I) Rappel des règles relatives à la prise d’acte.
La prise d’acte est la situation dans laquelle le salarié notifie à l’employeur la rupture de son contrat de travail en lui en imputant la responsabilité en raison de son comportement fautif ou de son non-respect des obligations contractuelles, rendant impossible la poursuite de l’exécution du contrat de travail.
Il appartient au salarié qui reproche des manquements à l’employeur de rapporter la preuve des griefs qu’il invoque, à défaut de quoi la prise d’acte produit les effets d’une démission.
Lorsque le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, cette rupture produit les effet :
soit d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient (ouvrant le droit au versement d’indemnités),
soit, dans le cas contraire, d’une démission [2].
Les manquements invoqués par le salarié à l’appui de sa prise d’acte doivent être actuels. Il faut que les manquements empêchent la poursuite du contrat. Tel n’est pas le cas lorsque les manquements invoqués par le salarié à l’encontre de l’employeur sont anciens [3].
Au cours de l’année 2020, la Cour de cassation a pu préciser sa position quant aux manquements relatifs aux conditions de travail.
II) Point sur la jurisprudence relative aux conditions de travail.
Dans l’arrêt rendu le 12 novembre 2020, la Cour de cassation a jugé que, pour des chauffeurs, des retenues opérées sur la rémunération et des coupures imposées sur des parkings ne constituaient pas des manquements suffisamment graves pour justifier une prise d’acte.
Au cours de l’année 2020, la Haute Assemblée a déjà une position similaire en jugeant que des retards de paiement [4] ne justifiaient pas une prise d’acte.
Cependant, une dégradation des conditions de travail due à un harcèlement moral constitue un manquement grave justifiant la rupture du contrat de travail [5].
En bref, l’appréciation de la gravité des manquements invoqués par le salarié relève de l’appréciation souveraine des juges du fond et du dossier. Il n’est pas possible de dégager une solution générale à chacun des griefs.
Hors, la jurisprudence récente conduit à un certain durcissement puisque les
manquements d’un employeur liés à la rémunération du salarié sont graves et ont
généralement des répercussions importantes.
Il est donc recommandé de consulter un avocat avant de prendre acte afin d’obtenir un avis sur les griefs invoqués.
En résumé, la prise d’acte est un mode de rupture du contrat de travail « risqué », car il n’est pas certain que les juges du fond retiennent la gravité des manquements invoqués.
Surtout, si la prise d’acte produit les effets d’une démission, le salarié pourrait être condamné à rembourser son préavis.
Il convient donc d’être vigilant avant de prendre acte.