La palpation de sécurité : quel cadre juridique ?

Par Alain Bollé, Avocat.

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Explorer : # palpation de sécurité # sécurité publique # prévention # répression

La palpation de sécurité est une mesure indispensable, même si elle présente un caractère facultatif. Que ce soit à l’occasion d’une manifestation publique ou lors d’une opération de police, elle prévient un risque potentiel. L’augmentation de la violence, en réalité, la rend indispensable.

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La sécurité est la principale préoccupation des autorités publiques. Chaque manifestation publique ou opération de police est susceptible de présenter un risque. Il est indispensable de s’assurer que les participants, à une manifestation publique ou lorsque qu’une opération de police est déclenchée, ne soient pas porteuses d’une arme ou d’un objet susceptible de porter une atteinte corporelle aux tiers.

L’article R434-16 du Code de la sécurité intérieure dispose :

« La palpation de sécurité est exclusivement une mesure de sûreté. Elle ne revêt pas un caractère systématique. Elle est réservée aux cas dans lesquels elle apparaît nécessaire à la garantie de la sécurité du policier ou du gendarme qui l’accomplit ou de celle d’autrui. Elle a pour finalité de vérifier que la personne contrôlée n’est pas porteuse d’un objet dangereux pour elle-même ou pour autrui.
Chaque fois que les circonstances le permettent, la palpation de sécurité est pratiquée à l’abri du regard du public
 ».

La palpation de sécurité est donc une recherche extérieure d’objets dangereux pour un objectif de sécurité, sur une personne, au-dessus de ses vêtements. Il ne s’agit pas d’une perquisition au sens des articles 56 et 76 du Code de procédure pénale.

Une distinction doit être faite entre la fouille dans les effets personnels d’une personne, sur son lieu de travail, à l’école ou dans un véhicule, opération assimilée à une perquisition, à la palpation de sécurité. Cette mesure est encadrée par la loi, elle est strictement réservée à certaines catégories de personnes.

La palpation de sécurité peut être réalisée soit en prévention à l’occasion d’une manifestation publique de grande ampleur ou soit lors d’une interpellation policière. Elle peut être mise en œuvre par les policiers nationaux et municipaux, les gendarmes et dans certaines conditions par des agents de sécurité privée.

I. Les catégories d’agents habilitées à pratiquer la palpation de sécurité.

La palpation de sécurité est réservée exclusivement à deux catégories d’agents, ceux du secteur public et ceux du secteur privé.

1.1. Les agents du secteur public.

Les policiers et les gendarmes nationaux, les policiers municipaux sont des agents du secteur public habilités à procéder à une palpation de sécurité. Le Code de procédure pénale, dans son article 15, fixe les catégories d’enquêteurs. Il s’agit des officiers, agents et agents adjoints de police judiciaire. Les policiers et gendarmes peuvent être officiers ou agents de police judiciaire, les policiers municipaux sont des agents de police judiciaire adjoints.

La palpation de sécurité est exclusivement une mesure de sûreté. Elle ne revêt pas un caractère systématique. Elle est réservée aux cas dans lesquels elle apparaît nécessaire à la garantie de la sécurité du policier ou du gendarme dans son action ou pour protéger autrui. Elle a pour finalité de vérifier que la personne contrôlée n’est pas porteuse d’un objet dangereux pour elle-même ou pour autrui.

La palpation de sécurité est réalisée à l’occasion d’une enquête judiciaire en préliminaire, flagrance ou sur commission rogatoire, mais également dans le cadre d’un contrôle d’identité, d’une rétention judiciaire ou pour l’exécution d’un mandat délivré par une autorité judiciaire.

Le droit pénal connait deux modes d’enquête, préliminaire et flagrant délit. Les officiers de police judiciaire peuvent également agir par délégation d’un juge d’instruction, sur commission rogatoire. La palpation de sécurité doit être effectuée lors d’une interpellation en enquête préliminaire ou de flagrant délit, ainsi que dans le cadre de l’exécution d’une commission rogatoire.

L’enquête préliminaire est une procédure permettant l’ouverture d’une enquête et la conduite d’investigations après la dénonciation de faits dans un commissariat ou une brigade de gendarmerie. Mais, elle peut également être déclenchée à l’initiative du procureur de la République ou d’un officier ou agent de police judiciaire.

L’enquête de flagrant délit est une enquête de police mise en œuvre dans des cas précis, prévus par le Code de procédure pénale, notamment lorsque la commission de l’infraction est en cours ou vient de se produire. Elle vise à assurer une réaction pénale rapide destinée à mettre fin à la perturbation de l’ordre public et permet de conserver les preuves.

