail.
Il ne peut résilier le bail commercial conclu avec son locataire qu’à l’issue de son terme, c’est-à-dire en délivrant un congé avec ou sans offre de renouvellement en respectant un préavis de 6 mois.
Néanmoins, le bailleur a plusieurs options afin de résilier le bail sans attendre le terme. Il dispose d’une faculté de résiliation triennale pour certains motifs.
Il peut également résilier le bail commercial amiablement ou judiciairement.

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Les congés triennaux délivrés par le bailleur.

Conformément aux dispositions de l’article L145-4 du Code de commerce, le bailleur a la possibilité de résilier tous les trois ans le contrat de bail commercial en respectant un préavis de 6 mois avant l’échéance triennale pour les motifs suivants :

  • Reprise pour construire ou reconstruire [1].

Le bailleur peut délivrer congé à son locataire au terme d’une période triennale, s’il entend soit construire un nouvel immeuble sur un terrain non construit et déjà partiellement construit, soit démolir l’immeuble et le reconstruire.

Dans ce dernier cas, la démolition devra être complète.

À défaut, la démolition partielle entraîne les conséquences d’un congé avec refus de renouvellement.

Le bailleur qui déclare vouloir construire ou reconstruire est présumé sincère, mais le congé peut être annulé, s’il apparaît qu’il avait une autre intention [2].

Le bailleur devra verser au locataire évincé une indemnité d’éviction sauf s’il lui offre un local correspondant à ses besoins et possibilités, situé à un emplacement équivalent.

Le congé doit alors préciser les conditions du relogement proposé et le locataire dispose d’un délai de trois mois pour répondre.

En cas d’accord sur ce dernier, le locataire pourra recevoir une indemnité couvrant sa privation temporaire de jouissance, la moins-value éventuelle de son fonds et ses frais normaux de déménagement et d’emménagement.

  • Travaux de restauration immobilière en secteur sauvegardé, nécessitant l’évacuation des locaux [3].

Pour faciliter les travaux de restauration immobilière, le bailleur peut reprendre les lieux loués, soit à la fin du bail, soit à l’occasion d’une échéance triennale en versant une indemnité d’éviction, à la condition que l’immeuble soit compris dans un secteur ou périmètre prévu aux articles L313-4 et L313-4-2 du Code de l’urbanisme.

  • Reprise temporaire pour surélever [4].

Le bailleur peut également suspendre le bail, à l’expiration d’une période triennale, pendant une durée maximale de trois ans, s’il entend surélever l’immeuble et si cette surélévation rend nécessaire l’éviction temporaire du locataire.

Le locataire aura droit dans ce cas à une indemnité égale au préjudice subi qui ne peut toutefois excéder trois ans de loyer.

Lorsque les travaux de surélévation sont terminés, le bail reprend son cours et le locataire réintègre les locaux.

  • Reprise des logements vacants [5].

Le bailleur a le droit à une faculté supplémentaire de résiliation anticipée partielle du bail lui permettant de reprendre possession des logements intégrés dans l’assiette d’un bail commercial et demeurés inhabités six mois après notification de cette intention de reprise.

Dans ce cas, le loyer est réduit à proportion des locaux repris, mais cette reprise n’est pas constitutive d’un motif de déplafonnement au sens de l’article L145-34 du Code de commerce. 

  • Permis de construire un local d’habitation sur tout ou partie d’un terrain loué nu [6].

Cette disposition présente la particularité de déroger au principe d’indivisibilité du bail commercial en permettant la délivrance d’un congé partiel.

Le congé ne doit être délivré que sur la partie du terrain indispensable à la construction d’habitation projetée. L’obtention du permis de construire doit être préalable au congé.

Sauf offre d’un local de remplacement faite au locataire, le bailleur aura l’obligation de payer une indemnité d’éviction.

  • En vue de transformer à usage principal d’habitation un immeuble existant par reconstruction, rénovation ou réhabilitation [7].

Le bailleur a la possibilité de délivrer un congé à l’issue d’une période triennale, afin de « transformer à usage principal d’habitation un immeuble existant par reconstruction, rénovation ou réhabilitation ».

Les exigences concernant la nature des travaux entrepris par le bailleur sont assez souples puisqu’il peut s’agit d’une simple réhabilitation. 

En outre, l’immeuble devra avoir un usage « principal » d’habitation, et non un usage exclusif d’habitation, ce qui autorise dès lors le propriétaire à conserver au sein de l’immeuble un usage commercial à titre accessoire.

Sauf offre d’un local de remplacement, le bailleur ne peut se soustraire au paiement de l’indemnité d’éviction.

Toutefois, cette nouvelle possibilité qui s’offre au bailleur devra intervenir dans les conditions antérieures à savoir celles prévues aux articles précités L145-18, L145-21, L145-23-1 ou L145-24 du Code de commerce.

La résiliation amiable du bail commercial.

