L’obligation d’entretien est prévue expressis verbis par l’article 155 alinéa 2 du Code de la famille : « les époux contractent ensemble par leur mariage, l’obligation de nourrir, entretenir, élever et éduquer leurs enfants ». Elle recouvre tout ce qui est nécessaire pour l’éducation, le logement, la nourriture, la santé, et le bien-être des enfants, jusqu’à ce qu’ils soient en mesure de subvenir à leurs besoins propres. Cette obligation fait partie des effets du mariage et des devoirs de la puissance paternelle.
A l’époque contemporaine, parler de l’obligation d’entretien est une nécessité ; celle-ci est un phénomène exotérique parce qu’il est connu de tous qu’il appartient au parent d’entretenir et d’assurer l’épanouissement de leur enfant. D’ailleurs ces interrogations légitimisent une telle assertion : si les époux sont dans les liens du mariage, comment l’obligation d’entretien doit être exécutée ? En cas de dissolution du lien matrimonial comment elle doit s’accomplir ?
Il semble judicieux de se poser la question suivante : quelle est la durée de l’obligation d’entretien ? Compte tenu de ces considérations nous allons faire une petite esquisse sur le commencement de l’obligation d’entretien (I) avant de disséquer la cessation de celle-ci (II).
I/ Le commencement de l’obligation d’entretien.
Le lien de filiation fonde l’obligation d’entretien. Cette dernière existe tout au long du mariage (A) même en cas de divorce ou de séparation de corps elle subsiste (B).
A- L’obligation d’entretien pendant le mariage.
Sous tous les régimes, les époux s’engagent entre eux et à l’égard des tiers à pourvoir à l’entretien du ménage et à l’éducation des enfants communs. L’article 155 du Code de la Famille en prévoyant l’obligation d’entretien opère un renvoi sur le livre VI qui est relatif aux charges du mariage sur les modalités d’exécution de celle-ci.
C’est le lien de filiation qui fonde l’obligation d’entretien. En effet l’obligation d’entretien des parents de leurs enfants est automatique. À partir du moment où les époux ont contracté mariage, ils sont liés par cette obligation. Les enfants sont les créanciers de l’obligation d’entretien. L’enfant étant né incapable, il appartient à ses parents de prendre soin de lui.
L’obligation d’entretien fait partie parmi les devoirs des époux. L’enfant étant né incapable, il est tout à fait logique que ses parents le portent assistance, il ne peut rien faire lui-même. Il appert qu’il a besoin de la protection de ses parents du fait de son état de minorité.
Lorsque les époux sont dans les liens du mariage et qu’ils cohabitent ensemble, l’obligation d’entretien des parents va s’exécuter alors le plus souvent en nature : soins médicaux, nourriture, habillement... Et les dépenses occasionnées à cet effet feront partie des charges du ménage qui est prévue par l’article 375 du Code de la famille. Si les époux vivent de façon séparée, il reviendra à l’époux non gardien de verser une somme d’argent de manière périodique. Les juges prennent en compte les ressources et les charges des parents ainsi que les besoins de l’enfant. Par exemple en cas de changement de la situation financière d’un parent ou des besoins de l’enfant (maladie, handicap), l’obligation d’entretien peut être réévaluée.
Ainsi exposé, l’obligation d’entretien pèse toujours sur les parents même en cas de divorce ou de relâchement du lien matrimonial.
B- La survie de l’obligation d’entretien en cas de divorce ou de séparation de corps.
L’obligation d’entretien des enfants par leurs parents subsiste même en cas de dissolution du lien matrimonial par le divorce ou lorsqu’il y a eu relâchement du lien matrimonial, c’est-à-dire en cas de séparation de corps. L’article 181 du Code de la Famille dispose : « La séparation de corps met fin à l’obligation de cohabitation, impose aux époux le régime de la séparation de biens s’ils n’y étaient déjà soumis et maintient les autres effets du mariage entre époux ». Il est clair, manifeste et apparent que la séparation de corps ne met pas fin à tous les effets du mariage ; parmi ces effets demeurent l’obligation d’entretien des enfants par les parents.
Aux termes des dispositions de l’article 278 du Code de la Famille : « le jugement prononçant ou constatant le divorce ou la séparation de corps statue sur la garde de chacun des enfants, qui pour son plus grand avantage, sera confié à l’un ou l’autre des parents ou s’il est nécessaire à une tierce personne. Le gardien de l’enfant exerce les différents droits attachés à la puissance paternelle sur la personne et les biens de l’enfant ».
L’alinéa 2 de cette même disposition prévoit : « Quelle que soit la personne à laquelle les enfants sont confiés, les père et mère contribuent à l’entretien et à l’éducation de leurs enfants dans la mesure de leurs ressources ». Une exégèse des dispositions de l’article précité nous permet d’avoir une double opinion.
