Management brutal = faute grave.

Par Xavier Berjot, Avocat.

6814 lectures 1re Parution: 4.81  /5

Explorer : # management brutal # faute grave # obligation de sécurité

Ce que vous allez lire ici :

La décision de la Cour de cassation dans l'arrêt du 14 février 2024 établit que la faute grave d'un salarié rend impossible son maintien dans l'entreprise. L'employeur a l'obligation de garantir la sécurité et la santé physique et mentale des travailleurs.
Description rédigée par l'IA du Village

Dans un arrêt du 14 février 2024 (n° 22-14.385), la Cour de cassation rappelle que la pratique par un salarié d’un « mode de gestion inapproprié de nature à impressionner et nuire à la santé de ses subordonnés » est de nature à caractériser un comportement rendant impossible son maintien dans l’entreprise.

-

1/ L’arrêt du 14 février 2024.

Une salariée occupe le poste de directrice d’une association gestionnaire d’un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes.

L’intéressée fait l’objet d’un licenciement pour faute grave, en raison de ses méthodes de gestion ayant causé la démission d’au moins deux salariées, le placement en arrêt de travail d’une autre et « un mal être et une souffrance de la majorité du personnel ».

La cour d’appel saisie du litige [1] estime que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse, au motif qu’aucun élément ne permet d’établir que l’employeur avait cherché à vérifier que les faits qui lui avaient été rapportés étaient effectivement constitutifs de faits de harcèlement moral imputables à cette salariée.

La décision est censurée par la Cour de cassation, rappelant que « la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise ».

En l’espèce, la Cour d’appel ne pouvait donc pas se contenter de juger que les faits imputables à la salariée ne caractérisaient pas un harcèlement moral.

Il lui appartenait, au contraire, de vérifier si ces faits rendaient impossible le maintien de l’intéressée dans l’entreprise.

2/ L’obligation de sécurité de l’employeur.

En effet, l’employeur, tenu d’une obligation de sécurité, doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs [2].

La Cour de cassation considère que l’employeur ne méconnaît pas cette obligation légale s’il justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L4121-1 et L4121-2 du Code du travail [3] :

  • Des actions de prévention des risques professionnels
  • Des actions d’information et de formation
  • La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés
  • Le respect de principes généraux de prévention.

A l’inverse, le juge ne saurait débouter un salarié de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail pour manquement de son employeur à son obligation de sécurité, au motif que l’intéressé ne fournit aucun élément et aucun témoignage sur les circonstances de survenue de l’accident dont il a été victime, alors qu’il appartient à l’employeur de démontrer qu’il avait pris les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé du salarié [4].

Compte tenu de cette obligation légale, l’employeur doit procéder au licenciement pour faute grave du salarié développant un comportement managérial toxique, oppressant ou brutal.

Plus encore, ces faits n’ont pas nécessairement à caractériser un harcèlement moral, au sens de l’article L1152-1 du Code du travail, pour justifier un licenciement pour faute grave.

3/ Les précédents jurisprudentiels.

Dans un arrêt du 8 février 2023 [5], la Cour de cassation avait retenu une formulation analogue à celle de l’arrêt du 14 février 2024, retenant que « la pratique par le salarié d’un mode de management de nature à impressionner et nuire à la santé de ses subordonnés » constitue une faute grave rendant impossible son maintien dans l’entreprise même pendant la durée limitée du préavis.

Dans cette affaire, la Cour d’appel avait jugé que la faute grave n’était pas établie après avoir pourtant relevé que les pièces produites faisaient état d’un

« management de nature à impressionner et nuire à la santé de ses subordonnés : critiques vives et méprisantes, déchirer le travail d’un salarié en public au motif qu’il n’est pas satisfaisant, ordres et contre-ordres peu respectueux du travail des salarié ».

Dans des arrêts précédents, la Cour de cassation a régulièrement considéré comme constituant une faute grave le comportement d’un responsable hiérarchique présentant un caractère dégradant, sexiste ou, encore, raciste.

A titre d’illustrations, la faute grave a été retenue dans les situations suivants :

  • Les injures à l’égard d’un subordonné de santé fragile [6] ;
  • Les propos racistes et sexistes au sujet d’un ou plusieurs subordonnés [7] ;
  • Les propos dégradants et humiliants à connotation sexuelle et ouvertement sexistes [8] ;
  • Les méthodes de management humiliantes, pressions diverses, propos insultants et dénigrants tant à l’égard des subordonnés que des prestataires de services [9].

En définitive, la Cour de cassation veille strictement au respect des dispositions légales garantissant la santé et la sécurité des salariés.

Xavier Berjot
Avocat Associé au barreau de Paris
Sancy Avocats
xberjot chez sancy-avocats.com
https://bit.ly/sancy-avocats
LinkedIn : https://fr.linkedin.com/in/xavier-berjot-a254283b

Recommandez-vous cet article ?

Donnez une note de 1 à 5 à cet article :
L’avez-vous apprécié ?

21 votes

Cet article est protégé par les droits d'auteur pour toute réutilisation ou diffusion (plus d'infos dans nos mentions légales).

Notes de l'article:

[1CA Pau 3-2-2022, n° 19/01455.

[2C. trav. art. L4121-1.

[3Cass. soc. 13-4-2023, n°21-20.043 ; Cass. soc. 25-11-2015, n° 14-24.444.

[4Cass. soc. 23-1-2019, n° 17-18.771.

[5Cass. soc. 8-2-2023, n° 21-11.535.

[6Cass. soc. 19-1-2010, n° 08-42.260.

[7Cass. soc. 8-11-2023, n° 22-19.049.

[8Cass. soc. 27-5-2020, n° 18-21.877.

[9Cass. soc. 10-5-2012, n° 11-11.371.

"Ce que vous allez lire ici". La présentation de cet article et seulement celle-ci a été générée automatiquement par l'intelligence artificielle du Village de la Justice. Elle n'engage pas l'auteur et n'a vocation qu'à présenter les grandes lignes de l'article pour une meilleure appréhension de l'article par les lecteurs. Elle ne dispense pas d'une lecture complète.

A lire aussi :

Village de la justice et du Droit

Bienvenue sur le Village de la Justice.

Le 1er site de la communauté du droit: Avocats, juristes, fiscalistes, notaires, commissaires de Justice, magistrats, RH, paralegals, RH, étudiants... y trouvent services, informations, contacts et peuvent échanger et recruter. *

Aujourd'hui: 156 340 membres, 27854 articles, 127 257 messages sur les forums, 2 750 annonces d'emploi et stage... et 1 600 000 visites du site par mois en moyenne. *


FOCUS SUR...

• Assemblées Générales : les solutions 2025.

• Avocats, être visible sur le web : comment valoriser votre expertise ?




LES HABITANTS

Membres

PROFESSIONNELS DU DROIT

Solutions

Formateurs