Prime de vacances SYNTEC, prise de d’acte et prorata.

Par Elisabeth Graëve et Anaël André, Avocats.

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La prime de vacances SYNTEC prévue par l’article 31 de la CCN doit-elle donner lieu à un paiement au prorata, en cas d’entrée ou de départ en cours d’année, notamment en cas de prise d’acte de la rupture par le salarié ?

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La convention collective SYNTEC ne prévoit pas de paiement au prorata de la prime de vacances.

La Cour de cassation a déjà posé, par un arrêt du 29 mars 1995, le principe de l’absence de proratisation de la prime de vacances SYNTEC sauf disposition contractuelle, conventionnelle ou usage contraire, dont l’existence et la charge de la preuve incombent au salarié (Cass.soc, 29 mars 1995, n° 91-41.654).

Ce principe a depuis lors été appliqué par plusieurs cours d’appel (CA DIJON, 26 juin 2007, n°06/01448 ; CA DOUAI, 30 septembre 2008, n°07/02798 ; CA LYON, 14 octobre 2008, n°07/02838 ; CA METZ, 22 octobre 2014, n°14/0054 ; CA NIMES,15 mars 2016, n°15/02464).

(i) Prime de vacances SYNTEC, prise d’acte et salarié non protégé : une confirmation de jurisprudence

La Cour de cassation, confirme ce principe, par sa décision du 21 septembre 2017 (Cass. soc. 21 septembre 2017 n° 15-28.933 FS-PB, Sté Coheris c/ L) dans le cadre de la prise d’acte par le salarié non protégé de la rupture de son contrat de travail.

En l’espèce, un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en avril 2011.

Il saisit le CPH de diverses demandes et notamment du paiement prorata temporis de la prime de vacances SYNTEC.

L’employeur soutient que la prime de vacances étant versée en juillet, le salarié qui a pris acte de la rupture de son contrat de travail en avril, ne peut y prétendre.

La cour d’appel :

  • Juge que la prise d’acte est justifiée et qu’elle produit donc les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse
  • Rejette le moyen de l’employeur et fait droit à la demande du salarié en accordant la prime de vacances SYNTEC au prorata, en considérant que l’inexécution du préavis est imputable à l’employeur et qu’en conséquence, si le salarié avait exécuté son préavis il aurait été présent en juillet lors du versement de la prime de vacances SYNTEC.

La Cour de cassation casse cette décision en rappelant que :
«  La prise d’acte de la rupture du contrat de travail entraîne la cessation immédiate de la relation contractuelle  ».

« Le salarié, qui avait pris acte de la rupture de son contrat de travail le 4 avril 2011, ne pouvait prétendre au versement de la prime de vacances fixé en juillet de chaque année ».

(ii) Prime de vacances SYNTEC, prise d’acte et salarié protégé : une solution en lien avec le statut protecteur

Le délégué du personnel dont la prise d’acte de la rupture du contrat produit les effets d’un licenciement nul a droit à une indemnité pour violation du statut protecteur égale :

  • à la rémunération qu’il aurait perçue depuis son éviction jusqu’à l’expiration de la période de protection
  • dans la limite de 2 ans, (durée minimale légale du mandat) augmentée de 6 mois

En appliquant ce principe, la Cour de cassation juge que la rémunération servant de base au calcul de l’indemnité doit comprendre la prime de vacances SYNTEC, prévue par l’article 31 de la CCN, versée après la prise d’acte, mais au cours de la période de protection (Cass. soc. 21 septembre 2017 n° 15-28.932 FS-PB, Sté Coheris c/ L).

Au premier abord, cette décision peut sembler contradictoire avec une celle rendue le même jour concernant la prise d’acte de la rupture par un salarié non protégé (Cass. soc. 21 septembre 2017 n° 15-28.933 FS-PB, Sté Coheris c/ L).

En effet, conformément à une jurisprudence constante, la prise d’acte emporte la rupture immédiate du contrat de travail quel que soit le statut du salarié qui l’invoque, qu’il soit non protégé (Cass. soc., 4 juin 2008 n° 06-45.757 FS-PB) ou protégé (Cass. soc., 29 mai 2013 n° 12-15.974 FS-PB).

De ce point de vue, les deux salariés, protégés ou non, qui ont pris acte de la rupture, sont donc placés dans une situation identique : ils n’appartiennent plus à l’entreprise à la date d’effet de la prise d’acte qui est immédiate et n’ont donc pas vocation à bénéficier de la prime de vacances SYNTEC au prorata, dès lors qu’elle est payée postérieurement à leur départ

Néanmoins :

  • La prise d’acte de la rupture par un salarié protégé produit les effets d’un licenciement nul et non sans cause réelle et sérieuse si elle est justifiée
  • Le salarié protégé peut donc obtenir des dommages et intérêts équivalents aux éléments de rémunération qu’il aurait perçus jusqu’à la fin de sa période de protection si le contrat n’avait pas été rompu, ce dans la limite de 30 mois.

En conséquence, le salarié protégé qui prend acte de la rupture de manière justifiée a droit à la prime de vacance SYNTEC au prorata, dès lors qu’elle est versée postérieurement à la rupture de son contrat de travail mais durant la période de protection.

Elisabeth GRAËVE et Anaël ANDRE, Avocats - GRAËVE Avocats

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