La commission rogatoire est l’acte par lequel un juge d’instruction délègue une partie de ses pouvoirs à un officier de police judiciaire pour la réalisation de certains actes d’enquête.

Le contrôle d’identité vise à vérifier et confirmer l’identité d’une personne et s’assurer qu’elle ne présente pas de risques pour la sécurité publique. Ces contrôles se produisent, notamment lors d’un contrôle routier, dans les aéroports, les gares, à l’occasion d’événements publics, ou encore en réponse à des signalements ou des soupçons de comportements criminels.

Par ailleurs, l’enquêteur, pour l’exécution d’un mandat de recherche, de comparution, d’amener, d’arrêt ou de dépôt peut procéder à une palpation de sécurité. Le mandat de comparution consiste à mettre en demeure la personne de se présenter devant le juge à la date et à l’heure indiquées par ce mandat. Le mandat d’amener est l’ordre donné à la force publique de conduire immédiatement devant le magistrat la personne à l’encontre de laquelle il est décerné. Le mandat d’arrêt est l’ordre donné à la force publique de rechercher la personne et de la conduire devant le magistrat, puis à la maison d’arrêt indiquée sur le mandat, où elle sera reçue et détenue. Le mandat de dépôt est l’ordre donné au chef de l’établissement pénitentiaire de recevoir et de détenir la personne à l’encontre de laquelle il est décerné.

1.2. Les agents du secteur privé.

Les agents du secteur privé œuvrent dans les sociétés de surveillance et de gardiennage, de transport de fonds ou de protection physique des personnes, et du service de sécurité d’entreprise.

Chaque établissement doit être autorisé à exercer et ses dirigeants agréés.

L’autorisation, après certaines vérifications administratives, est délivrée sous la forme d’un arrêté préfectoral autorisant la société à démarrer son activité. Le Code de la sécurité intérieure impose aux personnes souhaitant exercer un métier de sécurité privée d’obtenir, préalablement à leur entrée en formation, une autorisation préalable ou provisoire délivrée par le Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS). L’examen d’une demande d’autorisation pour une personne physique inclut notamment une enquête administrative durant laquelle sont consultés les fichiers du traitement des antécédents judiciaire (TAJ), le fichier des personnes recherchées (FPR) et la consultation du bulletin numéro deux du casier judiciaire (B2).

Cette enquête permet de vérifier que le demandeur n’a pas commis d’actes incompatibles avec l’exercice d’une activité privée de sécurité.

Le CNAPS est chargé de faire respecter les textes en vigueur. Les métiers de la sécurité privée sont accessibles aux personnes réunissant certaines conditions :

  • Posséder un justificatif d’identité en cours de validité ;
  • Pour les ressortissants étrangers hors UE ou hors EEE, justifier d’un titre de séjour en cours de validité depuis au moins 5 ans ;
  • Bénéficier d’un casier judiciaire compatible (pour tous les ressortissants étrangers : produire l’équivalent du bulletin n° 3 du casier judiciaire du pays d’origine ou de provenance de moins de 3 mois, accompagné d’une traduction en langue française effectuée par un traducteur certifié) ;
  • Justifier d’une préinscription à une formation sécurité en vue d’acquérir l’aptitude professionnelle (délivrée par un organisme de formation titulaire d’une autorisation d’exercice délivrée par le CNAPS sauf pour les organismes de formation publics) ;
  • Avoir au minimum un niveau B1 de langue française. Pour les ressortissants étrangers, justifier d’un niveau de langue B1 du cadre européen commun de référence pour les langues ;
  • Une attestation d’aptitude professionnelle remplie par l’employeur ;
  • Une attestation d’emploi remplie par l’employeur.

La durée de validité de l’autorisation est de cinq ans. Toute demande d’autorisation est effectuée par courrier, accompagnée des pièces listées et adressée à la préfecture de département de la région dans laquelle le demandeur a son domicile.

Les agents de sécurité privées de sécurité sont titulaires d’une carte professionnelle, remise par l’employeur. Elle doit être présentée à toute réquisition d’un agent de l’autorité publique. A l’expiration du contrat de travail, elle est restituée à l’employeur.

Elle comporte un numéro délivré en préfecture. Chaque demande de carte professionnelle est accompagnée de la copie recto verso, en cours de validité, d’un justificatif d’identité et du bulletin n°3 du casier judiciaire du pays d’origine traduit en français pour les ressortissants étrangers en recherche d’emploi. La préfecture de police est seule compétente pour instruire les demandes de cartes professionnelles des personnes résidant hors de France, dans un Etat membre de l’Union Européenne ou de l’Espace Economique Européen. Un justificatif d’aptitude professionnelle doit être communiqué pour chacune des spécialités de sécurité demandée.

