Pour ce rapport 2024 (de 176 pages !), la commission rappelle que 44 États membres ont participé au processus dans son ensemble (Liste page 10).
Budget de la justice.
La France consacre 0,20 % du PIB à la Justice, alors que la médiane européenne s’établit à 0,28 %. Elle fait à ce titre partie du groupe C (celui des états qui allouent en moyenne 0,30% de leur PIB à la Justice) sur un classement qui se termine avec le groupe D (avec une moyenne de 0,21%).
Pour établir une comparaison avec des pays ayant un PIB par habitant similaire, et voir lequel parmi eux investit plus ou moins dans le système judiciaire, le rapport compare Andorre, la France et l’Écosse (RU) qui ont un PIB par habitant proche. Et en tire comme conclusion qu’Andorre alloue un budget par habitant plus élevé à son système judiciaire que la France et l’Écosse (RU).
Autre donnée intéressante : en moyenne, les États membres/entités dépensent environ 2/3 du budget de leur système judiciaire pour les tribunaux, 25% pour le Ministère public et le reste pour l’aide judiciaire (11%).
Taux de résolution des affaires (Clearance Rate) .
Le Clearance Rate se définit ainsi (page 111 du rapport) :
CR > 100 %: le tribunal est en mesure de résoudre un nombre d’affaires supérieur au nombre d’affaires dont il a été saisi (et l’arriéré d’affaires
diminue)
CR < 100% : le tribunal est en mesure de résoudre un nombre d’affaires inférieur au nombre d’affaires dont il a été saisi. (et l’arriéré d’affaires
augmente).
La France présente un CR de 103% des affaires civiles et commerciales contentieuses en première instance, alors qu’elle n’avait jamais atteint les 100% depuis 2012.
Technologie judiciaire.
Le rapport calcule à ce titre notamment un indice de déploiement des TIC. Ce score moyen sur une échelle va d’un minimum de 0 à un maximum théorique de 10. La France se classe dans le 2ᵉ groupe de l’indice (2,5 à 5).
Elle se classe de la même façon pour l’indice d’utilisation des TIC. (Page 156 et 157)
Aide judiciaire (juridictionnelle).
À la question : "Quels sont les États et les entités qui investissent le plus dans l’aide judiciaire ? ", la France se classe dans le Groupe C soit entre 20.000 - 40.000 €, en équivalent par habitant : 10,29 Euros. C’est tout juste dans la moyenne européenne, à 10 euros.
Recrutement des juges professionnels.
Le nombre de juges professionnels en France pour 100.000 habitants (11,3 en 2022 contre 10,7 en 2012) est stable, mais bien en dessous de la médiane du Conseil de l’Europe (17) (page 44 du rapport). Le chiffre est particulièrement alarmant pour le Ministère public : avec 3,2 procureurs pour 100.000 habitants en 2022, la France se situe à un niveau très inférieur à la médiane européenne, située à 11,2.
Côté recrutement, le concours (comme en France) est le mode de recrutement des juges le plus répandu, pratiqué dans 58% des États membres.
Chiffre (questionnant) qui fait le lien entre les 2 informations : le ratio entre le nombre de juges recrutés et le nombre de candidats. Pour la France, il est de 11% (contre par exemple 42% pour la Belgique) (page 48 du rapport).
Parité chez les juges.
Tous états confondus, la part des femmes parmi les juges professionnels est passée en moyenne de 49% en 2012 à 57% en 2022 (+8 points de pourcentage) (page 66 du rapport).
Si l’on zoome sur la France, elle se classe largement au dessus de la moyenne, avec 69% de femmes juges et procureurs en fonction, et 72 % des femmes recrutées (en 2022).
Chiffres en progrès donc, mais bémol important cependant : "Plus le niveau hiérarchique s’élève, plus la part des femmes dans la magistrature, juges et procureurs confondus, diminue et plus la liste de pays pour lesquels ce pourcentage reste inférieur à 50% s’allonge"...
Quelles réactions du côté du Ministère de la Justice français ?
Dans son communiqué de presse en date du 17 octobre sur ce rapport [1], le Ministère de la Justice (à la tête duquel Didier Migaud a été nommé en septembre 2024) ne cache pas que le rapport met en exergue "la lente évolution du budget consacré à la Justice en France".
Note positive : pour le ministère "le rapport de la CEPEJ invite à accroître les moyens consacrés à notre système judiciaire tout en cherchant à en renforcer l’efficacité" et rappelle que le Ministère travaille d’ores et déjà sur la feuille de route suivante :
le renforcement du parquet ;
la nécessité de poursuivre la constitution des équipes autour du magistrat ;
l’accélération du financement, du déploiement et de l’utilisation des outils numériques.