Les parties peuvent s’accorder sur une résiliation amiable et anticipée du bail.

Les parties ont le droit de résilier le bail commercial à tout moment, à condition que leur accord soit certain et non-équivoque [8].

Une telle issue amiable permet d’obtenir la libération rapide des locaux donnés à bail, en engageant des coûts plus limités qu’une action en justice devant le Tribunal judiciaire du lieu de situation de l’immeuble.

Néanmoins, il convient de garder à l’esprit que le locataire n’est en aucun cas tenu d’accepter cette résiliation.

En effet, la volonté d’une seule partie n’est apte à mettre fin au bail que dans les cas prévus par la loi, c’est-à-dire : 
- aux échéances triennales ;

- au terme du contrat ;

- à tout moment au cours de la prolongation tacite, sous réserve de respecter le préavis et le terme trimestriel. 

Ainsi, en pratique, il est opportun de concrétiser l’accord des parties par la signature d’un protocole transactionnel, aux termes duquel :

- Les parties s’accordent sur une résiliation amiable immédiate du bail en cours ;

- Elles fixent les délais de libération des lieux ;

- Elles établissent le solde du loyer et des charges et le sort du dépôt de garantie.

Le bailleur pourra remettre en location le local commercial après le départ du preneur et conclure un nouveau contrat de bail commercial. 

Les parties doivent prêter attention aux créanciers inscrits sur le fonds de commerce car l’alinéa 2 de l’article L143-2 du Code de commerce précise que :
« La résiliation amiable du bail ne devient définitive qu’un mois après la notification qui en a été faite aux créanciers inscrits, aux domiciles déclarés par eux dans leurs inscriptions. »

Celle-ci peut intervenir par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou acte délivré par un Commissaire de justice.

La résiliation judiciaire du bail.

La résiliation du bail par le jeu de la clause résolutoire.

Le bail commercial peut être résilié de plein droit par l’effet de la clause résolutoire stipulée au bail.

Le régime de la clause résolutoire est régi par les dispositions, d’ordre public, de l’article L145-41 du Code de commerce :

« Toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai. »

Pour mettre en œuvre la clause résolutoire, le bailleur doit s’assurer que :

- La clause résolutoire figure bien dans le bail ;

- Le locataire a manqué à une stipulation expresse du bail, c’est-à-dire une obligation ou interdiction clairement indiquée dans le bail ;

- Un commandement de payer ou une sommation de faire a été délivré par un Commissaire de justice (anciennement Huissier de justice) au locataire d’avoir à s’exécuter dans le délai d’un mois ;

- L’infraction a persisté au-delà du délai d’un mois accordé par le commandement de payer ou la sommation de faire.

S’il n’est pas mis fin à l’infraction avant l’expiration du délai d’un mois, la clause résolutoire est acquise et le bail est résilié permettant l’expulsion du locataire. 

Dans la plupart des cas, le locataire refuse de quitter les lieux en dépit de la résiliation intervenue.

Le juge doit ainsi être saisi par assignation afin de constater l’acquisition de la clause résolutoire et toutes les conséquences qui en découlent (expulsion, condamnation du locataire aux impayés, etc.).

Le juge n’a pas le pouvoir d’apprécier la gravité du manquement invoqué mais devra contrôler que les conditions énoncées ci-avant sont réunies.

Concernant les créanciers inscrits, le propriétaire qui poursuit la résiliation du bail de l’immeuble dans lequel s’exploite un fonds de commerce grevé d’inscriptions doit notifier sa demande aux créanciers antérieurement inscrits, au domicile déclaré par eux dans leurs inscriptions. Le jugement ne peut intervenir qu’après un mois écoulé depuis la notification [9].

La résiliation judiciaire du bail commercial pour manquement suffisamment grave.

Si le manquement du locataire n’est pas prévu par la clause résolutoire, le bailleur pourra demander la résiliation judiciaire du bail, à tout moment, mais seulement en cas de manquement suffisamment grave du preneur à ses obligations contractuelles, conformément à l’article 1224 du Code civil.

​Par exemple, un changement de destination non autorisé ou le défaut d’exploitation peuvent constituer des manquements suffisamment graves du preneur entraînant la résiliation du bail. 

Dans cette procédure, le juge devra apprécier la gravité du manquement.

Benjamin Vidal, Avocat au Barreau de Paris
BVI Avocat
Baux commerciaux
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Notes de l'article:

[1Article L145-18, alinéa 1, du Code de commerce

[2CA Paris, 16e ch. A, 26 avr. 2000 : absence de travaux pendant six ans

[3Article L145-18, alinéa 2 du Code de commerce

[4Article L145-21 du Code de commerce

[5Article L145-23-1 du Code de commerce

[6Article L145-24 du Code de commerce

[7Article L145-4, alinéa 3 du Code de commerce

[8Cass. Civ. 3ème, 23 mars 2011, n° 10-10.226

[9Article L143-2, alinéa 1, du Code de commerce

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