II. Le cadre juridique de la palpation de sécurité.

La palpation de sécurité peut intervenir dans un cadre préventif, mais également répressif.

2.1. La palpation de sécurité dans le cadre de la prévention.

La palpation de sécurité préventive caractérise essentiellement une mesure administrative. Elle permet de s’assurer qu’il n’y aura pas de trouble à l’ordre publique. Elle est ordonnée par le préfet de police ou du département sous la forme d’un arrêté. Cette mesure est limitée aux manifestations réunissant plus de 300 personnes, notamment pour les manifestations sportives ou culturelles.

En pratique, la palpation de sécurité consiste à vérifier que les participants ne détiennent pas d’arme ou d’objets dangereux. Le contrôle est réalisé par un agent de sécurité agréé par la commission d’agrément et de contrôle du conseil national des activités privées de sécurité.

Cette mesure est encadrée. L’accord exprès de la personne subissant la palpation de sécurité doit obligatoirement être recueilli. Cette acceptation est exprimée clairement, par la signature d’un écrit ou par une déclaration faite en public, devant des témoins. La palpation doit être faite par une personne de même sexe. La procédure se déroule sous le contrôle d’un officier de police judiciaire, fonctionnaire de police ou militaire de la gendarmerie habilitée à mettre en œuvre des moyens d’enquête, interpellation et placement en garde à vue.

2.2. La palpation de sécurité dans le cadre de la répression.

La palpation de sécurité reste sous la direction du procureur de la République, la surveillance du procureur général et le contrôle de la chambre de l’instruction.

Lorsqu’une personne est placée en garde à vue, un enquêteur de police ou de gendarmerie procède à une palpation de sécurité. Elle a pour but de s’assurer que la personne placée en garde à vue ne détient pas, sur elle, un objet dangereux. Le consentement de la personne n’est pas obligatoire, cependant la palpation doit être faite par une personne de même sexe.

Lors d’un contrôle d’identité, un agent de police ou de gendarmerie procède à une palpation de sécurité lorsqu’elle semble nécessaire pour garantir sa sécurité ou la sécurité d’une autre personne. Elle sert à vérifier que la personne contrôlée n’a pas sur elle un objet dangereux. Lorsque les circonstances le permettent, la palpation de sécurité est pratiquée à l’abri du regard du public.

En cas de circonstances particulières liées à des menaces graves pour la sécurité publique, un officier de police judiciaire peut procéder à une palpation de sécurité, notamment dans le cas de menace terroriste. Ces circonstances particulières sont constatées par arrêté du préfet du département, ou du préfet de police de Paris. Le préfet fixe la durée et détermine les lieux ou catégories de lieux dans lesquels les contrôles peuvent être réalisés.

La sécurité est au cœur de la préoccupation des services répressifs et des autorités
publiques, notamment lors de l’organisation de manifestations. Régulièrement, les policiers, les gendarmes et les agents de sécurité privée sont la cible des délinquants qui n’hésitent plus à les agresser. Le risque s’est considérablement accru avec la prolifération des armes et leur utilisation.

Pour assurer la sécurité, non seulement des enquêteurs et des autres personnels habilités, mais également des tiers (témoins, passants…), il est indispensable de s’assurer que les auteurs d’infractions ou les participants à une manifestation publique ne soient pas porteurs d’une arme ou d’un objet susceptible de porter atteinte à l’intégralité physique. Dès lors la palpation de sécurité devient indispensable.

Alain Bollé, avocat spécialiste en droit,
Barreau du Val d’Oise,
Membre fondateur du cercle K2.

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Discussions en cours :

  • par gauthier , Le 16 avril à 20:46

    bonjour peut-on lors de la palpation toucher les parties intimes par dessus les vêtements ?

  • Dans votre article "La palpation de sécurité dans le cadre de la prévention" vous ne faites mention que des agents de sécurité.

    Vous omettez les Policiers municipaux, article L. 511-1 du CSI "Affectés sur décision du maire à la sécurité d’une manifestation sportive, récréative ou culturelle ou à celle des périmètres de protection institués en application de l’article L. 226-1 du présent code ou à la surveillance de l’accès à un bâtiment communal, ils peuvent procéder à l’inspection visuelle des bagages et, avec le consentement de leur propriétaire, à leur fouille. Ils peuvent également procéder, avec le consentement exprès des personnes, à des palpations de sécurité. Dans ce cas, la palpation de sécurité doit être effectuée par une personne de même sexe que la personne qui en fait l’objet."

    • par Pat , Le 25 janvier à 19:52

      On ne prend pas directement dans les poches..
      On demande si quelque chose de dangereux
      Si oui on invite à nous le remettre ...

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