Première hypothèse, la garde de l’enfant est confiée à l’un des parents. Dans une telle situation, le parent non gardien son obligation d’entretenir l’enfant s’exécutera sous forme de pension alimentaire qui sera fixé par le juge.
Deuxième hypothèse, la garde est confiée à une tierce personne. Il n’est pas superfétatoire de rappeler que la garde est un des attributs de la puissance paternelle. Est-ce à dire dans une pareille situation les parents sont déchargés de leur obligation d’entretien. La réponse est négative. En effet dans ce cas de figure les père et mère vont contribuer à l’entretien de l’enfant en fonction de leurs sources.
En marge de ces observations, il est nécessaire de mettre le curseur sur la cessation de l’obligation d’entretien.
II/ La cessation de l’obligation d’entretien.
L’obligation d’entretien des enfants par leurs parents prend fin à la majorité de l’enfant (A) ou par l’émancipation du mineur (B).
A- La majorité de l’enfant.
En droit sénégalais, l’obligation d’entretien des parents de leurs enfants prend fin à la majorité de l’enfant. A 18 ans accomplis, les personnes de l’un et l’autre sexe sont majeures et capables de tous les actes de la vie civile. Le majeur est alors la personne de l’un ou de l’autre sexe qui a l’âge de 18 ans révolus. Le majeur ayant la pleine capacité juridique, donc il est tout à fait normal que l’obligation d’entretien des parents prenne fin à cette étape de la vie de l’enfant.
Une lecture combinée des dispositions de l’article 283 et 288 du Code de la Famille nous permet d’affirmer de manière péremptoire et sans équivoque que « l’obligation d’entretien est un accessoire de la puissance paternelle ». Il en résulte vigoureusement que 1’obligation de contribution à l’entretien de l’enfant incombant au parent non gardien, prenant sa source dans l’exercice de la puissance paternelle, prend fin en même temps que celle-ci.
En effet l’article 283 prévoit que : « le père ou celui qui exerce la puissance paternelle est chargé de la direction de l’enfant. Il ne peut faire usage des droits de la puissance paternelle que dans l’intérêt du mineur.
Celui qui exerce la puissance paternelle est tenu d’entretenir l’enfant, de pourvoir à ses besoins et à son éducation ». Et l’article 288 dispose à son tour : « la puissance paternelle prend fin par la majorité, le mariage ou l’émancipation ». Comme le dit adage « l’accessoire suit le principal ». Il est logique alors que l’obligation d’entretien des parents cesse à partir du moment où prend fin la puissance paternelle.
Cependant, il faut rappeler que le juge sénégalais de la Cour Suprême a admis l’obligation d’entretien au-delà de la majorité.
En droit français, l’obligation d’entretien des parents à l’égard de leurs enfants ne cesse pas de plein droit si l’enfant a atteint l’âge de la majorité. En ce sens l’article 371-2 du Code civil dispose : « Chacun des parents contribue à l’entretien et à l’éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l’autre parent, ainsi que des besoins de l’enfant. Cette obligation ne cesse de plein droit ni lorsque l’autorité parentale ou son exercice est retiré, ni lorsque l’enfant est majeur ».
Au même titre que la majorité de l’enfant, l’obligation d’entretien des parents cesse aussi si l’enfant est émancipé.
B- L’émancipation de l’enfant.
Le mineur est émancipé de plein droit par le mariage. L’émancipation est une anticipation de la majorité du mineur, en ce sens le mineur par son âge n’a pas encore atteint la majorité ; mais par l’effet du mariage, il sera considéré comme majeur. Il faut affirmer que le mariage est incompatible avec l’état de minorité.
Le mineur émancipé cesse d’être sous l’autorité de ses père et mère. Il faut rappeler à juste titre que l’article 288 du Code de la Famille prévoit que la puissance paternelle cesse par le mariage ou l’émancipation. Par voie de conséquence, on peut dire que l’obligation d’entretien des parents prend fin si le mineur est émancipé.
À notre avis une refonte du Code de la Famille sur ce point semble être une nécessité. En effet beaucoup de personne qui ont atteint l’âge de la majorité n’ont pas une autonomie financière ou une situation financière stable. Et le plus souvent à cette étape de la vie l’enfant n’a pas encore terminé ses études. Sur cette question le législateur sénégalais devrait faire preuve de mansuétude en s’alignant avec son homologue français, qui depuis 2002 a prévu que l’obligation d’entretien des parents de leurs enfants ne cessait pas de plein droit à la majorité de l’enfant.
Le seul recours dont dispose le majeur qui est dans une situation de détresse économique : c’est l’obligation alimentaire, qui est une obligation réciproque.
L’obligation alimentaire est l’obligation qui incombe à une personne dont les ressources sont suffisantes pour subvenir aux besoins d’une autre qui est son parent ou son allié dans le besoin.
Discussion en cours :
Ma Sha Frère, article très pertinent. Bonne continuation