1. Faits et procédure.
Une salariée a saisi le conseil de prud’hommes de Narbonne, d’une demande de requalification de son contrat de travail à durée déterminée à temps partiel en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet.
Par un jugement rendu le 27 août 2018, le conseil de prud’hommes de Narbonne a fait droit à la demande de la salariée, et condamne à cet effet l’employeur au paiement de diverses sommes afférentes à cette requalification, telles que des indemnités de requalification, de rappel de salaire à temps complet, des congés payés afférents et des dommages-intérêts.
L’employeur interjette alors appel, mais reçoit dans le même temps, un commandement d’avoir à payer la somme de 14 958,59 euros par acte du 8 février 2019 de la part de la salariée.
En conséquence, l’employeur saisit le juge de l’exécution pour contester ce commandement de payer.
C’est alors que, par un arrêt rendu le 29 octobre 2020, la Cour d’appel de Montpellier prononce l’annulation du commandement aux fins de saisie-vente.
2. Moyen.
La salariée se pourvoit donc en cassation sur le fondement des articles 514 du Code de procédure civile, et R1245-1 du Code du travail, selon lesquels respectivement « les décisions de première instance sont de droit exécutoire à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement », et « lorsqu’un conseil de prud’hommes est saisi d’une demande de requalification d’un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, en application de l’article L1245-2, sa décision est exécutoire de droit à titre provisoire ».
En effet, la salariée fait grief à l’arrêt de prononcer l’annulation du commandement aux fins de saisie-vent, sur le motif duquel
« lorsqu’un conseil de prud’hommes est saisi d’une demande de requalification d’un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, sa décision est exécutoire de droit à titre provisoire ».
En considération de la nature exécutoire de droit à titre provisoire de la décision d’un conseil de prud’hommes, la salariée soutient alors que l’ensemble des chefs de la décision, relatif à la qualification du contrat de travail, doit par conséquent, bénéficier aussi de l’exécution provisoire de droit.
Dès lors et contrairement à ce que la cour d’appel a jugé, l’exécution provisoire de droit ne doit pas s’exercer dans la limite maximum de neuf mois de salaire pour le paiement des sommes afférentes à la requalification d’un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, suivant le raisonnement défendu par la salariée.
3. Solution et analyse.
En cas de requalification d’un contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, l’exécution provisoire de droit s’exerce-t-elle que dans la limite de neuf mois de salaire, pour le paiement des sommes afférentes à cette requalification ?
Au visa des articles 514 du Code de procédure civile et R1245-1 du Code du travail, la chambre sociale de la Cour de cassation, dans son arrêt du 25 octobre 2023 (n°21-25.320), répond par la négative.
Considérant le principe édicté à l’article 514 du Code de procédure civile selon lequel « l’exécution provisoire ne peut pas être poursuivie sans avoir été ordonnée », et au regard du fait que la décision de requalification d’un contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée est exécutoire de droit à titre provisoire en application de l’article R1245-1 du Code du travail, la Cour de cassation en convient que
« le jugement d’un conseil de prud’hommes qui ordonne la requalification d’un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée bénéficie de plein droit de l’exécution provisoire dans toutes ses dispositions ».
Par conséquent, l’arrêt de la Cour d’appel de Montpellier du 29 octobre 2020 est cassé et annulé car, de même que la décision qui prononce la requalification d’un contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée est exécutoire de plein droit, de même l’exécution provisoire de droit ne s’exerce pas dans une limite maximum de neuf mois de salaire.
Cette solution est nouvelle et doit être approuvée.
On doit s’en réjouir pour les salariés employés en CDD qui sont très souvent précarisés.
Source.